Le "colbertisme" en débat

4 mars 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Nicolas Baverez fustige « la renaissance du colbertisme » qu'il juge « meurtrière pour l'industrie ».

Nicolas Baverez s'attaque au colbertisme. Fidèle à sa réputation – on le range volontiers parmi les "déclinologues" –, il dresse le sombre tableau d'une industrie française « naufragée et menacée de mort » : « La production et l'investissement manufacturiers se sont effondrés de 13 % en 2009 », écrit-il dans Le Point du 25 février, « tandis que 196 000 postes de travail disparaissaient, soit 42 % des suppressions d'emplois, alors que le secteur n'occupe plus que 11 % de la main d'œuvre ».

Constatant « un retour en force de l'État dans l'industrie » à la faveur de la crise, il juge l'intervention des pouvoirs publics « parfaitement légitime pour contenir l'arrêt simultané de la demande privée et du crédit en 2008 comme pour secourir les secteurs sinistrés ». À ses yeux, cependant,  « la renaissance du colbertisme se révèle meurtrière pour l'industrie. Le protectionnisme vaut condamnation à mort de notre industrie, affirme-t-il, alors que les groupes qui résistent le mieux, tels Total, Air liquide, Schneider ou L'Oréal, sont les plus internationalisés. La centralisation de la politique industrielle entraîne les dirigeants à faire le siège des antichambres parisiennes au lieu de définir une stratégie. Les interventions publiques échappent à toute cohérence. [...] Enfin, l'État se montre le pire des actionnaires. [...] Loin d'inscrire la stratégie dans la durée, il ne cesse de la déstabiliser : l'assujettissement de l'intérêt social des entreprises publiques aux contingences gouvernementales se résume à un abus de bien social permanent. La politique industrielle est indispensable [...] mais mérite d'être repensée. L'objectif central doit être l'insertion dans la mondialisation et la réponse au défi de la concurrence des émergents. »

Un objectif évidemment débattu, dont la poursuite pourrait être assimilée à un renoncement par les pourfendeurs du mondialisme. Soulignons, quoi qu'il en soit, l'inconséquence du gouvernement qui plaide en faveur d'une libéralisation accrue des échanges dans les arcanes internationaux, mais flatte la CGT qui s'oppose à "l'ajustement" des capacités de raffinage de Total. Bel exemple de schizophrénie, peut-être inévitable à l'approche des élections régionales.

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