Aberrations égalitaires
5 novembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
La loi sera aménagée pour préserver la retraite des mères de famille et se conformer à la jurisprudence. Cela en application d'un principe égalitaire que nous récusons.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010 comporte un article réformant la majoration de durée d'assurance (MDA) pour enfant accordée aux mères relevant du régime général. Dans un rapport d'information rédigé au nom de la délégation "aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes", Mme Marie-Jo Zimmermann, député de la Moselle, rappelle que « ces majorations sont aujourd'hui de huit trimestres par enfant élevé. Elles bénéficient à la quasi-totalité des mères et comptent pour une part très importante (de l'ordre de 20 %) dans les montants des retraites des femmes, montant qui demeure malgré ces effets correctifs bien inférieur à celui des pensions des hommes. »
Les statistiques sont édifiantes : en 2004, les femmes recevaient une retraite inférieure en moyenne de 38 % à celle des hommes, au montant d'autant plus faible qu'elles avaient eu d'enfants. Ceux-ci affectent évidemment leur carrière professionnelle (82 % des travailleurs à temps partiel sont des femmes) ; en revanche, leur présence « peut même avoir plutôt un effet positif [sur celle des hommes] par l'image de responsabilité qu'elle confère au père ».
Discrimination
Dans ces conditions, remarque Mme Zimmermann, « la majoration de durée d'assurance apparaît bien comme un élément essentiel pour préserver une particularité française, la conjugaison d'un fort taux d'activité féminine avec une fécondité [relativement...] dynamique ». Une majorité de parlementaires partagent sans aucun doute son point de vue. Mais le législateur doit compter avec la Cour de cassation, dont l'arrêt du 19 février dernier imposait d'étendre aux hommes le bénéfice des MDA. Une perspective évidemment insupportable pour les finances publiques. À l'avenir, l'essentiel des majorations pourra donc être attribué à la mère ou au père, ou bien partagé entre eux. Outre des conflits entre les parents, le député craint « le risque d'entraîner des choix d'opportunité sans lien avec la finalité de la majoration et qui se révèleront pénalisants pour les mères ».
Un nouveau mensonge
Au moins le dispositif sera-t-il sauvegardé. Solution bancale apportée à un problème strictement juridique ? Pas tout à fait, car l'évolution de la jurisprudence n'est pas hermétique à celle des mentalités. L'entrée en vigueur de la Convention européenne des droits de l'homme, sur laquelle s'est appuyée la Cour de cassation, ne remonte-t-elle pas à 1953 ? Si le rapport fustige « une vision étroite du principe d'égalité », il n'en conteste pas les fondements. Selon Mme Zimmermann, en effet, « les majorations de durée d'assurance, comme les autres droits familiaux, ont pour objectif de corriger les effets sur les pensions de retraite des inégalités professionnelles subies par les femmes. Elles ont donc, en principe, vocation à disparaître au fur à mesure que la situation des hommes et des femmes se rapprochera. »
Or, au regard du bien commun, il ne convient pas seulement de "compenser" les sacrifices consentis par les mères, mais aussi d'encourager l'accueil des enfants. Sans quoi, homme ou femme, chacun devra s'accommoder demain d'une retraite de clopinettes ! En réalité, « l'égalité ne peut régner nulle part », observait Charles Maurras, « mais son obsession, son désir, établissent un esprit politique directement contraire aux besoins vitaux d'un pays » (Mes Idées politiques).
Peut-être faut-il le rappeler ? Les hommes ne portent pas d'enfants... ; le bon sens voudrait qu'on en tire quelque conséquence. « Dans un État puissant, vaste, riche et complexe comme le nôtre, chacun assurément doit avoir le plus de droits possible », poursuit le maître de l'AF ; « mais il ne dépend de personne de faire que ces droits soient égaux quand ils correspondent à des situations naturellement inégales. Quand donc, en un tel cas, la loi vient proclamer cette égalité, la loi ment, et les faits quotidiens mettent ce mensonge en lumière. » Mme Zimmermann juge « indispensable de fixer un pourcentage minimum de membres du sexe sous-représenté au sein des conseils d'administration et des conseils de surveillance pour les sociétés cotées en bourse » ; ces quotas ne seraient qu'un nouveau mensonge.