Chronique parlementaire

3 novembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Fidèles à leurs habitudes, les parlementaire s'immiscent dans les mœurs et malmènent la mémoire.

Parmi les dernières propositions de loi déposées au Parlement, on relève celle de Jean-Marie Sermier, député UMP du Jura, qui entend lutter contre « l'outrage aux symboles de la République ». Ce faisant, il fait planer une menace sur les royalistes caricaturant Marianne...

Rebondissant sur l'affaire Baby Loup (du nom d'une crèche où travaillait une employée voilée), Françoise Laborde, sénateur PRG de Haute-Garonne, se fait le chantre de la laïcité : elle demande que « l'obligation de neutralité » soit étendue aux structures privées en charge de la petite enfance.

La parité n'est pas en reste. Tandis que Jean Louis Masson (ex-UMP) se mobilise au Sénat, Chantal Brunel (UMP) mène le bal à l'Assemblée, dans l'espoir que l'"égalité professionnelle" soit érigée en « grande cause nationale ».

Adeptes de la repentance, divers sénateurs se sont manifestement divisés quant au contenu du texte à déposer à l'approche du 17 octobre, date anniversaire de la manifestation de 1961. « Les hommes qui manifestaient à mains nues furent molestés, torturés et massacrés. Des coups de feu furent tirés. Loin de la "bavure", cette action était préméditée et coordonnée », soutient la communiste Nicole Borvo Cohen-Seat. Employant des termes plus durs encore, sa collègue écologiste Esther Benbassa pointe carrément un « un crime d'État ».

« La France est dans la merde »

27 octobre 2011

Au micro de RFR, rebond sur la polémique déclenchée par le spectacle de Romeo Castellucci.

La France est dans la merde ! Pire : elle s'y complait. C'est en tout cas le message que pourraient porter les militants d'Action française, après leur coup d'éclat de jeudi dernier. Le 20 octobre, donc, il se sont retrouvés aux prises avec les forces de l'ordre, peu disposées à tolérer leur présence place du Châtelet, dans le 1er arrondissement de Paris, à l'entrée du théâtre de la Ville.

On joue là-bas Sur le concept du visage du fils de Dieu, un pièce qui plonge le spectateur littéralement dans la merde, sous le regard du Christ dont un portrait domine la scène. C'est une représentation coprodruite par le théâtre de la Ville, dont le financement repose, dans une large mesure, sur des deniers publics. En l'occurrence, une subvention de la ville de Paris, dont le montant se serait élevé en 2007 à 10,7 millions d'euros. Naturellement, en pleine crise de la dette souveraine, on peut s'interroger sur la pertinence d'un tel investissement.

Quitte à chahuter le spectacle pour des motifs  politiques, poser ce genre de question, ce serait peut-être plus intelligible que de crier au « blasphème » censé insulter la nation tout entière. Quant à la "christinophobie", dont je ne parlerai pas sans guillemets, on en mesure la prégnance à la lecture du constat selon lequel il serait désormais « risqué d'être chrétien et de le proclamer », et cela « que ce soit au Caire ou à Paris ». Les coptes apprécieront, sans nul doute, cet élan de solidarité.

C'est l'art contemporain qui est en cause. Avec sa fascination pour les selles et autres déjections, sa soif de cocktails détonants ! Ce qui n'exclut pas, dans le cas présent, un message « spirituel et christique », selon l'auteur de la pièce. Bien au contraire ! « Ce spectacle est une réflexion sur la déchéance de la beauté, sur le mystère de la fin », explique Romeo Castellucci. « Les excréments dont le vieux père incontinent se souille ne sont que la métaphore du martyre humain comme condition ultime et réelle. Le visage du Christ illumine tout ceci par la puissance de son regard et interroge chaque spectateur en profondeur. »  

Cela me laisse pour le moins perplexe, mais je suis tout disposé à croire en la sincérité des propos. De la même façon, en photographiant un crucifix baigné dans l'urine, Andres Serrano a prétendu rappeler « par quelle horreur le Christ est passé ». Qu'importe les intentions, me direz-vous. Effectivement : « Aucune origine n'est belle. La beauté véritable est au terme des choses. »

Sauf que les adeptes de la "christianophobie" s'érigent non seulement en victimes, mais aussi en cibles, puisqu'ils prétendent faire l'objet d'une "phobie" particulière. L'analogie avec l'"homophobie" n'est pas gratuite, loin s'en faut : dans un cas comme dans l'autre, le terme est le produit d'une certaine propagande, et sa consécration ouvre la voie à de multiples condamnations. Les activistes catholiques sont manifestement inspirés par la Halde, c'est un comble !

Cela prêterait à sourire, s'il ne fallait craindre un réveil du laïcisme. Déstabilisée par l'islam, la République se montrait déjà mal inspirée... Donner des gages aux bouffeurs de curés arrangera-t-il quoi que ce soit à l'affaire ?

Rendez-vous sur le site de RFR pour découvrir les autres interventions :

http://www.radio-royaliste.fr/

L'islam des bureaux

6 octobre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Se démarquant des chantres de la "diversité", le Haut Conseil à l'intégration pointe les tensions suscitées dans l'entreprise par les revendications religieuses. En réponse, il invoque la sacro-sainte laïcité.

Après avoir agité l'école, les services publics et les crèches, la laïcité suscite le débat dans l'entreprise. « Le paysage a bien changé », observe Jean-Christophe Sciberras, président de l'Association nationale des directeurs des ressources humaines (DRH). Selon lui, « la revendication religieuse se fait plus forte, en raison notamment du recours à une main d'œuvre immigrée, originaire de pays non catholiques, à partir des années soixante ». Les chantiers du bâtiment constitueraient un cas emblématique : « on y observe le plus souvent des équipes constituées par communautés d'appartenance et par affinités religieuses », rapporte le Haut Conseil à l'intégration (HCI). Dans un avis publié le mois dernier, celui-ci ne craint pas d'aborder un sujet « tabou et politiquement incorrect ». D'autant qu'il aurait « toujours considéré la question de la laïcité comme intrinsèquement liée à celle de l'intégration des personnes d'origine étrangère ».

Problèmes concrets

Le service de repas halal, l'aménagement des horaires en vue des prières et l'octroi de congés pour les fêtes religieuses seraient gérés « avec assez de souplesse » dans les grandes entreprises. En revanche, le port de signes religieux, l'ouverture de salles de prière et les relations hommes-femmes seraient plus délicats à traiter. La légalité s'en trouverait bafouée : « Ainsi, tel restaurant ne possède pas de vestiaire pour femmes parce que son patron n'envisage pas d'en embaucher. [Dans] un salon de coiffure strictement réservé aux femmes, l'inspecteur du travail ne peut entrer pour effectuer un contrôle parce que son intervention troublerait leur intimité. »

Deux types de restrictions de l'expression religieuse peuvent être inscrites dans le règlement intérieur des entreprises : elles portent, d'une part, sur les impératifs de sécurité, d'hygiène et de santé et, d'autre part, sur la tâche du salarié définie dans son contrat de travail. « La jurisprudence du "boucher de Mayotte" (arrêt de la Cour de cassation, mars 1998) est claire sur ce point : un salarié boucher de confession islamique demandait, après deux ans de travail, de ne plus avoir à traiter de viande de porc ; l'employeur refuse ; le salarié cesse son travail et invoque un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais le juge estime que "l'employeur ne commet aucune faute en demandant au salarié d'exécuter la tâche pour laquelle il a été embauché". » Par ailleurs, « le juge français a évoqué au cours de plusieurs affaires la relation avec la clientèle pour justifier la restriction du port du foulard par des femmes musulmanes. Ainsi, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (1997) a admis le licenciement pour cause réelle et sérieuse d'une salariée de confession islamique qui refusait d'adopter la tenue conforme à l'image de marque de l'entreprise. »

Tandis que la loi leur interdit de répertorier la religion de leurs employés, patrons et DRH risquent des poursuites judiciaires quand ils refusent de céder à certaines revendications. En effet, « certains seront tentés de lire toute limitation de l'expression religieuse [...] comme une discrimination religieuse, quand bien même cette restriction serait proportionnée et justifiée ». À ce titre, déplore le HCI, « la Halde a participé de cette évolution qui par certains aspects ne favorise guère l'apaisement entre salariés et entre employeur et salariés ».

Sentiment d'injustice

En outre, des accommodements peuvent être perçus comme des privilèges accordés à une minorité : « Si certains sont exemptés de travail le vendredi ou le samedi, serait-ce à dire que d'autres doivent impérativement les remplacer ces jours-là ? Si certains ont des horaires aménagés, pourquoi alors le refuser à d'autres dont les raisons ne seraient pas religieuses mais familiales par exemple ? » Souhaitant palier l'absence de réponses claires et homogènes, le HCI soutient « la mise en œuvre d'un dispositif à la fois législatif et règlementaire ». Aujourd'hui, ces questions seraient traitées au plus près du terrain. Selon le HCI, il conviendrait de promouvoir explicitement « la neutralité religieuse », de façon à « favoriser la qualité du lien social dans l'entreprise ». Concrètement, cela supposerait la révision des règlement intérieurs, et l'organisation de séminaires où serait diffusée la bonne parole républicaine.

« La laïcité est le moyen de faire coexister pacifiquement dans un espace commun une pluralité de convictions », martèle le HCI. C'est ignorer la violence des inventaires, et négliger les instrumentalisations auxquelles se prête un principe ambigu. C'est en son nom qu'on tente, parfois, d'étouffer des traditions façonnées par le christianisme – en allant jusqu'à réclamer que les sapins soient retirés des écoles à l'approche de de Noël ! Mais n'est-ce pas en son nom, également, que le Front national dénonce désormais l'immigration ? « En dehors de Marine Le Pen, plus personne ne défend la laïcité », assure Élisabeth Badinter, dans un entretien accordé au Monde des religions. Le 22 septembre, deux condamnations ont été prononcées par le tribunal de Police de Meaux en application de la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Or, si l'on en croit l'enquête du Guardian, cela ne devrait rien changer au comportement des femmes incriminées. À moins qu'elles renoncent définitivement à sortir de chez elles, confrontées à des injures dont la violence irait croissant. Curieuse façon d'œuvrer à la concorde sociale.

Les vacances, une affaire d'État

4 août 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Les services gouvernementaux veillent sur le bonheur des Français. Pour preuve, ils se soucient de les faire partir en vacances. Cela donne à réfléchir sur les modalités de l'aide sociale.

Parmi les Français, 62 % étaient partis en vacances au cours de l'année passée. Du moins, au sens où l'entend l'Organisation mondiale du tourisme (OMT), qui définit les vacances comme un déplacement d'agrément d'au moins quatre nuits consécutives hors du domicile. Quoique supérieure à la moyenne européenne, cette proportion est jugée insuffisante par le Centre d'analyse stratégique (CAS). Dans une note d'analyse publiée le mois dernier, celui-ci promeut le développement d'« une politique globale de soutien au départ en vacances pour tous ». Cela conformément à la loi selon laquelle, depuis 1998, « l'égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national ».

Psychologie

Les rapporteurs escomptent quelque bénéfices de la multiplication des vacanciers, « tant en matière de bien-être que d'autonomisation, de lien social, de soutien à la parentalité ou de lutte contre l'exclusion ». Autant de préoccupations auxquelles les pouvoirs publics pourraient répondre sans prendre par la main tout un chacun. Les auteurs vont jusqu'à traiter des « barrières psychologiques » faisant obstacle au départ chez les personnes souffrant d'anxiété. C'est dire les dérives auxquelles se prête la politique sociale. Dans le cas présent, elle investit un domaine que nous réserverions à la Santé. Constatant, par ailleurs, que « les propriétaires d'une maison apprécient d'y rester pour faire des travaux ou pour inviter des proches », les rapporteurs en concluent que « la qualité de vie quotidienne influe [...] fortement sur le choix de partir ou non, ce qui pourrait expliquer que les Corses restent deux fois plus chez eux que la population générale ». Le cas échéant, l'État ne devrait-il pas se concentrer sur l'urbanisme et l'organisation du territoire ?

Le CAS lui assigne une autre priorité : « développer le sentiment d'appartenance à un collectif européen », en s'assurant que les jeunes Français aient voyagé au moins une fois dans l'Union européenne avant leurs vingt ans. Peut-être pourrait-on commencer par faire visiter Versailles aux écoliers, quitte à inscrire dans un jumelage ce genre d'initiatives... L'observation suivante nous est apparue plus pertinente : « Indépendamment des structures marchandes, d'autres systèmes se développent grâce à l'internet, à l'image des échanges de maisons et d'appartements entre particuliers. » Un dispositif jugé particulièrement intéressant dans le champ du handicap, où seraient échangés des logements accessibles. Au-delà, on évite l'écueil affectant les infrastructures exploitées en marge des activités lucratives. En effet, « face aux effets d'usure mais aussi à l'évolution des standards de qualité, les structures du tourisme associatif répondent de moins en moins aux attentes de leurs clients : ce serait ainsi près de 40 % du parc immobilier qui nécessiterait des travaux pour un montant estimé à 500 millions d'euros. »

Usine à gaz

Parmi les dispositifs sociaux censés favoriser les départs en vacances, on relève les chèques vacances, les aides des caisses d'allocations familiales, des réductions offertes par la SNCF et de multiples initiatives locales et associatives. Or, « cette diversité de sources de financement et d'offres d'accompagnement [...] présente inévitablement un certain nombre de limites en termes d'accès à l'information et à l'ensemble des droits disponible ». C'est d'ailleurs un problème récurrent en matière sociale. Plusieurs initiatives visent à pallier ces difficultés. Tel le projet "Espace vacances aides au départ" (EVAD), porté par trois associations en Poitou-Charentes, qui devrait se concrétiser par la mise en ligne d'un site Internet, l'installation d'une permanence téléphonique et des campagnes de communication et de formation communes.

Entretenue de la sorte, l'usine à gaz continuera peut-être à tourner des années durant, mais au prix d'une énergie largement dissipée en chaleur. Or, en pleine crise de la dette souveraine, l'État-providence subira vraisemblablement de multiples assauts. Jadis en pointe sur les questions sociales, les royalistes devront se saisir du débat. Peut-être trouveront-ils quelque source d'inspiration dans les propositions de "revenu familial minimum garanti" ou autres "impôt négatif" censés substituer aux minima sociaux une allocation dégressive servie aux plus modestes. Si l'on en croit ses promoteurs libéraux, l'idée fut popularisée dans les années soixante par le cercle des économistes de Chicago, autour de Milton Friedman, le chantre du monétariste. C'est un lourd passif, dont le rappel ne devrait pas faciliter sa diffusion dans l'Hexagone... De toute façon, le gouvernement vient d'annoncer la mise en place imminente d'un tarif social pour l'internet haut débit. Quant aux politiciens en campagne, peut-être montreront-ils la Belgique en exemple : là-bas, l'assurance chômage contribue à financer les congés des jeunes actifs.

Féminisme : surenchère à l'UMP

22 juin 2011

En route pour 2012, l'UMP se penche « sur la place des femmes dans la société ». Inspirées par une idéologie grotesque, ses propositions nourrissent une inquiétude grandissante, tant la folie semble gagner les élites politiques.

À l'approche des élections de 2012, l'UMP s'est fixé « un rendez-vous avec la modernité ». « Depuis 2007 », affirme-t-elle, « le gouvernement et les parlementaires de la majorité [...] ont été très actifs pour défendre et promouvoir l'égalité entre les sexes ». Sans doute cela n'aura-t-il pas suffi aux yeux de Jean-François Copé, chantre notoire de la parité, dont le parti verse délibérément dans la surenchère féministe.

En témoignent les vingt-six propositions présentées lundi dernier (20 juin 2011) « pour arriver enfin à l"égalité ». On y relève quelque écho au récent rapport de l'IGAS sur « sur l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités familiales dans le monde du travail ». En effet, selon l'UMP, « les femmes pourront pleinement investir le marché du travail quand notre vision de la parentalité aura évolué ». Autrement dit, « l'entreprise ne doit plus voir en ses salariés simplement des femmes et des hommes mais plutôt une majorité de mères et de pères [...], tous également susceptibles [...] de prendre un congé parental ».

On nous annonce une profusion de quotas. Afin, par exemple, d'« obliger les administrations à employer 40 % de cadres supérieurs de l'un ou de l'autre sexe d'ici 2015 ». L'UMP envisage même d'ériger la parité en obligation constitutionnelle ! Affichant la volonté de « changer inexorablement les mentalités », elle appelle, sans surprise, à lutter contre les « stéréotypes », accusés de « contrarier les talents et le potentiel de chacune et chacun ». Comme si les personnalités se construisaient sans référence à aucun repère social... Et de pointer les médias, coupables de mettre en scène « un monde binaire, voire archaïque » – rien de moins ! Faudra-t-il interdire d'antenne les femmes racontant leur grossesse avec enthousiasme ? Dans un premier temps, c'est la publicité qu'il conviendrait de mettre sous surveillance, avec « un examen systématique » des campagnes d'affichage.

La proposition la plus effarante vise à « introduire, dès la maternelle, des séances consacrées à la mixité et au respect hommes-femmes ». Avec, pour objectif explicite, « d'amener les enfants à se sentir autorisés à adopter des conduites non stéréotypées ». Autrement dit, à s'émanciper de leur identité sexuelle – de leur nature même ! On nage en plein délire.

L'IGAS veut mettre les pères au foyer

16 juin 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Un rapport officiel promeut l'égalité dans les ménages, avec, pour mesure phare, l'incitation des pères à profiter d'un "congé d'accueil de l'enfant".

En janvier dernier, Mme Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, avait confié à l'Inspection générale des Affaires sociales (IGAS) une mission « sur l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités familiales dans le monde du travail ». Celle-ci vient de lui remettre son rapport, établi par Brigitte Grésy, qui avait signé, il y a deux ans, un « manuel de résistance » contre le « sexisme ordinaire », selon les termes de son éditeur. Cela plante le décor.

Mme Grésy observe que les hommes et les femmes « font l'objet, depuis l'enfance, d'assignations différentes en matière de rôles parentaux ». Lesquelles susciteraient, pour chaque sexe, « enfermement et résistances ». Et de citer les appellations "heure des mamans", "école maternelle", "assistantes maternelles", accusées d'assigner les femmes à la petite enfance. Or, prévient le rapporteur, « l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, et, dans son sillage, l'égalité sociale, ne peut être atteinte tant qu'il y aura inégal partage des responsabilités domestiques et familiales ». Dans ces conditions, « un effort sans précédent » devrait être porté « sur tous les lieux de production et reproduction des stéréotypes sexués, que ce soit les lieux d'accueil collectifs de la petite enfance, l'école ou encore les médias ».

Mme Grésy se fait l'apôtre d'une double émancipation : « émancipation de la sphère privée pour les femmes », mais aussi « émancipation de la sphère publique pour les hommes ». En conséquence, elle formule vingt-cinq propositions, à commencer par la création d'un « congé d'accueil de l'enfant ». S'ajoutant au congé de maternité de douze semaines, il comprendrait huit semaines « à partager également entre les deux parents, non transférables, devant être pris à la suite du congé de maternité, avec un bonus d'une semaine, en cas de prise intégrale de son congé par le père, à prendre indifféremment entre les deux parents jusqu'au un an de l'enfant ». « Pour mieux associer les pères au déroulement de la grossesse de leur conjointe », il est proposé également « de leur ouvrir le droit de l'accompagner, lors des examens médicaux obligatoires ».

« Jouer sur les congés pour les pères est un élément central, en effet, de ce changement de paradigme » appelé par Mme Grésy. « Des études montrent ainsi que la prise de congés par les pères, à la naissance, dans les pays du Nord de l'Europe, a un impact fort, par la suite, sur la redéfinition et la redistribution des tâches domestiques et parentales. » Ce faisant, s'agit-il de répondre aux aspirations des femmes ? Bien qu'elle fustige « une injustice ménagère », Mme Grésy constate que celle-ci n'est pas « ressentie comme telle ». D'ailleurs, souligne-t-elle, le partage des tâches « souhaité dans le dire des femmes [...] est pourtant fragilisé par la toute-puissance de la compétence maternelle ». Et d'évoquer « la bataille autour de l'allaitement maternel et l'assignation, parfois abusive, faite aux jeunes mères de s'y conformer » qui « renforce ce lien d'exclusivité ». S'agit-il alors de répondre aux besoins des enfants ? Pas vraiment. « Les analyses sont, ici, délicates, non seulement parce qu'elles relèvent de champs variés des sciences humaines mais aussi parce que la valorisation du rôle du père auprès des enfants, aux côtés de la mère, risque de porter en elle une vision normative et ne saurait délégitimer d'autres formes d'éducation parentale. » Manifestement, ce rapport promeut l'instrumentalisation des mesures sociales en vue de remodeler les mœurs familiales suivant les canons d'une idéologie égalitariste. Le rapporteur pose « la question d'une immixtion peut-être trop importante de l'entreprise dans la vie privée des individus ». Sans doute devrait-il s'interroger sur celle des pouvoirs publics.

S'ils suivaient ses recommandations, ceux-ci parviendraient-ils au résultat escompté ? L'IGAS nous fournit quelques indices qui permettent d'en douter. La répartition du travail ménager serait caractérisée par « une remarquable stabilité en termes d'investissement temporel ». En outre, « dans les couples où les pères sont au foyer, les femmes qui occupent le rôle de pourvoyeuse de revenu n'abandonnent pas la responsabilité et la charge mentale relatives à la vie domestique et continuent en réalité de gérer une multiplicité de contraintes familiales et professionnelles [...] et les clivages traditionnels persistent ». Comme l'observe Mme Grésy, « l'entrée de la petite enfance dans la culture de la paternité est très récente à l'échelle de l'histoire et fait partie des bouleversements qui modifient les représentations les plus profondes ». Raison pour laquelle on préférera s'en remettre, plutôt qu'au volontarisme idéologique, à la sagesse de l'empirisme organisateur.

Savoir raison garder

16 juin 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Le nucléaire pourrait s'inviter au cœur de la campagne présidentielle. Or, la politique énergétique suppose des arbitrages difficiles. D'autant qu'il faut compter avec l'émotion et le "principe de précaution".

La Suisse et l'Allemagne avaient ouvert la voie ; l'Italie les a suivies : à l'occasion d'un référendum organisé les 12 et 13 juin, elle a exclu de revenir au nucléaire civil, à la faveur de 94 % des voix. Ce résultat, typique d'une république soviétique, souligne combien les démocraties occidentales sont sensibles à l'émotion – sinon soumises à sa dictature.

Pas de moratoire

En France, la catastrophe de Fukushima a ravivé la défiance à l'égard de l'atome, quoique celle-ci demeure bien moindre que chez nos voisins. Pour Nicolas Sarkozy, c'est l'occasion de revêtir ses nouveaux habits d'homme d'État : « Nous sommes les héritiers d'une histoire qui ne nous appartient pas », a-t-il déclaré le mardi 7 juin. « Je n'ai pas été élu pour détruire une filière industrielle qui crée de l'emploi, de la compétitivité et de l'indépendance énergétique. Il est extrêmement important d'avoir du sang-froid en toute chose. » (Les Échos, 08/06/2011)

De fait, aucun moratoire ne devrait interrompre la construction de deux EPR dans l'Hexagone. Anne Lauvergeon, le P-DG d'Areva, affiche un optimisme mesuré : « les projets de réacteurs nucléaires en cours d'examen seront retardés de six à neuf mois environ », a-t-elle prévenu (BFM Business, 30/05/2011). À moyen terme, peut-être son groupe profitera-t-il d'exigences de sécurité renforcées de part le monde. Paris milite de longue date en ce sens. Il l'a confirmé le 7 juin, en accueillant, dans la foulée du G8 de Deauville, un séminaire ministériel sur la sûreté nucléaire, où trente-trois pays étaient représentés. On parle, notamment, de développer les revues périodiques par les pairs. Étant donné les difficultés rencontrées par les Européens pour s'accorder sur des "tests de résistance", peut-être ce projet réclamera-t-il quelque habileté diplomatique pour être mis en œuvre.

Modèle français

Dominique Louis, président du directoire d'Assystem France, soutient que l'industrie « doit s'appuyer sur une autorité de sûreté nucléaire très forte, sur le modèle français ou américain, ainsi que sur un nombre limité d'opérateurs nucléaires pérennes et transparents » (Les Échos, 24/05/2011). Il établit une comparaison saisissante : «  En France, les cinquante-huit réacteurs sont opérés par un seul exploitant – EDF – autour de procédures de sécurité communes et partagées par l'ensemble des centrales. Un incident sur un réacteur fera l'objet d'une procédure de sécurité sur l'ensemble des autres réacteurs du même type. Le Japon, pour cinquante-quatre réacteurs, dénombre pas moins de onze exploitants, disposant chacun de ses propres procédures. [...] Par ailleurs, les récentes annonces de Tepco nous permettent de sérieusement douter de la solidité capitalistique, de la gouvernance et de la pérennité industrielle des opérateurs nucléaires japonais. Ces difficultés structurelles se reflètent dans la disponibilité du parc nucléaire japonais. Depuis 1998, elle a constamment chuté jusqu'à atteindre en 2009 moins de 60 % du potentiel de production, à comparer à une disponibilité supérieure à 75 % en France et 80 % aux États-Unis ou en Allemagne. »

Avant d'être submergée par un raz-de-marée, la centrale de Fukushima-Daiichi a résisté à un séisme d'une magnitude exceptionnelle. Cela ne manquera pas de nourrir la confiance des plus optimistes. Mais nul ne peut assurer avec une absolue certitude qu'aucune catastrophe nucléaire ne surviendra jamais en France. Reste à en évaluer le risque et les conséquences potentielles, puis à les mettre en perspective. Berlin aurait abandonné l'atome en marge de toute concertation européenne. Quoique sa décision soit vraisemblablement dictée par un calcul électoral, cette désinvolture peut sembler significative d'une matière où les arbitrages apparaissent authentiquement politiques.

Le social s'en mêle

L'expertise et la technocratie ne sauraient suffire quand sont en jeu, tout à la fois, l'indépendance du pays, la santé de ses habitants, la compétitivité de son économie. Aux méfaits potentiels des radiations, il convient de confronter les conséquences avérées de la pollution atmosphérique ; au risque de mettre en friche un territoire sinistré, on opposera la crainte de fragiliser l'emploi... « Depuis le début du débat sur la sortie rapide du nucléaire, le prix du kilowatt-heure à la bourse de l'électricité a augmenté de 10 % et celui des certificats d'émissions de CO2 de 2 euros la tonne », souligne Utz Tillmann, directeur de la fédération allemande de la chimie (Les Échos, 31/05/2011). « Notre industrie ne peut répercuter ces hausses sur ses produits », a-t-il prévenu. « À terme, si notre politique d'innovation ne peut déboucher sur la mise sur le marché de produits à des prix concurrentiels, l'industrie devra se poser la question de rester ou non sur le sol allemand. »

Reste que le nucléaire suscite un effroi tout particulier.  Parce qu'il touche à l'intimité de la matière, que ses méfaits s'enracinent durablement dans l'environnement, qu'il suscite un danger invisible... Agitant à tout va le principe de précaution, la société feint de croire qu'elle va bannir le risque. Tout au plus le rendra-t-elle plus diffus. Quitte à restreindre les marges de manœuvre du politique.

Le bien commun chassé par Narcisse

17 novembre 2005
Article publié dans L'Action Française 2000

Critique de la reconnaissance institutionnelle de l'homosexualité.

Depuis la parodie de mariage orchestrée par Noël Mamère, les partisans de la "cause homosexuelle" semblent peut-être moins pressants, mais leur résolution n'a pas faibli. Le retour de leurs revendications sur le devant de la scène politique sera-t-il l'occasion d'un débat plus réfléchi ? Le dernier ouvrage du prêtre et psychanalyste Tony Anatrella, Le Règne de Narcisse, devrait nous aider à en cerner les enjeux.

Dans une première partie, l'auteur se propose de définir l'homosexualité. Il y voit la conséquence d'un manque d'intériorisation de la différence des sexes, le résultat d'une identification au même que soi. Cette « fixation narcissique » donnerait parfois des personnalités très imbues d'elles-mêmes ; à l'opposé, elle pourrait aussi encourager les individus à se dévaloriser. Dans tous les cas, elle ne serait pas une option équivalente à l'hétérosexualité, mais un échec dans le processus normal du développement psychique de l'individu.

Principe de précaution

Représente-t-elle une image de la sexualité à partir de laquelle la société doit s'organiser ? Dans une seconde partie, Tony Anatrella expose les motifs de son opposition à la reconnaissance institutionnelle de l'homosexualité. Il décrypte la "théorie du gender", selon laquelle la masculinité et la féminité seraient déterminées par la culture. Ses implications sont profondes : le déni de la différence sexuelle pourrait notamment amener la société à dissocier la procréation de la sexualité, brouillant ainsi les repères de la filiation.

L'auteur s'inquiète des conséquences de ce bouleversement symbolique. Selon lui, l'amour ne suffit pas à combler les besoins de l'enfant, qui risque d'être perturbé. Il en appelle donc au principe de précaution pour justifier son refus d'ouvrir le mariage et l'adoption aux « duos homosexuels ».

Imposture

Reste à convaincre nos compatriotes... La troisième partie est consacrée à la dénonciation d'un concept désormais consacré par la loi, l'"homophobie". Ce n'est qu'une « imposture » pour Tony Anatrella. Sa fonction ne serait pas seulement de discréditer l'opposition aux revendications homosexuelles, par analogie avec le racisme. Ce concept pourrait également contribuer à occulter certains phénomènes.

La détresse des jeunes homosexuels, particulièrement enclins au suicide, est connue de tous, mais quelle en est l'origine ? La mise en accusation de la société est une explication naïve aux yeux de l'auteur. Considérée comme « le résultat d'un complexe psychologique », l'homosexualité suscitera un trouble indépendamment du regard porté sur elle par la société. Quant à la réaction des parents découvrant l'homosexualité de leur enfant, parfois vive, elle témoigne « d'une angoisse existentielle et non pas d'une quelconque "homophobie", comme on veut le prétendre dans un excès d'interprétation psychologique moralisante ».

Bons sentiments

S'il est démuni de toute connaissance en psychologie, le lecteur ne se sentira peut-être pas à son aise, et dans ce cas il regrettera d'autant plus que l'ouvrage ne soit pas construit d'une façon plus rigoureuse. Trop d'idées sont avancées ici alors qu'il faut chercher l'explication ailleurs ; d'autres reviennent comme un leitmotiv sans être suffisamment argumentées : le déni de la différence sexuelle est peut-être dénoncé à chaque page, mais aucune n'est consacrée à la définition de cette réalité jugée fondamentale.

On comprend néanmoins combien la question de l'homosexualité et de sa reconnaissance institutionnelle est abordée de façon superficielle dans les médias. Sa dimension psychologique est écartée, les possibles conséquences sociales sont ignorées... Sous « le règne de Narcisse », les intelligences sont dévoyées par les bons sentiments. Ce constat est inquiétant à plus d'un titre, car il est symptomatique d'une société où le bien commun n'a plus sa place.

Tony Anatrella, Le Règne de Narcisse – Les Enjeux du déni de la différence sexuelle, Presses de la Renaissance, 250 p., 18 euros.