Forces spéciales : quand la Défense s'attaque au cinéma

31 décembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Retour sur un film ayant bénéficié d'une implication inédite des armées.

En salles depuis le 2 novembre, Forces spéciales raconte le sauvetage d'une journaliste prise en otage par des Talibans. Selon son réalisateur, Stéphane Rybojad, ce film constitue un hommage aux militaires français engagés en opérations extérieures. À ce titre, il méritait le détour, en dépit du scepticisme des critiques. En cinéphiles avertis, ceux-ci auront traité avec dédain cette pale imitation des blockbusters hollywoodiens... Bon public, nous avons préféré l'aborder avec une complaisance délibérée : des héros bien français, cela fait plaisir à voir !

À la différence de leurs homologues américains, ceux-ci ne marchent pas sur l'eau. En revanche, de part et d'autre de l'Atlantique, on dépense apparemment les munitions sans compter. Pourtant, le réalisme serait « à peu près tenu », selon notre confrère Jean-Marc Tanguy, auteur d'un album consacré au film. Entres autres incongruités, signalons la mixité de l'équipe engagée par le COS (Commandement des opérations spéciales), où des commandos de marine côtoient des parachutistes de l'air. Par ailleurs, aucun hélicoptère Puma n'a jamais été déployé en Afghanistan...

Cela dit, on le devine à l'écran, cette production a bénéficié d'un soutien inédit des armées. « L'idée consistait [...] à ne pas demander des moyens particuliers (humains et matériels), mais à nous greffer sur des moyens planifiés et engagés sur des séquences réelles d'entrainement », explique Jackie Fouquereau, l'officier dépêché auprès de l'équipe de tournage. Quelques plans ont même été filmés à Kaboul. Notamment un scène de poursuite, où un sous-officier assure la doublure de Diane Kruger.

Bien que la complexité du théâtre afghan soit occultée par la caricature des Talibans, dont l'ambigüité des liens avec la population est passée sous silence, le film donne à réfléchir sur le souci de parer aux réactions de l'opinion publique – un élément clef de la guerre menée en Afghanistan. « C'est un sujet qui suscite l'intérêt partout sauf en France », relève le réalisateur, dont le film constituerait « l'une des meilleures préventes à l'international depuis dix ans ».

Les armées seront-elles appelées à transformer l'essai ? Leur immixtion dans les salles obscures apparaît somme toute naturelle. Ce faisant, peut-être espèrent-elles susciter des vocations, voire contribuer à la résilience de la nation. Reste à trouver le ton juste. Leurs communicants devront se montrer subtils pour parer aux critiques. Un jeune homme a d'ailleurs chahuté la projection à laquelle nous avons assisté : avant de quitter la salle, il a dénoncé une propagande d'État et accusé les militaires français d'avoir perpétré des exactions en Afghanistan.

À la lecture de la dédicace finale, des applaudissements ont balayé son injure. Depuis, nous avons appris le décès de Goran Franjkovic, un légionnaire mort au combat lundi dernier, 14 novembre, alors qu'il venait de rejoindre le théâtre afghan. Il s'était distingué par sa motivation et sa rusticité, témoignant, selon l'armée de Terre, d'une volonté et d'une discipline exemplaires. Il était âgé de vingt-cinq ans : c'était "un jeune Français", dont le sacrifice nous inspire le plus profond respect.

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