Voyage en Polynésie

5 mars 2010

Une "mission exploratoire" s'est rendue en Polynésie française du 31 octobre au 6 novembre 2009. Elle portait sur la création d'une agence d'urbanisme et la redynamisation de sites de défense. Son rapport a été publié par la Documentation française le 23 février. En voici un aperçu.

« Le modèle de développement de Tahiti [...] serait proche d'une rupture », affirment Patrick Albrecht, Patrick Cunin et François Wellhoff. Leur constat semble alarmant : « L'île regroupe plus des trois quarts de la population polynésienne sur une bande étroite entre la mer et la montagne. La croissance démographique a été soutenue, due à un taux de natalité élevé et à une migration depuis les autres archipels. Il en résulte une urbanisation désordonnée et proliférante de l'ensemble de la plaine côtière autour de Papeete, fruit d'un aménagement privé d'opportunités foncières. Alors que les besoins fonciers restent forts, l'urbanisation a atteint ses limites : étalement urbain y compris sur les piémonts, asphyxie de la circulation automobile, quartiers d'habitat insalubre, absence de réseaux collectifs d'assainissement... Une difficulté supplémentaire pour la Polynésie est son étendue, équivalente à celle de l'Europe. L'accès aux soixante-seize îles habitées est problématique. La majorité des archipels n'ont pas de réseau d'eau potable ni d'assainissement, l'habitat y est sans confort, les zones agricoles ne sont pas équipées. »

Dans ce contexte, alors que la fréquentation touristique aurait chuté d'un quart en 2009,  une réduction de moitié des effectifs militaires stationnés en Polynésie est programmée. Cela n'ira pas sans conséquences économiques et sociales, préviennent les rapporteurs. qui ont reçu les maires des six principales communes affectées par les restructurations : Faa'a, Papeete, Pirae, Arue, Mahina et Taiarapu-Est. Lesquels auraient des opportunités à saisir. En effet, la « densification des sites militaires » permet d'envisager la cession d'une vingtaine d'hectares sur Tahiti à partir de 2011. Or, « le maire de Mahina attend depuis fin 2007 un accord formel du ministère de la Défense pour réaliser une station d'épuration communale ». Plus généralement, de nouvelles voies s'ouvrent ainsi au développement économique.

Reste à mettre en place la "gouvernance" adéquate. « La récente instabilité politique du Pays n'a pas été favorable à la mise en perspective des projets et a créé un obstacle à la continuité de l'action publique », déplorent les rapporteurs. « Pourtant dépasser le court terme est indispensable pour affronter la triple crise économique, sociale et écologique (pollutions) qui menace l'avenir de ce "paradis terrestre". » Cela suppose « un fort partenariat entre les responsables du Pays (défenseurs, vis-à-vis de l'État, de leur large autonomie), les élus communaux (détenteurs de peu de leviers d'intervention mais proches de leurs concitoyens) et l'Etat représenté par le Haut-Commissariat ».

Saluant une « nouvelle volonté de coopération », la mission se veut optimiste. Mais il ne faudra pas décevoir, « car un échec des dispositifs envisagés alimenterait une fois de plus le scepticisme des acteurs publics et des citoyens sur la possibilité de mener en Polynésie des démarches durables ». Affaire à suivre.

Laissez un commentaire