La conquête spatiale, un impératif stratégique

19 octobre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

François Hollande prétend réenchanter la France. À cet effet, peut-être pourrait-il l'encourager à se tourner vers les étoiles !

Ce jeudi 20 octobre 2011 devaient être mis en orbite les deux premiers satellites du système Galileo – l'équivalent européen du GPS américain. Cela grâce à un lanceur Soyouz, la première fusée russe décollant depuis la Guyane française. Située à proximité de l'équateur, la base spatiale de Kourou bénéficie d'une situation géographique plus avantageuse que celle de Baïkonour, au bénéfice de la charge utile des lanceurs. Ainsi Moscou optimise-t-il l'exploitation de ses capacités, tandis que Paris et Bruxelles investissent à moindre coût les segments du marché qui n'étaient pas couverts par Ariane V.

Vulnérabilités

Ce marché se développe à la mesure de la prégnance croissante des technologies spatiales. Laquelle s'avère porteuse de vulnérabilités. Le durcissement des satellites et la redondance des systèmes sont censés y répondre. Il conviendrait néanmoins de préparer les populations à un "blackaout spatial", selon Guilhem Penent, animateur du blog De la Terre à la Lune. D'autant qu'un tel scénario lui semble « parfaitement envisageable », qu'il soit le fait d'une agression délibérée ou d'un catastrophe naturelle (météorites ou tempête solaire). Dans un ouvrage consacré à la Stratégie spatiale (Esprit du Livre, 404 p., 25 euros), le colonel Jean-Luc Lefebvre souligne qu'il est « stratégique [...] de disposer de moyens autonomes pour détecter, identifier et classifier tous les objets spatiaux pouvant représenter une indiscrétion, un risque ou une menace ». La France bénéficie d'ores et déjà d'un système de radar, dont on dit qu'il aurait détecté la destruction d'un satellite par la Chine en 2007. Toutefois, avertit Guilhem Penent, « d'importants efforts restent encore à fournir au niveau européen ». Dans ce cadre, un système autonome de surveillance de l'espace (SSA) pourrait être mis en œuvre à l'horizon 2020. C'est en tout cas le vœu formulé par le Centre d'analyse stratégique, dans un rapport présenté le 11 octobre.

Le lendemain, le Quai d'Orsay a salué la mise en orbite du premier satellite franco-indien, preuve que l'Europe n'est pas un horizon indépassable. Cependant, aux yeux de Laurent Wauquiez, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, « l'Union européenne doit avoir un rôle de stratège, définir les grandes orientations et les besoins » en matière spatiale. Paris jouerait alors un rôle moteur, nous promet-il. De fait, selon le gouvernement, l'industrie spatiale française représente 50 % du chiffre d'affaires européen et 40 % des emplois. Dans le jeu européen, Paris détient surtout une carte maîtresse. « Les éléments les plus critiques des activités spatiales sont certainement les installations de lancement », souligne le colonel Lefebvre, dans un entretien publié sur le blog Egea. « Les grandes nations spatiales en détiennent plusieurs. [...] Le port spatial européen situé à Kourou, en Guyane française, est unique. Il est donc assurément aussi stratégique pour l'autonomie spatiale de l'Europe que peut l'être l'île Longue pour sa sécurité. »

Du pétrole en Guyane

Dans ces conditions, la découverte de pétrole au large de la Guyane doit être accueillie avec prudence, prévient le géopoliticien Olivier Kempf. « En effet, certains esprits, arguant d'une pauvreté résiliente, pourraient expliquer aisément que la richesse du pétrole doit revenir aux Guyanais, sans même parler de l'exploitation colonialiste de la métropole. [...] Dès lors, il est urgent pour la France, si elle tient à conserver la Guyane dans la collectivité nationale [...], de prendre un certain nombre de mesures : augmenter rapidement les investissements en Guyane de façon à préparer le territoire à son développement futur ; réfléchir à son dispositif maritime et probablement le renforcer ; appuyer plus que jamais l'éducation. L'arrivée du RSA en Guyane le 1er janvier 2011 est certes une bonne chose, mais je ne suis pas sûr que le symbole soit très fort... (8,5 % de la population touche le RMI). Avec 21 % de la population au chômage, le département ne doit pas être loin du record de France. Et en PIB par habitant [...] la Guyane est dernière nationale. » Il appartient aux pouvoirs publics de tout mettre en œuvre pour remédier à cette situation. 

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