29 décembre 2009
Depuis Dublin, un commissaire européen prononce un éloge
dithyrambique de la diplomatie française. Charlie McCreevy a-t-il perdu
la tête ?
Le président de la République n'a pas manqué de fanfaronner,
tandis qu'il venait d'obtenir pour la France le portefeuille de
commissaire européen en charge du Marché intérieur. Ce faisant, il
aurait « enterré une fois pour toutes le mythe selon lequel
les commissaires européens, et tout particulièrement les Français,
arrivant à Bruxelles, sont supposés laisser de côté les intérêts
nationaux ». C'est en tout cas l'opinion formulée le
18 décembre par le commissaire irlandais Charlie McCreevy,
auquel Michel Barnier doit justement succéder. Selon lui, l'influence de
la France à Bruxelles serait
« impressionnante » : « On oublie
que la bureaucratie de Bruxelles a été conçue par la France. [...] Au
fil des années, cela a donné aux Français un énorme avantage pour
savoir comment actionner les leviers de pouvoir. » En
conséquence, il a salué l'« habileté extraordinaire »
de la diplomatie française.
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27 décembre 2009
L'AFE s'attaque au Père Noël ; nous prenons sa
défense ! Sans craindre la polémique, mais en rappelant à nos
petits camarades qu'elle peut stimuler les intelligences en marge de toute
inimitié. 😉
À l'approche de Noël, tandis que la joie gagne spontanément
bien des cœurs, quelques grincheux se manifestent parmi les
inconditionnels de la messe de minuit. Chantres d'une austérité que
récuseraient vraisemblablement des catholiques plus conséquents, ils
observent avec dédain la ferveur envahissant des foyers illuminés avec
faste par les « infidèles » (sic) : le
Christ, lui, s'était contenté d'une étable, nous rappellent-ils avec
véhémence.
L'AFE
leur a ouvert son blog, versant dans un obscurantisme
déplacé. « Athéisée », la fête de Noël se trouverait
réduite de ce fait à une « mascarade d'une vulgarité
abjecte » selon F. Magellan. Elle serait d'autant moins
porteuse de sens que l'humanité s'imaginerait « née d'un
enchainement de coups de bol chimiques ». Noël, propriété
créationniste ? Fichtre !
Ces outrances jettent le discrédit sur une critique du
consumérisme par ailleurs compréhensible, à laquelle nous aurions pu
souscrire en partie si elle avait été explicitée : qu'on juge
la valeur d'un cadeau à son prix nous désole ! Cela dit, c'est
moins le dévoiement de la fête que sa sécularisation qui incommode
notre gardien du temple. La tradition façonnée par l'Église se perpétue
dans une société déchristianisée ; avec vigueur
même ! C'est en ce sens qu'elle constituerait « le
comble du délire ».
En toute logique, les nostalgiques devraient se féliciter
d'une telle survivance : la France demeure ancrée dans son
passé chrétien, et si l'on s'affaire dans les magasins pendant l'avent,
c'est tout de même pour choyer ses proches ; c'est autre chose
que la frénésie des soldes ! Qu'importe aux yeux des nouveaux
croisés, jaloux de leur monopole, oublieux peut-être des enseignements
de leur propre religion : ils ne sauraient tolérer que le
profane cohabite avec le sacré.
Aussi dressent-ils le Père Noël contre
Leur-Seigneur-Jésus-Christ-agneau-de-Dieu, affublant le vieillard
ingénu de défauts insoupçonnés : il serait
l'« allégorie sublime de la goinfrerie consumériste, de la
pseudo-égalité destructrice [et] de l'iniquité démocratique
libérale ». Sans doute était-il trop convenu d'y voir un
symbole de l'amour filial... Son innocence l'a rendu consensuel. Une
tare inexcusable : ignorant ses aïeux chrétiens, ses
détracteurs le dénigrent avant tout par snobisme.
Cette posture infantile nous aurait arraché un sourire si elle n'avait pas été
teintée d'un si virulent sectarisme. Lequel met en cause nos valeurs, mais aussi
la "concorde sociale"... Politique d'abord, merde !
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17 décembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
L'institution de la "parité" dans les conseils
d'administration est un vieux serpent de mer. Forte d'un soutien
inédit, une nouvelle proposition de loi plébiscitant les quotas a été
déposée à l'Assemblée nationale.
Les conseils d'administration des cinq cents premières
entreprises françaises compteraient 8 % de femmes. Situation
inacceptable aux yeux des élites féministes. Le mois dernier, le
ministre du Travail Xavier Darcos s'était autorisé à « poser
la question des quotas ». Dans la foulée, une proposition de
loi a été déposée à l'Assemblée nationale le 3 décembre afin
d'instituer en cinq ans la composition à parité des conseils
d'administration des sociétés cotées. Les entreprises récalcitrantes
s'exposeraient à des difficultés administratives, mais non à des
sanctions financières – à moins qu'un amendement soit adopté en ce sens.
Récidives
En 2006, déjà, le Parlement avait exigé que la proportion de
représentants de chaque sexe ne dépasse pas 80 %. Il s'était
heurté à l'opposition du Conseil constitutionnel, selon lequel on
« ne saurait [...] faire prévaloir la considération du sexe
sur celle des capacités et de l'utilité commune ». Mais la
Constitution a depuis été révisée, stipulant désormais que
« la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes [...]
aux responsabilités professionnelles et sociales ».
Tandis que la crainte d'une nouvelle censure semble écartée,
« un consensus se dégage aujourd'hui sur la nécessité d'agir
de façon contraignante », observe Marie-Jo Zimmermann, le
président de la délégation de l'Assemblée nationale aux Droits des
femmes. En mars dernier, avec seize autres députés, elle avait proposé,
en vain, de fixer des quotas à 40 %. Quelques mois plus tard,
plus d'une centaine de collègues lui apportent leur soutien. Parmi les
signataires figurent Jean-François Copé, le président du groupe UMP à
l'Assemblée, mais aussi Hervé Gaymard, que l'on imaginait plus
réactionnaire.
« Sensibiliser »
« La loi ne peut tout résoudre »,
reconnaissent les auteurs de cette proposition, « mais elle
peut induire un changement dans les mentalités et les pratiques. [...]
On peut espérer que des conseils d'administration exemplaires
insuffleront une nouvelle sensibilité face aux questions d'égalité
salariale ou d'accès à la formation et que notre modèle social et
culturel permettra aux femmes de mieux concilier leur vie
personnelle et leur vie professionnelle. »
Mme Zimmermann affirme « la nécessité d'une action
volontariste ». Elle ne croit pas si bien dire : aux
antipodes de l'empirisme, sa démarche vise, au fond, à réorganiser la
cité non pas selon ses exigences intrinsèques – en tirant des
conséquences sociales de la différence des sexes –, mais au regard
d'une idéologie.
Dans cette perspective, la priorité sera donnée à la lutte
contre les "stéréotypes". Un "groupe d'experts" de la Commission
européenne présente les pistes à suivre : « La
plupart des pays ayant les plus longues traditions en matière de
politiques de déségrégation [sic] – Danemark, Allemagne, Finlande,
Islande et Pays-Bas – montrent la volonté d'affronter la ségrégation à
un stade précoce de la vie en investissant dans des "événements
motivationnels" ou dans des programmes éducatifs conçus pour encourager
de façon positive les choix "atypiques" parmi les jeunes filles et
garçons, et de promouvoir de nouveaux modèles à imiter. [...] Un bon
exemple est celui des campagnes d'information parallèles intitulées Girls'
Day (journée des filles) et New Pathways for boys
(nouveaux parcours pour les garçons) en Allemagne. »
Ces velléités idéologiques se parent d'un alibi économique
dont les outrances tempèrent la crédibilité : « dans
un scénario optimal » échafaudé par la Commission européenne, « le
comblement de l'écart des taux d'emploi pourrait entraîner une hausse
du PIB de 15 % à 45 % en Europe » ;
rien de moins ! Quant à Xavier Darcos, il se montre
alarmiste : « La France ne peut se permettre de voir
son potentiel féminin quitter le pays, parce que nous n'aurons pas
agi. »
Équilibre
Selon le ministre, « il est clair que notre société,
pour son propre développement et propre équilibre, doit parvenir à
faire aboutir positivement ce sujet ». Tel n'est pas l'avis
d'Éric Zemmour, accusé de « justifier
l'injustifiable » dans un documentaire sorti en salles le
25 novembre. Le polémiste, qui juge sa pensée caricaturée, a
exigé par huissier l'arrêt d'exploitation du film. Fustigeant
« une époque de mixité totalitaire, castratrice », il
observe que « les mères célibataires n'ont jamais été aussi
nombreuses ; jamais aussi pauvres » et craint, à
terme, « des tsunamis politiques et sociaux »
provoqués par les transformations familiales. Il rappelle en outre
l'originalité de la tradition française :
« François Ier fut le premier roi d'Occident qui
accepta les femmes à sa cour. L'amour courtois fut inventé dans le
Sud-Ouest de la France. Les salons du XVIIIe siècle, tenus par
des femmes, furent une exclusivité française. » En plein débat
sur l'identité nationale, il était opportun de souligner « cet
équilibre subtil entre virilité dominante et féminité
influente » inventé par la France (1).
(1) Éric Zemmour : Le Premier Sexe ;
J'ai lu, 122 p., 4,80 euros.
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16 décembre 2009
Le Premier ministre a prononcé un discours sur l'identité
nationale. Morceaux choisis.
Voilà qui tranche avec le "droit-de-l'hommisme " que
l'on croyait de mise : intervenant
dans le débat sur l'"identité nationale" le 4 décembre,
le Premier ministre a souligné le poids de l'histoire :
« être français, c'est d'abord appartenir à un très vieux pays
d'enracinement », a-t-il déclaré. « C'est habiter une
fresque historique où tout s'enchaîne : le Moyen Âge chrétien,
la Renaissance humaniste, la monarchie absolue, la Révolution citoyenne
[sic], l'Empire triomphant, les républiques progressistes... »
En conséquence, affirme François Fillon, si « la France est
laïque », elle « est tout naturellement traversée par
un vieil héritage chrétien qui ne saurait être ignoré par les autres
religions installées plus récemment sur notre sol ».
Entres autres personnalités citées au cours du discours figure
un historien d'Action française : « Bainville disait
que ce qui était remarquable chez Jeanne d'Arc, ce n'était pas d'avoir
délivré Orléans, mais d'avoir reconnu le dauphin et d'être tombée à
genoux devant lui. Je crois effectivement que l'identité française se
reconnaît à ce dialogue de l'orgueil et de l'abnégation, à cette
alternance entre les guerres intestines et les élans d'unité, à ce
tiraillement bien français, et finalement fécond, entre la passion du
"je" et la nécessité du "nous". »
« Nous sommes les héritiers d'une histoire
exceptionnelle dont nous n'avons pas à rougir. », proclame le
chef du gouvernement. « Est-ce qu'il faut négliger, [...]
balayer tout cela ? Et au profit de quoi ? [...] D'une Europe encore,
malgré les efforts qui sont faits, souvent plus technocratique que
politique ? [...] Vous savez que je n'ai jamais été de ceux qui pensent
que le temps des nations est révolu. [...] L'Europe politique que nous
voulons, c'est l'Europe des nations qui ont la volonté de se placer au
service d'un dessein collectif. Sans nations fortes, nous sommes
convaincus qu'il ne peut y avoir d'Europe forte ! »
Propos de bon sens, sur lesquels les souverainistes devraient
méditer au lieu de crier au délire schizophrénique. Selon François
Fillon, ce débat censé « raffermir nos repères historiques,
civiques et moraux » se justifie par la nécessité de revigorer
« l'énergie nationale » permettant à la France
« de tenir son rang dans la mondialisation ».
D'autres préfèrent la fuir. Pour cette raison, ils revendiquent
l'exclusivité du patriotisme. Reprenant les mots du Premier ministre,
nous leur rétorquerons que si « notre nation c'est notre
protection », c'est aussi « notre tremplin ».
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3 décembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Le gouvernement et les parlementaires de la majorité
promeuvent le développement de la finance islamique sur la place de
Paris. Aperçu des enjeux économiques et sociaux.
Le mois dernier, Bercy accueillit un colloque présentant les
« opportunités pour les entreprises françaises »
offertes par la finance islamique. Christine Lagarde a confirmé qu'elle
menait un « combat » en faveur de son développement
sur le territoire national. Par ce biais, le ministre de l'Économie
entend renforcer l'attractivité de la place de Paris et capter des
liquidités au volume croissant, issues de rentes pétrolières et
gazières.
Cinq principes
La finance islamique recouvre les activités censées respecter
les prescriptions du Coran. Elle repose sur cinq principes :
interdiction de l'intérêt versé selon le seul écoulement du
temps ; prohibition de la spéculation et de
l'incertitude ; exclusion des secteurs haram
(vente d'armes, d'alcool ou de porc, pornographie) ; partage
des profits et des pertes ; adossement à des actifs tangibles.
Des exigences mises en valeur par la Crise... Évalué à
700 milliards de dollars, ce marché devrait représenter
1 000 milliards d'euros à l'horizon 2020, selon Elyès
Jouini et Olivier Pastré, auteurs d'un rapport pour Paris Europlace.
« Soit [...] l'équivalent du tiers des fonds propres de
l'ensemble des banques mondiales en 2007 ou l'équivalent de la moitié
de la capitalisation boursière de la place financière de Paris
aujourd'hui. »
Les banques françaises n'ont pas manqué d'investir ce marché.
BNP-Paribas s'y emploie depuis les années quatre-vingt, principalement
dans le Golfe persique et en Asie du Sud-Est. Depuis 2003, le groupe
s'appuie sur une filiale basée à Bahrein. « Cette entité est
soumise aux mêmes contraintes et dispositions légales que BNP-Paribas,
notamment en matière de connaissance des clients, de lutte contre le
blanchiment d'argent, etc. Néanmoins, [...] elle dispose d'un comité de
charia composé de docteurs en théologie [...] chargés d'approuver
toutes les opérations mises en place », expliqua Maya
Boureghda lors d'une table ronde organisée au Sénat au printemps 2008.
Immigrations
Sur le territoire européen, le Royaume-Uni fait figure de
pionnier. Par rapport à lui, « la France a pris beaucoup de
retard dans le développement de son industrie financière
islamique », observe Zoubeir Ben Terdeyet, directeur
d'Isla-Invest. Peut-être parce que « en Grande-Bretagne, les
populations musulmanes sont constituées surtout de personnes
originaires du Pakistan, de l'Inde et du Golfe persique, soit des
régions où les banques islamiques sont très présentes. En France, en
revanche, la communauté musulmane est composée, en majorité, de gens
issus d'Afrique du Nord où la finance islamique est assez
inexistante. » Jean Arthuis, qui préside la commission des
Finances de la chambre haute, déplore l'« inertie
nationale », tout en martelant que peu d'aménagements légaux
seraient nécessaires pour y remédier. D'ailleurs, l'Autorité des
marchés financiers a déjà approuvé des OPCVM (organismes de placement
collectif en valeurs mobilières) compatibles avec la charia.
Outre-Rhin, le land de Saxe a émis une obligation islamique
– ou sukuk – qui lui a rapporté 100 millions
d'euros.
Un exemple à suivre ? Probablement aux yeux du
sénateur UMP Philippe Marini, auteur d'un amendement à la proposition
de loi « tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et
moyennes entreprises ». Adopté définitivement par le
Parlement, après avis favorable du gouvernement, son texte prévoyait la
modification du Code civil sur la fiducie (transfert temporaire de
propriété), afin que le détenteur de sukuk
puisse se prévaloir d'un
droit de propriété des actifs supports. Saisi par l'opposition, le
Conseil constitutionnel a censuré cet amendement le 14 octobre
dernier, pour un motif de forme. Scandalisé, le député PS Henri
Emmanuelli avait dénoncé une atteinte à la laïcité par
« l'introduction de la charia dans le droit
français ». Une accusation récusée par sa collègue UMP Chantal
Brunéi : « Nous n'ajoutons ici qu'un instrument
d'investissement supplémentaire dans la boîte à outils – un parmi
beaucoup d'autres, et que personne n'est obligé
d'utiliser ! »
Communautarisme
Sans doute eût-il été plus opportun d'agiter l'épouvantail du
communautarisme. L'année dernière, Jean Arthuis avait regretté que
« la réflexion présentement engagée soit essentiellement
tournée vers la banque d'investissement et de financement au détriment
de la banque de détail ». La demande des particuliers
n'apparaît pas manifeste, mais Zoubeir Ben Terdeyet veut croire en son
émergence : « Lorsque la viande halal est apparue en France, presque personne n'en achetait. [...]
Beaucoup de musulmans qui ne consommaient
pas de viande halal,
par effet de mimétisme, font maintenant comme
leurs voisins en s'en procurant. Le même phénomène pourrait avoir lieu
concernant les produits de finance islamique. » Leur
développement s'accompagnerait d'un « effet
intégrateur potentiel » selon Jean Arthuis ; ce
serait un signal positif envoyé à la communauté musulmane nationale,
une sorte de reconnaissance.... Dans le débat qui anime la rédaction de
L'Action Française 2000 et qui oppose, plus ou moins,
les partisans de l'assimilation à ceux de l'intégration communautaire,
l'ancien ministre de l'Économie soutiendrait vraisemblablement les
seconds.
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3 décembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Les commentaires vont bon train depuis la désignation du
premier président "stable" du Conseil européen. On en fait volontiers
le président « de l'Union européenne ». Un simple
abus de langage ?
Les Vingt-Sept se sont accordés pour désigner le Belge Herman
Van Rompuy à la tête du Conseil européen. « Cela s'est passé
relativement facilement, en tout cas rapidement », selon le
témoignage du président de la République. Rappelons que le Conseil
européen réunit les chefs d'État ou de gouvernement des États membres
de l'UE. Selon les traités, il « donne à l'Union les
impulsions nécessaires à son développement et en définit les
orientations et les priorités politiques générales ». Il en
est devenu une institution à part entière avec l'entrée en vigueur du
traité de Lisbonne le 1er décembre. Cette consécration nourrit
d'ailleurs quelque inquiétude en l'exposant au contrôle de la Cour de
Justice de Luxembourg.
Quels pouvoirs ?
Évoquant le Premier ministre belge sortant, nombre de nos
confrères se sont empressés d'en faire le président non pas du Conseil
européen, mais de « l'Union européenne » tout
entière. C'est méconnaître ses responsabilités. Officiellement, il
« préside et anime les travaux du Conseil européen ;
assure la préparation et la continuité des travaux du Conseil européen
en coopération avec le président de la Commission, et sur la base des
travaux du Conseil des Affaires générales ; œuvre pour
faciliter la cohésion et le consensus au sein du Conseil
européen ; présente au Parlement européen un rapport à la
suite de chacune des réunions du Conseil européen ».
Le 12 novembre, Herman Van Rompuy se serait paraît-il
prononcé « lors de la réunion du groupe Bilderberg, à
Bruxelles, pour un fédéralisme européen sur le modèle de celui des
États-Unis » ; il aurait « plaidé en faveur
d'un financement direct du budget européen par l'impôt, en l'occurrence
une taxe environnementale » (Coulisses de Bruxelles,
29/11/2009). Tout juste désigné à la tête du Conseil européen, il a
prononcé une déclaration bien plus consensuelle :
« Je veillerai à respecter les sensibilités et les intérêts de
tout un chacun. [...] Chaque pays a son histoire, sa culture et sa
façon de faire. Sans respect pour notre diversité, nous ne
constituerons jamais notre unité. Ce principe sera toujours présent
dans mon esprit. »
Son influence dépendra de l'habileté avec laquelle il
dessinera les contours de sa fonction. Mais il ne saurait convoiter un
pouvoir exécutif. « Il ne s'agissait pas d'élire George
Washington à la tête des États-Unis d'Amérique », proclame
Pierre Lellouche, le secrétaire d'État en charge des Affaires
européennes : « Son rôle sera non pas de faire de la
représentation et de donner des conférences de presse, mais d'être
capable de poser les bonnes questions au Conseil européen, puis, une
fois qu'un accord aura été dégagé, d'en assurer le suivi. »
Jacques Delors balaie lui aussi les utopies giscardiennes :
« Il n'a jamais été question [...] d'avoir une personne qui
serait président de l'Europe, les États ne l'auraient pas supporté.
[...] Au bout de six mois, les tensions entre les différentes
institutions auraient été telles que tout aurait été
paralysé. » (Le Monde, 30/11/2009)
Un vrai ministre
Haut Représentant pour les Affaires étrangères et la Politique
de sécurité, la Britannique Catherine Ashton est quant à elle promue
« ministre des Affaires étrangères » par certains
journalistes, qui empruntent l'expression au défunt traité établissant
une constitution pour l'Europe. Ce titre apparaît moins usurpé que le
précédent : Mme Ashton présidera le Conseil des
ministres des Affaires étrangères ; elle s'appuiera à terme
sur le Service européen pour l'Action extérieure qu'il lui appartient
de mettre en place. Aussi Paul-Marie Coûteaux annonce-t-il d'ores et
déjà la « suppression » des ambassades nationales.
Avant d'en arriver là, l'UE devra unifier son embryon de diplomatie,
scindée entre ses piliers communautaire et intergouvernementaux. À
titre d'exemple, elle a entrepris il y a seulement quelques mois
d'unifier sa représentation en Afghanistan, où le délégué du Conseil
cohabitait avec celui de la Commission ; ainsi, bien sûr, qu'avec les
représentants des États membres maintenus à leur poste.
Cristal opaque
La nationalité du Haut Représentant pourrait en outre tempérer
l'inquiétude des souverainistes. « C'est assez intéressant de
prendre [...] une femme qui vient d'un pays qui a parfois plus de
difficultés avec l'Europe », souligne Nicolas Sarkozy. Sans
doute sera-t-elle confrontée à quelques tiraillements. Parmi les
premiers dossiers qu'elle aura à traiter figure ainsi le déploiement,
en Ouganda, d'un dispositif européen de formation des soldats
somaliens ; une opération dont les préparatifs sont accueillis
avec réticence par le Royaume-Uni.
Les approximations sémantiques observées dans la presse
s'expliquent par des motifs idéologiques. Elles illustrent également ce
travers par lequel des schémas institutionnels nationaux sont calqués
sur la réalité européenne, où ils s'avèrent inopérants. La mise en
œuvre du traité de Lisbonne rendra-t-elle le fonctionnement de l'UE
plus intelligible aux yeux des profanes ? La présidence de la
Commission n'est pas subordonnée à celle du Conseil européen, et celle,
tournante, du Conseil des ministres est maintenue... Tandis qu'on lui
demandait quel était désormais le visage de l'"Europe", le président de
la République lâcha cet aveu : « Tout n'est pas d'une
pureté de cristal. »
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19 novembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
La saison 7 de 24 Heures chrono
met en scène le débat sur la torture. La série en dit long sur le fossé
qui nous sépare des mentalités américaines.
La septième saison de 24 Heures chrono
est disponible en DVD depuis le 4 novembre. Référence en
matière de thriller, cette série met en scène
Jack Bauer, un agent fédéral aux méthodes musclées, prêt à perdre son
âme pour déjouer les complots terroristes fomentés contre les
États-Unis. Tournée plus ou moins à la façon d'un reportage, elle
prétend rapporter ses péripéties en temps réel, les vingt-quatre
épisodes d'une saison correspondant aux vingt-quatre heures d'une
journée riche en rebondissements.
Polémiques
Dans un pays marqué par le traumatisme du
11 Septembre, pointé du doigt après la proclamation du Patriot
Act, Twenty four s'est livré, avec une outrance
croissante, à une véritable apologie de la torture... pour la plus
grande satisfaction du public. Cela n'a pas manqué de susciter des
polémiques outre-Atlantique, voire « un certain
malaise » selon le Courrier International
du 14 février 2007 : « Pour preuve, "un groupe inhabituel
formé de militants des droits de l'homme, du doyen de l'académie
militaire américaine de West Point et des interrogateurs vétérans de
Saigon ou d'Abou Ghraib s'est réuni autour d'une table à la mi-novembre
2006." [...] En venant à la rencontre des créateurs de la série, ces
visiteurs n'avaient qu'un souhait : "Que les scènes de torture
soient plus authentiques. Cela ne veut pas dire plus sanglantes ou plus
sauvages." Au contraire, ils veulent qu'elles soient plus réalistes,
moins expéditives. Ce qui fait dire au Los Angeles Times
que "24 Heures chrono prend une leçon de torture de la part
d'experts". The Independant n'en revient pas lui
non plus. "L'armée américaine a fait appel aux producteurs [...] pour
modérer les scènes de torture à cause de l'impact qu'elles ont à la
fois sur les troupes sur le terrain et sur la réputation de l'Amérique
à l'étranger. »
Jack Bauer, héros damné
Loin de se repentir, les producteurs du "Jour 7" ont
pris le parti culotté de mettre en scène le débat. Le premier épisode
s'ouvre sur le procès orchestré par un sénateur contre Jack
Bauer, appelé à répondre à Washington de crimes qu'il assume
apparemment sans scrupule. Son audition est interrompue à la demande du
FBI, qui requiert son aide pour résoudre une enquête. Travaillant à ses
côtés pendant vingt-quatre heures, l'agent Renée Walker se laisse
convaincre du bien fondé de ses méthodes. Avec toutefois quelques
réticences, si bien que sa sensibilité contribue à "réhumaniser" le
héros damné.
En guise de prologue, le téléfilm Redemption
(disponible séparément) fustige l'impuissance – voire la lâcheté – des
Nations Unies, ainsi qu'un certain isolationnisme américain, lui
préférant manifestement l'ingérence humanitaire. Au fil des épisodes,
on relève une mise en garde contre le développement des armées privées
– largement utilisées en Irak – et le "retour à la foi" de Jack sous
l'influence d'un imam qu'il avait accusé à tort de protéger un
terroriste. Bien évidemment, la part belle est réservée au patriotisme
ainsi qu'au sens du devoir. Cela ne va pas sans déchirement dans la
famille du président – une femme...
Le suspens étant au rendez-vous les amateurs du genre seront
comblés. Tous nos lecteurs n'en sont pas, mais ils mesureront à travers
ces quelques lignes le fossé qui nous sépare des mentalités américaines.
24 Heures chrono,
saison 7 ; coffret six DVD, 24 x 41 minutes environ,
format 1.78, VF et VO en 5.1, Fox-FPE, 39,99 euros.
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19 novembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Le Conseil d'État reconnaît désormais "l'effet direct" des
directives européennes.
En 1975, Daniel Cohn-Bendit demanda l'abrogation de l'arrêté
d'expulsion dont il avait fait l'objet le 25 mai 1968. Confronté, dans
un premier temps, au refus du ministre de l'Intérieur, il fit valoir,
en vain, que sa décision était contraire à la directive adoptée par le
Conseil des Communautés européennes le 25 février 1964.
À la différence des règlements, rappelons que les directives
requièrent une "transposition" par les autorités nationales.
À l'époque, le Conseil d'État considéra que les États membres
étaient les seuls destinataires des directives, et que celles-ci
« ne sauraient être invoquées par [leurs] ressortissants [...]
à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif
individuel ». Sa position tranchait avec celle de la Cour de
Justice de Luxembourg, dont il se rapprocha toutefois en pratique par
la suite, jusqu'à revenir sur cette jurisprudence le 30 octobre dernier.
Un revirement
Appelé à statuer sur une affaire de discrimination,
l'Assemblée du contentieux – la formation juridictionnelle la plus
élevée du Conseil d'État – a jugé, suivant les termes du communiqué
officiel, « que tout justiciable [pouvait] se prévaloir, à
l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif même non
réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une
directive lorsque l'État n'a pas pris, dans les délais impartis par
elle, les mesures de transposition nécessaires. » "L'effet
direct" des directives européennes se trouve ainsi reconnu. Et la
prégnance du droit communautaire confirmée, bien que son primat fût
admis de longue date : depuis 1984, par exemple, le Conseil d'État
pouvait annuler les dispositions de tout acte réglementaire contraire à
une directive.
Pour expliquer son revirement, la juridiction administrative
invoque l'« obligation constitutionnelle » que
revêtirait désormais la transposition en droit interne des directive
communautaires. Depuis 1992, en effet, la constitution de la
Ve République affirme la participation de la France aux
Communautés et à l'Union européennes, dans les conditions fixées par
les traités européens successifs. Aux yeux des juristes, l'influence
des normes communautaires puise donc sa légitimité dans notre propre
constitution.
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19 novembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Souverainistes et européistes s'offusquent de l'opacité des
négociations européennes.
Les tractations allaient bon train à l'approche du Conseil
européen du 19 novembre, où les chefs d'État et de
gouvernement devaient désigner celui qui présiderait leurs réunions
pendant deux ans et demi, en application du traité de Lisbonne.
Les candidats potentiels à ce genre de poste n'ont pas
l'habitude de se déclarer. Jean-Claude Juncker, le Premier ministre du
Luxembourg, a certes rompu avec la tradition ; gageons que c'était
moins dans l'espoir de satisfaire ses ambitions qu'afin de faire échec
à Tony Blair.
Quoi qu'il en soit, le président du Conseil européen reste
désigné sous l'empire de négociations diplomatiques. Pour les
européistes, cela témoigne de l'empreinte insupportable que les États
continuent d'imprimer sur l'UE. « Ces tractations secrètes
donnent des arguments à ceux qui plaident pour l'élection au suffrage
universel d'un "président de l'Union" », clame Jean Quatremer (Coulisses
de Bruxelles, 11/11/2009). C'est le cas de Ségolène Royal,
qui renouvelle son vœu de « créer les États-Unis
d'Europe » dans un entretien accordé à La Tribune
le 10 novembre. Sans doute aurait-elle mieux fait de se
taire : l'utopie apparaît selon nous trop manifeste pour
berner l'électeur moyen en quête d'un projet mobilisateur.
Comme en URSS...
De son côté, Yves Daoudal a fait écho aux déclarations de Mme Vike-Freiberga, dont le nom était parfois avancé pour prendre la tête
du Conseil européen. L'ancien président de la Lettonie fustige les
nominations décidées « comme toujours dans l'obscurité,
derrière des portes closes » : « Il y en a
assez que l'Union européenne fonctionne comme l'ancienne Union
soviétique. » Le Salon Beige a lui aussi
relayé ses propos, qui semblent réjouir les souverainistes. La
comparaison puise ses racines dans l'histoire, comme le rappelle
L'Encyclopédie de l'Agora : « En 1985, Mikhaïl
Gorbatchev, alors premier secrétaire du Parti communiste au pouvoir en
Union soviétique, fit l'annonce d'une nouvelle politique fondée sur la
Glasnost, mot que l'on traduisit par transparence en français. C'est
ainsi que l'on put connaître les faits sur les grandes purges de
Staline et le massacre de Katyn... »
Cela dit, la blogosphère réactionnaire se fourvoie en versant
apparemment dans l'apologie de la "transparence". En effet, sa
revendication participe d'un libéralisme forcené, tandis que son
application revêt une incontestable dimension totalitaire.
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10 novembre 2009
Le Sénat a donné son feu vert au changement de statut de La Poste.
Un nouveau pas vers la liquidation du "service
public" ? Pas forcément. Aperçu de quelques dispositions
légales encadrant les activités postales.
Le Sénat a adopté hier soir, 9 novembre, le projet de
loi « relatif à l'entreprise publique La Poste et aux
activités postales ». Au préalable, Pierre Hérisson s'en était
saisi au nom de la commission de l'Économie de la chambre haute. Son
rapport, dont nous avons lu l'exposé général, nous a réservé
quelques surprises. En effet, nous ignorions l'existence des barrières
érigées par le législateur contre le "tout libéral", y compris au
niveau européen.
« La Poste imprègne notre univers quotidien et notre
imaginaire collectif », souligne le sénateur. « Le
bureau de poste symbolise la vie communale, au même titre que la mairie
ou l'église, et traduit l'ancrage territorial de l'entreprise. La
figure du facteur, immortalisée par le septième art et plébiscitée par
nos compatriotes, constitue un lien de proximité et de sociabilité
central jusque dans les zones les plus reculées. Les fonctions
assurées, porteuses d'une dimension universelle – relier les hommes,
faire circuler l'information, transmettre des biens –, méritent au
premier chef la qualification de service public. » En
conséquence, la loi définit quatre missions faisant l'objet d'un
contrat entre l'État et La Poste : le service public
des envois postaux et le service universel postal ; le service
public du transport et de la distribution de la presse ; la
mission d'accessibilité bancaire ; la mission d'aménagement du
territoire.
Service universel
Une directive européenne de 1997 impose au prestataire du
service universel de « garantir, tous les jours ouvrables et
pas moins de cinq jours par semaine, au minimum une levée et une
distribution au domicile de chaque personne physique ou morale. En
France, la loi du 20 mai 2005 [...] met à la charge
de La Poste [...] des obligations qui vont au-delà [...] et
fait de la France l'un des pays européens bénéficiant du service
universel le plus large. [...] Il comprend ainsi, notamment, un service
de levée et de distribution six jours sur sept, des envois de colis
postaux jusqu'à 20 kg, des envois recommandés et des envois à
valeur déclarée ainsi que des envois de journaux et imprimés
périodiques pesant au plus 2 kg. Les critères d'accessibilité
au réseau de points de contact [...] prévoient "qu'au moins
99 % de la population nationale et au moins 95 % de
la population de chaque département soit à moins de 10 km d'un
point de contact et [que] toutes les communes de plus de
10 000 habitants disposent d'au moins un point de
contact par tranche de 20 000 habitants". »
La loi du 2 juillet 1990 « dispose
que "La Poste contribue [...] à l'aménagement et au
développement du territoire national". [...] Le réseau de
La Poste se compose, pour ce faire, de 17 091 points
de contact répartis dans environ 14 000
communes [...] : 10 778 bureaux de
poste détenus en propre par La Poste, dont 4 000 dans
des communes de moins de 2 000 habitants ;
4 446 agences postales communales et intercommunales,
situées dans des mairies, un demi-emploi étant financé par
La Poste ; 1 758 relais Poste chez des
commerçants, ces derniers étant rémunérés par La Poste au
moyen d'un forfait et d'une commission sur les activités. Au titre de
sa mission d'aménagement du territoire, La Poste entretient un
réseau de points de contact dans les zones dites
"prioritaires" : zones de revitalisation rurale, zones
montagneuses, zones urbaines sensibles et départements
d'outre-mer. »
« Le surcoût occasionné par ce réseau est estimé, en
tenant compte des efforts engagés par La Poste en termes de
productivité et d'adaptation de son réseau, à 250 millions
d'euros environ. [...] Or, La Poste, désormais soumise à la
pression concurrentielle sur la totalité de son domaine d'activité, ne
pourra pas contribuer de manière indéfinie au financement d'une mission
qui ne pèse pas sur ses concurrents, notamment les grands
établissements postaux européens, chargés seulement de la mission de
service universel. Votre rapporteur souligne en conséquence qu'il est
temps de trouver une solution de financement à la mission d'aménagement
du territoire de La Poste et que l'État [...] ne saurait en
être absent. »
La peur de la liberté ?
Cela soulève des inquiétudes légitimes. Cependant, on s'étonne
des réflexes "étatistes" animant certains royalistes. Leur réaction
tranche avec les partis pris de Maurras, fustigeant jadis
« l'État français qui se mêle de tout [...], même de faire des
écoles et de vendre des allumettes ». Pourquoi faudrait-il,
par principe, s'en remettre à lui pour livrer des gadgets high tech
commandés sur la Toile ? La distribution des lettres relève
certes davantage du "service public". Mais « l'avenir du
marché "courrier" ne semble pas porter à l'optimisme. [...] Les
spécialistes auditionnés par la commission Ailleret ont évoqué des
réductions de volume de l'ordre de 20 à 40 % à l'horizon
2020. » Si « des opportunités de
croissance » existent, elles sont « recelées par
l'ère numérique »
Aussi La Poste est-elle « confrontée à un
bouleversement majeur de son environnement rendant son avenir
incertain ». Elle se trouve « acculée dans une
impasse », estime Pierre Hérisson :
« l'insuffisance de ses fonds propres l'empêche de procéder
aux investissements nécessaires pour affronter ses concurrents les plus
directs. [...] Or, son statut actuel d'établissement public ne
l'autorise pas à accéder à des sources de financement élargies. Pour y
remédier [...], une modification de sa forme juridique est
aujourd'hui indispensable. C'est l'objet principal du présent projet de
loi, qui donne explicitement à La Poste le statut de société
anonyme. » « S'il existe un risque en toute
chose », poursuit le sénateur, « le pire risque
serait aujourd'hui de ne rien faire ».
La tentation de l'immobilisme apparaît pourtant manifeste. Il
est vrai que La Poste est le premier employeur de France après
l'État... Nos compatriotes seraient-ils effrayés par la
liberté ? C'est l'hypothèse
avancée par Yves Daoudal, qui dénonce le tabou du "service
public à la française" : « Peut-être faudrait-il se
demander s'il ne s'agit pas plutôt de services publics "à la
soviétique", expression traduite par les communistes par "à la
française" et imposée comme telle aux Français au moment où le Parti
communiste avait une très grande influence. Ainsi la SNCF a-t-elle été
créée par le Front populaire, EDF-GDF et la Sécurité sociale en 1946.
Certes, La Poste, quant à elle, est devenue monopole d'État en
1793. Mais c'est aussi une date de dictature d'extrême
gauche. » Voilà qui pourrait interpeler ces royalistes
devenus des chantres de l'État-providence !
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