Brèches à foison dans l'UE

15 septembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Le navire européen prend l'eau de toutes parts. En dépit du zèle manifesté par le Parlement français, la mise en œuvre du "plan de sauvetage" de la Grèce, arrêté en juillet dernier, n'est pas assurée.

Un timide soulagement s'est emparé des capitales européennes dans la matinée du 7 septembre. Ce jour-là, le tribunal constitutionnel allemand a validé (entre autres) la création du Fonds européen de stabilité financière (FESF) – le principal instrument dont se sont dotés les États européens pour combattre la crise des dettes souveraines.  « Andreas Vobkuhle, le président de la cour de Karlsruhe [...] a toutefois insisté sur la nécessité pour le Bundestag d'exercer l'entièreté de ses compétences budgétaires, et de ne jamais y renoncer », rapportent Les Échos. « Il a précisé que le gouvernement doit solliciter l'approbation de la commission budgétaire du Bundestag pour toute nouvelle aide. »

Calendes grecques

Cette inclination à protéger les prérogatives d'un parlement national est volontiers montrée en exemple par les souverainistes républicains : ils y voient, naturellement, un garde-fou contre les velléités fédéralistes de l'Union européenne. Mais c'est aussi un frein à l'action du gouvernement, dont les marges de manœuvre se trouvent réduites dans les négociations internationales. De fait, les considérations de politique intérieure pourraient ruiner le travail des diplomates qui s'évertuant, bon an, mal an, à échafauder le "sauvetage" de la Grèce. Outre la volte-face d'Helsinki, on signalera la défiance de Bratislava, tout disposé à reporter aux calendes grecques, justement, le renforcement du FESF : la Slovaquie sera le dernier État de la zone euro à voter le nouveau plan d'aide à Athènes, a annoncé le Premier ministre Iveta Radicová.

Ce projet, dévoilé le 21 juillet, sera-t-il jamais ratifié par chacune des parties ? Le cas échéant, l'impact à court terme sera limité pour les finances publiques de la France. En effet, sa contribution ne se fera pas sous forme de liquidités, mais par un apport de garanties au FESF, en charge d'émettre les obligations qui lui permettront, ensuite, de prêter lui-même à la Grèce. Toutefois, expliquent Les Échos, « la dette publique brute de la France sera augmentée à mesure des émissions du FESF, ce qui représentera près de 15 milliards d'ici à 2014 (0,7 % de PIB), auxquels il faut ajouter le premier plan d'aide ainsi que les émissions au bénéfice de l'Irlande et du Portugal ». Au total, l'aide apportée aux pays en difficulté devrait représenter 40 milliards d'euros, soit 2 % du PIB, selon le député UMP Gilles Carrez, rapporteur du collectif budgétaire.

Un cap impossible

Outre la volonté idéologique de "sauver l'euro", celle d'éviter un "saut dans l'inconnu" peut motiver cette démarche. D'autant que les banques françaises sont parmi les plus exposées à la dette hellène. Mais encore faudrait-il s'accorder sur un cap à moyen terme, sans quoi la confiance sera bien difficile à rétablir, quelles que soient les sommes déversées dans le tonneau des Danaïdes. Étant donné la prégnance du fait national et l'interférence des échéances électorales, peut-être cela s'avère-t-il impossible ? Telle est la conviction qui pourrait bien gagner l'Europe. En tout cas, certains tabous sont en passe d'être brisés : le gouvernement allemand étudierait désormais l'hypothèse d'un retour au drachme, affirment nos confrères du Spiegel.

Peut-être s'agit-il d'une rumeur délibérément diffusée afin d'exercer une pression sur Athènes. Quoique les circonstances y suffiraient vraisemblablement : la Grèce pourrait se trouver à court de liquidités dès le mois prochain. On devine la tension qui doit animer les discussions avec la BCE et la Commission européenne, suspendues quelques jours durant à l'occasion d'un différend... Des dissensions se font jour de toutes parts – jusque dans les couloirs feutrés de la Banque centrale européenne ! Alors que les ministres des Affaires européennes des Vingt-Sept se réunissaient à Bruxelles lundi dernier, 12 septembre, les représentants de sept États sont montés au créneau pour dénoncer leur mise à l'écart des négociations portant sur la réforme de l'Union économique et monétaire. « Nous sommes insatisfaits de la rencontre Merkel-Sarkozy et de ses effets », a même déclaré Donald Tusk, le chef du gouvernement polonais, qui attendait – « et attend toujours » – « des décisions beaucoup plus fermes ».

Serait-il déçu par la règle d'or promise par le président de la République ? D'autres ont déjà manifesté leur scepticisme à ce propos, tel Herman Van Rompuy, le président du Conseil européen. Fidèle à la mission que lui assigne son mandat, il exhorte néanmoins les responsables européens à serrer les rangs. En vain. Reste la proposition de l'Allemand Günther Oettinger, commissaire européen en charge de l'Énergie : selon lui, il conviendrait de mettre en berne, à l'abord des édifices communautaires, les drapeaux des États sortant des clous du Pacte de stabilité. Voilà qui devrait nous tirer d'affaire.

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