Gare au retour de flamme !
2 juillet 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Saluée comme une victoire par les souverainistes, l'abstention aux élections européennes justifie également les appels en faveur d'une Europe plus fédérale.
Les résultats électoraux se prêtent toujours aux interprétations les plus diverses. À l'issue du scrutin des 6 et 7 juin, Jean Quatremer saluait « l'Europe, grand vainqueur des élections en France », tandis que Le Salon Beige pointait « un désaveu pour l'UE ».
L'abstention massive (59,37 % des inscrits) réjouit naturellement les souverainistes. Les enquêtes d'opinion pourraient toutefois les faire déchanter. Le tableau est nuancé : 80 % des Français seraient favorables à la construction européenne, mais 26 % la percevraient comme « une menace pour notre identité » ; 78 % considéreraient qu'elle « les rend plus forts face au reste du monde », mais 62 % estimeraient qu'elle « coûte cher à la France » ; enfin, 6 % réclameraient la dissolution de l'UE (1).
Quoi qu'il en soit, l'abstention doit être invoquée avec prudence. En effet, comment peut-on l'expliquer ? Sans doute par le peu d'implication de l'Union européenne dans les politiques de redistribution sociale cristallisant les clivages partisans ; ainsi que par la faible "personnification" des enjeux : le vote des électeurs peut influencer la composition de la Commission, mais sa désignation demeure l'apanage des États. Autant de "maux" que les fédéralistes aspirent à corriger : l'abstention serait vraisemblablement endiguée par un accroissement des compétence de l'UE et une émancipation – peu réaliste selon nous - de la Commission et du Parlement.
En attendant, la transposition du formalisme parlementaire au niveau communautaire apparaît aberrante à bien des égards. Les journalistes de Libération posent parfois de bonnes questions (2) : « On peut dès lors se demander s'il était bien nécessaire de faire élire au suffrage universel direct le Parlement européen : en déséquilibrant une construction qui a été pensée dès l'origine comme une union d'États et dont la légitimité démocratique s'exerçait uniquement au second degré, cette innovation a sans doute concouru à renforcer le sentiment que l'Union souffrait d'un grave déficit démocratique. » Selon Jean Quatremer, « le seul moyen d'y remédier ne serait évidemment pas de revenir en arrière, cela étant démocratiquement inacceptable, mais de créer un véritable État fédéral ». De notre point de vue, cependant, qu'importe la démocratie !
(1) Enquête réalisée du 28 avril au 5 mai par Efficience 3 pour la Représentation en France de la Commission européenne.
(2) Coulisses de Bruxelles, 11/05/09.