Dans une économie appelée à devenir circulaire, les pneus rechapés semblent avoir toute leur place. Boudés par les automobilistes, ils demeurent populaires auprès des transporteurs routiers. Mais il faut compter désormais avec la concurrence des pneus chinois vendus à prix cassé.
Le rechapage a été mis à l'honneur lors d'une conférence organisée à l'initiative du magazine Pneumatique mercredi dernier, 6 juin 2018. Cette activité consiste à remplacer la bande de roulement des pneumatiques, une fois le point d'usure atteint, tout en en conservant la carcasse. Peut-être les automobilistes s'imaginent-ils qu'elle est tombée en désuétude ; il est vrai qu'en France, seule la société Black Star propose encore d'y recourir afin d'équiper des voitures de tourisme. Mais tel n'est pas le cas des transporteurs routiers : en 2017, 40 % des pneus qu'ils ont achetés étaient rechapés.
Depuis cinq ou six ans, ce marché est toutefois ébranlé par la croissance fulgurante des importations en provenance de Chine. L'empire du Milieu casse les prix sur les pneus neufs ! Dans l'Hexagone, mille neuf cents emplois directs seraient en jeu. Le mois dernier, la Commission européenne a érigé des barrières douanières censées rendre cette concurrence plus équitable. « On a une position neutre officiellement, mais pour moi, c'est une bonne nouvelle », s'est réjoui Rodolphe Hamelin, directeur des produits industriels de Bridgestone. La légitimité de ces mesures protectionnistes n'est pas contestée par les professionnels du secteur – au contraire. « Je suis profondément libéral », a déclaré Bruno Muret, représentant du SNCP (Syndicat national du caoutchouc et des polymères) ; cependant, les règles doivent-être les mêmes pour tous, a-t-il expliqué en substance. « Cela aurait dû être fait il y a des années », a renchéri Thierry Dourdet, P-DG de Vulcalor, une entreprise spécialisée dans le rechapage ; toutefois, a-t-il poursuivi, « je préfère qu'on mette en avant ce qu'on est capables de faire ».
« Sans rechapage, on n'a pas de modèle premium »
Des erreurs ont-elles été commises ? « Il y a peut-être de bonnes raisons pour que le pneu chinois s'impose », selon Régis Audugé, directeur général du SPP (Syndicat des professionnels du pneumatique). « On n'a pas su communiquer », a reconnu Thierry Dourdet. Soucieux de rectifier le tir, les syndicats professionnels ont présenté un outil en ligne censé mettre en évidence le « coût total de possession » des pneumatiques. À la différence du prix d'achat, celui-ci serait à l'avantage des pneus "premium" : susceptibles d'être rechapés par deux fois, ces derniers permettraient de couvrir ainsi une distance moyenne 660 000 kilomètres, avec une moindre consommation de carburant – un gage d'économies substantielles.
Ces arguments feront-ils mouche auprès des clients ? Bridgestone en est convaincu. Dans la tourmente, le manufacturier a tenu à soutenir son activité de rechapage, quitte à en sacrifier momentanément les marges. Depuis 2015, il propose une garantie sur la « rechapabilité » des pneus destinés aux véhicules de chantier : si une carcasse s'avère défectueuse, elle est changée. En outre, l'entreprise a investi afin d'automatiser le processus de rechapage ; productivité et qualité ont été significativement accrues par l'emploi d'un robot baptisé Leonardo. De toute façon, « sans rechapage, on n'a pas de modèle premium », a prévenu Rodolphe Hamelin. En tout cas, Thierry Dourdet se montre optimiste : « quelle que soit la situation, on se développera toujours », a-t-il annoncé.
Les syndicats professionnels dénoncent l'inertie des autorités françaises
Il faut dire qu'à ses yeux, les pneus chinois ne valent pas grand-chose : leurs carcasses ne sont bonnes à rien, s'est-il indigné. Il lui semble impossible de leur donner une seconde vie, pas même pour équiper des tracteurs agricoles. Olivier Dusserre, directeur commercial de Doumerc Pneus International, n'est pas du même avis : « il y a des pneus chinois qui sont rechapables », a-t-il souligné. Dans les usines de l'empire du Milieu, « il y a forcément à boire et à manger », a nuancé Bruno Mazzacurati, directeur général de Dipropneu. « Dans les pneumatiques chinois, il y a des mauvais et il y a des bons », a confirmé Pascal Audebert, directeur général de Profil Plus.
Cela étant, comme l'a rappelé Olivier Dusserre, « on a vu arriver sur le marché français des pneus qui n'étaient pas aux normes ». À ce sujet, Bruno Muret a dénoncé l'inertie des autorité françaises, qui auraient manqué de vigilance quant au respect du règlement Reach adopté sous l'égide de l'Union européenne : « on a eu beaucoup de mal à ce que les Douanes fassent leur boulot », a-t-il rapporté. Des difficultés similaires auraient été rencontrées avec la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), qui aurait traîné avant de veiller au bon étiquetage des produits.
La voiture électrique met tout le monde à poil !
Selon Dominique Stempfel, directeur communication et développement d'Allopneus, « il n'y a plus de mauvais pneus qui circulent sur le marché français ». Certains produits sont certes de moindre qualité ; mais il sont aussi moins chers ! Cela répond à une demande qui ne saurait être ignorée. « Le segment "budget" a toujours existé », a rappelé Dominique Stempfel. Jadis, il était d'ailleurs occupé… par les pneus rechapés ! Ceux-ci présentent désormais de bien meilleures performances. Un « saut qualitatif » a été franchi « au prix d'un assainissement de la profession », a constaté Bruno Muret ; la qualité des pneus rechapé est aujourd'hui comparable à celle des pneus neufs, a-t-il assuré. La réutilisation des carcasses répond, de plus, aux attentes de la société : le rechapage constitue « un maillon important de l'économie circulaire » ; en cela, a-t-il martelé, c'est « une excellente illustration de ce que prônent nos pouvoirs publics ».
Les menaces qui planent aujourd'hui sur les vieux manufacturiers s'abattront-elles demain sur les constructeurs automobiles les plus renommés ? « Les voitures ne voyagent pas autant que les pneumatiques », a souligné Bernard Jullien, économiste, maître de conférences à l'université de Bordeaux. L'inquiétude n'en est pas moins légitime : les constructeurs ont multiplié les partenariats dans l'empire du Milieu, mais « l'équilibre des pouvoirs dans les joint-ventures est en train de changer », a-t-il constaté ; autrement dit, les Chinois prennent le contrôle. Depuis quatre ans, la « sinisation » est en marche, a-t-il expliqué. Parallèlement, Pékin canalise l'automobilisation du pays, afin de préserver les terres agricoles ; en outre, il promeut les investissements à l'étranger et pousse au déclin du moteur thermique dans l'espoir de rebattre les cartes au profit de sa propre industrie : « sur l'électrique, tout le monde est à poil », s'est exclamé Bernard Jullien. Nous sommes prévenus.
Au programme de l'émission : la voiture électrique, la « France périphérique » et les abeilles.
Mardi dernier, 25 juillet 2017, Philippe Mesnard animait comme tous les quinze jours sur Radio Courtoisie le Libre Journal de la réaction. À son micro, votre serviteur a exprimé les réserves que lui inspire la voiture électrique. Des réserves que reflétaient déjà nos derniers partages de liens, dont certains visaient précisément à préparer cette émission… Autres sujets abordés : la « France périphérique » de Christophe Guilluy, dont Louise Demange a présenté une relecture critique, insistant sur ses implications en termes de stratégie électorale ; et les abeilles, dont Gersende Bessède nous a expliqué qu'elles étaient sauvées par le capitalisme, quoique au prix d'un certain déracinement.
16 février 2017 Article publié dans L'Action Française 2000
La présentation d'une nouvelle Alpine est imminente. Pour Renault, il s'agit de renouer avec une tradition en sommeil depuis une vingtaine d'années.
L'attente aura été longue : le mois prochain (en mars 2017), à l'occasion du salon de Genève, sera enfin dévoilée la nouvelle Alpine ; plus d'un quart de siècle se sera écoulé depuis la présentation, en mars 1991, au même endroit, de l'A610, ultime héritière d'une dynastie fondée en 1955. Pour peu qu'ils soient chauvins, cela ne manquera pas de réjouir les amateurs de conduite, sinon de pilotage. « À quoi sert la course automobile ? », avait jadis demandé le général de Gaulle. « À faire gagner la France ! », lui avait répondu Jean Rédélé, fondateur d'Alpine.
Montée en gamme
C'est d'abord sur la route que cette nouvelle voiture se frottera à ses rivales. Moins bourgeoise qu'une Porsche Cayman, elle s'annonce toutefois plus confortable qu'une Lotus Élise. À travers elle, Renault prétend investir le segment du « sport premium ». Sans doute les ventes seront-elles modestes, quoique les quelque deux mille premiers exemplaires ouverts à la réservation aient déjà trouvé preneur. En tout cas, c'est un petit pas vers la montée en gamme du Losange. De toute façon, comme l'expliquait dernièrement Carlos Tavares, ancien directeur général de Renault, aujourd'hui à la tête de PSA, « la course au volume est une dimension d'un autre âge » (Les Échos) – la priorité étant désormais donnée à l'accroissement des marges.
Reniant l'aspect spartiate de la célèbre A110, ce nouveau modèle se rapprochera davantage, dans sa philosophie, de l'A310 appelée à lui succéder en 1971. Mais pas dans son design ! Se raccrochant aux épisodes les plus glorieux de son histoire, Alpine inscrit son renouveau dans l'héritage quasi-exclusif de la berlinette disparue en 1977. D'un point de vue technique, cependant, sa lointaine descendante s'en distingue à bien des égards. Son moteur ne sera plus disposé en porte-à-faux arrière, mais en position centrale, juste derrière les sièges. De plus, « elle va disposer d'un châssis en aluminium qui est la marque de fabrique de Lotus et non d'Alpine », s'indigne Jacques Cheinisse, numéro 2 historique de la marque, dans un entretien au site Motor 1. Cela étant, toute tradition n'est-elle pas nécessairement critique ?
Soucieux de renouer avec elle, Renault enracine à Dieppe, siège historique de la marque, la production de la nouvelle Alpine. C'est un choix rationnel dans une optique strictement économique, cette usine étant spécialisée dans les productions de niche et tout particulièrement dans celle des voitures de sport. Mais c'est aussi un atout marketing, les clients potentiels exigeant aujourd'hui, plus ou moins consciemment, des gages d'authenticité. En revanche, le retour du "A fléché" en compétition apparaît, quant à lui, très artificiel : si les victoires sont engrangées sur les circuits des European Le Mans Series, elles le sont en fait par un constructeur tiers (Signatech) dont les voitures ont simplement été repeintes aux couleurs d'Alpine.
Noblesse mécanique
Le public sera-t-il dupe ? On verra bien. Mais peut-être Renault aura-t-il tiré quelque leçon de ses erreurs, parfois récentes. En 2010, il avait tenté une relance bien hasardeuse de Gordini, un nom prestigieux lui aussi, ravalé au rang de simple finition. Par ailleurs, ses modèles sportifs ont souvent pâti d'un manque de noblesse mécanique. Sur ce point, les circonstances jouent en sa faveur : sous les capots des Porsche et autres BMW, par exemple, afin de réduire les consommations, les moteurs quatre cylindres sont désormais légion, si bien que l'Alpine n'aura pas à rougir de la comparaison. Si les acheteurs sont conquis, il sera tentant de transformer l'essai afin d'en récolter des dividendes via la production d'une modèle plus largement diffusé (on parle déjà d'un SUV). Au risque de rompre les fils reliant Alpine à son passé, lesquels sont pourtant la clef du succès escompté.
2 novembre 2016 Article publié dans L'Action Française 2000
Demain, les voitures seront autonomes, pilotées par des algorithmes et leur intelligence artificielle. Cette perspective soulève bien des questions.
Dans les embouteillages ou sur autoroute, le conducteur d'une voiture à la pointe de la technologie (ou du marketing...) peut désormais lâcher le volant. Mais c'est de façon plus discrète, sinon sournoise, que des algorithmes prennent d'ores et déjà les commandes. Comme à bord de la BMW 330e iPerformance, une berline équipée d'un moteur hybride : « la voiture gère [...] la réponse des deux moteurs en fonction du trafic et du profil de la route », rapporte notre confrère Romain Heuillard ; « elle utilisera ainsi le moteur électrique en montée avant une descente dans laquelle elle pourra profiter de la récupération d'énergie », explique-t-il sur Clubic (25 mars 2016).
Objectif 2025
Ce n'est qu'un début. « La révolution va venir par étapes », annonce Carlos Ghosn, président de Renault, dans un entretien au Figaro (6 octobre). « Concernant la voiture sans chauffeur », précise-t-il, « elle n'arrivera probablement pas avant 2025 ». De toute façon, souligne-t-il, « pour que le régulateur franchisse le pas et autorise ces véhicules, il faudra que toutes les conditions soient réunies, notamment en matière de responsabilité ». C'est un défi lancé aux juristes. Voire aux philosophes : en cas d'accident jugé inéluctable, qui faudra-t-il protéger en priorité ? « Clarifier ces questions de droit et d'éthique à long terme demandera un grand débat international », prévient Mercedes, dans un communiqué cité par Numerama (18 octobre) ; selon la marque à l'Étoile, ce serait « le seul moyen de parvenir à un consensus global et de promouvoir l'acceptation des résultats ».
Les constructeurs automobiles travaillent donc à concrétiser la promesse de la voiture autonome. Tout comme les spécialistes du numérique. Ceux-ci finiront-ils par supplanter ceux-là dans le contrôle de leur propre industrie ? Dans l'immédiat, Apple ayant renoncé à construire sa propre voiture, les uns et les autres semblent enclins à poursuivre leurs recherches main dans la main : Renault et Nissan ont annoncé en septembre dernier un partenariat avec Microsoft sur la voiture connectée, prélude à la voiture autonome ; quant à Fiat et Chrysler, par exemple, ils collaborent timidement avec Google. L'économie hexagonale tirera-t-elle quelque bénéfice ce cette révolution ? Nos confrères d'Industrie et Technologies ont recensé par moins de « vingt technologies made in France qui permettent de lâcher le volant ».
Faire comme un homme
Beaucoup d'investissements ont été consacrés au développement des capteurs. Mais « la conduite requiert des capacités cognitives [...] de haut niveau, exigeant en outre un apprentissage », comme l'explique Denis Gingras, professeur à l'université de Sherbrooke au Québec, cité par le Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA, 4 octobre). « Aujourd'hui, les algorithmes vérifient qu'ils ne rencontrent pas d'obstacles prédéfinis : pas de piéton, pas de camion, pas de moto, pas de mur, etc. », souligne Jen-Hsun Huang, directeur général de Nvidia, cité par L'Usine digitale (28 septembre) ; « mais quand on conduit », poursuit-il, « on n'énumère pas de liste de ce genre, on voit juste que la route est libre ». Voilà précisément ce à quoi devront parvenir les intelligences artificielles.
Celles-ci éviteront probablement des accidents aux automobilistes. Mais peut-être les placeront-elles également sous surveillance. Ainsi Tesla a-t-il annoncé que ses voitures autonomes seraient soumises à des conditions d'utilisation : « pas question pour les taxis d'imaginer revendre leur licence pour devenir propriétaire d'une voiture autonome lucrative, qui irait chercher et déposer toute seule les clients », résume Guillaume Champeau sur Numerama (21 octobre). Ce faisant, le constructeur de Palo Alto entend privilégier sa propre plate-forme de covoiturage, faisant concurrence à Uber. Ses clients seront-ils prêts à le tolérer ? C'est possible : parmi les acheteurs de livres numériques, par exemple, beaucoup demeurent fidèles à Amazon en dépit des contraintes que celui-ci leur impose. Quoi qu'il en soit, « le véhicule autonome va bouleverser l'industrie automobile dans son business model », prévient François Jaumain, associé spécialiste des transports chez PWC, cité par le CCFA (27 octobre) ; « le volume des ventes comme indicateur de performance va laisser sa place, peu à peu, aux kilomètres parcourus », annonce-t-il notamment.
Libérer le code source
Peut-être une garantie de transparence dissiperait-elle un certain nombre d'inquiétudes suscitées par l'émergence de la voiture autonome. Dans l'idéal, les intelligences artificielles appelées à la piloter ne devraient-elles pas constituer un "bien commun" ? Au moins devront-elles s'accorder sur un langage commun : conscients de cette nécessiter, Ford et Jaguar-Land Rover travaillent déjà à faire communiquer leurs véhicules. Udacity, une entreprise californienne, cultive une tout autre ambition : voilà qu'après avoir développé un logiciel de conduite autonome, elle va le diffuser en "open source", comme le rapporte Industrie et Technologies (27 octobre). Un exemple à suivre !
6 octobre 2016 Article publié dans L'Action Française 2000
Femme au volant, mort au tournant ? Une délégation du Sénat
s'attaque à ce cliché.
Le Mondial de l'automobile de Paris a ouvert ses portes au public samedi
dernier, 1er octobre 2016. Sans Alpine ni Mazda, Volvo ou Ford. Mais
toujours en présence de jolies hôtesses. Jean-Claude Girot, commissaire
général du salon, l'a pourtant assuré : « s'il est vrai qu'il
y a quelques années, il n'y avait que des femmes qui [...] étaient
là essentiellement pour la représentation, aujourd'hui ce n'est le plus
cas ». Du moins a-t-il tenté d'en convaincre la délégation aux
droits des femmes du Sénat.
Statistiques à l'appui
Celle-ci s'est penchée sur l'automobile, y voyant « un enjeu de
lutte contre la précarité, d'orientation professionnelle et de
déconstruction des stéréotypes », selon
l'intitulé du rapport présenté par Chantal Jouanno (UDI-UC) et
Christiane Hummel (LR). « Les clichés sexistes associés à
l'inaptitude des femmes en matière de conduite sont largement démentis
par les statistiques », soulignent-elles. Mais la hantise des
discriminations interdit désormais aux assureurs d'en tirer quelque
conséquence tarifaire. « La délégation regrette cette évolution
qui a pénalisé les jeunes conductrices » ; mais peut-être
y contribue-t-elle elle-même...
Constatant la moindre réussite des femmes à l'épreuve pratique du permis
de conduire, Chantal Jouanno et Christiane Hummel l'expliquent par « la
déstabilisation des jeunes candidates que pourrait entraîner le sexisme »
et par « l'impact de l'intériorisation des stéréotypes ».
Aussi moniteurs et inspecteurs devraient-ils être formés à les
déconstruire, tandis que « des équipes paritaires d'enseignants »
devraient voir le jour. Curieusement, aucune mention n'est faite de
l'initiative prise à Villefranche-sur-Saône, où les responsables d'une
auto-école s'étaient vantés, l'été dernier, de contrevenir aux canons de
la mixité...
Aujourd'hui, les trois quarts des femmes ont leur permis en poche, mais
cela n'a pas toujours été le cas. Les rapporteurs ne manquent pas de le
rappeler : « en 1967, les femmes ne sont encore que 22 % à
conduire, soit trois fois moins que les hommes » ; « il
faut attendre 1981 pour qu'une femme sur deux détienne le permis de
conduire, et 2007 pour que cela soit le cas de près de 75 % d'entre
elles ». Sans surprise, la délégation du Sénat met en cause
« la crainte des hommes de voir les femmes s'émanciper et échapper
à la sphère privée par le biais de l'automobile, qui symbolise à ses
débuts le désir de vitesse, de réduction des espaces et la connaissance
de nouveaux horizons ». Une crainte qui prit parfois
l'apparence d'une bienveillance suspecte.
Relecture de l'Histoire
Dans cette perspective, l'Histoire apparaît d'autant plus perverse que
l'accès à la conduite ne fut concédé aux femmes que pour les maintenir
asservies : « les trajets des femmes sont plus courts, plus
segmentés et plus fréquents » ; « le travail domestique y
joue un rôle prépondérant », déplorent Chantal Jouanno et
Christiane Hummel. Celles-ci relèvent qu'« une polémique durable a
eu lieu sur le genre du substantif "automobile" : masculin entre
1905 et 1920, et féminin seulement après 1920 sur prescription de
l'Académie française ». Elles y voient un « élément
révélateur de la volonté d'exclure les femmes du monde automobile ».
La relecture de l'historie via le prisme de la "guerre des sexes" se prête
manifestement aux interprétations les plus hardies.
NB – En illustration, une publicité comme on n'en fait
plus !
18 mai 2016 Article publié dans L'Action Française 2000
Sous prétexte d'écologie, des véhicules en bon état risquent d'être
précipités vers la casse.
Vingt ans, c'est trop vieux : dès l'été prochain, les voitures
immatriculées avant 1997 seront bannies de Paris ; d'ici quatre ou
cinq ans, le même sort sera réservé à celles mises en circulation avant
2011. « À force de négociations avec la municipalité, les
propriétaires de véhicules de collection feront exception à ces
interdictions », précise
notre consœur Leila Marchand (Les Échos,
11 mai 2016) – un privilège réservé aux automobiles âgées de trente
ans ou plus ; déjà convoitées par les amateurs, les Clio Williams
devront patienter quelque temps aux portes de la capitale ; tout
comme les Ferrari F40, par exemple ! Les propriétaires de véhicules
plus populaires peuvent s'inquiéter : « personne ne voudra de
votre voiture si elle ne peut plus circuler dans Paris et elle ne vaudra
donc plus rien », déplore
l'avocat Jean-Baptiste Iosca (Le Parisien,
11 mai 2016).
Obsolescence planifiée
Cette politique s'inscrit dans la continuité des "primes à la casse"
instituées dans les années quatre-vingt-dix. Elle fait écho au projet
fantaisiste qu'avait présenté dans les années trente Bernard London :
apôtre de « l'obsolescence planifiée », il regrettait
« que les consommateurs aient pris l'habitude, à cause de la
crise, d'utiliser un produit jusqu'à ce qu'il soit hors d'usage »,
comme
le résume Wikipedia ; de son point de vue,
c'était un frein à l'activité économique. Frédéric Bastiat, icône
française du libéralisme, n'aurait pas manqué de réfuter un « sophisme » :
« la société perd la valeur des objets inutilement détruits », expliquait-il
au XIXe siècle ; autrement dit, « destruction n'est pas
profit ».
Or, précipiter des automobiles vers la casse, cela n'a rien d'une
fatalité. À l'intention des heureux collectionneurs roulant en 911, Porsche
propose des tableaux de bord refaits à l'identique, quoique plus
résistants que les originaux ; mais aussi un système multimédia (GPS,
connexion USB, écran tactile...) s'intégrant dans le compartiment réservé
jadis à l'autoradio. Visant un public beaucoup plus large, Aramisauto.com
s'est lancé en 2013 dans le reconditionnement de véhicules
d'occasion ; « le principe n'est pas nouveau », remarque
Jean Savary (Caradisiac, 2 avril 2015) ;
« mais là », souligne-t-il, « c'est à l'échelle
industrielle, avec la productivité que cela suppose ». Anne
Hidalgo, s'abrite derrière des considérations écologiques. Mais
n'apporte-t-elle pas une caution politique à la frénésie
consumériste ? « Rappelons juste que la fabrication d'une
voiture occasionne l'émission de huit à douze tonnes de CO2 et qu'il
faut, pour l'éponger avec une voiture consommant un litre de moins aux
cent kilomètres que celle qu'elle remplace, parcourir dans les
300 000 kilomètres », lui
rétorque encore Jean Savary.
Les Tesla adulées
Dédaignant les sympathiques Twingo (première version), dont la bouille
rigolote et les couleurs pimpantes égaient toujours les rues de Paris,
Mme Hidalgo leur préfère des voitures électriques, à l'image des
luxueuses Tesla. De fait, sans le soutien des pouvoirs publics, peut-être
le constructeur de Palo Alto n'aurait-il pas connu pareil succès. « Le
modèle économique actuel d'Elon Musk est de collecter de l'argent de la
poche de ses concurrents automobiles, sous forme de "permis d'émissions" »,
dénonce
ainsi Charles Boyer (Contrepoints, 6 mai
2015) ; selon lui, « Tesla perd des sous sur chaque voiture
qu'il vend, et fait des profits en agissant fondamentalement comme un
fermier général, collecteur de taxes auprès de ses concurrents ».
À Singapour, cependant, la Model S a été affublée d'un malus
écologique ; « il faut mettre en perspective la propreté de
l'électricité, produite aux trois quarts à Singapour par des centrales
au gaz naturel », explique
notre confrère Romain Heuillard (Clubic, 9 mars
2016).
Au moins les Tesla se distinguent-elles par leur capacité à recevoir des
mises à jour, susceptibles de pallier leur obsolescence. À moins qu'il
s'agisse de corriger les bugs résultant d'un développement trop
hâtif ? Quelques propriétaires de Model X ont été confrontés à
des portières bloquées... Tesla innove incontestablement dans le domaine
du marketing. Ainsi propose-t-il à ses clients
d'accroître l'autonomie de leur voiture, délibérément limitée par un
bridage logiciel, en souscrivant une option d'un simple clic ;
« bien entendu, ce n'est pas une opération magique : les
Model S 70 et les Modell S 75 embarquent tous les deux une
batterie de 75l kWh », précise
Julien Cadot (Numerama, 6 mai 2016). Autrement
dit, le prix de vente se trouve explicitement déconnecté du
coût de fabrication – dans l'industrie automobile, c'est une
révolution !
Révolution en marche
Une autre bouleversement s'annonce : profitant de la connectivité de
ses véhicules, Tesla accumule les données nécessaires au développement de
la conduite autonome. Si l'entreprise « prend une longueur
d'avance aujourd'hui sur la concurrence, c'est parce qu'elle possède
déjà des centaines de milliers de données sur de la conduite réelle, sur
route, de ses modèles », analyse
Julien Cadot (Numerama, 12 mai 2016). Dans ces
conditions, aux yeux des constructeurs traditionnels, « les
spécialistes des flux d'information [...] sont potentiellement
inquiétants : ils pourraient devenir demain de nouveaux concurrents
ou, pire, leur prendre la position centrale qu'ils occupent aujourd'hui
dans la chaîne de valeur », comme
expliqué sur Paris Tech Review (26 avril 2016).
Klaus Froehlich, directeur de la recherche et du développement de BMW, en
a pleinement conscience : si son entreprise négocie mal ce virage, prévient-il,
« nous finirons comme un Foxconn pour une société comme Apple, à
ne fournir que des cadres en métal » (Clubic,
7 mars 2016). La France saura-t-elle tirer son épingle du jeu ?
La Cour des comptes craint qu'elle y soit mal préparée. Ainsi
déplore-t-elle « une "absence de stratégie globale et de
coordination entre les services de l'État", avec notamment une veille
internationale inadéquate pour orienter les actions à mener »,
comme
le rapporte André Lecondé (Caradisiac, 11 mai
2016). Les responsables politiques seraient bien inspirés de s'en
préoccuper, plutôt que de jeter l'anathème sur les malheureux Parisiens
possesseurs d'une vénérable Twingo.
Petit coup de gueule à la lecture des premières pages... d'un
manuel de mécanique auto.
Lu dans Technologie fonctionnelle de l'automobile (Dunod,
tome I, septième édition) : « Les ressources
en pétrole ne sont pas éternelles. [...] Les constructeurs
réfléchissent depuis longtemps aux moteurs qui peuvent fonctionner avec
un autre carburant. L'électricité n'étant pas très pratique, c'est pour
l'instant l'hydrogène qui a leur faveur. »
D'accord, la première édition de ce livre remonte à 1981. Mais
celle que nous avons en main a tout juste un an ! Or, en mai
2014, et même avant, on croisait déjà des Renault Zoe et quelques
Tesla... sans parler des Bluecar de Bolloré, mises à la disposition des
Parisiens depuis la fin 2011 ! À l'inverse, les véhicules
fonctionnant à l'hydrogène demeurent rarissimes, la Toyota Mirai venant
à peine d'être commercialisée. Dès l'avant propos, un inspecteur de
l'Éducation nationale n'en salue pas moins
l'« investissement personnel et le cœur » que
l'auteur aurait « mis à réaliser la mise à jour du présent
ouvrage ». À lire le « bref historique de
l'automobile » qui nous est proposé, on se demande si pareil
éloge est bien mérité : apparemment, il ne se serait plus rien
passé depuis 1985, sinon le développement des monospaces... Comme si
ceux-ci n'avaient pas été en partie éclipsés par les SUV au cours de la
décennie écoulée !
Dans un manuel destiné à de futurs techniciens, il y a plus gênant
cependant : en l'occurrence, l'opposition établie entre
« l'électricité » et
« l'hydrogène », qui n'a aucun sens. De
fait, ce qui distingue fondamentalement une Mirai d'une Zoe, c'est le
recours à une pile à combustible plutôt qu'à une batterie pour
alimenter le moteur... qui fonctionne à l'électricité dans chacun des
cas.
Bref, l'entrée en matière laisse à désirer. Il faut espérer
que les pages qui suivent auront été écrites ou révisées avec davantage
de soin. D'autant que nous n'aurons pas forcément la compétence pour le
dire. Si tel était le cas, il est bien évident que nous n'aurions pas
acheté un tel bouquin...
Les amateurs de bagnoles devront apparemment s'y
habituer : dans les salons comme sur les circuits, les hôtesses
aux tenues affriolantes vont se faire moins nombreuses.
Les Chinois sont pudibonds. De fait, les hôtesses seront,
paraît-il, bannies du salon automobile de Shanghai, qui ouvrira ses
portes mercredi prochain, 22 avril 2015. Ses organisateurs
auraient demandé aux exposants « d'éviter d'amener des show
girls, mais plutôt des conseillers commerciaux seniors
habillés correctement », comme
le rapporte Caradisiac. Les traditions
se perdent. Y compris sur les circuits. « Vous ne verrez plus
aucune grid girl sur la grille de départ », a
annoncé Gérard Neveu, président du championnat du monde
d'endurance (WEC). « Ce sera le cas dans toutes les courses
que nous organiserons », a-t-il prévenu. « Pour
moi », s'est-il justifié, « c'est du
passé » : « les conditions des femmes sont
quelque
peu différentes maintenant ». Et pourtant... le septième volet
de Fast and Furious cartonne toujours au
cinéma !
15 avril 2015 Article publié dans L'Action Française 2000
Alors que l'exploitation de l'hydrogène s'avère pleine de
promesses, les pouvoirs publics tardent à accompagner son développement.
Cyrus Smith, héros de L'Île mystérieuse,
l'avait annoncé dès 1875 : « Oui, mes amis, je crois
que l'eau sera un jour employée comme combustible, que l'hydrogène et
l'oxygène, qui la constituent, utilisés isolément ou simultanément,
fourniront une source de chaleur et de lumière inépuisables et d'une
intensité que la houille ne saurait avoir. » Le rêve de Jules
Verne est devenu réalité : jadis cantonnée à la conquête
spatiale, l'exploitation de l'hydrogène s'est banalisée.
Créer un réseau de distribution
« Dans plusieurs applications de niches, telles que
les chariots élévateurs ou encore les alimentations secourues,
l'hydrogène énergie se substitue progressivement à des solutions
préexistantes, telles que les batteries électrochimiques, désormais
jugées moins performantes », comme l'observent les
parlementaires socialistes Laurent Kalinowski et Jean-Marc Pastor,
respectivement député de la Moselle et sénateur du Tarn, auteurs d'un
rapport publié fin 2013. En décembre dernier, Toyota a même
commercialisé la Mirai, une voiture dont le fonctionnement produit pour
seul déchet... de la vapeur d'eau. « Elle ne pollue pas plus
qu'une électrique et n'en a pas les inconvénients »,
s'enthousiasme
notre confrère Jean-Luc Moreau. « C'est un must »,
conclut-il dans Auto Moto. En dépit d'un prix
élevé (80 000 euros outre-Rhin), le succès est au
rendez-vous : à l'origine, sept cents exemplaires devaient
être assemblés chaque année ; finalement, en 2016, ce sont
plus de deux mille Mirai qui devraient sortir des chaînes, selon nos
confrères de TF1.
Les Français ne seront pas les premiers servis. Il est vrai
que les pompes à hydrogène ne sont pas légion dans l'Hexagone. La
faute aux pouvoirs publics ? En partie seulement.
« Dans ces deux grands pays d'industrie automobile que sont
l'Allemagne et le Japon », expliquent MM. Kalinowski
et Pastor, « la plus grande part de l'investissement
nécessaire à la création de cette infrastructure de distribution
d'hydrogène devrait être prise en charge par les constructeurs
automobiles eux-mêmes ». Or, qu'en est-il des constructeurs
français ? Tandis que Renault a fait un pari sur les
batteries, PSA s'est enfoncé dans l'impasse de l'hybride diesel... En
conséquence, « ce sont des acteurs de plus petite taille qui
essaient d'identifier des applications de mobilité pour lesquelles le
véhicule à hydrogène pourrait devenir concurrentiel ». Ainsi
la société Symbio FCell greffe-t-elle des piles à combustible sur des
véhicules existants, tel le Kango ZE. Plébiscitant cette démarche, les
parlementaires envisagent « un déploiement progressif de
stations à hydrogène de taille réduite, initialement destinées à
alimenter des flottes captives de véhicules utilitaires, mais
susceptibles d'être par la suite ouvertes au public ».
Décentraliser l'énergie
« La filière a pris du retard », constate
Jean-Marc Pastor, « mais notre pays a la particularité de
posséder le plus d'industriels – y compris des petites et moyennes
entreprises – qui travaillent sur l'hydrogène partout dans le
monde » : « au Japon, en Corée du Sud, en
Floride, on voit partout des équipements Air liquide ou
Total », a-t-il souligné lors d'une réunion en commission.
Malheureusement, les innovations sont entravées par un cadre
réglementaire dépassé, élaboré au temps où l'hydrogène n'était manipulé
qu'en grandes quantités : « ainsi la construction
d'une petite unité de production d'hydrogène par électrolyse de l'eau
nécessite-t-elle a priori de
s'astreindre à un processus
d'autorisation extrêmement complexe, puisque conçu pour une
installation industrielle », déplore-t-il dans son rapport.
Michelin en a fait la triste expérience, alors qu'il travaillait au
développement d'une nouvelle technologie : « au bout
de cinq années de démarches vaines auprès de l'administration
française », le manufacturier « a délocalisé son
équipe à Fribourg où toutes les autorisations ont été obtenues en trois
mois ».
La "transition énergétique" saura-t-elle s'accommoder d'une
pareille inertie des pouvoirs publics ? Selon
MM. Kalinowski et Pastor, seule l'exploitation de l'hydrogène
serait « en mesure de compenser, sur la durée, des
fluctuations importantes de la production des énergies renouvelables ».
Concrètement, il s'agirait, par exemple, de stocker par ce biais des
excédents en provenance d'éoliennes, afin de les réinjecter plus tard
dans le réseau. Alors qu'il vient d'inaugurer un centre de recherche
dédié à l'hydrogène, comme le rapporte Clubic,
Toshiba y voit le moyen
d'importer de l'énergie au Japon « sans la nécessité de
construire des lignes de transmission pour connecter un site de
production extérieur au Japon ». Toutefois, selon les
rapporteurs du Parlement, « le réalisme impose de privilégier,
chaque fois que possible, une production décentralisée de l'hydrogène,
répartie dans les territoires au plus près des besoins ». À
leurs yeux, « ce choix ne constitue pas [...] une contrainte,
dès lors que l'hydrogène peut être produit à partir de ressources
locales, qu'il s'agisse de biogaz, de déchets ligneux ou
d'électricité ». Aussi conviendrait-il « d'envisager
une organisation du réseau électrique plus modulaire et plus robuste,
basée sur l'agrégation de sous-réseaux ».
Ce faisant, la France pourrait même « s'affranchir de
toute dépendance exclusive vis-à-vis d'une source d'énergie ».
Resterait à sécuriser les approvisionnements en platine, nécessaire à
la fabrication des piles à combustible... En résumé, l'hydrogène
pourrait contribuer à la décentralisation effective du pays, sans
affecter son économie, ni sacrifier l'indépendance nationale – bien au
contraire ! Autrement dit, c'est une technologie d'Action
française.