21 mai 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Les nouveaux services de la Toile présentent une dimension stratégique.
Facebook espérait placer plus de 300 millions d'euros
à l'occasion de son entrée en bourse. Une somme à la mesure des
bouleversements accompagnant l'émergence des réseaux sociaux. Lesquels
affectent les modalités de navigation sur la Toile, mais aussi la
sécurité nationale, voire le déroulement des conflits armés.
Le ministère de la Défense vient d'ailleurs de publier un "guide
de bonnes pratiques" à l'intention des militaires s'exprimant sur le
"web 2.0". « De simples statuts, photos ou vidéos peuvent
parfois contenir des informations stratégiques », prévient
l'Hôtel de Brienne. De fait, l'année dernière, un marin embarqué sur le
Charles de Gaulle avait annoncé sur Facebook son
départ pour la Libye avant que le déploiement du porte-avions soit
rendu public...
Dans un entretien accordé à Florent de Saint Victor, publié
par l'Alliance géostratégique (AGS), Marc Heckern, chercheur à l'Irsem,
évoque l'annulation d'une opération programmée par Tsahal, après qu'un
soldat israélien eut annoncé sur Facebook : « Mercredi, on
nettoie [le village de] Qatana et jeudi, si Dieu le veut, on rentre à
la maison. » Quant à la rébellion libyenne, Charles Bwele
rapporte, toujours sur le site de l'AGS, qu'elle a pratiqué une
utilisation intensive de Twitter et même détruit un véhicule
lance-roquettes par la magie du net : « Grâce à leurs
ordinateurs portables, à leurs smartphones et à Google
Earth », les guérilleros « purent orienter et ajuster
précisément leurs tirs », atteignant leur cible en dépit de
leur piètre expérience.
Preuve que les cartes sont bel et bien rebattues à l'heure de
la révolution numérique.
Chronique enregistrée pour RFR
le dimanche 1er avril 2012.
Nos auditeurs savent-ils dans quelles conditions sont
fabriqués les Iphone qu'ils trimballent dans leur
poche ? Ils sont assemblés en Chine, dans une usine
où l'on travaille souvent plus de quarante-neuf heures par
semaine. C'est davantage que le plafond légal
fixé dans l'empire du Milieu. Cela ressort des conclusions
d'un audit réalisé par la Fair labor association,
dont les conclusions ont été publiées
jeudi dernier (le 29 mars 2012).
Que les fanatiques d'Apple se rassurent : ils ne sont
pas coupables de contribuer à faire travailler des enfants.
De toute façon, mon intention n'est pas de les accuser de
quoi que ce soit. Je cherche plutôt à les mettre
en garde contre l'avenir qui nous est réservé.
En effet, un candidat à l'élection
présidentielle a proclamé son ambition de
fabriquer des smartphones non pas en Chine, mais en France. Et je ne
vous parle pas d'un candidat de seconde division. Bien au
contraire : selon des analyses manifestement très
sérieuses, ce candidat-là serait le mieux
placé pour vaincre François Hollande au second
tour. C'est un serviteur illustre de la France, l'incarnation
même de la nation, la nouvelle Jeanne d'Arc !
Demain, les royalistes marcheront sur Reims aux
côtés de Marine Le Pen.
En attendant, quand un Iphone est importé aux
États-Unis, étant donné l'origine des
différents composants, ce sont seulement 4 % de son
prix qui reviennent à la Chine. 4 % :
s'agit-il de la part que l'égérie populiste
voudrait réserver à la France ? 4 %,
contre 14 % à la Corée du Sud,
18 % à l'Allemagne, 36 % au
Japon ?
Aux yeux d'un certain nombre d'économistes, tel
Olivier Bouba-Olga, « on peut donc opposer deux
stratégies en matière de politique
industrielle » : d'une part, la
stratégie popularisée par la campagne
électorale, « qui vise à
soutenir la production de biens "made in France" vendus en
France » ; d'autre part,
« la stratégie japonaise ou allemande,
qui vise à être bien placé dans les
processus de production de produits "made in monde" vendus... partout
dans le monde ».
Prétendre que l'on serait plus ou moins patriote
selon que l'on promeuve l'une ou l'autre de ces stratégies,
c'est une belle ânerie, permettez-moi de le dire.
Hélas, les royalistes se rendent volontiers complices d'une
instrumentalisation démagogique du sentiment national. Je
suis désolé de le proclamer à ce
micro, mais le "patriotisme économique", à bien
des égards, c'est à l'économie ce que
le "bio" est à l'agriculture. C'est un gadget marketing,
dont la mise en œuvre suppose une normalisation hasardeuse,
pour des bénéfices vraisemblablement marginaux.
Érigé en politique, d'aucuns
prétendent qu'il serait même
« suicidaire ». Parce que si vous
vous interdisez de délocaliser certaines
activités, vous renoncez également à
allouer de façon optimale les ressources dont vous disposez.
Le problème se pose en termes similaires à propos
des progrès techniques. Cela n'a pas
échappé aux parlementaires de l'UMP, dont on
connaît l'ultra-méga-super-libéralisme.
J'en tiens pour preuve deux propositions de loi
déposées il y a quelques mois : d'abord,
celle du député Alain Moyne-Bressand,
« visant à interdire la
généralisation des caisses automatiques aux
barrières des
péages » ; ensuite, celle du
sénateur Alain Houpert, visant à
« assujettir aux prélèvements
sociaux le chiffre d'affaires réalisé par les
caisses automatiques ». En Allemagne, on
compte, paraît-il, trois fois plus de robots industriels que
chez nous. Demandez-vous pourquoi l'économie d'outre-Rhin
est réputée plus compétitive que la
nôtre...
On prétend sauvegarder l'emploi en s'opposant
à la technique ou à la mondialisation. Mais
conserver, c'est dépérir ! Entasser du
blé dans un grenier, stocker des aliments sous vide, cela
permet de subsister quelques mois, voire quelques années.
S'il convient de se préparer à affronter les
disettes, cela ne saurait nous détourner du travail
quotidien de la terre, ni des semis réguliers :
sans cesse nous devons remettre l'ouvrage sur le
métier ! C'est la vie, et nulle incantation
volontariste n'y changera jamais quoi que ce soit.
Les cas de relocalisation en témoignent :
ils ne concernent pas des emplois recrées
à l'identique, mais ils résultent
généralement d'un repositionnement de
l'activité vers une offre de meilleure qualité.
Par conséquent, si nos responsables politiques
témoignaient d'un peu de "patriotisme
économique", ils commenceraient par sortir de la farandole
courant de Florange à Petit-Couronne, où les
candidats à l'élection présidentielle
défilent pour visiter les usines du passé.
Catoneo l'a martelé sur Royal Artillerie :
« Plutôt que de lever le poing au ciel,
nous devons développer de l'industrie à travers
des métiers neufs et sans tarder, car les courbes ne
s'inverseront pas. Innovons ! Découvrons !
Inventons ! »
Vincent Benard a lancé cet avertissement
relayé par l'Institut Turgot :
« Si nous ne corrigeons pas le tir, le
déclin de notre système éducatif et
notre fiscalité punitive de la prise de risque pourraient,
dès le second tiers du présent siècle,
cantonner un pays comme la France au rôle de pourvoyeur de
cols bleus mal payés pour le compte de décideurs
des pays émergents. » Je vous l'ai
dit : on fabriquera des smartphones en France... Bien que ses
concurrents ne s'en distinguent pas fondamentalement, au moins Marine
Le Pen annonce-t-elle fièrement la couleur.
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2 mars 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Bénéficiant d'une immense
popularité en Amérique latine, la France aurait
négligé, des années durant, de mettre
à profit un tel atout. Il est temps de réparer
cette erreur, martèle, plein d'enthousiasme, le
député Jean-Luc Reitzer.
La France « compte-t-elle enfin
définir et mettre en œuvre la politique
latino-américaine qu'elle n'a jamais
eue ? » Telle est la question
posée par Jean-Luc Reitzer, député UMP
du Haut-Rhin, en conclusion d'un rapport d'information
enregistré le mois dernier (en février 2012)
à la présidence de l'Assemblée
nationale. Fervent promoteur d'un rapprochement avec
l'Amérique latine, il doute « qu'aucun
autre pays ait été aussi adulé que la
France l'a été par les élites de la
région ». Toute une
génération de Brésiliens a d'ailleurs
été formée à la culture
française, suivant l'enseignement dispensé par
les Alliances françaises. Pourtant, regrette le
parlementaire, « il n'est pas certain que la France
ait toujours su répondre à l'attente qu'elle a
suscitée ». Sa présence dans
la région souffrirait de la comparaison avec ses voisins
européens. Par son silence, le Livre blanc sur la
défense et la sécurité nationale
l'avait confirmé en 2008 : « Le
sous-continent latino-américain est clairement le grand
absent de notre réflexion diplomatique et
stratégique. »
Continuité gaullienne
Cela ne date pas d'hier. À la veille d'un voyage en
Amérique latine, le général
De Gaulle, alors président de la
République, avait confié à Michel
Debré qu'il partait « sans programme
diplomatique bien précis ». Tout au plus
cherchait-il des partenaires susceptibles d'interférer dans
le tête à tête de Moscou et Washington.
« On ne s'est jamais vraiment
intéressé à l'Amérique
latine pour ce qu'elle est ou pouvait être, au mieux pour ce
qu'elle pouvait apporter dans un équilibre
multipolaire », analyse Jean-Luc Reitzer. De ce
point de vue, Jacques Chirac s'inscrirait dans la continuité
de son prédécesseur, développant des
relations bilatérales afin « de trouver
des appuis, au sein du Conseil de sécurité des
Nations Unies par exemple, pour peser dans la relation tendue que la
France avait avec les États-Unis au long de ces deux
présidences ».
De fait, « l'Amérique latine
dans son ensemble est désormais vue par la France comme un
partenaire obligé, indispensable pour faire avancer les
grands dossiers internationaux », tels le
réchauffement climatique ou la
sécurité alimentaire. Cela étant, en
dépit de multiples convergences avec Paris, Brasilia n'a pas
caché les réserves que lui inspiraient ses
interventions en Côte d'Ivoire et en Libye. Mais les
relations commerciales constituent « la
première pierre d'achoppement ». D'autant
que la France a pris la tête de l'opposition
européenne à la conclusion d'un accord avec le
Mercosur, dont risqueraient de pâtir les exploitants
hexagonaux : « Je ne serai pas le
président qui laissera mourir l'agriculture
française », a prévenu Nicolas
Sarkozy.
Multilatéralisme
Si l'on excepte le "partenariat stratégique"
– mais non exclusif, loin s'en faut – mis en
œuvre avec le Brésil, « la
dimension purement bilatérale de notre action
vis-à-vis des pays d'Amérique latine ou, du
moins, de certains d'entre eux, [...] semble réduit
à une portion de plus en plus congrue »,
déplore le rapporteur. Selon lui, « la
tendance à la multilatéralisation de la relation
de la France avec les pays d'Amérique latine, si elle n'est
évidemment pas récente, n'a fait que se confirmer
au fil du temps, à mesure que l'action bilatérale
tendait à
décroître ». À
l'heure actuelle, la France s'implique plus particulièrement
dans la Banque interaméricaine de développement
(BID). Elle figure au premier rang des seize pays européens
actionnaires de l'institution, à
égalité avec l'Allemagne, et dispose d'un
siège au Conseil d'administration, partagé par
rotation avec l'Espagne. « Il s'agit là
évidemment d'un atout
considérable », estime le
député du Haut-Rhin. Un tel statut permettrait
à la France de « conforter sur le long
terme sa présence régionale, que ce soit sur des
questions relatives à l'APD [l'aide publique au
développement], au bénéfice des pays
les moins développés de la zone, ou sur des
enjeux plus économiques, dans les plus
importants ». Selon Jean-Luc Reitzer,
« un véritable potentiel s'offre ainsi
aux entreprises françaises. Une collaboration s'est
d'ailleurs très vite instaurée entre l'AFD
[l'Agence française de développement ] et la BID,
de plus en plus étroite. » C'est
même sur la base d'une étude préalable
financée par la BID qu'Alstom a remporté le
marché du métro de Panamá, nous dit le
rapporteur.
Quoique les marchés n'y soient pas d'un
accès toujours aisé, la période
actuelle est jugée faste pour les "investissements directs
à l'étranger" (IDE) en Amérique
latine. « Il apparaît toutefois que les
IDE français restent relativement limités et que
la France ne profite pas comme elle le pourrait de cette dynamique
régionale. De sorte que bien que certaines entreprises
françaises aient participé fortement aux
privatisations sud-américaines au milieu et à la
fin des années 1990, nos IDE ne dépassent que
rarement 3 % des flux globaux que reçoit
aujourd'hui le sous-continent. » Le rapporteur
pointe « une certaine
frilosité », sans occulter de
« remarquables
succès », telles l'implantation durable
au Brésil de Carrefour, Casino et Suez, ou la
présence de Sodexho au Pérou, où la
société est devenue, comme au Chili, le premier
employeur. En outre, « si elle est modeste, la
présence des IDE français n'est cependant pas
anodine ». Elle aurait même tendance
à s'accroître ces dernières
années.
Le Brésil rafle la mise
La majorité des investissements français
en Amérique latine (près de 70 %) sont
dirigés vers le Brésil, où ils
enrichissent un "stock d'IDE" près de deux fois plus
important qu'en Chine ! « Parmi les
principales opportunités actuelles, de très gros
projets sont envisagés dans les transports – TGV
Rio de Janeiro-Campinas –, dans la
génération d'énergie, sur laquelle
Alstom et GdF-Suez sont sur les rangs avec les projets de barrage de
Belo Monte et Jirau, ainsi que dans les domaines spatial ou
nucléaire, qui intéressent respectivement des
sociétés comme Thalès, Ariane Espace
et Areva. PSA, qui a annoncé par ailleurs un investissement
de 940 millions d'euros en Amérique latine, produit
quelque 150 000 véhicules par an au
Brésil. »
En 2010, la part de l'Amérique latine dans notre
commerce extérieur se limitait à 2,7 %.
Or, soutient Jean-Luc Reitzer, « les milieux
d'affaires, qu'ils soient Français expatriés ou
non, sont majoritairement désireux d'une présence
supérieure de notre pays dans la
région ». Le député
se fait l'écho d'une exceptionnelle francophilie :
« Quand bien même les relations,
commerciales notamment, seraient-elles aujourd'hui plus importantes
avec d'autres pays européens qu'avec le nôtre, les
interlocuteurs, unanimes, n'en soulignent pas moins que "la
qualité du dialogue n'est pas la même" et qu'"il
n'y a pas la même identification", voire, même, pas
les a priori dont d'autres peuvent pâtir. La relation avec la
France est toujours présentée comme
particulière, voire unique, non
stéréotypée, à l'inverse de
ce qui se passe pour d'autres, et il ne tient qu'à la France
de savoir profiter de cet avantage incomparable. Tel est [...] le
message que la mission a continûment
entendu. »
Vers un choc des cultures ?
Au-delà des IDE, des transferts de
compétences sont escomptés. Le savoir-faire de la
France en matière de tourisme constituerait une
expérience précieuse pour l'Équateur,
par exemple. D'ores et déjà, la collaboration
scientifique de part et d'autre de l'Atlantique s'avérerait
très fructueuse. Selon le rapporteur,
« la France pourrait opportunément tirer
profit de son image et de l'attente qu'elle suscite pour
compléter son offre actuellement centrée sur la
création de lycées d'excellence en
échange de la réintroduction de l'enseignement du
Français dans les cursus scolaires ». Une
carte à jouer parmi tant d'autres...
« De l'avis unanime »,
explique-t-il, « la proximité culturelle
contribue grandement à résoudre les
difficultés éventuelles ».En
ce sens, poursuit-il, « la latinité est
un atout considérable ». Cependant,
prévient-il, « l'appui traditionnel des
élites sur lequel la France a longtemps compté
pour entretenir son image et ses positions en Amérique
latine risque d'évoluer et d'être à
l'avenir un instrument moins efficace, ne serait-ce que parce nombre
d'entre elles sont plus facilement allées étudier
aux États-Unis qu'en France ». Aussi
celle-ci devrait-elle se mobiliser sans tarder pour
« ne pas rater le coche ».
D'autant que « si l'Amérique latine se
sent aujourd'hui globalement toujours occidentale, certains pays sont
désormais sur des registres en partie, voire radicalement,
différents. C'est le cas en premier lieu de la
Bolivie. » D'une certaine manière, il
faudrait tenir compte, dorénavant,
« d'une forme de choc des
cultures ».
22 février 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Quand l'Assemblée nationale se saisit d'une
polémique à la suite des Associations familiales
catholiques.
L'année dernière, une
polémique s'était ouverte tandis qu'on
découvrait de nouveaux manuels de sciences de la vie et de
la terre (SVT) destinés à des
élèves de Première. La notion de
"genre" s'y trouvait complaisamment présentée,
quoiqu'elle ne soit pas explicitement citée dans les
programmes de l'Éducation nationale. « Ce
sont donc certains manuels qui [...] ont
développé une approche quelque peu exploratoire
de la question », soutient Xavier Breton,
député UMP de l'Ain.
Un arbre de Noël
À l'automne, une commission de
l'Assemblée nationale l'avait chargé d'animer un
groupe de travail créé en raison de cette
controverse. Dans ses conclusions, mises en ligne le
1er février, il relève un
« décalage entre le pouvoir
prêté au manuel et la
réalité de son utilisation ».
En effet, explique-t-il, « le contenu du manuel est
toujours perçu comme étant prescriptif alors
qu'il n'est plus conçu, comme ce fut le cas auparavant,
comme un "doublon" du programme ». De fait,
« le manuel ressemble désormais
à un "arbre de Noël" ou à des "extraits
de presse" » – un format censé
« aider les enseignants à mettre en
œuvre une pédagogie fondée sur le
questionnement et l'interaction en classe »...
M. Breton n'en déplore pas moins un manque
de concertation : « C'est uniquement
à la demande des éditeurs, et donc de
manière ponctuelle, que des réunions sont
organisées avec la direction générale
de l'enseignement scolaire et les groupes d'experts afin de
présenter l'esprit » des nouveaux
programmes. Revisés tous les cinq ans en moyenne, ceux-ci
sont élaborés selon une procédure
jugée « peu
transparente ». À l'opposé,
« devrait-on [...] prévoir l'organisation
de débats démocratiques sur les projets de
programmes ? » Selon le
député de l'Ain, ce serait
« prendre le risque que ces discussions
débouchent sur ce que certains n'hésiteraient pas
à appeler des "victoires" ou des
"défaites" au regard des opinions
défendues. Dans ces conditions, aux yeux d'une partie de
l'opinion, l'école ne pourrait plus être ce lieu
neutre où l'on acquiert des connaissances et des
compétences. »
Mme Françoise Imbert,
député PS de Haute-Garonne, s'accommoderait
volontiers d'une telle situation. Intervenant lors d'un
débat en commission, elle a jugé essentiel que
les manuels scolaires soient conçus de façon
à « faire évoluer les
représentations de la femme dans notre
société ».
« Ne faisons pas de cet objet [...] l'enjeu d'une
lutte politique », lui a rétorqué
Jean-Pierre Giran, député UMP du Var.
Au fond, c'est bien la mission assignée
à l'École qui est en cause. La tentation est
grande de l'instrumentaliser à des fins
idéologiques. Or, à la faveur de l'indignation
relayée par les Association familiales catholiques,
plusieurs parlementaires ont suggéré que le choix
des manuels soit soumis à l'approbation de
l'État, ou du moins orienté par l'attribution
d'un label officiel. C'est dire la perversité de la
République, susceptible de retourner à son
avantage les critiques les plus légitimes...
Chronique enregistrée pour RFR le lundi
23 janvier 2012.
L'année dernière, quelques prophètes avaient annoncé que
l'euro ne survivrait pas à 2011 – c'était le cas, on s'en souvient,
d'Emmanuel Todd. L'entrée dans la nouvelle année les a couverts de
ridicule ! Bien sûr, le spectre d'un éclatement de l'Union
économique et monétaire hante les esprits. Mais si l'on s'en tient au
cours des devises, en dépit d'une inflexion récente à la baisse, force
est de constater que l'euro inspire toujours confiance. Quant à nos
auditeurs, je doute qu'aucun commerçant les ait jamais priés de régler
leurs achats en or ou en dollars. Chacun peut donc le constater au
quotidien : l'euro n'est pas en crise. Du moins, pas au sens
strict.
D'ailleurs, la crise de la dette est loin d'affecter les seuls
États partageant la monnaie unique, quoique celle-ci leur complique
effectivement la tâche pour en sortir. Le redressement des comptes
publics est devenu une préoccupation majeure au Royaume-Uni, aux
États-Unis, au Japon aussi. C'est dire la légèreté avec laquelle on
attribue parfois à l'euro la responsabilité de tous nos malheurs.
En fait, les souverainistes me rappellent ces gens qui, au
lieu de condamner les violeurs, incriminent leurs victimes, coupables
de les avoir tentés en affichant leur féminité. Tu portais une
mini-jupe ? C'est bien fait pour ta gueule ! Cool...
On sait que les Grecs ont maquillé leurs comptes publics ;
mais ils en sont tout excusés, puisque c'était pour coller aux critères
de convergence du traité de Maastricht. Ils se sont trop
endettés : c'est encore la faute de l'euro, puisque celui-ci
leur a permis de le faire à moindre coût. Parallèlement, on nous
explique que la France pâtirait non pas de l'ampleur de ses emprunts,
mais de leur coût depuis qu'ils sont souscrits sur les marchés
financiers. Bonjour la cohérence.
Tout cela me semble symptomatique d'une démarche idéologique.
Évoquant l'"empirisme organisateur" cher à l'AF, Maurras.net
explique qu'il s'agit « de "voir les faits", de se laisser
guider par eux, sans faire intervenir un vocabulaire sentimental. Rien
ici n'est de l'ordre de la détestation, de l'indisposition, ou d'un
mouvement de l'âme si cher aux politiques romantiques et, plus tard,
aux démagogues électoraux qui y trouvent le moyen de remuer les foules
d'électeurs ou d'émeutiers. » Présentant l'attitude de Maurras
à l'égard des colonies, le site précise que celles-ci n'étaient jugées
« ni bonnes ni mauvaises métaphysiquement ». En
effet, « ce sont les conditions objectives de leur
développement, de leur maintien, de leur profit pour la nation qu'il
s'agit d'examiner ». Sans préjuger des conclusions, je pense
qu'il faudrait faire de même avec l'euro. D'autant que s'en
débarrasser, c'est autre chose que de ne pas l'avoir adopté...
J'en vois déjà certains sauter sur leur chaise comme des
cabris en disant "souveraineté", "souveraineté". Mais cela ne recouvre
rien de concret. Leur discours n'est que le paravent d'un idéalisme
républicain, dont participe la dénonciation récurrente du "déficit
démocratique". Par cette expression, on ne pointe pas la capacité des
responsables politiques à décider ou non en toute indépendance, mais
leur inclination à court-circuiter le Sénat et l'Assemblée par
l'entremise des institutions européennes. Marine Le Pen n'a
pas manqué de verser dans cette rhétorique : dans son projet
présidentiel, elle se félicite de l'élection des eurodéputés au
suffrage universel direct, et déplore que leurs pouvoirs n'aient pas
été davantage accrus. C'est un comble ! En effet, des trois
sommets constituant le "triangle institutionnel" de l'Union européenne,
le Parlement est clairement le plus fédéral.
Parlons plutôt de puissance et d'indépendance, mais sans faire
de celle-ci un absolu. Laisser sa voiture au garage, pour lui préférer
le train, voire l'avion, c'est sacrifier un peu de son indépendance,
mais cela n'en reste pas moins un choix souverain, motivé,
vraisemblablement, par la volonté de s'ouvrir de nouveaux horizons.
Quant à l'achat d'une voiture, cela va sans dire, il présenterait peu
d'intérêt pour un individu qui ne serait pas en mesure de conduire.
C'est pourquoi la perspective d'un retour au franc ne devrait susciter
qu'un enthousiasme modéré. En effet, si l'État disposait à nouveau du
levier monétaire, saurait-il l'actionner à bon escient ?
Déplorant les dévaluations à répétition, Jacques Bainville en a jadis
douté.
Quoi qu'il en soit, la question mérite d'être posée. D'autant
qu'il ne faudrait pas prendre nos politiciens pour plus bêtes qu'ils ne
sont. Ils savaient bien à quels impératifs devait nous soumettre
l'adoption d'une monnaie unique. En l'occurrence, une stricte
discipline budgétaire, ainsi qu'une grande flexibilité économique
censée compenser les écarts de compétitivité. Or, depuis l'entrée en
vigueur du traité de Maastricht, la France a fait voler en éclats le
Pacte de stabilité, tout en rechignant à libéraliser davantage son
économie.
Peut-être avons-nous échappé au pire, me direz-vous. La
République n'en apparaît pas moins incapable d'assumer les conséquences
de ses propres décisions, bonnes ou mauvaises. En cela, les déboires de
l'euro sont le symbole d'une République en faillite. À l'approche de
l'élection présidentielle, les royalistes seraient bien inspirés de le
marteler.
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24 janvier 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Bien qu'elle conserve l'euro, l'île de Saint-Barthélémy vient
de s'émanciper de l'influence de l'UE, jugée trop pesante en l'absence
de compensations financières.
En dépit des incertitudes pesant sur l'Union économique et
monétaire, un territoire ultramarin s'accroche à l'euro :
conformément au souhait exprimé par les autorités de Saint-Barthélémy,
un traité négocié avec l'UE vient d'être ratifié par la France afin d'y
maintenir la monnaie unique. Depuis le
1er janvier 2012, cette île des Antilles n'est plus
comptée au nombre des régions ultra-périphériques (RUP) de l'Union
européenne. C'est pourquoi, en l'absence d'un tel accord, elle aurait
dû se doter de sa propre devise, fondée vraisemblablement sur le dollar
américain, si l'on en croit Éric Doligé, sénateur du Loiret et
vice-président de la délégation sénatoriale à l'outre-mer.
De la RUP au PTOM
Bénéficiant d'un "régime d'association", Saint-Barthélémy se
range désormais, aux yeux de Bruxelles, parmi les pays et territoires
d'outre-mer (PTOM). S'étendant sur 25 km², peuplée aujourd'hui
de 8 500 habitants, l'île fut cédée par Louis XVI à
la Suède en 1684, avant de redevenir française en 1878. Elle demeura
rattachée à la Guadeloupe, en qualité de commune, jusqu'au
15 juillet 2007, date à laquelle elle se mua en
collectivité d'outre-mer, à la suite d'un référendum organisé quatre
ans plus tôt. Sa transformation en PTOM s'inscrit dans la continuité de
cette évolution, quoique les statuts français et européens soient
indépendants l'un de l'autre : « Saint-Barthélemy
aurait pu conserver, comme Saint-Martin par exemple, le statut de RUP,
tout en étant devenue une collectivité régie par l'article 74
de la Constitution », souligne Éric Doligé. Cela étant, selon
son conseil territorial, « l'évolution du statut européen de
Saint-Barthélemy exclut toute idée d'indépendance de Saint-Barthélemy
[qui] est, et restera, partie intégrante de la France ».
« L'île a souhaité gagner une certaine liberté par
rapport aux règles européennes en devenant PTOM, notamment pour pouvoir
commercer avec sa zone géographique », explique le sénateur.
Dorénavant, conformément au code général des collectivités
territoriales, Saint-Barthélémy « est compétente en matière
douanière, à l'exception des mesures de prohibition à l'importation et
à l'exportation qui relèvent de l'ordre public et des engagements
internationaux de la France, des règles relatives aux pouvoirs de
recherche et de constatation des infractions pénales et des procédures
contentieuses en matière douanière ».
Fonds structurels
Entre autres considérations invoquées par les autorités
locales, figurait la crainte que l'harmonisation progressive des
législations européennes remette en cause, à terme, la fiscalité
spécifique applicable à leur territoire. Surtout, la stricte
application des normes européennes n'irait pas sans effets
pervers : ainsi, l'abaissement de la teneur en benzène dans
l'essence sans plomb, de 3 à 1 %, aurait conduit à majorer de
22 centimes d'euros le prix du litre de carburant distribué
sur l'île. Éric Doligé critique ouvertement la technocratie
bruxelloise : « J'ai toujours été frappé par
l'imposition de normes ne correspondant pas à la réalité des
territoires d'outre-mer, obligés d'importer d'Europe, à 10 000
kilomètres, des produits qu'ils pourraient trouver à
100 kilomètres », a-t-il déclaré lors d'une réunion
en commission. Saint-Barthélémy ne serait pas le seul territoire
concerné : « La Guyane n'a pas le droit d'utiliser
l'essence brésilienne, beaucoup moins chère, parce que sa composition
ne correspond pas aux normes européennes », déplore le
sénateur.
Forte d'un PIB par habitant supérieur à 75 % de la
moyenne européenne, l'île de Saint-Barthélémy n'est pas éligible au
bénéfice des fonds structurels de l'UE. D'ailleurs, souligne
Éric Doligé, elle est « le seul territoire qui, au lieu de
recevoir de l'argent de la métropole, est un contributeur
net ». Dans ces conditions, estime-t-il, en tant que RUP, elle
ne pouvait « rien » obtenir de l'Union européenne.
« Ceux qui en ont les moyens souhaitent changer de
statut », affirme-t-il. Et « ceux qui ne les ont pas
restent dans le cadre des règles européennes, en attendant... La Guyane
sera peut-être un jour, avec son pétrole, son bois, son or qu'on lui
empêche d'exploiter, suffisamment riche pour sortir du statut de DOM et
de RUP. » Lorgnant sur la manne des fonds structurels Mayotte
n'en formule pas moins le vœu d'accéder aussi vite que possible au
statut de région ultra-périphérique de l'Union européenne...
31 décembre 2011 Article publié dans L'Action Française 2000
Un album nous plonge dans le quotidien du 7e BCA.
En début d'année, le photographe Jean-Christophe Hanché s'est
mêlé, cinquante jours durant, au quotidien des soldats du
7e bataillon des chasseurs alpins (BCA) qui arpentaient alors
la Kapisa, au Nord-Est de Kaboul. De retour d'Afghanistan, il a
sélectionné trois cents clichés réunis dans un petit album.
Les compositions cultivent le dynamisme dans la sobriété, et
si le style se montre volontiers intimiste, il ne verse jamais dans
l'impudeur. Sont évoqués la puissance du feu comme les stigmates de la
guerre, mais aussi les moments de détente... Notre confrère nous convie
à la rencontre de soldats qui nous apparaissent somme toute familiers :
tel est, peut-être, le caractère le plus saisissant de son témoignage,
dont on regrettera surtout qu'il ne soit pas promis à une plus large
diffusion.
Jean-Christophe Hanché, Kapisa-Afghanistan,
240 p., trois cents images en couleur, format 15x21
à l'italienne, 25 euros ; livre édité par l'auteur,
disponible dans quelques librairies de Reims ou par
correspondance ; renseignements et commande :
www.jeanchristophehanche.com ; 06 77 06 94 83.
31 décembre 2011 Article publié dans L'Action Française 2000
Retour sur un film ayant bénéficié d'une implication inédite
des armées.
En salles depuis le 2 novembre, Forces
spéciales raconte le sauvetage d'une journaliste prise en
otage par des Talibans. Selon son réalisateur, Stéphane Rybojad, ce
film constitue un hommage aux militaires français engagés en opérations
extérieures. À ce titre, il méritait le détour, en dépit du scepticisme
des critiques. En cinéphiles avertis, ceux-ci auront traité avec dédain
cette pale imitation des blockbusters
hollywoodiens... Bon public, nous avons préféré l'aborder avec une
complaisance délibérée : des héros bien français, cela fait
plaisir à voir !
À la différence de leurs homologues américains, ceux-ci ne
marchent pas sur l'eau. En revanche, de part et d'autre de
l'Atlantique, on dépense apparemment les munitions sans compter.
Pourtant, le réalisme serait « à peu près tenu »,
selon notre confrère Jean-Marc Tanguy, auteur d'un album consacré au
film. Entres autres incongruités, signalons la mixité de l'équipe
engagée par le COS (Commandement des opérations spéciales), où des
commandos de marine côtoient des parachutistes de l'air. Par ailleurs,
aucun hélicoptère Puma n'a jamais été déployé en Afghanistan...
Cela dit, on le devine à l'écran, cette production a bénéficié
d'un soutien inédit des armées. « L'idée consistait [...] à ne
pas demander des moyens particuliers (humains et matériels), mais à
nous greffer sur des moyens planifiés et engagés sur des séquences
réelles d'entrainement », explique Jackie Fouquereau,
l'officier dépêché auprès de l'équipe de tournage. Quelques plans ont
même été filmés à Kaboul. Notamment un scène de poursuite, où un
sous-officier assure la doublure de Diane Kruger.
Bien que la complexité du théâtre afghan soit occultée par la
caricature des Talibans, dont l'ambigüité des liens avec la population
est passée sous silence, le film donne à réfléchir sur le souci de
parer aux réactions de l'opinion publique – un élément clef de la
guerre menée en Afghanistan. « C'est un sujet qui suscite
l'intérêt partout sauf en France », relève le réalisateur,
dont le film constituerait « l'une des meilleures préventes à
l'international depuis dix ans ».
Les armées seront-elles appelées à transformer
l'essai ? Leur immixtion dans les salles obscures apparaît
somme toute naturelle. Ce faisant, peut-être espèrent-elles susciter
des vocations, voire contribuer à la résilience de la nation. Reste à
trouver le ton juste. Leurs communicants devront se montrer subtils
pour parer aux critiques. Un jeune homme a d'ailleurs chahuté la
projection à laquelle nous avons assisté : avant de quitter la
salle, il a dénoncé une propagande d'État et accusé les militaires
français d'avoir perpétré des exactions en Afghanistan.
À la lecture de la dédicace finale, des applaudissements ont
balayé son injure. Depuis, nous avons appris le décès de Goran
Franjkovic, un légionnaire mort au combat lundi dernier,
14 novembre, alors qu'il venait de rejoindre le théâtre
afghan. Il s'était distingué par sa motivation et sa rusticité,
témoignant, selon l'armée de Terre, d'une volonté et d'une discipline
exemplaires. Il était âgé de vingt-cinq ans : c'était "un
jeune Français", dont le sacrifice nous inspire le plus profond respect.
En salles depuis le 2 novembre, Forces
spéciales raconte le sauvetage d'une journaliste prise en
otage par des Talibans. Selon Stéphane Rybojad, son réalisateur, ce
film constitue un hommage aux militaires français engagés en Opex. À ce
titre, il méritait le détour.
Nous n'avons pas été déçu, mais il faut dire
que nous n'en attendions pas grand chose et que nous sommes
(très) bon public : d'emblée, quelques plans d'hélicos
arborant la cocarde tricolore ont suffi à nous faire vibrer. Des héros
bien français, cela fait plaisir à voir ! D'autant qu'on
échappe, dans une mesure certes très relative, à l'aspect parodique affublant moult
productions de ce type, succédanés grotesques des blockbusters
américains : ici, point de président roulant les mécaniques,
ni de commandos marchant sur l'eau, en dépit d'un inévitable sacrifice
et de plusieurs affrontements à l'intensité exagérée.
Outre ces échanges de tirs (beaucoup) trop nourris, l'incapacité de
l'état-major à localiser ses hommes nous a étonné. Cela dit, nous
sommes peu compétent pour juger du réalisme du film. Précisons
toutefois que nous l'avons découvert avec un a priori positif,
étant donné les antécédents du réalisateur et la bienveillance de
l'Armée à son égard : « Ses équipes de tournage ont
installé leurs caméras dans les camps de Caylus (Tarn-et-Garonne) et de
Djibouti, dans un hélicoptère Tigre du 4e régiment
d'hélicoptères des forces spéciales (4e RHFS) de Pau, dans un
avion Transall de l'armée de l'Air et sur le porte-avions Charles-de-Gaulle »,
précise la Défense nationale. « En juin 2010, les acteurs ont
également suivi un stage d'une semaine à la base des fusiliers marins
de Lorient pour se former aux techniques des commandos
marines. »
Des cinéphiles plus avisés ont pointé les tares du scénario et le manque d'épaisseur des personnages. Dommage, surtout, que la complexité du théâtre afghan
soit occultée par la caricature des Talibans, dont l'ambigüité des
liens avec la population est passée sous silence. Ils sont d'ailleurs
accusés d'avoir raflé les enfants de tout un village. Cela s'est-il
effectivement produit ? En revanche, l'accueil sympathique
réservé ici ou là aux soldats français fait écho, nous semble-t-il, à
des témoignages bien réels : on y verra une forme d'hyperbole ! Quant à l'intrigue, qui rappelle à certains
égards celle du Soldat Ryan, elle renvoie
ouvertement au débat suscité par la présence de journalistes en
Afghanistan. Le spectateur est d'ailleurs conduit à s'indigner de la
moindre valeur apparemment conférée à la vie des militaires. Lesquels
témoignent d'une abnégation forçant le respect. La timide immixtion des
politiques justifie leur sacrifice par la nécessité de parer aux
réactions de l'opinion publique – un élément clef e la guerre menée en
Afghanistan.
Ce faisant, le film fait œuvre de pédagogie, si l'on peu dire.
À nos yeux, ce n'est pas son moindre mérite, et cela tombe à pic, à
l'heure où les Français sont suspects de lâcher le terrain pour coller
au calendrier électoral. Reste que, parallèlement, les critiques s'en
trouvent légitimées. Formaté, vraisemblablement, par un certain
communautarisme, un jeune homme a chahuté la projection à laquelle nous
avons assisté : avant de quitter la salle, il a dénoncé une
propagande d'État et accusé les militaires français d'avoir perpétré
des exactions en Afghanistan. À la lecture de la dédicace finale, des
applaudissements ont balayé son injure. Mais peut-être les choses se
seraient-elles mal passées si nous nous étions retrouvé tout près de
lui... Respect pour nos soldats, merde !
3 novembre 2011 Article publié dans L'Action Française 2000
De l'aveu même de son chef d'état-major, la Marine
présenterait un format « juste suffisant pour répondre aux
ambitions de défense et de sécurité de notre pays ».
Le mercredi 12 octobre, un mois après sa prise de
fonction, l'amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine
(CEMM), a été auditionné par la commission de la défense nationale et
des forces armées de l'Assemblée nationale. Il a vanté les qualités
« d'une marine de premier rang, efficiente et
réactive », dont l'activité s'est particulièrement intensifiée
ces derniers mois. Au point que la "consommation de potentiel"
dépasserait aujourd'hui de 30 % l'allocation annuelle pour le
porte-avions, les bâtiments de projection et de commandement (BPC) et
les avions de patrouille maritime Atlantique 2.
Opération Harmattan
L'opération Harmattan, déclenchée en février dernier et menée
au large de la Libye, a focalisé l'attention des députés. Selon
l'amiral Rogel, « par son caractère littoral et son
intensité » elle a nécessité « un niveau d'engagement
exceptionnel ». Ce fut « un exercice de
vérité » permettant de « mesurer notre réactivité,
mais aussi notre capacité à mener des opérations de haute intensité,
exigeant un niveau de coopération interarmées, inter-composantes et
interalliée, dont très peu de marines sont aujourd'hui
capables ». Cet engagement a mis en évidence, aux yeux du
CEMM, « la remarquable efficacité, la fiabilité et la
polyvalence du Rafale marine, la justesse de nos choix pour le BPC qui
ont conduit à privilégier la fonction "porte-hélicoptères d'assaut", la
forte implication des frégates et des sous-marins nucléaires d'attaque
(SNA) dans l'action vers la terre et notre capacité de frappe dans la
profondeur (missile SCALP, complété demain par le MDCN) ».
Cela étant, la Marine n'est pas parvenue à répondre à toutes
les sollicitations. Privilégiant des déploiements au Sahel puis en
Libye, elle a compromis son action contre la piraterie au large de la
Somalie. L'amiral Rogel a regretté également « l'absence de
SNA en Atlantique pendant quatre mois, la réduction de la présence en
océan Indien à un seul bâtiment de surface à compter du mois de juin,
le gel de la mission Corymbe dans le golfe de Guinée en juillet 2011
ainsi que l'annulation de deux missions sur quatre de lutte contre le
narcotrafic en Méditerranée ».
Six mois de remise à niveau
Quant à la disponibilité des forces, elle n'a pu être
maintenue « qu'au prix d'une tension extrême sur nos moyens de
soutien. À titre d'exemple, à peine trois mois après le début des
opérations, les taux de prélèvements de pièces sur les bâtiments
avaient augmenté de 300 %. » Le Forbin
et le Chevalier Paul, les deux frégates de
défense aérienne de type Horizon, ont dû échanger des composants
majeurs : furent concernés les conduites de tir, le radar de
veille aérienne et la propulsion.
Parmi les autres conséquences de l'engagement en Libye,
l'amiral Rogel a pointé « une petite baisse d'activité dans le
domaine de la formation, notamment pour la lutte
anti-sous-marine » et le report de la transformation de la
flottille 11F sur Rafale. Un peu plus de six mois seraient nécessaires
à la Royale « pour revenir à l'ensemble de ses qualifications
opérationnelles ».
Aussi le format de notre Marine apparaît-il « juste
suffisant pour répondre aux ambitions de défense et de sécurité de
notre pays ». Cela s'avère d'autant plus préoccupant que,
selon l'amiral Rogel, « la mondialisation se traduira par une
"maritimisation" et qu'on verra se multiplier les flux maritimes
importants ».