Féminisme diplomatique
19 octobre 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
Faciliter l'accès à la contraception et à l'avortement dans le monde : tel est l'objectif de la France, qui a présenté une stratégie à cet effet.
L'action extérieure de la France « sur les enjeux de population,
de droits et santé sexuels et reproductifs
» fait l'objet d'une
« stratégie
» pour 2016-2020 qui vient d'être présentée
le 4 octobre 2016. « Aujourd'hui encore
», déplorent
Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du Développement
international, et André Vallini, secrétaire d'État chargé du Développement
et de la Francophonie, « plus de trois cent mille femmes dans le
monde meurent chaque année de complications liées à la grossesse ou à
l'accouchement
» ; ce serait même la première cause de
mortalité des adolescentes en Afrique. « Il ne s'agit pas
seulement de donner accès à des services de planification familiale ou à
des produits contraceptifs
», expliquent-ils, « mais de
soutenir des politiques de développement fondées sur les droits
individuels, à travers l'amélioration de la législation et des
politiques familiales et l'évolution des normes sociales
».
Priorité donnée à l'Afrique
Huit pays retiennent plus particulièrement l'attention du Quai
d'Orsay : Bénin, Côte d'Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal, Tchad
et Togo. En 2014, dans un cadre bilatéral, 55 millions d'euros ont
été consacrés à la « santé sexuelle et reproductive
».
Les sommes transitant via des canaux multilatéraux sont plus
importantes : 330 millions d'euros cette année-là. Le ministère
des Affaires étrangères (MAE) rapporte, par exemple, que « la
France finance des projets au Cameroun, au Sénégal et au Togo qui visent
à lutter contre les violences liées au genre en milieu scolaire
» ;
« ces projets contribuent au déploiement d'environnements
scolaires sûrs, inclusifs et propices à l'égalité entre les filles et
les garçons
», se félicite-t-il, sans autre précision.
Long d'une trentaine de pages, son « rapport de stratégie
»
s'avère tout aussi indigent quant à l'exposé des motifs susceptibles de
légitimer pareille politique. S'agit-il de promouvoir des valeurs ?
Le Gouvernement hésite à l'assumer, récusant toute volonté d'« ingérence
» ;
« garantir des droits sexuels et reproductifs
[...] c'est
sauver des vies
», se justifie-t-il. S'agit-il plutôt de
contribuer au développement de l'Afrique ? « La pression
démographique qui pèse sur les secteurs sociaux (éducation, emploi,
santé) et sur la gestion du foncier (géographie et dynamique du marché
agricole) est un facteur d'instabilité (conflits sociaux, migrations
internes, insécurité alimentaire) et fragilise la gouvernance des États
»,
souligne effectivement le MAE.
Enjeux démographiques
« La croissance démographique
[...] est bien sûr une
promesse pour l'avenir, mais aussi un facteur de risque pour la
stabilité du continent où la prévalence des grossesses adolescentes est
la plus importante du monde
», expliquent encore Jean-Marc
Ayrault et André Vallini. Cela étant, « plus aucune politique de
population ne peut freiner ce qui se passe en Afrique
»,
prévient Dominique Kerouedan, docteur en médecine, titulaire de la chaire
"Savoirs contre pauvreté" du Collège de France en 2012-2013. De son point
de vue, « l'enjeu est plutôt de se préparer et accompagner les
pays à assimiler le passage de un à deux milliards d'habitants sur le
continent, dont une immense partie est composée de jeunes
».
Bien qu'il prétende le contraire, le Gouvernement « n'a jamais eu
aucune action sérieuse ni financement conséquent sur ces sujets
»,
nous a-t-elle affirmé. En définitive, peut-être ce semblant de stratégie
contribuera-t-il surtout à rassembler le Gouvernement, sa majorité et ses
électeurs dans un combat qui leur est cher...