7 juin 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Petite pique en direction de François Hollande, thuriféraire
des eurobonds.
D'une pauvreté affligeante, les premières conférences de
presse du président Hollande lassent davantage que celles de son
prédécesseur, qui ne ménageait pas nos confrères, mais savait ponctuer
ses interventions de quelques touches d'humour.
Le 23 mai, le nouvel hôte de l'Élysée s'est fendu
d'une question qui se voulait rhétorique : « Est-il
acceptable que certaines dettes souveraines pour être financées soient
obligées de consentir des taux d'intérêts à plus de 6 % et que
d'autres pays [puissent] accéder à des financements à des taux
d'intérêts voisins de zéro dans la même Union monétaire,
budgétaire ? » Or, si l'Union monétaire constitue une
réalité, certes chaotique, l'union budgétaire demeure un fantasme.
Lequel se réaliserait à la faveur d'une mutualisation des emprunts
obligataires promue par François Hollande. En Europe comme en France,
sans doute s'agit-il de faire payer les riches – comprenez l'Allemagne.
On imagine avec quelle facilité celle-ci va se laisser
convaincre : la fourmi n'est pas prêteuse... Autant parasiter
ouvertement les sommets internationaux !
Dans un accès de magnanimité, Berlin semble enclin à inscrire
aux calendes grecques l'introduction des "eurobonds". On attend avec
impatience les conclusions du prochain Conseil européen, dont le chef
de l'État se gargarisera vraisemblablement comme il fit de celles du
G8, après y avoir glissé une coquille vide – en l'occurrence, le mot
"croissance". « Je considère que le mandat que j'avais reçu du
peuple français a été, dans un premier temps, déjà honoré »,
a-t-il déclaré, fort de son succès diplomatique. Rien de plus
"normal" !
21 mai 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Au milieu du village global, un pays résiste, encore et
toujours, aux canons de la mondialisation promus par les artisans de la
gouvernance planétaire...
À la faveur de l'élection présidentielle, la France aurait
« réaffirmé sa profonde vocation républicaine, qui fait primer
la volonté politique sur la fatalité des marchés, la sensibilité
sociale sur les recettes financières, et la justice et la solidarité
sur l'exclusion », selon Hugo Chavez. S'agit-il d'un soutien
de poids pour François Hollande ? Affaibli par la maladie,
bientôt sur le départ, le président du Vénézuela s'est fait voler la
vedette, sur la scène latino-américaine, par son homologue argentin,
Cristina Kirchner.
Repsol exproprié
Celle-ci s'attire les éloges des pourfendeurs de la
mondialisation, tel Aymeric Chauprade : « l'Argentine
[...] apporte au monde une preuve supplémentaire que la voie du
redressement et de la liberté des peuples passe par l'indépendance
nationale et la rupture » avec le FMI, la Banque mondiale,
l'Union européenne, etc., a-t-il écrit sur son
blog. Il y a dix ans, déjà, Buenos Aires s'était distingué en cessant
de rembourser quelque 100 milliards de dollars de dette
extérieure. Aujourd'hui, il pratique « un protectionnisme
décomplexé », comme le relevaient, début mars, nos confrères
de La Tribune. De fait, « pour exporter en Argentine,
on doit s'engager à importer des produits argentins ou à investir dans
le pays pour ne pas risquer de voir ses produits bloqués aux douanes.
Parmi les cas les plus connus, le constructeur automobile allemand
Porsche a dû en 2011 s'engager à acheter du vin et de l'huile d'olive
argentins pour faire entrer une centaine de véhicules. Le fabricant
canadien Blackberry a dû, lui, annoncer l'ouverture d'une unité de
production en Terre de Feu (sud) pour continuer à vendre ses
portables. » Cependant, « en janvier, lassée des
retards provoqués par les nouveaux contrôles, le constructeur
automobile Fiat a arrêté son usine de Ferreyra (Cordoba, centre)
pendant 48 heures. Un avertissement pour le
gouvernement. »
Celui-ci ne semble pas se laisser démonter, comme en témoigne
la nationalisation de la société pétrolière YPF, aux dépens du groupe
espagnol Repsol... et dont pourrait profiter Total, qui en était déjà
un partenaire habituel. Scandalisés, le Washington Post
et le Wall Street Journal ont appelé à exclure
l'Argentine du G20, où son voisin chilien mériterait de lui succéder.
En réaction, le gouvernement espagnol a annoncé une limitation des
importations de biodiesel argentin. Mais selon l'analyse du Fauteuil de
Colbert, publiée par l'Alliance géostratégique (AGS), « il va
sans dire que Madrid est quelque peu démunie dans cette crise. La
Commission européenne a beau dire que... la Commission européenne ne
peut rassembler ni coalition, ni moyens de coercitions pour soutenir
l'Espagne. Cerise sur le gâteau, le nouveau gouvernement de Mario Rajoy
prend à peine ses marques dans une Espagne exsangue, et la contestation
sociale gronde. »
Les Malouines
Cela étant, poursuit l'auteur, « il y a [...],
forcément, quelques probabilités que la crise argentino-espagnole ne
vienne heurter le conflit anglo-argentin ». Voilà tout juste
trente ans se déroulait la guerre des Malouines. Depuis, le différend
opposant Londres et Buenos Aires ne s'est jamais dissipé. Les tensions
se sont même ravivées à l'approche de cet anniversaire, puisque les
navires battant le pavillon de l'archipel ne sont plus autorisés à
accoster dans les ports argentins... Dans cette affaire,
Mme Kirchner bénéficie d'ailleurs du soutien de la Bolivie, du
Brésil, du Chili et de l'Uruguay.
Ces deux crises, avec l'Espagne d'une part, le Royaume-Uni
d'autre part, « gravitent autour de la question des richesses
pétrolières qui gisent au large des côtes du Brésil et de l'Argentine -
et en Guyane », explique le Fauteuil de Colbert.
« Sous cet angle, il est moins certain que l'action argentine
actuelle ne vise qu'à détendre les cours actuels de l'or noir sur le
marché argentin. Cette action n'a-t-elle pas quelques visées à plus
long terme ? » L'auteur relève encore « des
enjeux de puissance car les richesses pétrolières brésiliennes
permettrait à Brasilia de produire plus d'or noir que BP ou
Exxon ». Quoi qu'il en soit, conclut-il, « il est
possible de se demander si Buenos Aires peut faire face à deux crises
sérieuses avec deux pays ayant des intérêts voisins dans les deux
conflits ».
21 mai 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Les nouveaux services de la Toile présentent une dimension stratégique.
Facebook espérait placer plus de 300 millions d'euros
à l'occasion de son entrée en bourse. Une somme à la mesure des
bouleversements accompagnant l'émergence des réseaux sociaux. Lesquels
affectent les modalités de navigation sur la Toile, mais aussi la
sécurité nationale, voire le déroulement des conflits armés.
Le ministère de la Défense vient d'ailleurs de publier un "guide
de bonnes pratiques" à l'intention des militaires s'exprimant sur le
"web 2.0". « De simples statuts, photos ou vidéos peuvent
parfois contenir des informations stratégiques », prévient
l'Hôtel de Brienne. De fait, l'année dernière, un marin embarqué sur le
Charles de Gaulle avait annoncé sur Facebook son
départ pour la Libye avant que le déploiement du porte-avions soit
rendu public...
Dans un entretien accordé à Florent de Saint Victor, publié
par l'Alliance géostratégique (AGS), Marc Heckern, chercheur à l'Irsem,
évoque l'annulation d'une opération programmée par Tsahal, après qu'un
soldat israélien eut annoncé sur Facebook : « Mercredi, on
nettoie [le village de] Qatana et jeudi, si Dieu le veut, on rentre à
la maison. » Quant à la rébellion libyenne, Charles Bwele
rapporte, toujours sur le site de l'AGS, qu'elle a pratiqué une
utilisation intensive de Twitter et même détruit un véhicule
lance-roquettes par la magie du net : « Grâce à leurs
ordinateurs portables, à leurs smartphones et à Google
Earth », les guérilleros « purent orienter et ajuster
précisément leurs tirs », atteignant leur cible en dépit de
leur piètre expérience.
Preuve que les cartes sont bel et bien rebattues à l'heure de
la révolution numérique.
Chronique enregistrée pour RFR
le dimanche 1er avril 2012.
Nos auditeurs savent-ils dans quelles conditions sont
fabriqués les Iphone qu'ils trimballent dans leur
poche ? Ils sont assemblés en Chine, dans une usine
où l'on travaille souvent plus de quarante-neuf heures par
semaine. C'est davantage que le plafond légal
fixé dans l'empire du Milieu. Cela ressort des conclusions
d'un audit réalisé par la Fair labor association,
dont les conclusions ont été publiées
jeudi dernier (le 29 mars 2012).
Que les fanatiques d'Apple se rassurent : ils ne sont
pas coupables de contribuer à faire travailler des enfants.
De toute façon, mon intention n'est pas de les accuser de
quoi que ce soit. Je cherche plutôt à les mettre
en garde contre l'avenir qui nous est réservé.
En effet, un candidat à l'élection
présidentielle a proclamé son ambition de
fabriquer des smartphones non pas en Chine, mais en France. Et je ne
vous parle pas d'un candidat de seconde division. Bien au
contraire : selon des analyses manifestement très
sérieuses, ce candidat-là serait le mieux
placé pour vaincre François Hollande au second
tour. C'est un serviteur illustre de la France, l'incarnation
même de la nation, la nouvelle Jeanne d'Arc !
Demain, les royalistes marcheront sur Reims aux
côtés de Marine Le Pen.
En attendant, quand un Iphone est importé aux
États-Unis, étant donné l'origine des
différents composants, ce sont seulement 4 % de son
prix qui reviennent à la Chine. 4 % :
s'agit-il de la part que l'égérie populiste
voudrait réserver à la France ? 4 %,
contre 14 % à la Corée du Sud,
18 % à l'Allemagne, 36 % au
Japon ?
Aux yeux d'un certain nombre d'économistes, tel
Olivier Bouba-Olga, « on peut donc opposer deux
stratégies en matière de politique
industrielle » : d'une part, la
stratégie popularisée par la campagne
électorale, « qui vise à
soutenir la production de biens "made in France" vendus en
France » ; d'autre part,
« la stratégie japonaise ou allemande,
qui vise à être bien placé dans les
processus de production de produits "made in monde" vendus... partout
dans le monde ».
Prétendre que l'on serait plus ou moins patriote
selon que l'on promeuve l'une ou l'autre de ces stratégies,
c'est une belle ânerie, permettez-moi de le dire.
Hélas, les royalistes se rendent volontiers complices d'une
instrumentalisation démagogique du sentiment national. Je
suis désolé de le proclamer à ce
micro, mais le "patriotisme économique", à bien
des égards, c'est à l'économie ce que
le "bio" est à l'agriculture. C'est un gadget marketing,
dont la mise en œuvre suppose une normalisation hasardeuse,
pour des bénéfices vraisemblablement marginaux.
Érigé en politique, d'aucuns
prétendent qu'il serait même
« suicidaire ». Parce que si vous
vous interdisez de délocaliser certaines
activités, vous renoncez également à
allouer de façon optimale les ressources dont vous disposez.
Le problème se pose en termes similaires à propos
des progrès techniques. Cela n'a pas
échappé aux parlementaires de l'UMP, dont on
connaît l'ultra-méga-super-libéralisme.
J'en tiens pour preuve deux propositions de loi
déposées il y a quelques mois : d'abord,
celle du député Alain Moyne-Bressand,
« visant à interdire la
généralisation des caisses automatiques aux
barrières des
péages » ; ensuite, celle du
sénateur Alain Houpert, visant à
« assujettir aux prélèvements
sociaux le chiffre d'affaires réalisé par les
caisses automatiques ». En Allemagne, on
compte, paraît-il, trois fois plus de robots industriels que
chez nous. Demandez-vous pourquoi l'économie d'outre-Rhin
est réputée plus compétitive que la
nôtre...
On prétend sauvegarder l'emploi en s'opposant
à la technique ou à la mondialisation. Mais
conserver, c'est dépérir ! Entasser du
blé dans un grenier, stocker des aliments sous vide, cela
permet de subsister quelques mois, voire quelques années.
S'il convient de se préparer à affronter les
disettes, cela ne saurait nous détourner du travail
quotidien de la terre, ni des semis réguliers :
sans cesse nous devons remettre l'ouvrage sur le
métier ! C'est la vie, et nulle incantation
volontariste n'y changera jamais quoi que ce soit.
Les cas de relocalisation en témoignent :
ils ne concernent pas des emplois recrées
à l'identique, mais ils résultent
généralement d'un repositionnement de
l'activité vers une offre de meilleure qualité.
Par conséquent, si nos responsables politiques
témoignaient d'un peu de "patriotisme
économique", ils commenceraient par sortir de la farandole
courant de Florange à Petit-Couronne, où les
candidats à l'élection présidentielle
défilent pour visiter les usines du passé.
Catoneo l'a martelé sur Royal Artillerie :
« Plutôt que de lever le poing au ciel,
nous devons développer de l'industrie à travers
des métiers neufs et sans tarder, car les courbes ne
s'inverseront pas. Innovons ! Découvrons !
Inventons ! »
Vincent Benard a lancé cet avertissement
relayé par l'Institut Turgot :
« Si nous ne corrigeons pas le tir, le
déclin de notre système éducatif et
notre fiscalité punitive de la prise de risque pourraient,
dès le second tiers du présent siècle,
cantonner un pays comme la France au rôle de pourvoyeur de
cols bleus mal payés pour le compte de décideurs
des pays émergents. » Je vous l'ai
dit : on fabriquera des smartphones en France... Bien que ses
concurrents ne s'en distinguent pas fondamentalement, au moins Marine
Le Pen annonce-t-elle fièrement la couleur.
Rendez-vous sur le site de RFR pour
découvrir les autres interventions :
2 mars 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Bénéficiant d'une immense
popularité en Amérique latine, la France aurait
négligé, des années durant, de mettre
à profit un tel atout. Il est temps de réparer
cette erreur, martèle, plein d'enthousiasme, le
député Jean-Luc Reitzer.
La France « compte-t-elle enfin
définir et mettre en œuvre la politique
latino-américaine qu'elle n'a jamais
eue ? » Telle est la question
posée par Jean-Luc Reitzer, député UMP
du Haut-Rhin, en conclusion d'un rapport d'information
enregistré le mois dernier (en février 2012)
à la présidence de l'Assemblée
nationale. Fervent promoteur d'un rapprochement avec
l'Amérique latine, il doute « qu'aucun
autre pays ait été aussi adulé que la
France l'a été par les élites de la
région ». Toute une
génération de Brésiliens a d'ailleurs
été formée à la culture
française, suivant l'enseignement dispensé par
les Alliances françaises. Pourtant, regrette le
parlementaire, « il n'est pas certain que la France
ait toujours su répondre à l'attente qu'elle a
suscitée ». Sa présence dans
la région souffrirait de la comparaison avec ses voisins
européens. Par son silence, le Livre blanc sur la
défense et la sécurité nationale
l'avait confirmé en 2008 : « Le
sous-continent latino-américain est clairement le grand
absent de notre réflexion diplomatique et
stratégique. »
Continuité gaullienne
Cela ne date pas d'hier. À la veille d'un voyage en
Amérique latine, le général
De Gaulle, alors président de la
République, avait confié à Michel
Debré qu'il partait « sans programme
diplomatique bien précis ». Tout au plus
cherchait-il des partenaires susceptibles d'interférer dans
le tête à tête de Moscou et Washington.
« On ne s'est jamais vraiment
intéressé à l'Amérique
latine pour ce qu'elle est ou pouvait être, au mieux pour ce
qu'elle pouvait apporter dans un équilibre
multipolaire », analyse Jean-Luc Reitzer. De ce
point de vue, Jacques Chirac s'inscrirait dans la continuité
de son prédécesseur, développant des
relations bilatérales afin « de trouver
des appuis, au sein du Conseil de sécurité des
Nations Unies par exemple, pour peser dans la relation tendue que la
France avait avec les États-Unis au long de ces deux
présidences ».
De fait, « l'Amérique latine
dans son ensemble est désormais vue par la France comme un
partenaire obligé, indispensable pour faire avancer les
grands dossiers internationaux », tels le
réchauffement climatique ou la
sécurité alimentaire. Cela étant, en
dépit de multiples convergences avec Paris, Brasilia n'a pas
caché les réserves que lui inspiraient ses
interventions en Côte d'Ivoire et en Libye. Mais les
relations commerciales constituent « la
première pierre d'achoppement ». D'autant
que la France a pris la tête de l'opposition
européenne à la conclusion d'un accord avec le
Mercosur, dont risqueraient de pâtir les exploitants
hexagonaux : « Je ne serai pas le
président qui laissera mourir l'agriculture
française », a prévenu Nicolas
Sarkozy.
Multilatéralisme
Si l'on excepte le "partenariat stratégique"
– mais non exclusif, loin s'en faut – mis en
œuvre avec le Brésil, « la
dimension purement bilatérale de notre action
vis-à-vis des pays d'Amérique latine ou, du
moins, de certains d'entre eux, [...] semble réduit
à une portion de plus en plus congrue »,
déplore le rapporteur. Selon lui, « la
tendance à la multilatéralisation de la relation
de la France avec les pays d'Amérique latine, si elle n'est
évidemment pas récente, n'a fait que se confirmer
au fil du temps, à mesure que l'action bilatérale
tendait à
décroître ». À
l'heure actuelle, la France s'implique plus particulièrement
dans la Banque interaméricaine de développement
(BID). Elle figure au premier rang des seize pays européens
actionnaires de l'institution, à
égalité avec l'Allemagne, et dispose d'un
siège au Conseil d'administration, partagé par
rotation avec l'Espagne. « Il s'agit là
évidemment d'un atout
considérable », estime le
député du Haut-Rhin. Un tel statut permettrait
à la France de « conforter sur le long
terme sa présence régionale, que ce soit sur des
questions relatives à l'APD [l'aide publique au
développement], au bénéfice des pays
les moins développés de la zone, ou sur des
enjeux plus économiques, dans les plus
importants ». Selon Jean-Luc Reitzer,
« un véritable potentiel s'offre ainsi
aux entreprises françaises. Une collaboration s'est
d'ailleurs très vite instaurée entre l'AFD
[l'Agence française de développement ] et la BID,
de plus en plus étroite. » C'est
même sur la base d'une étude préalable
financée par la BID qu'Alstom a remporté le
marché du métro de Panamá, nous dit le
rapporteur.
Quoique les marchés n'y soient pas d'un
accès toujours aisé, la période
actuelle est jugée faste pour les "investissements directs
à l'étranger" (IDE) en Amérique
latine. « Il apparaît toutefois que les
IDE français restent relativement limités et que
la France ne profite pas comme elle le pourrait de cette dynamique
régionale. De sorte que bien que certaines entreprises
françaises aient participé fortement aux
privatisations sud-américaines au milieu et à la
fin des années 1990, nos IDE ne dépassent que
rarement 3 % des flux globaux que reçoit
aujourd'hui le sous-continent. » Le rapporteur
pointe « une certaine
frilosité », sans occulter de
« remarquables
succès », telles l'implantation durable
au Brésil de Carrefour, Casino et Suez, ou la
présence de Sodexho au Pérou, où la
société est devenue, comme au Chili, le premier
employeur. En outre, « si elle est modeste, la
présence des IDE français n'est cependant pas
anodine ». Elle aurait même tendance
à s'accroître ces dernières
années.
Le Brésil rafle la mise
La majorité des investissements français
en Amérique latine (près de 70 %) sont
dirigés vers le Brésil, où ils
enrichissent un "stock d'IDE" près de deux fois plus
important qu'en Chine ! « Parmi les
principales opportunités actuelles, de très gros
projets sont envisagés dans les transports – TGV
Rio de Janeiro-Campinas –, dans la
génération d'énergie, sur laquelle
Alstom et GdF-Suez sont sur les rangs avec les projets de barrage de
Belo Monte et Jirau, ainsi que dans les domaines spatial ou
nucléaire, qui intéressent respectivement des
sociétés comme Thalès, Ariane Espace
et Areva. PSA, qui a annoncé par ailleurs un investissement
de 940 millions d'euros en Amérique latine, produit
quelque 150 000 véhicules par an au
Brésil. »
En 2010, la part de l'Amérique latine dans notre
commerce extérieur se limitait à 2,7 %.
Or, soutient Jean-Luc Reitzer, « les milieux
d'affaires, qu'ils soient Français expatriés ou
non, sont majoritairement désireux d'une présence
supérieure de notre pays dans la
région ». Le député
se fait l'écho d'une exceptionnelle francophilie :
« Quand bien même les relations,
commerciales notamment, seraient-elles aujourd'hui plus importantes
avec d'autres pays européens qu'avec le nôtre, les
interlocuteurs, unanimes, n'en soulignent pas moins que "la
qualité du dialogue n'est pas la même" et qu'"il
n'y a pas la même identification", voire, même, pas
les a priori dont d'autres peuvent pâtir. La relation avec la
France est toujours présentée comme
particulière, voire unique, non
stéréotypée, à l'inverse de
ce qui se passe pour d'autres, et il ne tient qu'à la France
de savoir profiter de cet avantage incomparable. Tel est [...] le
message que la mission a continûment
entendu. »
Vers un choc des cultures ?
Au-delà des IDE, des transferts de
compétences sont escomptés. Le savoir-faire de la
France en matière de tourisme constituerait une
expérience précieuse pour l'Équateur,
par exemple. D'ores et déjà, la collaboration
scientifique de part et d'autre de l'Atlantique s'avérerait
très fructueuse. Selon le rapporteur,
« la France pourrait opportunément tirer
profit de son image et de l'attente qu'elle suscite pour
compléter son offre actuellement centrée sur la
création de lycées d'excellence en
échange de la réintroduction de l'enseignement du
Français dans les cursus scolaires ». Une
carte à jouer parmi tant d'autres...
« De l'avis unanime »,
explique-t-il, « la proximité culturelle
contribue grandement à résoudre les
difficultés éventuelles ».En
ce sens, poursuit-il, « la latinité est
un atout considérable ». Cependant,
prévient-il, « l'appui traditionnel des
élites sur lequel la France a longtemps compté
pour entretenir son image et ses positions en Amérique
latine risque d'évoluer et d'être à
l'avenir un instrument moins efficace, ne serait-ce que parce nombre
d'entre elles sont plus facilement allées étudier
aux États-Unis qu'en France ». Aussi
celle-ci devrait-elle se mobiliser sans tarder pour
« ne pas rater le coche ».
D'autant que « si l'Amérique latine se
sent aujourd'hui globalement toujours occidentale, certains pays sont
désormais sur des registres en partie, voire radicalement,
différents. C'est le cas en premier lieu de la
Bolivie. » D'une certaine manière, il
faudrait tenir compte, dorénavant,
« d'une forme de choc des
cultures ».
22 février 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Quand l'Assemblée nationale se saisit d'une
polémique à la suite des Associations familiales
catholiques.
L'année dernière, une
polémique s'était ouverte tandis qu'on
découvrait de nouveaux manuels de sciences de la vie et de
la terre (SVT) destinés à des
élèves de Première. La notion de
"genre" s'y trouvait complaisamment présentée,
quoiqu'elle ne soit pas explicitement citée dans les
programmes de l'Éducation nationale. « Ce
sont donc certains manuels qui [...] ont
développé une approche quelque peu exploratoire
de la question », soutient Xavier Breton,
député UMP de l'Ain.
Un arbre de Noël
À l'automne, une commission de
l'Assemblée nationale l'avait chargé d'animer un
groupe de travail créé en raison de cette
controverse. Dans ses conclusions, mises en ligne le
1er février, il relève un
« décalage entre le pouvoir
prêté au manuel et la
réalité de son utilisation ».
En effet, explique-t-il, « le contenu du manuel est
toujours perçu comme étant prescriptif alors
qu'il n'est plus conçu, comme ce fut le cas auparavant,
comme un "doublon" du programme ». De fait,
« le manuel ressemble désormais
à un "arbre de Noël" ou à des "extraits
de presse" » – un format censé
« aider les enseignants à mettre en
œuvre une pédagogie fondée sur le
questionnement et l'interaction en classe »...
M. Breton n'en déplore pas moins un manque
de concertation : « C'est uniquement
à la demande des éditeurs, et donc de
manière ponctuelle, que des réunions sont
organisées avec la direction générale
de l'enseignement scolaire et les groupes d'experts afin de
présenter l'esprit » des nouveaux
programmes. Revisés tous les cinq ans en moyenne, ceux-ci
sont élaborés selon une procédure
jugée « peu
transparente ». À l'opposé,
« devrait-on [...] prévoir l'organisation
de débats démocratiques sur les projets de
programmes ? » Selon le
député de l'Ain, ce serait
« prendre le risque que ces discussions
débouchent sur ce que certains n'hésiteraient pas
à appeler des "victoires" ou des
"défaites" au regard des opinions
défendues. Dans ces conditions, aux yeux d'une partie de
l'opinion, l'école ne pourrait plus être ce lieu
neutre où l'on acquiert des connaissances et des
compétences. »
Mme Françoise Imbert,
député PS de Haute-Garonne, s'accommoderait
volontiers d'une telle situation. Intervenant lors d'un
débat en commission, elle a jugé essentiel que
les manuels scolaires soient conçus de façon
à « faire évoluer les
représentations de la femme dans notre
société ».
« Ne faisons pas de cet objet [...] l'enjeu d'une
lutte politique », lui a rétorqué
Jean-Pierre Giran, député UMP du Var.
Au fond, c'est bien la mission assignée
à l'École qui est en cause. La tentation est
grande de l'instrumentaliser à des fins
idéologiques. Or, à la faveur de l'indignation
relayée par les Association familiales catholiques,
plusieurs parlementaires ont suggéré que le choix
des manuels soit soumis à l'approbation de
l'État, ou du moins orienté par l'attribution
d'un label officiel. C'est dire la perversité de la
République, susceptible de retourner à son
avantage les critiques les plus légitimes...
Chronique enregistrée pour RFR le lundi
23 janvier 2012.
L'année dernière, quelques prophètes avaient annoncé que
l'euro ne survivrait pas à 2011 – c'était le cas, on s'en souvient,
d'Emmanuel Todd. L'entrée dans la nouvelle année les a couverts de
ridicule ! Bien sûr, le spectre d'un éclatement de l'Union
économique et monétaire hante les esprits. Mais si l'on s'en tient au
cours des devises, en dépit d'une inflexion récente à la baisse, force
est de constater que l'euro inspire toujours confiance. Quant à nos
auditeurs, je doute qu'aucun commerçant les ait jamais priés de régler
leurs achats en or ou en dollars. Chacun peut donc le constater au
quotidien : l'euro n'est pas en crise. Du moins, pas au sens
strict.
D'ailleurs, la crise de la dette est loin d'affecter les seuls
États partageant la monnaie unique, quoique celle-ci leur complique
effectivement la tâche pour en sortir. Le redressement des comptes
publics est devenu une préoccupation majeure au Royaume-Uni, aux
États-Unis, au Japon aussi. C'est dire la légèreté avec laquelle on
attribue parfois à l'euro la responsabilité de tous nos malheurs.
En fait, les souverainistes me rappellent ces gens qui, au
lieu de condamner les violeurs, incriminent leurs victimes, coupables
de les avoir tentés en affichant leur féminité. Tu portais une
mini-jupe ? C'est bien fait pour ta gueule ! Cool...
On sait que les Grecs ont maquillé leurs comptes publics ;
mais ils en sont tout excusés, puisque c'était pour coller aux critères
de convergence du traité de Maastricht. Ils se sont trop
endettés : c'est encore la faute de l'euro, puisque celui-ci
leur a permis de le faire à moindre coût. Parallèlement, on nous
explique que la France pâtirait non pas de l'ampleur de ses emprunts,
mais de leur coût depuis qu'ils sont souscrits sur les marchés
financiers. Bonjour la cohérence.
Tout cela me semble symptomatique d'une démarche idéologique.
Évoquant l'"empirisme organisateur" cher à l'AF, Maurras.net
explique qu'il s'agit « de "voir les faits", de se laisser
guider par eux, sans faire intervenir un vocabulaire sentimental. Rien
ici n'est de l'ordre de la détestation, de l'indisposition, ou d'un
mouvement de l'âme si cher aux politiques romantiques et, plus tard,
aux démagogues électoraux qui y trouvent le moyen de remuer les foules
d'électeurs ou d'émeutiers. » Présentant l'attitude de Maurras
à l'égard des colonies, le site précise que celles-ci n'étaient jugées
« ni bonnes ni mauvaises métaphysiquement ». En
effet, « ce sont les conditions objectives de leur
développement, de leur maintien, de leur profit pour la nation qu'il
s'agit d'examiner ». Sans préjuger des conclusions, je pense
qu'il faudrait faire de même avec l'euro. D'autant que s'en
débarrasser, c'est autre chose que de ne pas l'avoir adopté...
J'en vois déjà certains sauter sur leur chaise comme des
cabris en disant "souveraineté", "souveraineté". Mais cela ne recouvre
rien de concret. Leur discours n'est que le paravent d'un idéalisme
républicain, dont participe la dénonciation récurrente du "déficit
démocratique". Par cette expression, on ne pointe pas la capacité des
responsables politiques à décider ou non en toute indépendance, mais
leur inclination à court-circuiter le Sénat et l'Assemblée par
l'entremise des institutions européennes. Marine Le Pen n'a
pas manqué de verser dans cette rhétorique : dans son projet
présidentiel, elle se félicite de l'élection des eurodéputés au
suffrage universel direct, et déplore que leurs pouvoirs n'aient pas
été davantage accrus. C'est un comble ! En effet, des trois
sommets constituant le "triangle institutionnel" de l'Union européenne,
le Parlement est clairement le plus fédéral.
Parlons plutôt de puissance et d'indépendance, mais sans faire
de celle-ci un absolu. Laisser sa voiture au garage, pour lui préférer
le train, voire l'avion, c'est sacrifier un peu de son indépendance,
mais cela n'en reste pas moins un choix souverain, motivé,
vraisemblablement, par la volonté de s'ouvrir de nouveaux horizons.
Quant à l'achat d'une voiture, cela va sans dire, il présenterait peu
d'intérêt pour un individu qui ne serait pas en mesure de conduire.
C'est pourquoi la perspective d'un retour au franc ne devrait susciter
qu'un enthousiasme modéré. En effet, si l'État disposait à nouveau du
levier monétaire, saurait-il l'actionner à bon escient ?
Déplorant les dévaluations à répétition, Jacques Bainville en a jadis
douté.
Quoi qu'il en soit, la question mérite d'être posée. D'autant
qu'il ne faudrait pas prendre nos politiciens pour plus bêtes qu'ils ne
sont. Ils savaient bien à quels impératifs devait nous soumettre
l'adoption d'une monnaie unique. En l'occurrence, une stricte
discipline budgétaire, ainsi qu'une grande flexibilité économique
censée compenser les écarts de compétitivité. Or, depuis l'entrée en
vigueur du traité de Maastricht, la France a fait voler en éclats le
Pacte de stabilité, tout en rechignant à libéraliser davantage son
économie.
Peut-être avons-nous échappé au pire, me direz-vous. La
République n'en apparaît pas moins incapable d'assumer les conséquences
de ses propres décisions, bonnes ou mauvaises. En cela, les déboires de
l'euro sont le symbole d'une République en faillite. À l'approche de
l'élection présidentielle, les royalistes seraient bien inspirés de le
marteler.
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24 janvier 2012 Article publié dans L'Action Française 2000
Bien qu'elle conserve l'euro, l'île de Saint-Barthélémy vient
de s'émanciper de l'influence de l'UE, jugée trop pesante en l'absence
de compensations financières.
En dépit des incertitudes pesant sur l'Union économique et
monétaire, un territoire ultramarin s'accroche à l'euro :
conformément au souhait exprimé par les autorités de Saint-Barthélémy,
un traité négocié avec l'UE vient d'être ratifié par la France afin d'y
maintenir la monnaie unique. Depuis le
1er janvier 2012, cette île des Antilles n'est plus
comptée au nombre des régions ultra-périphériques (RUP) de l'Union
européenne. C'est pourquoi, en l'absence d'un tel accord, elle aurait
dû se doter de sa propre devise, fondée vraisemblablement sur le dollar
américain, si l'on en croit Éric Doligé, sénateur du Loiret et
vice-président de la délégation sénatoriale à l'outre-mer.
De la RUP au PTOM
Bénéficiant d'un "régime d'association", Saint-Barthélémy se
range désormais, aux yeux de Bruxelles, parmi les pays et territoires
d'outre-mer (PTOM). S'étendant sur 25 km², peuplée aujourd'hui
de 8 500 habitants, l'île fut cédée par Louis XVI à
la Suède en 1684, avant de redevenir française en 1878. Elle demeura
rattachée à la Guadeloupe, en qualité de commune, jusqu'au
15 juillet 2007, date à laquelle elle se mua en
collectivité d'outre-mer, à la suite d'un référendum organisé quatre
ans plus tôt. Sa transformation en PTOM s'inscrit dans la continuité de
cette évolution, quoique les statuts français et européens soient
indépendants l'un de l'autre : « Saint-Barthélemy
aurait pu conserver, comme Saint-Martin par exemple, le statut de RUP,
tout en étant devenue une collectivité régie par l'article 74
de la Constitution », souligne Éric Doligé. Cela étant, selon
son conseil territorial, « l'évolution du statut européen de
Saint-Barthélemy exclut toute idée d'indépendance de Saint-Barthélemy
[qui] est, et restera, partie intégrante de la France ».
« L'île a souhaité gagner une certaine liberté par
rapport aux règles européennes en devenant PTOM, notamment pour pouvoir
commercer avec sa zone géographique », explique le sénateur.
Dorénavant, conformément au code général des collectivités
territoriales, Saint-Barthélémy « est compétente en matière
douanière, à l'exception des mesures de prohibition à l'importation et
à l'exportation qui relèvent de l'ordre public et des engagements
internationaux de la France, des règles relatives aux pouvoirs de
recherche et de constatation des infractions pénales et des procédures
contentieuses en matière douanière ».
Fonds structurels
Entre autres considérations invoquées par les autorités
locales, figurait la crainte que l'harmonisation progressive des
législations européennes remette en cause, à terme, la fiscalité
spécifique applicable à leur territoire. Surtout, la stricte
application des normes européennes n'irait pas sans effets
pervers : ainsi, l'abaissement de la teneur en benzène dans
l'essence sans plomb, de 3 à 1 %, aurait conduit à majorer de
22 centimes d'euros le prix du litre de carburant distribué
sur l'île. Éric Doligé critique ouvertement la technocratie
bruxelloise : « J'ai toujours été frappé par
l'imposition de normes ne correspondant pas à la réalité des
territoires d'outre-mer, obligés d'importer d'Europe, à 10 000
kilomètres, des produits qu'ils pourraient trouver à
100 kilomètres », a-t-il déclaré lors d'une réunion
en commission. Saint-Barthélémy ne serait pas le seul territoire
concerné : « La Guyane n'a pas le droit d'utiliser
l'essence brésilienne, beaucoup moins chère, parce que sa composition
ne correspond pas aux normes européennes », déplore le
sénateur.
Forte d'un PIB par habitant supérieur à 75 % de la
moyenne européenne, l'île de Saint-Barthélémy n'est pas éligible au
bénéfice des fonds structurels de l'UE. D'ailleurs, souligne
Éric Doligé, elle est « le seul territoire qui, au lieu de
recevoir de l'argent de la métropole, est un contributeur
net ». Dans ces conditions, estime-t-il, en tant que RUP, elle
ne pouvait « rien » obtenir de l'Union européenne.
« Ceux qui en ont les moyens souhaitent changer de
statut », affirme-t-il. Et « ceux qui ne les ont pas
restent dans le cadre des règles européennes, en attendant... La Guyane
sera peut-être un jour, avec son pétrole, son bois, son or qu'on lui
empêche d'exploiter, suffisamment riche pour sortir du statut de DOM et
de RUP. » Lorgnant sur la manne des fonds structurels Mayotte
n'en formule pas moins le vœu d'accéder aussi vite que possible au
statut de région ultra-périphérique de l'Union européenne...