Le retour de la parité

17 décembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000

L'institution de la "parité" dans les conseils d'administration est un vieux serpent de mer. Forte d'un soutien inédit, une nouvelle proposition de loi plébiscitant les quotas a été déposée à l'Assemblée nationale.

Les conseils d'administration des cinq cents premières entreprises françaises compteraient 8 % de femmes. Situation inacceptable aux yeux des élites féministes. Le mois dernier, le ministre du Travail Xavier Darcos s'était autorisé à « poser la question des quotas ». Dans la foulée, une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale le 3 décembre afin d'instituer en cinq ans la composition à parité des conseils d'administration des sociétés cotées. Les entreprises récalcitrantes s'exposeraient à des difficultés administratives, mais non à des sanctions financières – à moins qu'un amendement soit adopté en ce sens.

Récidives

En 2006, déjà, le Parlement avait exigé que la proportion de représentants de chaque sexe ne dépasse pas 80 %. Il s'était heurté à l'opposition du Conseil constitutionnel, selon lequel on « ne saurait [...] faire prévaloir la considération du sexe sur celle des capacités et de l'utilité commune ». Mais la Constitution a depuis été révisée, stipulant désormais que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes [...] aux responsabilités professionnelles et sociales ».

Tandis que la crainte d'une nouvelle censure semble écartée, « un consensus se dégage aujourd'hui sur la nécessité d'agir de façon contraignante », observe Marie-Jo Zimmermann, le président de la délégation de l'Assemblée nationale aux Droits des femmes. En mars dernier, avec seize autres députés, elle avait proposé, en vain, de fixer des quotas à 40 %. Quelques mois plus tard, plus d'une centaine de collègues lui apportent leur soutien. Parmi les signataires figurent Jean-François Copé, le président du groupe UMP à l'Assemblée, mais aussi Hervé Gaymard, que l'on imaginait plus réactionnaire.

« Sensibiliser »

« La loi ne peut tout résoudre », reconnaissent les auteurs de cette proposition, « mais elle peut induire un changement dans les mentalités et les pratiques. [...] On peut espérer que des conseils d'administration exemplaires insuffleront une nouvelle sensibilité face aux questions d'égalité salariale ou d'accès à la formation et que notre modèle social et culturel permettra aux femmes de mieux concilier leur vie personnelle  et leur vie professionnelle. » Mme Zimmermann affirme « la nécessité d'une action volontariste ». Elle ne croit pas si bien dire : aux antipodes de l'empirisme, sa démarche vise, au fond, à réorganiser la cité non pas selon ses exigences intrinsèques – en tirant des conséquences sociales de la différence des sexes –, mais au regard d'une idéologie.

Dans cette perspective, la priorité sera donnée à la lutte contre les "stéréotypes". Un "groupe d'experts" de la Commission européenne présente les pistes à suivre : « La plupart des pays ayant les plus longues traditions en matière de politiques de déségrégation [sic] – Danemark, Allemagne, Finlande, Islande et Pays-Bas – montrent la volonté d'affronter la ségrégation à un stade précoce de la vie en investissant dans des "événements motivationnels" ou dans des programmes éducatifs conçus pour encourager de façon positive les choix "atypiques" parmi les jeunes filles et garçons, et de promouvoir de nouveaux modèles à imiter. [...] Un bon exemple est celui des campagnes d'information parallèles intitulées Girls' Day (journée des filles) et New Pathways for boys (nouveaux parcours pour les garçons) en Allemagne. »

Ces velléités idéologiques se parent d'un alibi économique dont les outrances tempèrent la crédibilité : « dans un scénario optimal » échafaudé par la Commission européenne, « le comblement de l'écart des taux d'emploi pourrait entraîner une hausse du PIB de 15 % à 45 % en Europe » ; rien de moins ! Quant à Xavier Darcos, il se montre alarmiste : « La France ne peut se permettre de voir son potentiel féminin quitter le pays, parce que nous n'aurons pas agi. »

Équilibre

Selon le ministre, « il est clair que notre société, pour son propre développement et propre équilibre, doit parvenir à faire aboutir positivement ce sujet ». Tel n'est pas l'avis d'Éric Zemmour, accusé de « justifier l'injustifiable » dans un documentaire sorti en salles le 25 novembre. Le polémiste, qui juge sa pensée caricaturée, a exigé par huissier l'arrêt d'exploitation du film. Fustigeant « une époque de mixité totalitaire, castratrice », il observe que « les mères célibataires n'ont jamais été aussi nombreuses ; jamais aussi pauvres » et craint, à terme, « des tsunamis politiques et sociaux » provoqués par les transformations familiales. Il rappelle en outre l'originalité de la tradition française : « François Ier fut le premier roi d'Occident qui accepta les femmes à sa cour. L'amour courtois fut inventé dans le Sud-Ouest de la France. Les salons du XVIIIe siècle, tenus par des femmes, furent une exclusivité française. » En plein débat sur l'identité nationale, il était opportun de souligner « cet équilibre subtil entre virilité dominante et féminité influente » inventé par la France (1).

(1) Éric Zemmour : Le Premier Sexe ; J'ai lu, 122 p., 4,80 euros.

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