2 novembre 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
Considérations sur l'extraterritorialité de la législation américaine.
Le nouveau locataire de la Maison-Blanche sera désigné mardi prochain, 8 novembre 2016. Quelle que soit l'issue de cette élection, le Vieux-Continent continuera-t-il de subir la volonté de Washington ? Il apparaît « nécessaire de faire valoir auprès des États-Unis que certaines pratiques sont devenues abusives et que la France ne les acceptera plus
», martèle une mission parlementaire présidée par Pierre Lellouche.
Américain par accident
En cause : « l'extraterritorialité de la législation américaine
». BNP-Paribas en a fait les frais voilà deux ans, pour avoir violé des embargos financiers décrétés outre-Atlantique contre Cuba, l'Iran ou le Soudan. Alors qu'Alstom était poursuivi pour corruption, peut-être cette procédure a-t-elle contribué au rachat de sa branche énergie par General Electric. Quant aux Français nés aux États-Unis, américains par accident, l'oncle Sam leur fait les poches ; afin d'échapper à un impôt ubuesque, ils peuvent certes renoncer à la nationalité américaine, mais encore faut-il y mettre le prix : « potentiellement 15 000, voire 20 000 euros
», selon Karine Berger, rapporteur.
La fronde du Congrès
Ces exemples sont-ils la traduction d'un impérialisme délibéré ? Comme l'observent les députés, « les États-Unis ont une "politique juridique extérieure", ce qui n'est sans doute pas le cas de la plupart des autres États
». Ils n'en sont pas moins fragilisés par leurs faiblesses institutionnelles : ainsi que le rapporte la mission d'information, « l'un des meilleurs moyens pour le Congrès de bloquer la politique étrangère de l'exécutif
[...] est d'adopter des lois qui, par leur portée extraterritoriale, sont de nature à empêcher cette politique d'atteindre ses objectifs
» – comme avec l'accord de juillet 2015 sur le nucléaire iranien. Au printemps dernier, Jack Lew, secrétaire au Trésor, s'est lui-même inquiété de ces dérives : « toutes les critiques habituelles en Europe sont présentes dans la bouche du ministre américain
», soulignent les parlementaires : « les risques diplomatiques et économiques, l'agacement qui touche même les proches alliés, le risque de remise en cause du rôle du dollar
».
Les autorités américaines « sont prêtes à la coopération internationale si leurs interlocuteurs répriment efficacement et sévèrement la corruption
», croient savoir les députés. Il est vrai que « d'après les statistiques de l'OCDE sur la répression de la corruption transnationale, la justice américaine est indéniablement beaucoup plus "activiste" que celles de la plupart des pays européens
». La France semble décidée à changer la donne, comme en témoigne le projet de loi « relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique
». Il est question, notamment, d'introduire en droit français un mécanisme de transaction pénale. D'ores et déjà, la collaboration transatlantique se trouve facilitée par le parquet national financier, créé en 2014. Mais quand elles répondent aux sollicitations de la justice américaine, les entreprises françaises sont censées le faire sous le contrôle des autorités nationales, en application de la loi du 26 juillet 1968 (dite « loi de blocage
»).
Culture du renseignement
De toute façon, « la mission considère que la seule coopération ne permettra pas de résoudre les problèmes apparus depuis quelques années
». Autrement dit, « un rapport de force doit être instauré
». Ses membres jugent « nécessaire que notre pays dispose en matière de renseignement économique d'outils permettant, sinon d'être "à armes égales" avec les services américains
[...], du moins d'être plus crédibl
e ». Or, rapporté au PIB, l'effort de renseignement français serait sept fois moindre que l'effort américain. « Au-delà même de la question de la très grande disparité des moyens
[...], les travaux de la mission ont mis en lumière une différence de culture considérable, pour le moment, entre les États-Unis et notre pays
», concluent les parlementaires. Il pourrait même « falloir dix ou quinze ans pour parvenir en France au même degré de collaboration et de partage de l'information économique entre services (notamment de renseignement et des grandes administrations économiques et financières) qu'aux États-Unis
». Vaste chantier en perspective.
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19 octobre 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
Faciliter l'accès à la contraception et à l'avortement dans le monde :
tel est l'objectif de la France, qui a présenté une stratégie à cet effet.
L'action extérieure de la France « sur les enjeux de population,
de droits et santé sexuels et reproductifs
» fait l'objet d'une
« stratégie
» pour 2016-2020 qui vient d'être présentée
le 4 octobre 2016. « Aujourd'hui encore
», déplorent
Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du Développement
international, et André Vallini, secrétaire d'État chargé du Développement
et de la Francophonie, « plus de trois cent mille femmes dans le
monde meurent chaque année de complications liées à la grossesse ou à
l'accouchement
» ; ce serait même la première cause de
mortalité des adolescentes en Afrique. « Il ne s'agit pas
seulement de donner accès à des services de planification familiale ou à
des produits contraceptifs
», expliquent-ils, « mais de
soutenir des politiques de développement fondées sur les droits
individuels, à travers l'amélioration de la législation et des
politiques familiales et l'évolution des normes sociales
».
Priorité donnée à l'Afrique
Huit pays retiennent plus particulièrement l'attention du Quai
d'Orsay : Bénin, Côte d'Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal, Tchad
et Togo. En 2014, dans un cadre bilatéral, 55 millions d'euros ont
été consacrés à la « santé sexuelle et reproductive
».
Les sommes transitant via des canaux multilatéraux sont plus
importantes : 330 millions d'euros cette année-là. Le ministère
des Affaires étrangères (MAE) rapporte, par exemple, que « la
France finance des projets au Cameroun, au Sénégal et au Togo qui visent
à lutter contre les violences liées au genre en milieu scolaire
» ;
« ces projets contribuent au déploiement d'environnements
scolaires sûrs, inclusifs et propices à l'égalité entre les filles et
les garçons
», se félicite-t-il, sans autre précision.
Long d'une trentaine de pages, son « rapport de stratégie
»
s'avère tout aussi indigent quant à l'exposé des motifs susceptibles de
légitimer pareille politique. S'agit-il de promouvoir des valeurs ?
Le Gouvernement hésite à l'assumer, récusant toute volonté d'« ingérence
» ;
« garantir des droits sexuels et reproductifs
[...] c'est
sauver des vies
», se justifie-t-il. S'agit-il plutôt de
contribuer au développement de l'Afrique ? « La pression
démographique qui pèse sur les secteurs sociaux (éducation, emploi,
santé) et sur la gestion du foncier (géographie et dynamique du marché
agricole) est un facteur d'instabilité (conflits sociaux, migrations
internes, insécurité alimentaire) et fragilise la gouvernance des États
»,
souligne effectivement le MAE.
Enjeux démographiques
« La croissance démographique
[...] est bien sûr une
promesse pour l'avenir, mais aussi un facteur de risque pour la
stabilité du continent où la prévalence des grossesses adolescentes est
la plus importante du monde
», expliquent encore Jean-Marc
Ayrault et André Vallini. Cela étant, « plus aucune politique de
population ne peut freiner ce qui se passe en Afrique
»,
prévient Dominique Kerouedan, docteur en médecine, titulaire de la chaire
"Savoirs contre pauvreté" du Collège de France en 2012-2013. De son point
de vue, « l'enjeu est plutôt de se préparer et accompagner les
pays à assimiler le passage de un à deux milliards d'habitants sur le
continent, dont une immense partie est composée de jeunes
».
Bien qu'il prétende le contraire, le Gouvernement « n'a jamais eu
aucune action sérieuse ni financement conséquent sur ces sujets
»,
nous a-t-elle affirmé. En définitive, peut-être ce semblant de stratégie
contribuera-t-il surtout à rassembler le Gouvernement, sa majorité et ses
électeurs dans un combat qui leur est cher...
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3 août 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
La dimension politique du sport est régulièrement soulignée à l'occasion
des Jeux olympiques. Cependant, les diplomates lui portent un intérêt
croissant.
Vendredi prochain, 5 août 2016, s'ouvriront au Brésil les XXXIe
Jeux olympiques de l'ère moderne. Entre 2010 et 2020, la plupart des
grandes manifestations sportives se seront tenues dans des pays dits
"émergents" – dix sur treize, selon le décompte proposé par les députés
Valérie Fourneyron (PS) et François Rochebloine (UDI) dans
un rapport enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le
8 juin 2016. Faut-il s'en étonner ? Comme le remarque
Valérie Fourneyron, « le sport est un révélateur de la marche du
monde
» ; « il permet aux États de se mettre en
scène
». De son point de vue, les Jeux de Sotchi, organisés en
Russie à l'hiver 2014, s'inscrivaient dans la « diplomatie des
muscles
» mise en œuvre par Vladimir Poutine. Quant aux
États-Unis, qui traquent la corruption dans les instances internationales
du sport, ils lui semblent « fidèles en cela à leur idéologie de
la "destinée manifeste", mélange de doctrine interventionniste, de
volonté de se poser en justiciers du monde et de diffuser un modèle de
démocratie libérale
». Le Qatar n'est pas en reste :
« le sport accompagne une politique de diversification
d'investissements en apportant une dimension de prestige essentielle aux
ambitions de l'Émirat
», observe-t-elle avec François
Rochebloine.
Un catalyseur de changements
Les États ou les villes qui accueillent de tels événements en attendent
des retombées économiques. Cela « malgré des chiffrages épars
»
dont les rapporteurs jugent la fiabilité « inégale
».
Attention aux déconvenues : « il n'y a pas eu à Londres plus
de touristes lors des Jeux de 2012 qu'en temps ordinaire
»,
soulignent les députés. Cela étant, « c'est dans une dynamique de
long terme que l'impact touristique doit être appréhendé
».
Tout comme la construction des infrastructures. À ce titre, « Barcelone
est devenue le modèle de régénération urbaine réussie grâce aux Jeux,
avant d'être détrônée par Londres vingt ans plus tard
». Ainsi
les JO de 2012 ont-ils été « utilisés à des fins de développement
territorial de l'Est londonien, déshérité
». La construction du
stade de France, à l'approche de la Coupe du monde de football de 1998,
s'est elle-même inscrite dans le développement plus général de la plaine
Saint-Denis. En résumé, « les grandes compétitions internationales
constituent des catalyseurs de changements pour une ville, un
territoire ; et à plus grande échelle, pour un pays
».
Des opportunités à saisir
Bien des opportunités sont à saisir. S'agissant du Japon, par exemple,
« il est notable que si Paris devait être sélectionné pour
accueillir les Jeux en 2024, l'intérêt se trouverait accru de construire
des partenariats avec des entreprises françaises
» ; dans
cette perspective, préviennent les rapporteurs, « il convient
d'entretenir la dynamique actuelle en capitalisant sur l'image du
charismatique entraîneur de la sélection nationale de football Vahid
Halilhodzik (ancien joueur du FC Nantes, ancien entraineur du PSG) et en
systématisant les invitations de hautes personnalités japonaises aux
grandes manifestations sportives organisées en France
». En
Amérique latine, « le sport est un excellent point d'entrée, parce
qu'il est populaire, outil de cohésion sociale et que les sports par
lesquels il est possible de développer une diplomatie d'influence sont
assez peu ou pas pratiqués aux États-Unis (football, rugby notamment) ou
plus européens qu'américains (cyclisme)
» ; « ce
raisonnement vaut aussi pour le handball en Afrique », précisent
les députés. Selon eux, il s'agit aussi d'« atteindre les cœurs et
les esprits des populations sans mettre en jeu l'État (concept de
"public diplomacy")
».
Ambassadeur pour le sport
La France saura-t-elle y parvenir ? Le ministère des Affaires
étrangères et du Développement international (MAEDI) « a
clairement intégré le sport comme un vecteur d'influence potentiellement
intéressant
», se félicitent les rapporteurs. Un ambassadeur
pour le sport a même été nommé en 2013. Mais les ressources mises à sa
disposition semblent dérisoires : « La ligne budgétaire est
de l'ordre de 8 000 euros de voyages annuels !
» La
situation demeure « brouillonne
», comme en témoigne la
préparation de l'Euro 2016, où « des tiraillements sont apparus
entre le MAEDI qui assure le pilotage politique et le ministère de
l'Économie, de l'Industrie et du Numérique qui détient les moyens
».
Rattachée aujourd'hui au ministère des Sports, la Délégation
interministérielle aux grands événements sportifs (DIGES) devrait être
placée auprès du Premier ministre, selon les recommandations des
députés : ce serait « une des clés de l'amélioration du
dispositif national, que tout le monde décrit comme éclaté et illisible
».
Apprendre à jouer collectif
Il faut « que les acteurs publics soient rassemblés et entraînent
les acteurs non étatiques pour former une véritable "équipe France"
»,
martèlent les rapporteurs. À l'exception notable de celles réunies dans le
"Cluster Montagne", nos entreprises « ne jouent pas toujours
"collectif"
» déplorent-ils. Or, « la diplomatie
sportive française ne peut exister sans parvenir à susciter cette
alchimie qui existe spontanément dans certains pays malgré la
concurrence commerciale
». Selon les parlementaires, il « revient
à l'État de structurer et rassembler les acteurs
», comme il
s'y essaie au Japon, « un pays laboratoire pour la diplomatie
économique française en matière de sport
».
Puissance et influence
L'« État stratège
» cher au Front national sera-t-il
édifié sous la houlette d'un gouvernement socialiste ? Sans doute
Valérie Fourneyron et François Rochebloine partagent-ils avec Marine Le
Pen une certaine bienveillance à l'égard de de l'intervention
publique : « les résultats sont beaucoup plus facilement au
rendez-vous quand l'État est à la manette
», écrivent-ils
notamment. Cependant, dans le cas présent, il ne s'agit pas de protéger
les entreprises françaises exposées à la concurrence étrangère, mais de
les accompagner dans la compétition internationale. Les rapporteurs disent
avoir mené un « travail de pédagogie sur le concept de puissance
telle qu'elle s'exerce aujourd'hui dans le monde
». Selon
Valérie Fourneyron, précisément, « la puissance de la France au
XXIe siècle résultera de la conjugaison intelligente des différents
leviers de l'influence
». Incidemment, loin de combattre la
mondialisation, elle propose de mieux y intégrer la France.
Cartes postales – Le 24 juillet 2016 s'est achevée
la cent-troisième édition du Tour de France. Dans leur rapport évoqué
ci-dessus, les députés Valérie Fourneyron et François Rochebloine
proposent un vibrant éloge de cette compétition. Il y voient « un
monument du sport mondial et un ambassadeur de la France à l'étranger
».
Le Tour de France est diffusé dans cent-quatre-vingt-douze pays,
précisent-ils ; « c'est la troisième diffusion audiovisuelle
mondiale
» ! « Au-delà du spectacle sportif
»,
se félicitent les parlementaires, « le Tour de France assume un rôle
de promotion de la France, de son patrimoine et de ses régions, de la
beauté et de la diversité des paysages français
» ; en
effet, « ce sont chaque jour des cartes postales de la France qui
passent sur des millions d'écrans
».
Euro radin – Alors que la France accueillait l'Euro 2016
de football, l'État a acheté vingt mille places « à vocation
sociale
». Cela « sans rabais
», déplorent les
députés Valérie Fourneyron et François Rochebloine. Les pouvoirs publics
auraient bénéficié de quatre-vingts places gratuites. Un nombre très
insuffisant aux yeux des parlementaires. C'est « inacceptable
»,
écrivent-ils dans leur rapport.
Lectures d'été – À l'approche des Jeux olympiques,
« les enjeux du sport
» – « économie,
géopolitique, société, identité
» – sont à la une de la revue Conflits
(n° 10, été 2016, 9,90 euros). On y trouve notamment un
entretien avec Pascal Boniface, auteur du livre JO politiques –
Sport et relations internationales, paru en juin dernier
(éditions Eyrolles, 202 pages, 16 euros). C'est aussi l'occasion
de relire les Lettres des Jeux olympiques de Charles
Maurras, préfacées par Axel Tisserand, publiées en poche en 2004 (éditions
Flammarion, 183 pages, 8,90 euros).
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6 juillet 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
Coopération franco-britannique, défense européenne, Alliance
atlantique : aperçu des perspectives ouvertes par le vote du
23 juin 2016 en faveur du Brexit.
Le 24 juin 2016, alors que venait d'être annoncée l'issue du
référendum en faveur du Brexit, le
président de la République a promis que Paris serait « à
l'initiative pour que l'Europe se concentre sur l'essentiel
» –
à savoir, tout d'abord, « la sécurité et la défense de notre
continent
». Or, si le Royaume-Uni quitte effectivement l'Union
européenne (UE), « la France
[...] continuera à travailler
avec ce grand pays
», y compris en cette matière, où « nos
relations étroites
[...] seront préservées
», a assuré
François Hollande.
Gare aux punitions
« Qu'ils soient dans ou en dehors de l'UE, les Britanniques
restent à échéance visible nos partenaires les plus crédibles et les
plus sérieux en matière de défense sur le continent européen
»,
confirme Pierre Razoux, dans
une note de l'Irsem (Institut de recherche stratégique de l'École
militaire). « Nous partageons des intérêts similaires (vision
mondiale, siège permanent au Conseil de sécurité, détention de l'arme
nucléaire, nombreux territoires d'outre-mer à protéger, intérêts
géostratégiques largement convergents) que le Brexit ne modifiera pas
»,
explique-t-il. « Sur le plan industriel
», précise-t-il,
« nous sommes engagés dans des projets structurants en cours de
développement (missile antinavire léger, système de combat aérien futur)
qui restent strictement bilatéraux
». Par conséquent,
prévient-il, « il est crucial que la France continue de traiter le
Royaume-Uni avec respect, de manière sereine et dépassionnée, sans
l'esprit de "punition" que certains pourraient être tentés
d'instrumentaliser
».
Ce partenariat s'appuie sur les accords de Lancaster House signés en
2010. Lesquels sont « une façon de "faire l'Europe sans l'Union
européenne", pour reprendre les propos de l'ambassadrice de France en
Grande-Bretagne
», citée par Florent de Saint-Victor dans
un entretien au Marin. En fait, c'est une façon parmi
beaucoup d'autres... Londres participe également à l'Occar (Organisation
conjointe de coopération en matière d'armement), par exemple, sous l'égide
de laquelle a été développé l'Airbus A400M. En revanche, à la différence
de Paris, il est resté en marge du Commandement européen du transport
aérien (EATC). Force est de le constater : "l'Europe des États" chère
aux souverainistes existe d'ores et déjà. En effet, ces structures-là sont
indépendantes de l'UE et de sa Politique de sécurité et de défense commune
(PSDC), à laquelle la contribution du Royaume-Uni s'avère d'ailleurs
modeste, au regard de ses capacités.
Londres préfère l'Otan
« Durant l'opération Eunavfor Atalanta contre la piraterie,
Londres n'a mis à disposition qu'un navire depuis 2008
», souligne
ainsi Nicolas Gros-Verheyde, animateur du blog Bruxelles 2.
« Et ce pendant quelques mois à peine
»,
précise-t-il, « soit à peine plus que les... Ukrainiens
» ;
« pendant ce temps
», poursuit-il, « les
Luxembourgeois mettaient à disposition deux avions de patrouille
maritime durant plusieurs années
». De fait, observe-t-il,
« le Royaume-Uni préférait mettre ses navires à disposition de
l'Otan ou des Américains
». Étonnement, Pierre Razoux n'en estime
pas moins que la perspective d'un Brexit « laisse présager la
démonétisation
» de la PSDC. Pourtant, Londres était
régulièrement accusé d'en freiner le développement, s'opposant à la
création d'un QG militaire de l'Union, ainsi qu'à l'accroissement du
budget de l'Agence européenne de défense (AED). Selon le collaborateur de
l'Irsem, « si les Britanniques ne peuvent plus jouer au sein de
l'UE, certains d'entre eux pourraient être tentés de torpiller la PSDC
et de convaincre leurs anciens partenaires de l'inutilité de cet outil
dont ils ne font plus partie
». Cependant, souligne Nicolas
Gros-Verheyde, « un départ du Royaume-Uni n'empêcherait pas qu'il
puisse continuer à contribuer, de manière extérieure, aux opérations
militaires européennes, comme le font aujourd'hui nombre de pays tiers,
de la Géorgie à la Colombie, en passant par la Suisse, la Norvège, la
Serbie ou les États-Unis
».
Quoi qu'il en soit, « la France aurait tout à gagner à se
présenter comme l'intermédiaire naturel entre le Royaume-Uni et l'UE
»,
selon Pierre Razoux. Ce dernier entrevoit également « une
opportunité de coopération supplémentaire entre l'Allemagne et la France
»
au sein de l'Alliance atlantique. Dans quelle mesure celle-ci serait-elle
affectée par un Brexit ? Les avis sont partagés. Un analyste russe, cité
par le Courrier international, anticipe « le
renforcement du rôle de l'Otan, comme "dernière structure unifiant
l'Europe"
» ; si bien que le Brexit contribuerait « non
pas à un infléchissement du rôle des États-Unis en Europe, mais au
contraire à son renforcement
». À l'inverse, sur
Royal Artillerie, Catoneo annonce que « nous
gagnerons en autonomie par rapport aux États-Unis
».
Nouveaux équilibres
La donne serait davantage bouleversée si le Brexit s'accompagnait d'un
éclatement du Royaume-Uni. Celui-ci apparaît « menacé de
déclassement à la fois économique et stratégique avec l'indépendance
plausible de l'Écosse
», selon Pierre Razoux. Dans l'immédiat,
les spéculations vont bon train quant aux nouveaux équilibres
géopolitiques qui pourraient se dessiner à l'occasion du Brexit. Le vote
"leave" a été « accueilli très favorablement par la Russie, la
Turquie et la Chine, et de manière dubitative par les États-Unis
»,
croit savoir Pierre Razoux. « Le retrait britannique change les
termes du processus décisionnel (modifiant la minorité de blocage),
modifie les équilibres au détriment de la sensibilité libérale, et
laisse Paris et Berlin dans un inconfortable face à face
»,
analyse Frédéric Charillon dans
The Conversation. « Ceux qui se réjouissent
aujourd'hui de la sortie annoncée du Royaume-Uni pourraient être demain
les premiers à dénoncer les ambitions géopolitiques et militaires d'une
Allemagne décomplexée
», s'inquiète même Pierre Razoux. « Si
les Britanniques n'étaient pas favorables à une politique étrangère
commune digne de ce nom, la contribution du Foreign and Commonwealth
Office à la diplomatie européenne renforçait considérablement l'analyse
et la crédibilité de celle-ci
», affirme encore celui-là. À ce
propos, les chefs d'État ou de gouvernement de l'UE viennent d'adopter le
28 juin une nouvelle stratégie pour la politique extérieure et de
sécurité. Y compris David Cameron donc. Brexit ou pas, l'Europe continue.
Sous de multiples formes.
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3 décembre 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Regard désabusé sur l'ouverture de la grand-messe du climat.
Le COP21 s'est donc ouverte lundi dernier,
30 novembre 2015. Ce jour-là, près de deux cents États étaient
représentés, pour la plupart au plus haut niveau. « Cet
événement constituera la plus grande conférence jamais organisée en
France depuis la signature de la déclaration universelle des droits de
l'homme à Paris en 1948 », avait
annoncé le Quai d'Orsay. Tout son réseau avait été mobilisé
en conséquence. Y compris à Kaboul, où les poules de l'ambassade de
France ont été mises « au service de lutte contre le
changement climatique ». Jean-Michel Marlaud, ambassadeur de
France en Afghanistan, l'explique très sérieusement dans
les Carnets diplomatiques du ministère
des Affaires étrangères.
Des poules et des centrales
Ironie mise à part, peut-être l'Exécutif s'inscrit-il dans la
tradition d'un certain messianisme français. D'autant que Paris a été
le seul à se porter candidat à l'accueil de cette conférence. D'autres
considérations s'avèrent plus prosaïques : il pourrait s'agir
de donner des gages aux Verts, ou de soutenir l'industrie nucléaire où
la France excelle. Mais pourquoi les chefs d'État ou de gouvernement
ont-il répondu si nombreux à l'appel ? Sans doute n'ont-ils
rien à y perdre. Comme
l'explique Carole Mathieu, chercheur à l'IFRI,
« l'économie mondiale va nécessairement connaître de profonds
changements dans les quinze prochaines années en raison de la
croissance de la demande d'énergie et de produits agricoles et
forestiers mais aussi de l'essor de la population
urbaine » ; or, poursuit-elle, « orienter
vers la construction d'une économie sobre en carbone » les
investissements nécessaires « serait à peine plus
onéreux ».
Aussi François
Hollande nous a-t-il promis un accord « universel,
différencié et contraignant ». Contraignant ?
« La contrainte, ce sera l'engagement international,
l'obligation de transparence, l'effet sur la réputation »,
décrypte la négociatrice française Laurence Tubiana, citée
par Sciences et Avenir. Laurent
Fabius a beau saluer « l'engagement de grandes
autorités spirituelles et religieuses », nulle révolution ne
devrait bouleverser la marche du monde à l'issue de cette COP21.
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2 décembre 2015
En décembre 2012, quand ces propos controversés ont été
rapportés, la France réservait officiellement sa position à l'égard du
Front al-Nosra.
C'est une accusation propagée avec zèle par des propagandistes
à la botte de Bachar el-Assad, tout particulièrement à l'extrême
droite, mais pas seulement : Laurent Fabius, ministre français
des Affaires étrangères, serait un fervent thuriféraire du Front
al-Nosra, affilié à Al-Qaïda.
Pour preuve, nous dit-on, il en aurait fait l'apologie dans
les colonnes du Monde. « Sur le terrain,
ils font du bon boulot », aurait-il effectivement déclaré,
selon notre consœur Isabelle Mandraud. À bien relire son article daté
du 13 décembre 2012, cependant, on relève quelque ambiguïté.
En effet, M. Fabius semble rendre compte de l'opinion du
président de la Coalition nationale syrienne, ce que confirme la
retranscription officielle de sa conférence de presse du
12 décembre 2012, à laquelle ont vraisemblablement assisté nos
collègues du Monde.
Évoquant le Front al-Nosra, mais se refusant à le citer
nommément, Laurent Fabius observait alors : « Il y a
en particulier un groupe qui a des positions militaires qui sont
importantes, mais les Américains ont estimé que ce groupe, compte tenu
de ses orientations, devait être mis sur la liste des terroristes.
D'autres pays, je pense à un certain nombre de pays arabes, ont dit que
cela ne leur paraissait pas pertinent. Et le président de la Coalition
a dit que, bien évidemment, on pouvait avoir des visions différentes
sur ce sujet mais que, lorsqu'un groupe menait une action qui était
efficace et utile au service des Syriens et contre Bachar el-Assad,
c'était très difficile de le récuser en tant que tel. »
« En ce qui concerne la France », annonçait
le ministre, « nous allons examiner cette question de manière
approfondie parce que c'est une question que l'on ne peut pas
éluder ».
Autrement dit, en décembre 2012, Paris réservait
officiellement sa position à l'égard du Front al-Nosra.
Sans doute cela
suffira-t-il à indigner les détracteurs de la politique menée par
Paris. Il n'empêche : réduire sa critique à l'agitation d'une
petite phrase sortie de son contexte n'est pas à leur honneur. Qu'on
débatte plutôt avec de vrais arguments, et sans fausse naïveté s'il
vous plaît !
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18 octobre 2015
Un petit billet écrit pour L'AF2k.
Héraut des droits de l'homme, Laurent Fabius a jeté le gant à
Bachar el-Assad, qu'il entend même traîner devant la justice
internationale. À certains égards, son discours fait mouche :
il est vrai que les médias, plus particulièrement audiovisuels,
s'accommodent volontiers d'une vision du monde en noir et blanc...
Morale et efficacité
Poutine étant passé par là, voilà que le Quai d'Orsay met de
l'eau dans son vin. « Il ne faut pas opposer d'un côté la
morale et de l'autre l'efficacité », martèle désormais le
ministre des Affaires étrangères ; « cela va
exactement dans le même sens », a-t-il affirmé le
29 septembre 2015 sur le plateau de BFM TV.
Le même jour, lors d'un sommet sur le terrorisme, il a jugé
« très difficile d'imaginer qu'on puisse avoir [...] une Syrie
unie, une Syrie libre, une Syrie qui respecte les communautés si à sa
tête il est écrit que sera comme dirigeant celui qui a été à l'origine
du chaos ». Et d'appeler à la constitution d'un gouvernement
« avec des éléments du régime » (dont seule la figure
de proue est désormais fustigée) « et avec des éléments de
l'opposition modérée ».
Logique de puissance
On le devine : l'obstination de Paris pourrait
presque se décliner sur un mode réaliste, à l'image du discours tenu
par Arnaud Danjean, député Les Républicains au Parlement européen.
« On peut décapiter Daech, lui infliger des pertes
importantes, le contenir, le dégrader », a-t-il expliqué à nos
confrères de L'Opinion ; « mais
le fond sunnite en ébullition persistera, faute de solutions
politiques », a-t-il prévenu. Dans cette perspective, le
départ de Bachar el-Assad n'apparaît plus comme une exigence morale,
mais comme un gage nécessaire qu'il faudrait donner aux populations
sunnites. Cela reste discutable, mais, à défaut d'infléchir encore sa
position, pourquoi le Quai d'Orsay ne la défend-il pas de cette
façon ? Le gouvernement a beau se proclamer en
« guerre » contre le terrorisme, il hésite à
s'inscrire clairement dans une logique de puissance. Dans ces
conditions, en dépit de ses engagements militaires, la France risque de
se montrer relativement passive sur la scène internationale, où la
Russie s'engage, à l'inverse, sans aucun complexe.
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16 septembre 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Le développement international et la santé mondiale sont loin
d'être régis par les seuls principes de la philanthropie. Force est de
constater que les États et leurs intérêts continuent d'en déterminer
les orientations.
Vendredi 25 septembre 2015 s'ouvrira à New York, pour
trois jours, le sommet des Nations unies au cours duquel sera adopté le
« programme de développement pour l'après-2015 »,
censé succéder aux « objectifs du millénaire pour le
développement ». Définis il y a quinze ans, ceux-ci visaient à
« réduire l'extrême pauvreté et la faim, assurer à tous
l'éducation primaire, promouvoir l'égalité des sexes et
l'autonomisation des femmes, réduire la mortalité infantile, améliorer
la santé maternelle, combattre le VIH-Sida, le paludisme et les autres
maladies, assurer un environnement humain durable, construire un
partenariat mondial pour le développement ».
Le commerce dicte sa loi
Les ambitions réaffirmées de la "communauté internationale" se
traduiront-elles dans les faits ? Entres autres écueils, les
politiques de développement s'avèrent biaisées par les préoccupations
propres aux États donateurs. Un exemple ? « La
disproportion et la précipitation de financements alloués au contrôle
de maladies infectieuses » – lesquelles « trouvent
des éléments d'explication dans la peur qui habite
l'Amérique », comme l'explique Mme Dominique
Kerouedan, dans
un leçon inaugurale du Collège de France prononcée en février 2013,
consacrée à la "géopolitique de la santé mondiale". « Dans le
même hôpital », regrette-t-elle, « le patient atteint
de Sida est parfois traité alors que les patients souffrant de
méningite, d'hépatite ou de fièvre typhoïde, ou de toute autre maladie,
meurent dans l'indifférence ». Peut-être la promotion des
« droits sexuels et reproductifs » participe-t-elle
d'un phénomène similaire ? Au printemps dernier, comme
le rapporte Euractiv, les Vingt-Huit se
sont accordés pour infléchir en ce sens la politique de développement
de l'Union européenne. Cela, semble-t-il, à l'invitation de
Paris : « nous sommes extrêmement satisfaits, car
nous avons réussi à négocier des conclusions ambitieuses, qui
comprennent notamment la mention de l'éducation sexuelle des femmes et
des droits reproductifs », s'est ainsi félicitée une « source
française » citée par nos confrères.
Quoi qu'il en soit, si l'idéologie exerce vraisemblablement
son influence, celle-ci ne saurait éclipser les considérations
économiques, comme en témoignent les origines historiques de
l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Tandis que se tient à Paris,
en 1851, la première Conférence sanitaire internationale, « il
s'agit moins pour les États de maîtriser les épidémies de choléra, de
peste ou de fièvre jaune, que de s'entendre pour réduire au minimum les
mesures de quarantaine qui s'avèrent coûteuses pour le
commerce », souligne encore Dominique Kerouedan. Autrement
dit, selon l'analyse de David Mitrany, « les progrès laborieux
de la coopération internationale sont moins dus à la sagesse politique
des États qu'au rapprochement de leurs intérêts matériels ».
Comment gagner la guerre
« Le vocabulaire de la géopolitique – puissance,
pouvoir, souveraineté, sécurité, territoires, velléités et rivalités,
cartes et positionnement – caractérise avec plus de justesse les
relations internationales contemporaines dans le champ de la santé que
celui de la seule gouvernance de l'architecture de l'aide au
développement », poursuit Mme Kerouedan. En pleine
Guerre froide, rappelle-t-elle, « le président John Fitzgerald
Kennedy [...] brandissait devant le Congrès, traditionnellement
isolationniste, la coopération au développement comme une stratégie
puissante pour contrer la progression du communisme ». À
l'aube du XXIe siècle, si le Conseil de sécurité des Nations
unies s'est inquiété de la propagation du Sida, c'était en raison de
son « impact [...] sur la paix et la sécurité en
Afrique », selon l'intitulé d'une thématique inscrite à
l'ordre du jour de ses réunions. Il semble même que l'expression de
"santé mondiale" soit apparue, pour la première fois, dans un rapport
américain soulignant « l'intérêt, pour la sécurité des
États-Unis, des questions de santé telles qu'elles se manifestent même
à l'autre bout de la planète ».
Outre-Atlantique, peut-être se souvient-on que « les
désastres sanitaires conduisant à des échecs militaires ne sont pas
exceptionnels ». Notre histoire nationale en donne quelques
exemples : « La variole avait tué plus de vingt-deux
mille soldats de l'armée française pendant la guerre de 1870. Les
troupes sont décimées lors de l'expédition du général Leclerc à
Saint-Domingue en 1802, ou de la conquête de Madagascar en
1895. » La guerre n'est plus la même aujourd'hui. Confrontées
à la menace islamiste, les armées devraient-elles se désintéresser des
questions sanitaires ? Coiffant les agences de renseignement
américaines, le National Intelligence Council (NIC) est convaincu du
contraire. En 2008, dans un rapport traitant, précisément, des
implications stratégiques de la santé mondiale, il prévenait
« que les acteurs non étatiques, comme les terroristes ou les
seigneurs de guerre, gagnent en légitimité, en pouvoir et en envergure,
locale et internationale, en fournissant des services que des
gouvernements ne proposent pas ». De fait,
« l'incapacité du gouvernement à fournir à la population des
services de base, de santé ou autres, a nui à la crédibilité du
gouvernement en Afghanistan, tout en alimentant le soutien aux
Talibans ».
Un appel à la France
Malheureusement, remarque Dominique Kerouedan, « la
notion de sécurité en politique va de pair avec l'urgence et le
contrôle de maladies transmissibles, plutôt qu'avec une approche
holistique de long terme, qu'exige le renforcement d'institutions
techniques ou managériales ». Par ailleurs, semble-t-elle
regretter, « à leur aide sanitaire bilatérale, la France et la
Commission européenne privilégient le financement d'initiatives
mondiales pilotées à distance ». Or, déplore-t-elle,
« le retrait du terrain de l'expertise bilatérale à long terme
signe, de fait, la fin de ce qui fut le plus satisfaisant – et
l'exception française, belge, allemande, européenne – dans l'exercice
de la coopération : réfléchir et travailler ensemble, in situ, à des
réponses renouvelées ». Tandis que dominent les intérêts
américains, clame-t-elle en conclusion de sa leçon inaugurale,
« il ne tient qu'à la France de se réconcilier avec son
histoire, européenne et africaine, et à l'Union européenne de prendre
la place qui est la sienne dans le monde, en faveur de la paix et du
développement ». Toujours actif en Afrique, Paris
relèvera-t-il le défi ? Sur
Diploweb, Dominique Kerouedan s'inquiète
« d'une politique de développement durable de la France
écartelée entre, d'un côté, la diplomatie économique avec les pays les
plus riches du continent, et de l'autre, l'organisation de la
conférence de Paris sur le climat en 2015 ». Affaire à suivre.
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27 février 2015
Un article publié par U235 explique pourquoi cette notion est
« une absurdité scientifique ».
Le "choc des civilisations" hante les esprits.
« Pourtant », explique
Olivier Schmitt, « pour les spécialistes de
relations internationales, il s'agit d'un concept zombie, qui a été
disqualifié de multiples fois théoriquement et empiriquement, mais qui
refuse manifestement de mourir ». Aussi l'auteur de cet
article se propose-t-il d'« expliquer patiemment pourquoi la
notion est une absurdité scientifique ».
Au passage, il égratigne un africaniste bien connu des
militants et sympathisants d'Action française : « Du
fait du caractère malléable des identités », écrit-il,
« toute explication des conflits sur cette base (comme par
exemple les arguments de Bernard Lugan sur l'Afrique) est une
absurdité. Le fait que certains éléments du monde musulman aient décidé
de rentrer en conflit avec des pays occidentaux ne peut pas être réduit
à une logique d'affrontement ontologique entre identités
religieuses-civilisationnelles-culturelles, mais doit être remis dans
le contexte d'un affrontement de projets politiques. Car c'est bien là
la faiblesse des explications culturalistes des conflits : en
se focalisant sur le facteur culturel-identitaire comme cause, souvent
par racisme non avoué, elles sont aveugles aux logiques politiques
conduisant au conflit lui-même. Manipulable, l'identité est un enjeu
d'un conflit, elle n'en est jamais la cause, qui
est toujours politique. » Politique d'abord, donc. Bernard
Lugan se verrait-il reprocher de ne pas être suffisamment
maurrassien ?
« Au final », conclut Olivier Schmitt,
« la persistance du concept de "choc des civilisations", en
dépit de ses multiples réfutations, est révélatrice de la difficulté à
penser la complexité des interactions sociales, au sein du cadre
national ou dans les relations internationales. » Voilà qui
nous renvoie plus ou moins à notre marotte conspirationniste...
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17 septembre 2014
Article publié dans L'Action Française 2000
Les déboires de l'Argentine reflètent-ils la toute-puissance
de la finance ? Peut-être faudrait-il plutôt s'interroger sur
le primat du droit.
Tandis que Buenos Aires tente d'échapper à la pression des
"fonds vautours", l'Assemblée générale des Nations Unies prévoit
d'établir « un cadre juridique multilatéral applicable aux
opérations de restructuration de la dette souveraine ». Une
résolution a été adoptée à cet effet le 9 septembre 2014.
Portée par le Bolivie, avec le soutien de la Chine et de
nombreux pays en développement, cette initiative semble avoir été
fraîchement accueillie par les États les plus riches. Selon un
communiqué de l'ONU, « à l'instar du représentant des
États-Unis, qui s'est inquiété des incertitudes qu'un tel texte
pourrait faire peser sur les marchés financiers, ceux de l'Union
européenne, du Japon, de l'Australie et de la Norvège ont dit qu'ils ne
pouvaient l'appuyer compte tenu de la précipitation avec laquelle il a
été présenté ».
Paris et ses alliés auraient-ils fléchi, encore une fois,
devant la toute-puissance de la finance, que François Hollande avait
pourtant érigée en ennemi ? Dans le cas de l'Argentine,
peut-être est-ce moins le primat de la finance que celui du droit qui
est en cause – quoique cette situation contribue à la confiance des
créanciers potentiels. Brossant le portrait d'Elliott, le principal
fonds spéculatif en prise avec l'Argentine, Les Échos n'ont-ils pas
décrit un organisme « procédurier à l'extrême », qui « détecte les
failles juridiques dans les contrats de dette » ? Ainsi fonctionnent
les "fonds vautours", qui rachètent des obligations dépréciées dans
l'espoir d'obtenir le remboursement de leur valeur nominale.
Or, comme l'explique La Tribune,
« un État peut choisir de se référer à une juridiction
étrangère dans ses contrats de dette », et cela
indépendamment de la devise à laquelle il recourt. « Le droit
de New York et le droit britannique sont les plus courants »,
précisent nos confrères, « car ils sont bien connus des
investisseurs et sont censés mieux les protéger ». À certains
égards, donc, Buenos Aires paie le prix de ses propres arbitrages. Bien
que la mondialisation ait changé la donne, le politique n'a pas tout à
fait perdu la main.
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