Prostitution : de l'idéal à la pratique
17 juillet 2014
Article publié dans L'Action Française 2000
L'abolition de la prostitution, en discussion au Parlement, se traduira-t-elle dans les faits ?
Approuvée l'année dernière par l'Assemblée nationale, la proposition de loi « renforçant la lutte contre le système prostitutionnel » a été vidée de sa substance, mardi 8 juillet 2014, par une commission du Sénat. Auparavant, son inspiration abolitionniste n'en avait pas moins été soutenue par la délégation aux droits des femmes de la haute assemblée.
Posture morale
Celle-ci « conteste le "droit" qu'auraient les femmes de se vendre et celui [...] qu'auraient les hommes de les acheter », a expliqué Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur d'un rapport d'information rédigé en son nom. Robert Badinter est apparu bien isolé, lui qui, lors d'une audition, « a fait valoir que le droit pénal n'avait pas à intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles entre adultes consentants, qui constituait un élément de la liberté individuelle ». « Il n'est pas tolérable qu'un être humain achète les services sexuels d'un autre être humain », a tranché Mme Gonthier-Maurin. À ses yeux, la « valeur pédagogique de la loi est suffisamment importante en soi pour justifier la mise en œuvre de la pénalisation du client en France ».
Des ébats en public
Qu'en sera-t-il en pratique ? Parmi les prostituées dites "traditionnelles", à l'image de celles, françaises, officiant dans le deuxième arrondissement de Paris, toutes ne s'inquiètent pas du processus législatif en cours. Leur activité n'est pas en cause, leur auraient assuré les forces de l'ordre. Ce sont leurs collègues étrangères qui seraient visées. Celles qui leur succèdent sur le trottoir, une fois la nuit tombée, au grand dam des riverains, indisposés par leurs discussions volubiles, et parfois confrontés à des ébats sexuels sur leur pallier d'immeuble.
Autrement dit, agitée avec discernement, la menace pesant sur les clients serait censée contribuer à préserver la tranquillité publique. Tout comme l'existence du délit de racolage passif, bientôt abrogé, donnait un prétexte aux policiers soucieux, le cas échéant, de soustraire une femme à son proxénète le temps d'un interrogatoire, sans nécessairement engager des poursuites à son encontre. À la faveur du changement de majorité, l'idéalisme de la gauche s'est effectivement substitué à la posture répressive de la droite. Mais dans un cas comme dans l'autre, peut-être ne s'est-il jamais agi que d'un habillage...