Singularité francophone du Vietnam
18 octobre 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Devenu un partenaire stratégique de Paris, Hanoï est résolument engagé dans la francophonie.
Vendredi 4 octobre 2013 s'est éteint le général Giáp, héros de l'indépendance du Vietnam, dont le Premier ministre, M. Tan Dung, venait d'effectuer une visite en France. À cette occasion, un "partenariat stratégique" a été signé entre Paris et Hanoï. « Le Vietnam est un partenaire [...] particulièrement cher à la France », a martelé Jean-Marc Ayrault. « D'abord en raison de l'histoire entre nos deux pays », a-t-il expliqué, mais aussi du fait « de notre appartenance commune à la Francophonie ». Comme le souligne Pierre Journoud, chargé d'études à l'Irsem (Institut de recherche stratégique de l'École militaire), le Vietnam « a été l'un des rares en Asie, sinon le seul, à jouer avec autant de persévérance la carte de la Francophonie politique, dans sa double dimension bilatérale et multilatérale ».
La langue française vecteur du désenclavement
On compterait aujourd'hui 623 000 francophones au Vietnam, représentant 0,7 % de la population. « On ne saurait [...] voir dans la modestie du nombre de locuteurs de français au Vietnam qu'un lent et inexorable déclin depuis la fin de l'ère coloniale », soutient Pierre Journoud. « Du point de vue purement comptable, la tendance globale paraît même plutôt favorable depuis la fin de la guerre froide : les francophones étaient estimés à 70 000 personnes en 1990, d'âge généralement élevé, soit seulement 0,1 % de la population... Plus surprenant, le nombre d'apprenants de français était moins élevé à l'époque coloniale qu'aujourd'hui. » « Résolument engagée dans la francophonie », la République socialiste du Vietnam « a renoué par étapes avec la coopération culturelle et linguistique avec la France, avant de marquer son adhésion à la Francophonie institutionnelle » en 1970. Dans les années quatre-vingt-dix, Hanoï « a fait de la langue française l'un des vecteurs de son désenclavement ». Il a d'ailleurs proposé que le français devienne la seconde langue de travail de l'Asean (Association des nations de l'Asie du Sud-Est).
« Le Vietnam n'est pas francophone, au sens linguistique », souligne encore Pierre Journoud, « mais la volonté que ses dirigeants ont jusqu'à présent manifestée, malgré bien des obstacles, de nourrir une francophonie de qualité et de valoriser la Francophonie institutionnelle témoigne de leur conviction que celle-ci peut servir les grands objectifs de leur politique étrangère : favoriser l'insertion régionale et internationale du Vietnam ; renforcer le glacis stratégique que tente de se constituer ce pays qui a dû affronter par les armes les ambitions impérialistes de la France, des États-Unis... et de la Chine. » Preuve que le français na pas dit son dernier mot !