Vociférations parlementaires

16 septembre 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Le Parlement européen n'a pas manqué d'invectiver Paris pour sa politique à l'égard des Roms. Aperçu des débats ayant précédé l'adoption d'une résolution présentée par les gauches européennes.

Déjà confrontée aux remontrances du Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale, aux outrances du commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, aux interrogations de la Commission de Bruxelles, la France a été  mise en cause par le Parlement européen le jeudi 9 septembre. Dans une résolution adoptée par 337 voix contre 245, avec 51 abstentions, celui-ci prie « instamment » Paris « de suspendre immédiatement toutes les expulsions de Roms », et « s'inquiète vivement [...] de la rhétorique provocatrice et ouvertement discriminatoire qui a marqué le discours politique au cours des opérations de renvoi ».

Schizophrénie

L'assemblée fustige également « la réaction tardive et réservée de la Commission », dont Hélène Flautre a interpellé le représentant, la Luxembourgeoise Viviane Reding : « Il est totalement sidérant, a-t-elle déclaré au nom du groupe Verts-ALE, qu'après les différents entretiens que vous avez pu avoir [...] vous en soyez à ce niveau de constat, c'est-à-dire de non-constat des violations objectives qui ont été commises par le gouvernement français. » D'autres députés français ont encouragé l'hémicycle à condamner leur pays, telles Catherine Grèze (Verts-ALE) et Sylvie Guillaume (Socialistes & Démocrates). À l'opposé, Jean-Pierre Audy (PPE) s'est fait l'apôtre de la sécurité, affirmant qu'« il ne peut pas y avoir de liberté sans ordre ».

Raillant l'"europhilie" traditionnelle de la France, le Britannique Gerard Batten a soutenu que les Roms y avaient été « invités », puisque « chaque citoyen européen a le droit de vivre dans un autre État membre ». Qu'en est-il exactement ? Certains rappels ne seront pas superflus si l'on en croit Bruno Gollnisch, « stupéfait [...] de la méconnaissance juridique de [ses] collègues qui ont oublié que les citoyens de l'Union européenne d'Europe centrale et orientale n'ont pas encore le droit définitif d'établissement sur notre territoire ».

Le point sur le droit

Jusqu'au 1er janvier 2014, en effet, Paris pourra continuer d'exiger des migrants  bulgares et roumains qu'ils détiennent un titre de séjour pour exercer une activité professionnelle en France, voire une autorisation de travail, dont la demande, à la charge de l'employeur, est instruite par la Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, « notamment après vérification de la situation de l'emploi dans la profession pour laquelle la demande est formulée », selon la Direction de l'information légale et administrative. D'une façon générale, pour un séjour de trois mois au plus, les citoyens de l'Union européenne ont pour seule obligation d'être en possession d'un document d'identité ou d'un passeport en cours de validité. Au-delà, ils sont tenus d'exercer une activité économique en qualité de travailleur, salarié ou non, ou bien de disposer de ressources suffisantes et d'une assurance maladie. L'ordre, la sécurité et la santé publics peuvent être invoqués pour limiter le droit d'entrée et de séjour. En outre, selon la législation européenne en vigueur, « les États membres peuvent adopter les mesures nécessaires pour refuser, annuler ou retirer tout droit conféré par la présente directive en cas d'abus de droit ou de fraude ».

Que chacun balaie devant sa porte

Voilà qui devrait alimenter les polémiques où interviendront juristes et politiciens... Pour clore ce débat parlementaire, signalons l'intervention relativement mesurée de Marielle De Sarnez (ALDE), pour qui « chacun doit balayer devant sa porte, à commencer par les pays d'origine, où doit être menée une politique d'intégration plus efficace, les Roms y étant trop souvent laissés pour compte, marginalisés. Cela doit changer. Les pays d'accueil, également, où les responsables politiques – je pense à l'Italie, hier, ou à la France, mon pays, aujourd'hui – ont trop souvent donné le sentiment de montrer du doigt, de stigmatiser une communauté tout entière et d'en faire le bouc émissaire facile de toutes les craintes et de toutes les peurs. Cela n'est pas acceptable. L'Union ne peut tolérer aucune politique discriminatoire. L'Union européenne, enfin, qui n'a pas pris la véritable mesure de cette question au moment de l'élargissement. Les milliards dépensés n'ont en rien amélioré la situation quotidienne des Roms. Il faut rattraper le temps perdu, mettre en place un plan d'intégration de grande ampleur impliquant la Commission, les États membres et les collectivités locales qui, trop souvent, se substituent à l'État pour l'accueil des Roms. » Vaste programme.

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