Goldorak vs Belkacem

17 juillet 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Un personnage jugé jadis chevaleresque risquerait fort, aujourd'hui, d'être vilipendé pour "sexisme". Au point d'être censuré à la télévision et même sur la Toile ? C'est en tout cas le projet du gouvernement.

Étant donné ses appels répétés à traiter hommes et femmes sur un pied d'égalité, Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement, ne devrait pas nous reprocher de révéler son âge : elle a trente-cinq ans. Comme toute une génération, sans doute a-t-elle grandi avec Dorothée, suivant les aventures de Candy quand d'autres, dont nous étions, vibraient aux exploits de Goldorak - un dessin animé culte dont un premier volume est enfin disponible en DVD depuis le mois dernier (juin 2013).

Actarus et les femmes

Nostalgie mise à part, un épisode a plus particulièrement retenu notre attention : le neuvième, où Vega menace de détruire la planète Concordia si l'une de ses habitantes, le commandant Euridie, échoue à détruire Goldorak lors d'une mission suicide. Son vaisseau s'étant écrasé, le prince Actarus s'en approche dans l'espoir de faire un prisonnier. Découvrant l'identité du pilote, il est saisi d'effroi : « Une femme ! Je n'aurai jamais le courage de l'obliger à parler », s'exclame-t-il. L'accueillant parmi les siens, il l'invite à porter la robe que lui prête Venusia : « je ne veux pas voir d'uniforme militaire, surtout sur une femme », lui explique-t-il. De quoi donner la nausée à Mme Vallaud-Belkacem, au cas où elle se risquerait à revoir Goldorak, du moins en version française. Si l'on en croit les sous-titres proposés par AB vidéo sur la version originale, en effet, l'homologue japonais d'Actarus se montre plus réservé, quoique tout aussi prévenant.

Prononcées aujourd'hui à la télévision, a fortiori à l'intention du jeune public, ces paroles provoqueraient la réaction virulente des officines féministes. Pour preuve, un collectif vient de prendre à partie Thierry Pflimlin, le patron de l'audiovisuel public, après qu'eut été diffusé sur France 2, le 9 juillet, le deuxième épisode de "Qui sera le prochain grand pâtissier ?". Au cours de cette émission, les téléspectateurs auraient subi « un florilège incroyable de propos sexistes », selon une quarantaine d'associations. « À l'heure où France Télévisions s'engage pour l'égalité femmes-hommes dans ses programmes », leurs responsables jugent « curieux – pour ne pas dire fatigant, énervant, révoltant – d'entendre, en prime time, des phrases d'une bêtise aussi crasse que "les petites filles aiment les coccinelles et les petits garçons les dinosaures, les trucs bruts de décoffrage" ou encore que les femmes auraient des compétences particulières pour réaliser des gâteaux ». De leur point de vue,« ce genre d'inepties fige dans le marbre les stéréotypes et les préjugés, qui sont à la racine des inégalités ».

Le CSA nous surveille

Cette conviction semble partagée par le gouvernement, qui a présenté, le 3 juillet, un projet de « loi cadre sur l'égalité femmes-hommes ». Entre autres dispositions, ce texte prévoit d'étendre les compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) afin qu'il « assure le respect des droits des femmes dans le domaine de la communication audiovisuelle ». Le CSA devrait veiller, d'une part, « à une juste représentation des femmes dans les programmes des services de communication audiovisuelle » et, d'autre part, « à l'image des femmes qui apparaît dans ces programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein des couples ». Sous son contrôle, les chaines hertziennes devraient même contribuer « à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes en diffusant des programmes relatifs à ces sujets ». Un retour à la télévision d'État ?

La Toile n'est pas en reste, comme le souligne Marc Rees, rédacteur en chef de PC Impact. Si le projet était adopté en l'état, la loi obligerait les "intermédiaires techniques" à lutter activement contre le "sexisme" et l'"homophobie". Plus concrètement, explique notre confrère, « si dans un forum ou sur un réseau social, un internaute se lance dans ce genre de discours sexistes avec quelques propos fleuris appelant à la discrimination, l'hébergeur devra impérativement dénoncer ces contenus aux autorités dès lors que ceux-ci lui auront été signalés par un individu ».

Alors, Goldorak est-il bon pour la casse ? On ne reprochera pas aux pouvoirs publics d'annoncer, par ailleurs, une protection accrue des femmes victimes de violences conjugales. Reste une question posée incidemment par Actarus : son refus de porter la main sur une femme, mais aussi son aversion à la voir prendre les armes, ne relèveraient-ils pas d'une même inclination ? Le cas échéant, l'égalité, agitée à tout va, serait une piètre parade aux souffrances dont s'inquiète, légitimement, le porte-parole du gouvernement.

Albator : sur l'Arcadia, c'est l'anarchie plus un !

2 mars 2016
Article publié dans L'Action Française 2000

Dans les années soixante-dix et quatre-vingt, les petits garçons vibraient au rythme des aventures télévisées du capitaine Albator... Le moment est venu de leur rafraîchir la mémoire.

Le capitaine Harlock, alias Albator, vient de faire son retour dans les librairies. Dans l'ombre de Goldorak, ce personnage a bercé toute une génération de petits Français. Apparu dans un manga en 1969, puis à la télévision en 1978, il a présenté plusieurs visages au fil de ses aventures, jusqu'à la caricature : porté au cinéma en 2013, il y est apparu sous les traits d'un psychopathe, tentant de racheter ses fautes à la faveur d'un génocide galactique prétendument rédempteur...

Retour aux sources

C'est à un retour aux sources que nous sommes conviés aujourd'hui, alors que vient de paraître la traduction française du premier tome d'un nouveau manga, Capitaine Albator – Dimension Voyage. Il s'agit d'un remake fidèle de l'histoire originelle, faisant, en quelque sorte, la synthèse d'une œuvre éparse à la cohérence toute relative. Ainsi le personnage de Kirita (Vilak) est-il repris du dessin animé de 1978, mais sous les traits d'un autre, apparu dans les années 2000. Officiant toujours au scénario, Leiji Matsumoto, soixante-dix-huit ans, a cédé son crayon à Kouiti Shimaboshi. Le dessin s'avère modernisé, mais les nostalgiques ne devraient pas en être dépaysés.

Signe des temps : la reine Sylvidra arbore désormais un décolleté. Albator s'en trouvera-t-il émoustillé, comme des quadragénaires le furent jadis à la vue des Sylvidres dénudées ? Rien n'est moins sûr. Alors qu'il voue une amitié indéfectible à Tochiro, on ne lui connaît qu'une seule et unique aventure, à l'issue tragique. En tout cas, les féministes ne l'apprécient guère. Relisant le manga fondateur, Charles-Édouard Mandefield s'était désolé d'un « machisme décalé ». Un passage a plus particulièrement retenu son attention, explique-t-il sur Otakia (en ligne) : celui où Kei Yuki (Nausicaa) « met sa vie en péril pour ménager la susceptibilité de Tadashi » (Ramis) « et lui faire croire qu'il l'a sauvée ». « Dans cette histoire », conclut notre confrère, « le message en filigrane est donc que les femmes [...] doivent masquer leur vraie valeur pour ne pas offusquer la gente masculine ». C'est oublier que ces récits sont destinés surtout à des garçons... Peut-être certains en auront-ils tiré quelque leçon d'humilité !

Reste à savoir ce qu'il adviendra de cet épisode dans la suite du remake. Dans ce premier tome, alors que les Sylvidres se préparent à envahir la Terre, « la civilisation matérialiste a conduit le peuple à la dépravation », comme le remarque l'une d'entre elles. Conscient de la menace, le professeur Daiba alerte le ministre censé présider aux destinées de l'humanité. Hélas, déplore-t-il, « cette tète de mule ne pense qu'a jouer au golf » ! Son fils, Tadashi, en est révolté : « ce n'est qu'un inconscient qui se complaît dans l'indolence », observe-t-il. « Depuis quand les hommes ne son-ils plus qu'une bande de dégonflés ? », se demande-t-il encore. À la mort de son père, il décide de rejoindre l'Arcadia commandé par Albator. Un vaisseau « avec à son bord de vrais hommes » !

Romantisme viril

Considérant ses semblables avec dédain, Albator n'en engage pas moins un combat désespéré pour sauver la Terre. Sans doute ce "romantisme viril" explique-t-il la sympathie que lui accordent les militants italiens de Casapound. Les identitaires français ne sont pas en reste : « ce personnage luttant pour une humanité dans laquelle il peine pourtant à se reconnaître, marqué par ses combats dans son cœur comme sur son visage, et hissant le pavillon noir à tête de mort sur son vaisseau, avait tout pour séduire les pirates identitaires », explique Philippe Vardon-Raybaud. Dans son livre, Éléments pour une contre-culture identitaire, tout comme dans celui d'Adriano Scianca, Casapound – Une terrible beauté est née !, Albator côtoie Ernst Jünger, dont il incarne précisément la figure du rebelle : « celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche de l'univers, se voit enfin livré au néant » ; « résolu à la résistance », il « forme le dessein d'engager la lutte, fût-elle sans espoir » ; « est rebelle, par conséquent », aux yeux de l'écrivain allemand, « quiconque est mis par la loi de sa nature en rapport avec la liberté, relation qui l'entraîne dans le temps à une révolte contre l'automatisme et à un refus d'en admettre la conséquence éthique, le fatalisme ».

Cependant, errant dans l'espace (et non dans les forêts), notre rebelle ne serait-il pas un apatride ? « Sous la bannière de la liberté, il parcourt les mers sans fin de l'univers en ne comptant que sur lui-même », s'enthousiasme un jeune homme déshérité, croisé dans les pages du manga. Alors qu'il s'apprête à s'envoler, Tadashi détruit un drapeau aux couleurs de la confédération terrestre. « Mon étendard à moi est orné d'une tête de mort », se justifie-t-il. Cela étant, toute notion d'héritage ne lui est pas étrangère, bien au contraire, car il poursuit, à sa façon, l'œuvre de son père. Albator, quant à lui, cultive la fidélité dans la tradition de sa lignée...

Nationalisme japonais

Au sein de l'équipage, il règne un sympathique désordre, dont s'émeut Tadashi : « ce vaisseau est un vrai cirque », se lamente-t-il, outré, alors qu'il en fait la visite. Mais quand vient l'heure du combat, sous les ordres du capitaine, chacun répond toujours à l'appel... Autrement dit, à bord de l'Arcadia, c'est l'anarchie plus un ! Ce vaisseau présente l'allure générale d'un cuirassé, sur lequel auraient été greffées les ailes d'un avion, mais aussi la poupe d'un vieux galion. La grande classe ! Dans une œuvre connexe, Leiji Matsumoto avait même exhumé le croiseur Yamato, puisant ainsi « dans les racines du nationalisme japonais », comme l'expliquait Didier Giorgini dans la revue Conflits (n° 3, automne 2014)... Preuve que la politique n'est jamais très loin !

Leiji Matsumoto (scénario) et Kouiti Shimaboshi (dessins), Capitaine Albator – Dimension Voyage, tome I, Kana, février 2016, 5,95 euros.

Vénusia, « la Jeanne d'Arc de l'espace »

9 mars 2014

Actarus et les femmes, épisode III. Où le prince d'Euphor s'emporte contre la "théorie du genre" !

Le quatrième coffret DVD des aventures de Goldorak fait la part belle à Vénusia. Dans les premiers épisodes (37, 38 et 39), sa promotion au rang d'héroïne fait l'objet d'une véritable mise en scène. La jeune femme se montre d'autant plus frustrée d'être tenue à l'écart des combats qu'elle a fait ses preuves, allant jusqu'à suppléer Alcor aux commandes de son appareil.

Le prince d'Euphor n'en reste pas moins sourd à ses suppliques. « Tu n'es qu'une gamine », lui lâche-t-il dans la langue de Molière, avant de l'écarter avec brutalité. « Lutter contre l'envahisseur n'est pas un travail de fille, laissons cela aux garçons », lance-t-il à Rigel. « Je ne cherche pas à minimiser les mérites de ta sœur », se justifie-t-il auprès de Mizar. « Au contraire je la trouve exceptionnelle »,  affirme-t-il. Cependant, « une guerre n'est pas une partie de plaisir », explique-t-il. « C'est ce qu'il y a de pire au monde. C'est la plus laide invention de l'homme. Mais puisqu'il la créée, l'homme doit la faire, chacun à sa place. Tu vois cette herbe ? Elle apparient à la terre qui l'a engendrée. Si tu l'arraches ou la changes de place, elle meurt. Les êtres et les choses ne doivent pas changer de place. Ta sœur est une femme et doit rester femme. Et je ne veux pas qu'il lui arrive malheur. » Auparavant, Actarus s'était inquiété de la voir « à son tour engagé dans cette guerre » : « c'est moi qui vais trembler pour elle maintenant », avait-il murmuré en son for intérieur.

« Elle a des capacité formidables, c'est peut-être à cause de ton sang », lui fait-on remarquer (dans un épisode précédent, Vénusia avait bénéficié d'une transfusion sanguine). Quoi qu'il en soit, confronté à la menace croissante de Véga, Actarus se résout finalement à l'accepter dans « la patrouille des trois aigles ». Le professeur Procyon s'inquiète alors de la réaction de Rigel - deux épisodes plus tôt, celui-ci s'était indigné voir sa fille porter une jupe beaucoup trop courte à son goût... « Je crains que vous ne donniez pas votre autorisation », lui avoue-t-il. « Vous plaisantez ! », lui rétorque Rigel. « Dieu soit loué, j'ai engendré la Jeanne d'Arc de l'espace », se félicite-t-il. Une allusion à l'histoire de France introduite par les responsables de l'adaptation française, comme la plupart des dialogues cités ci-dessus. Actarus apparaît manifestement un peu plus misogyne que Daisuke, son homologue japonais.

NB - Découvrant à son tour l'identité réelle d'Actarus, Rigel se dit vexé d'avoir été tenu à l'écart du secret, au point de menacer de se faire hara-kiri. Illustration teintée d'humour du sens de l'honneur cher aux Japonais.

Actarus et les femmes

12 septembre 2013

Suite du feuilleton : cette fois-ci, Goldorak perd des points face au gouvernement.

Précédemment, nous avions opposé Goldorak à un Golgoth d'un nouveau genre, à savoir Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement. Sans scrupule particulier, nous avions pris la défense du premier. Mais voilà que dans un épisode suivant (le vingt-troisième), Actarus se comporte en vrai goujat.

De retour au ranch du bouleau blanc, qu'il avait déserté des heures durant pour combattre Véga, il ne sait comment justifier son absence, provoquant la colère de Vénusia. Alors qu'un cheval s'est enfui dans la montagne, celle-ci veut partir à sa recherche. « C'est trop dangereux pour une femme », lui rétorque Actarus. Dans la version originale, il se montre toutefois plus courtois : « c'est de la folie », se contenterait-il d'avertir, si l'on en croit les sous-titres proposés par AB-vidéo.

Un peu plus loin, en tout cas, les images ne trompent pas. Alors que son amie vient de tomber dans un précipice, le prince d'Euphor se « métamorphose » pour lui venir en aide. Aussi doit-il lui révéler sa véritable identité. Désemparée, voire effrayée, Vénusia se montre distante. Froissé par sa réaction, Actarus la traite d'« idiote ». Pire, il lui donne une claque. Ça craint ! Manifestement honteux de son geste, il ne présentera pourtant aucune excuse.

Sur ce coup-là, il est indéfendable. Un point pour Najat, donc. Affaire à suivre, au fil des parutions en DVD.