Féminisme technocratique

7 janvier 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

La Commission européenne convoque le féminisme au service de la croissance.

« L'égalité entre les femmes et les hommes est une priorité pour notre pays et pour l'Union européenne », proclame le président du gouvernement espagnol. Sans doute José Luis Rodríguez Zapatero a-t-il accueilli avec bienveillance le rapport publié le 18 décembre par la Commission européenne. « L'égalité des sexes n'est pas seulement une question de diversité et d'équité sociale », affirme-t-on à Bruxelles. Elle constituerait aussi « une condition préalable à la réalisation des objectifs de croissance durable, d'emploi, de compétitivité et de cohésion sociale ». Pour preuve, la participation croissante des femmes au marché du travail serait « à l'origine d'un quart de la croissance économique annuelle depuis 1995 ».

Des États sceptiques ?

« Les investissements dans les politiques égalitaires sont payants », martèle le rapport. Mais tous les États n'en sont pas convaincus : examinant les mesures nationales de lutte contre la crise, la Commission pointe « le risque de détérioration du statut des politiques égalitaires ». La tentation serait d'autant plus grande d'y renoncer que les femmes sembleraient moins affectées par le conjoncture économique. Mais le taux d'emploi des hommes se redresserait plus rapidement.

Constatant l'« influence marquée de la parentalité [sic] sur la participation au marché du travail », la Commission stigmatise le « partage traditionnel des rôles », mais aussi le « manque de structure d'accueil pour les enfants ». En conséquence, elle réclame « des politiques et des incitations pour persuader les hommes et leur permettre d'assumer une plus grande part des tâches familiales » ; ce serait même « un défi majeur à relever ». Plus raisonnablement, elle souligne que « l'absence de mesures adéquates permettant de trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie familiale peut [...] inciter les femmes et les hommes à ne pas avoir d'enfants ou à en avoir moins, ce qui pose problème eu égard au vieillissement de la population ».

Fait remarquable : « Dans les pays où les conditions sont favorables s'agissant des services de garde d'enfants, des systèmes de congé parental et des régimes de travail flexibles, le taux d'emploi des femmes et le taux de natalité sont tous les deux plus élevés. » Ayant réconcilié en apparence féminisme et natalité, Bruxelles ne craint pas d'affirmer qu'« au besoin, il conviendrait de [...] supprimer les éléments financiers qui dissuadent les seconds titulaires de revenus [...] de travailler ».

Incohérence

Ce rapport, nourri d'idéologie, n'est pas sans présenter quelque incohérence. Saluant la réforme du congé parental, la Commission observe qu'elle encouragera les pères à profiter de cette possibilité. Une perspective manifestement contraire à l'objectif assigné par ailleurs à l'égalité des sexes, censée « permettre aux États membres d'exploiter pleinement l'offre potentielle de main d'œuvre ».

2 commentaires pour "Féminisme technocratique"

  1. Catoneo

    Le 7 janvier 2010 à 17 h 15 min

    Je ne comprends pas cette propension de la Communauté européenne à s'embringuer dans le débat sociétal des états membres.
    A moins qu'il ne s'agisse que d'influencer la politique belge ...

  2. GD

    Le 8 janvier 2010 à 2 h 36 min

    Je ne comprends pas non plus, mais la Commission n'est pas seule en cause : ces préoccupations apparaissent également dans les conclusions des Conseils européens. Quant à l'Espagne, elle a même érigé la lutte contre la violence faite aux femmes en priorité de sa présidence du Conseil, dont elle voudrait que les citoyens européens (« considérés comme tels », soit dit en passant) observent les bénéfices concrets. Si cette préoccupations-là me semble légitime, j'imagine en revanche qu'il est aberrant de vouloir en faire un enjeu communautaire...

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