15 avril 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Alors que l'exploitation de l'hydrogène s'avère pleine de
promesses, les pouvoirs publics tardent à accompagner son développement.
Cyrus Smith, héros de L'Île mystérieuse,
l'avait annoncé dès 1875 : « Oui, mes amis, je crois
que l'eau sera un jour employée comme combustible, que l'hydrogène et
l'oxygène, qui la constituent, utilisés isolément ou simultanément,
fourniront une source de chaleur et de lumière inépuisables et d'une
intensité que la houille ne saurait avoir. » Le rêve de Jules
Verne est devenu réalité : jadis cantonnée à la conquête
spatiale, l'exploitation de l'hydrogène s'est banalisée.
Créer un réseau de distribution
« Dans plusieurs applications de niches, telles que
les chariots élévateurs ou encore les alimentations secourues,
l'hydrogène énergie se substitue progressivement à des solutions
préexistantes, telles que les batteries électrochimiques, désormais
jugées moins performantes », comme l'observent les
parlementaires socialistes Laurent Kalinowski et Jean-Marc Pastor,
respectivement député de la Moselle et sénateur du Tarn, auteurs d'un
rapport publié fin 2013. En décembre dernier, Toyota a même
commercialisé la Mirai, une voiture dont le fonctionnement produit pour
seul déchet... de la vapeur d'eau. « Elle ne pollue pas plus
qu'une électrique et n'en a pas les inconvénients »,
s'enthousiasme
notre confrère Jean-Luc Moreau. « C'est un must »,
conclut-il dans Auto Moto. En dépit d'un prix
élevé (80 000 euros outre-Rhin), le succès est au
rendez-vous : à l'origine, sept cents exemplaires devaient
être assemblés chaque année ; finalement, en 2016, ce sont
plus de deux mille Mirai qui devraient sortir des chaînes, selon nos
confrères de TF1.
Les Français ne seront pas les premiers servis. Il est vrai
que les pompes à hydrogène ne sont pas légion dans l'Hexagone. La
faute aux pouvoirs publics ? En partie seulement.
« Dans ces deux grands pays d'industrie automobile que sont
l'Allemagne et le Japon », expliquent MM. Kalinowski
et Pastor, « la plus grande part de l'investissement
nécessaire à la création de cette infrastructure de distribution
d'hydrogène devrait être prise en charge par les constructeurs
automobiles eux-mêmes ». Or, qu'en est-il des constructeurs
français ? Tandis que Renault a fait un pari sur les
batteries, PSA s'est enfoncé dans l'impasse de l'hybride diesel... En
conséquence, « ce sont des acteurs de plus petite taille qui
essaient d'identifier des applications de mobilité pour lesquelles le
véhicule à hydrogène pourrait devenir concurrentiel ». Ainsi
la société Symbio FCell greffe-t-elle des piles à combustible sur des
véhicules existants, tel le Kango ZE. Plébiscitant cette démarche, les
parlementaires envisagent « un déploiement progressif de
stations à hydrogène de taille réduite, initialement destinées à
alimenter des flottes captives de véhicules utilitaires, mais
susceptibles d'être par la suite ouvertes au public ».
Décentraliser l'énergie
« La filière a pris du retard », constate
Jean-Marc Pastor, « mais notre pays a la particularité de
posséder le plus d'industriels – y compris des petites et moyennes
entreprises – qui travaillent sur l'hydrogène partout dans le
monde » : « au Japon, en Corée du Sud, en
Floride, on voit partout des équipements Air liquide ou
Total », a-t-il souligné lors d'une réunion en commission.
Malheureusement, les innovations sont entravées par un cadre
réglementaire dépassé, élaboré au temps où l'hydrogène n'était manipulé
qu'en grandes quantités : « ainsi la construction
d'une petite unité de production d'hydrogène par électrolyse de l'eau
nécessite-t-elle a priori de
s'astreindre à un processus
d'autorisation extrêmement complexe, puisque conçu pour une
installation industrielle », déplore-t-il dans son rapport.
Michelin en a fait la triste expérience, alors qu'il travaillait au
développement d'une nouvelle technologie : « au bout
de cinq années de démarches vaines auprès de l'administration
française », le manufacturier « a délocalisé son
équipe à Fribourg où toutes les autorisations ont été obtenues en trois
mois ».
La "transition énergétique" saura-t-elle s'accommoder d'une
pareille inertie des pouvoirs publics ? Selon
MM. Kalinowski et Pastor, seule l'exploitation de l'hydrogène
serait « en mesure de compenser, sur la durée, des
fluctuations importantes de la production des énergies renouvelables ».
Concrètement, il s'agirait, par exemple, de stocker par ce biais des
excédents en provenance d'éoliennes, afin de les réinjecter plus tard
dans le réseau. Alors qu'il vient d'inaugurer un centre de recherche
dédié à l'hydrogène, comme le rapporte Clubic,
Toshiba y voit le moyen
d'importer de l'énergie au Japon « sans la nécessité de
construire des lignes de transmission pour connecter un site de
production extérieur au Japon ». Toutefois, selon les
rapporteurs du Parlement, « le réalisme impose de privilégier,
chaque fois que possible, une production décentralisée de l'hydrogène,
répartie dans les territoires au plus près des besoins ». À
leurs yeux, « ce choix ne constitue pas [...] une contrainte,
dès lors que l'hydrogène peut être produit à partir de ressources
locales, qu'il s'agisse de biogaz, de déchets ligneux ou
d'électricité ». Aussi conviendrait-il « d'envisager
une organisation du réseau électrique plus modulaire et plus robuste,
basée sur l'agrégation de sous-réseaux ».
Ce faisant, la France pourrait même « s'affranchir de
toute dépendance exclusive vis-à-vis d'une source d'énergie ».
Resterait à sécuriser les approvisionnements en platine, nécessaire à
la fabrication des piles à combustible... En résumé, l'hydrogène
pourrait contribuer à la décentralisation effective du pays, sans
affecter son économie, ni sacrifier l'indépendance nationale – bien au
contraire ! Autrement dit, c'est une technologie d'Action
française.
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6 avril 2015
En matière de démagogie, comparé aux autres partis, le Front
national, c'est pareil en pire.
Opposé à la construction de nouveaux lieux de culte musulmans,
Florian Philippot, vice-président du Front national, s'est justifié en
paraphrasant la Française des jeux :
« 100 % des lieux de radicalisation sont des
mosquées », a-t-il prétendu sur
le plateau d'Itélé – sans même susciter
la réaction de notre confrère Bruce Toussaint !
Or, selon
Pierre Conesa, par exemple, « 80 % des
types qui partent en Syrie ne sont passés ni par la prison, ni [par] la
mosquée ». C'est dire l'efficacité de la politique prônée par
le Front national contre l'islamisme. En la matière, rappelons-le,
Marine Le Pen avait déjà proposé que les policiers
s'inspirent des méthodes à l'œuvre dans les séries télévisées américaines, à
commencer par 24 heures chrono.
Bref, c'est du sérieux.
NB – Les sentiments (à certains égards légitimes) visés par la
démagogie frontiste préoccupent le gouvernement et ses fonctionnaires.
En témoigne le séminaire qui se tiendra jeudi prochain,
9 avril 2015, consacré précisément à l'« insécurité
culturelle », organisé à
l'initiative de France stratégie, le think tank
de Matignon.
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2 avril 2015
Galvanisés par leurs élites politiques, quelques citoyens
exemplaires se décident enfin à en venir aux mains pour défendre les
valeurs de la République.
Une femme enceinte aurait été agressée à Toulouse « à
cause de son voile islamique », rapporte
Le Figaro. Curieusement,
précisent nos confrères, Manuel Valls, « a fait part de son
"indignation" ». Ces derniers temps, pourtant, le Premier
ministre nous avait habitué à davantage de fermeté. Peut-être s'est-il
épuisé à vilipender le Front national ? Au moins Nicolas
Sarkozy a-t-il gardé la tête froide : « la France est
une République, pas seulement une démocratie », a-t-il
martelé. « Dans une démocratie, chacun fait ce qu'il
veut tant que cela ne fait pas de mal aux autres », a-t-il
expliqué. Mais « dans une République, on est plus
exigeant ». Or, a-t-il rappelé, « la République,
c'est la laïcité ».
À l'UMP, quelques personnalités sont manifestement en passe
d'en devenir les champions. Dernièrement, François Fillon s'est
heureusement distingué de l'ancien président de la
République : « la laïcité ce n'est pas l'oppression
des religions, c'est le respect des différences », a-t-il
déclaré. C'est pourtant un ministre de son gouvernement, Luc
Chatel, qui avait banni des sorties scolaires les mamans les moins
enclines à se promener cheveux au vent. C'est également en son nom qu'avait
été présenté le projet de loi « interdisant la
dissimulation du visage dans l'espace public ». L'islamophobie
aidant, les libertés les plus élémentaires s'avèrent faciles à
piétiner !
D'autres exemples ? En juin dernier, s'inscrivant
dans la continuité de cette politique, Richard Trinquier, maire UMP de
Wissous (Essonne), avait
chassé d'une plage éphémère deux mères de famille coupables
de porter un voile recouvrant non seulement les cheveux... mais aussi
les oreilles – un vrai scandale ! Quant à l'inénarrable Nadine
Morano, au mois d'octobre, elle
s'était empressée de dénoncer à un policier la femme
intégralement voilée qu'elle avait croisée gare de l'Est, après l'avoir
sommée, en vain, de rendre son visage à la vue du public.
Remarquable initiative, dont on apprend donc aujourd'hui
qu'elle a peut-être fait quelques émules, à l'image de ces républicains
exemplaires qui viennent, paraît-il, d'agresser la malheureuse
Toulousaine. Découvrant qu'elle était enceinte, ils auraient décidé de
l'épargner. C'est dommage : sans doute cela les privera-t-il
de la Légion d'honneur. Qu'on se le dise : la République, ça
se mérite !
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1 avril 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Attisant le feu du communautarisme, Nicolas Sarkozy espère
vraisemblablement tirer profit de la hantise suscitée par l'islam, au
risque de priver les Français d'origine étrangère de toute perspective
d'assimilation.
La République s'accommode mal de la diversité. Jadis, à la
grande époque des hussards noirs, les petits Français surpris dans la
cour de récréation à parler un patois familial étaient passibles d'une
punition. Demain, les enfants refusant le porc qui leur sera proposé à
la cantine seront-ils systématiquement montrés du doigt ? «
Dans les cantines d'écoles publiques, je suis opposé à ce qu'on appelle
les repas de substitution où, en fonction de l'origine des enfants, de
la religion des parents, on choisit des repas différents », a
déclaré Nicolas Sarkozy, interrogé le mois dernier par nos confrères de
TF1. Ainsi l'ancien président de la République
s'est-il engouffré dans la brèche médiatique ouverte quelques jours
plus tôt par Gilles Platret, maire UMP de Chalon-sur-Saône, qui venait
d'annoncer qu'un « menu unique » serait servi dans
les écoles de sa commune à la rentrée prochaine. Ce faisant, rapporte Le Figaro,
l'édile « a mis fin à une pratique vieille de trente et un
ans, au nom, explique-t-il, du "principe de laïcité" et du
"vivre-ensemble" ».
La laïcité dévoyée
Or, selon l'Observatoire de la laïcité, celle-ci « ne
saurait être invoquée pour refuser la diversité des menus ».
En effet, selon son acception à laquelle demeure cantonnée la majeure
partie du droit, elle requiert la neutralité des institutions, mais
protège la liberté des individus. Nul n'est dupe des ressorts de la
confusion entretenue aujourd'hui par Nicolas Sarkozy :
« parler de laïcité devient une façon de revendiquer une
France blanche et chrétienne, où tout le monde partage la même culture
et les mêmes mœurs », comme l'observe le sociologue François
Dubet, cité par nos confrères du Monde ;
en résumé, c'est « une façon de dire qu'on ne veut pas des
musulmans ».
Cela étant, s'agit-il effectivement de protéger une identité
millénaire, ou bien d'en construire une nouvelle, fondée non pas sur le
respect d'un héritage, mais sur la hantise de l'islam ?
Jusqu'à présent, les rondelles de saucisson et autres bouteilles de
pinard n'avaient jamais figuré sur aucun étendard national...
« Voilà que les jupes longues, les tenues sombres ou amples
sont suspectées d'être des signes religieux », s'inquiète
notre consœur Aurélie Collas ! Revigoré par l'islamophobie, le
laïcisme menace d'ailleurs les traditions d'origine chrétienne les plus
sécularisées, comme en ont témoigné, ici ou là, les tentatives de
bannir les crèches de Noël de lieux réputés "publics". Or, quelles
perspectives d'assimilation peut offrir un pays reniant ainsi sa propre
histoire ?
L'apaisement, vraiment ?
Pire : tandis que le chef du gouvernement prétend
s'inquiéter d'un « apartheid » social, d'aucuns
voudraient délibérément susciter la ségrégation scolaire ! Le
communautarisme a tout à y gagner, sous ses formes les plus variées.
Ainsi Allain Bougrain-Dubourg, Aymeric Caron et Franz-Olivier Giesbert
viennent-ils d'appeler « à ce que la loi française impose dans
chaque cantine scolaire, mais aussi dans les restaurants universitaires
et les administrations, une alternative végétarienne, voire
végétalienne ». De leur point de vue, « il s'agirait
d'une avancée citoyenne majeure et d'un geste fort en faveur de
l'environnement et de ce "vivre-ensemble" que tant invoquent sans rien
faire pour le promouvoir ». N'en déplaise à
M. Platret, selon lequel les cantines scolaires devraient
« redevenir des espaces de neutralité », cet objectif
ne pourra être approché que dans le respect des aspirations de chacun.
Cela peut s'accommoder d'une relative indifférence à l'égard de la
religion : nulle prière n'est requise pour servir du poisson à
un petit musulman. En revanche, le politique ne saurait l'ignorer au
point de nier sa prégnance.
Thibaud Collin l'avait expliqué en décembre 2013 dans les
colonnes de L'Action Française 2000 :
« La laïcité est un régime de fermeture dans le sens où elle
procède par abstraction. Je considère telle personne en faisant
abstraction de ses croyances pour ne voir en elle que son humanité ou
son statut de citoyen. Cela implique donc de se fermer, c'est-à-dire
d'ignorer volontairement et consciemment une dimension pourtant
essentielle de la personne humaine, pour mieux faire ressortir un
aspect commun censé être principe de cohésion sociale. »
Disons que la laïcité procède d'une conception potentiellement
sectaire, sinon totalitaire, du fameux "vivre-ensemble". Sans doute
a-t-elle contribué aux dizaines de morts survenues, à l'étranger, lors
des manifestations consécutives à la publication d'une nouvelle
caricature de Mahomet dans Charlie Hebdo, dont la
France tout entière se revendiquait alors... Indiscutablement, comme le
dit le Premier ministre Manuel Valls, « la laïcité, c'est donc
l'apaisement ».
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12 mars 2015
L'Europe ne fonctionne pas, mais ses détracteurs les plus
virulents ne sont pas là pour le dire.
Avant-hier, mardi 10 mars, la
Commission européenne a officialisé le délai de deux ans imparti à la
France pour remettre un peu d'ordre dans ses finances publiques,
conformément aux règles censées régir le fonctionnement de l'Union
économique et monétaire (UEM).
S'agit-il d'une nouvelle humiliation ? François
Hollande est « tenu en laisse par Bruxelles », a
dénoncé Nicolas Duont-Aignan ; « la
Commission européenne dicte la politique de la France », vient
de confirmer aujourd'hui le Front national. Décidément, les
souverainistes se plaisent à croire qu'ils vivent dans cette Europe
fédérale qu'ils prétendent honnir ! Les sanctions vont
pleuvoir sur Paris, préviennent-ils. À la faveur de quel
miracle ? Nul ne le sait. Or, depuis que l'euro a été
substitué en franc, Paris s'est montré coutumier des dérapages
budgétaires, sans que les mécanismes institutionnels et juridiques
censés maintenir les États dans les clous n'aient jamais été tout à
fait mis en œuvre.
Cet échec apparaît d'autant plus criant à l'heure où le marché
n'est plus en mesure d'assurer sa fonction régulatrice, la Banque
centrale européenne ayant entrepris de tirer les taux vers le bas.
Autrement dit, l'aléa moral aidant, le laxisme risque fort de présider
quelque temps encore à la gestion des finances publiques. L'escroquerie
inflationniste s'avérant impraticable prou cause de monnaie unique,
précisément, cela pourrait très mal finir.
Bref, l'Europe ne fonctionne pas. On le savait déjà, mais
force est de constater que les souverainistes ne sont pas là pour
le dire. C'est normal : ils sont à peu près les seuls à croire
le contraire.
NB – Nous reprenons à notre compte ce
constat fait par Charles Wyplosz sur Telos :
« Le juridisme du pacte de stabilité n'a pas résisté aux
arbitrages politiques. [...] Un pays souverain peut dire non aux
injonctions de la Commission, s'il l'ose et s'il en a les
moyens. » À lire également, chez
nos confrères d'Euractiv, à propos des
recommandations budgétaires formulées par la Commission
européenne : « Jusqu'ici, les États membres ne se
sont [...] pas empressés de les traduire en mesures nationales. En
2013, seuls 9 % des recommandations ont été entièrement
concrétisées. Pour 2014, ce chiffre est encore moins élevé
selon la Commission, les Vingt-Huit n'ont mis en place, entièrement ou
presque, que douze des cent cinquante-sept recommandations établies
l'an passé, soit environ 7,5 %. » C'est dire la
réalité de la dictature de Bruxelles fantasmée par nos petits camarades
souverainistes...
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6 mars 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
L'Égypte acquiert le Rafale pour échapper à l'influence
américaine, tout comme la France l'avait développé pour garantir son
autonomie stratégique.
Le Rafale a enfin décollé à l'export ! Vingt-quatre appareils ont
été commandés par l'Égypte le 16 février. Il était
temps : son premier vol remontait à juillet 1986... Depuis,
les critiques n'ont pas manqué de railler un projet militaro-industriel
réputé symptomatique d'une certaine arrogance française. D'autant
qu'avec des ambitions plus modestes, le Gripen suédois avait déjà
conquis la République tchèque, la Hongrie, l'Afrique du Sud et la
Thaïlande... Paris pouvait certes s'enorgueillir de disposer d'un avion
polyvalent et performant, mais personne n'en voulait ; la
preuve n'était-elle pas ainsi faite qu'il avait eu tort de faire
cavalier seul ?
Le choix de l'indépendance
C'est pourtant ce choix-là qui s'est avéré payant à l'égard du
Caire – celui de l'indépendance. Pour l'Égypte, remarquent nos
confrères de DSI, cet achat « est plus
qu'une affaire d'équipement militaire : c'est aussi une question de
souveraineté sur l'usage qui peut être fait de ses
matériels ». Jean-Dominique Merchet le confirme sur son blog Secret
Défense : « Le facteur déclenchant du
contrat Rafale remonte au mois d'août dernier, lorsque les Émirats
arabes unis ont bombardé des positions islamistes en Libye, avec le
soutien de l'Égypte. Les Émiriens ont alors utilisé leurs Mirage 2000-9
plutôt que leurs F-16, les États-Unis ayant, selon des informations de
source française, mis leur veto sur l'emploi de chasseurs-bombardiers
de fabrication américaine. Or, l'essentiel de la flotte aérienne de
l'Égypte est aujourd'hui composé de deux cent vingt F-16. D'où la
volonté de Sissi de diversifier, vite, son approvisionnement en
armements, auprès de pays, comme la France, moins regardant sur
l'emploi qui en est fait. » De fait, le développement du
Rafale s'est inscrit dans la continuité d'une politique nationale dont
la dissuasion nucléaire n'est pas le moindre des aspects. Aux côtés des
SNLE (sous-marins nucléaires lanceurs d'engins), l'avion produit par
Dassault en est précisément l'un des vecteurs. Sa crédibilité serait
naturellement entamée si elle devait dépendre, d'une façon ou d'une
autre, d'une puissance étrangère...
Une bonne affaire
L'exportation du Rafale contribuera-t-elle à pérenniser cette
autonomie ? Peut-être permettra-t-elle d'en atténuer les
coûts, au demeurant très relatifs. Développé dans le cadre d'une
coopération entre l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le
Royaume-Uni, assemblé en conséquence sur quatre
sites différents, l'Eurofighter s'est avéré beaucoup plus coûteux, en
définitive, que son concurrent français. Selon un rapport du Sénat,
« la coopération européenne dans les industries de défense
regorge d'exemples de programmes dont les délais ont été plus longs et
les coûts plus chers que s'ils avaient été menés nationalement, qui ont
connu des dérapages de prix et ont débouché sur des produits moins
cohérents voire si différents que tout partage des coûts de maintenance
en est impossible ». Dans ces conditions, conclut notre
confrère Jean-Dominique Merchet, « le choix de jouer en
franco-français [...] apparaît [...] comme le plus rationnel, tant sur
le plan des finances publiques que sur celui des besoins
militaires ».
En résumé : l'indépendance nationale est une bonne
affaire.
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6 mars 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Le budget des collectivités locales n'en finit pas
d'augmenter, bien que l'État réduise leurs dotations. Tandis que
l'intercommunalité tarde à tenir ses promesses, la concentration des
activités serait la condition d'une croissance retrouvée.
Vraiment ?
Polémique à Compiègne : après que la bande-son d'un
clip de rap controversé eut été enregistrée aux frais des contribuables
locaux, la municipalité a dénoncé « un détournement »
de ses installations. « Nos équipements ne doivent pas être
utilisés pour produire des éléments qui sont de nature à développer
l'argent facile, les rodéos », a martelé benoîtement Michel
Foubert, premier adjoint au maire Philippe Marini, cité par nos
confrères du Parisien. En conséquence, a-t-il
annoncé, les installations municipales pourraient faire l'objet
prochainement d'une "charte d'utilisation". Autant dire qu'il affiche
la ferme volonté d'en finir avec la dilapidation des deniers publics...
Plus de fonctionnaires
Pourtant, la pression est forte sur les communes, départements
et régions, dont le budget doit s'accommoder d'une moindre dotation de
l'État. « Après un premier coup de rabot de
1,5 milliard en 2014, cette manne va être amputée de
3,67 milliards cette année et de 11 milliards au
total de 2015 à 2017 », rapporte Le Figaro.
Les dépenses n'en continuent pas moins d'augmenter dans les
collectivités locales, comme le précise notre confrère Cyrille
Pluyette : « Leur masse salariale – plus de la moitié
des charges des communes – a bondi de 4 % l'an dernier, selon
un chiffre provisoire donné par Christian Eckert, le secrétaire d'État
au Budget, après une progression 3,1 % en 2013. »
Tout en occultant la diversité des territoires, ces chiffres traduisent
l'échec d'une certaine "rationalisation" orchestrée depuis Paris. Selon
l'Observatoire des finances locales, en effet, ces mauvais chiffres
résulteraient de « la montée en charge progressive de
l'intercommunalité », laquelle associerait « une
hausse modérée des dépenses communales de personnel à une progression
importante de celles des groupements de communes ». Autrement
dit, les mutualisations annoncées n'ont pas produit les économies
escomptées, bien au contraire !
Une analyse biaisée
Qu'en sera-t-il du développement des métropoles ?
Héritier du Commissariat général du Plan, le Conseil d'analyse
économique (CAE) souligne « l'intérêt » qu'il y
aurait « à accompagner la concentration d'activité ».
Paradoxalement, quitte à accroître les redistributions, il y verrait le
moyen de « promouvoir l'égalité des chances à travers le
territoire », selon l'intitulé d'un rapport publié le mois
dernier (féveier 2015). Cela répondra-t-il aux attentes de la "France
périphérique" dépeinte par Christophe Guilluy ? Quoi qu'il en
soit, cette analyse apparaît biaisée aux yeux d'Olivier Bouba-Olga,
professeur à l'université de Poitiers. Les rapporteurs « font
"comme si" le PIB par habitant était un bon indicateur de la
productivité des régions », explique-t-il sur son blog. Or,
cette statistique « dépend certes en partie de la productivité
apparente du travail, mais aussi des taux d'emploi, des taux
d'activité, de la proportion de travailleurs transfrontaliers ou
interrégionaux, des comportements de mobilité, etc. ».
A titre d'illustration, précise-t-il, « une bonne part de
l'écart entre le PIB par habitant de l'Île-de-France et celui des
autres régions tient au fait que les actifs d'Île-de-France passent
leur retraite hors de la région capitale ». En définitive,
affirme le chercheur poitevin, « croire que la seule solution
pour faire de la croissance en France consiste à renforcer encore
l'hypertrophie francilienne est particulièrement désolant et non fondé
scientifiquement ».
Républiques en miniatures
C'est pourtant la conviction qui semble inspirer nos élites
politiques, y compris à l'échelle locale. Que l'on songe aux
chamailleries à l'œuvre à la faveur de la réforme territoriale, tandis
que les édiles se disputent les "capitales" des nouvelles entités
régionales ! « On aurait pu rêver d'un peu
d'imagination, de tentatives de gouvernance innovantes, permettant de
tirer partie de la diversité des territoires français, de bien gérer
ces interdépendances », regrette Olivier Bouba-Olga.
« Je crains qu'on s'achemine vers l'émergence de petits rois,
à la tête de leur petit royaume », conclut-il, pessimiste. De
"petits royaume" hélas construits sur un modèle républicain...
NB – À la faveur du redécoupage régional,
« l'hétérogénéité interrégionale des PIB par habitant se
réduit », observe Olivier Bouba-Olga. Cela n'ira pas sans
produire quelque effet collatéral, prévient-il :
« Comme les aides européennes sont calculées en partie sur la
base des PIB régionaux par habitant, le montant d'aide reçu par la
France va diminuer. » Voilà qui éclaire sous un nouveau jour
une "solidarité européenne" que l'on savait déjà bien fragile...
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27 février 2015
Un article publié par U235 explique pourquoi cette notion est
« une absurdité scientifique ».
Le "choc des civilisations" hante les esprits.
« Pourtant », explique
Olivier Schmitt, « pour les spécialistes de
relations internationales, il s'agit d'un concept zombie, qui a été
disqualifié de multiples fois théoriquement et empiriquement, mais qui
refuse manifestement de mourir ». Aussi l'auteur de cet
article se propose-t-il d'« expliquer patiemment pourquoi la
notion est une absurdité scientifique ».
Au passage, il égratigne un africaniste bien connu des
militants et sympathisants d'Action française : « Du
fait du caractère malléable des identités », écrit-il,
« toute explication des conflits sur cette base (comme par
exemple les arguments de Bernard Lugan sur l'Afrique) est une
absurdité. Le fait que certains éléments du monde musulman aient décidé
de rentrer en conflit avec des pays occidentaux ne peut pas être réduit
à une logique d'affrontement ontologique entre identités
religieuses-civilisationnelles-culturelles, mais doit être remis dans
le contexte d'un affrontement de projets politiques. Car c'est bien là
la faiblesse des explications culturalistes des conflits : en
se focalisant sur le facteur culturel-identitaire comme cause, souvent
par racisme non avoué, elles sont aveugles aux logiques politiques
conduisant au conflit lui-même. Manipulable, l'identité est un enjeu
d'un conflit, elle n'en est jamais la cause, qui
est toujours politique. » Politique d'abord, donc. Bernard
Lugan se verrait-il reprocher de ne pas être suffisamment
maurrassien ?
« Au final », conclut Olivier Schmitt,
« la persistance du concept de "choc des civilisations", en
dépit de ses multiples réfutations, est révélatrice de la difficulté à
penser la complexité des interactions sociales, au sein du cadre
national ou dans les relations internationales. » Voilà qui
nous renvoie plus ou moins à notre marotte conspirationniste...
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27 janvier 2015
À quel jeu les pouvoirs publics sont-ils donc en train de
s'adonner ? Que Valls se fasse mousser à travers Dieudonné,
cela passe encore, celui-ci ayant accepté son rôle de bouffon en toute
connaissance de cause, quoiqu'il soit la victime d'une raison d'État
quelque peu dévoyée... Mais l'heure n'est plus à l'agitation
médiatique. Ces jours-ci, ce sont des enfants qui trinquent !
Lu
sur Nouvelles de France :
« Nantes. Une jeune fille prend le tramway avec ses sœurs et
une amie. Des contrôleurs se présentent et demandent leur titre de
transport. Après une altercation verbale, la plus jeune leur lance "On
est les sœurs Kouachi, on va sortir les kalachnikovs". Les contrôleurs
appellent la police, elle est mise en garde à vue puis présentée à un
juge en comparution immédiate qui la met en examen pour apologie du
terrorisme. Elle a quatorze ans... Toujours à Nantes. Décidément... Un
lycéen publie sur son mur Facebook une caricature qu'il trouve
particulièrement "marrante" selon ses propres termes. En juillet 2013, Charlie
Hebdo sort une couverture qui montre un Égyptien se faire
trouer de balles malgré un Coran tenu devant lui avec la légende "Le
Coran, c'est de la merde, ça n'arrête pas les balles". Le lycéen trouve
sur Internet une parodie de cette caricature qu'il publie. Elle montre
un journaliste tenant ce même exemplaire de Charlie Hebdo, troué de
balles, avec la légende "Charlie Hebdo, c'est de
la merde, ça n'arrête pas les balles". Quelques jours plus tard, il est
interpellé par la police chez lui et placé en garde à vue puis déféré
le lendemain. Le parquet, requiert son placement en liberté surveillé
et sa mise en examen pour apologie du terrorisme. Il a seize ans...
Lu
dans le même article : « Jeudi
8 janvier. Un collégien fait une minute de silence avec sa
classe en hommage aux victimes des attentats. Vendredi, le professeur
de français propose à ses élèves un débat sur ce qui vient de se
passer. N'ayant pas bien compris qu'il s'agissait autant d'un piège que
d'une réelle volonté de débattre avec les élèves, l'enfant lève la main
et dit "ils ont eu raison". Au lieu de demander des explications,
d'écouter, puis d'expliquer comme tout bon professeur aurait dû le
faire, le censeur lui ordonne immédiatement : "si tu penses ça, sors de
ma classe". La suite est hallucinante. L'élève se rend chez la
conseillère Principale d'éducation qui lui explique pourquoi il était
interdit de penser que les terroristes "ont eu raison". Dimanche,
l'enfant va à son match de foot. Il fait une minute de silence avec ses
camarades. "C'était bien, on était tous en rond, on se tenait par le
cou", raconte-t-il. Lundi matin à l'école, il est convoqué chez le
principal. Mardi matin, il est reconvoqué. L'enfant s'excuse et exprime
ses regrets. Mardi, le principal le convoque à nouveau, avec ses
parents cette fois. Il leur apprend que leur enfant est exclu pour une
semaine, "une mesure conservatoire"... En attendant le conseil de
discipline où il risque une exclusion définitive. Mercredi, le
principal, grand pédagogue devant l'éternel va porter plainte contre
l'enfant au commissariat. Jeudi, l'enfant et ses parents se rendent à
la convocation de la police "pour être entendu". L'enfant est alors
arrêté et placé en garde à vue. Il va passer vingt-quatre heures dans
les geôles de la république nationale socialiste. Vendredi matin,
menotté, il est présenté au juge pour une mise en examen d'apologie du
terrorisme. »
Lu
chez Jean-Marc Morandini : « Quatre
collégiens français vont être convoqués devant un juge des enfants pour
"apologie du terrorisme". Ils risquent théoriquement jusqu'à trois ans
et demi de prison. Le message, inscrit en surimpression en bas d'une
photo de groupe, a été découvert mardi par un de leurs camarades qui
l'a signalé à la direction du collège. Les ados avaient
écrit : "On n'est pas Charlie et on saura jamais, bande de
petites putes. On sème ce qu'on récolte". Placés en garde à vue puis
relâchés, ils sont convoqués le 25 mars devant le juge des enfants "aux
fins de mise en examen pour apologie d'actes de terrorisme au moyen
d'un réseau public de télécommunications", a indiqué le parquet de
Meaux. »
Nous sommes effaré. Tantôt incrédule, tantôt révolté.
Quelqu'un pourrait-il nous expliquer quel est le phénomène à
l'œuvre ? Un juriste au fait des procédures en cours et des
sanctions déjà prononcées pourrait-il nous éclairer sur leur caractère
apparemment surréaliste ? Dans l'immédiat, nous n'avons rien
trouvé de mieux à faire que publier nous aussi cette image
blasphématoire. Disons que que c'est la traduction d'une colère
exprimée en toute modestie.
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26 janvier 2015
« Le conspirationnisme victimaire est la maladie
traditionnelle des faibles, qui s'excusent de leur impuissance en
prêtant à leurs ennemis une surpuissance maléfique », analyse
Régis Debray, cité par Frédéric Taddeï.
« Les gens qui n'ont pas les moyens de participer au
grand jeu s'imaginent être victimes de terribles complots par les
surpuissants », a-t-il
déclaré au micro d'Europe 1 mercredi
dernier, 21 janvier 2015 (à partir de la 28e minute). « C'est une façon
de s'excuser de ses propres insuffisances », a-t-il poursuivi.
« Je n'ai pas du tout une vision complotiste et policière de
l'histoire », a-t-il précisé. Selon lui, « il y a
beaucoup de faux mystères » ; « les choses
sont toujours beaucoup plus simples qu'on ne le pense ». Régis
Debray n'en croit pas moins « que les grandes choses se font
en silence et dans le dos des gens » ; « je
crois aux très lentes maturations », a-t-il
expliqué. Derrière le conspirationnisme, a-t-il observé, « il
y a l'idée que les officiels nous mentent et que la vérité est derrière
les apparences ». « Il y a l'idée aussi que les
grandes choses s'expliquent par de grandes causes très complexes et
qu'il faut qu'à à un événement majeur correspondent des préparatifs
majeurs. On ne pense pas simplement à l'accident, au hasard, à la
coïncidence, au fait que tout est bricolé ici-bas. »
De ce point de vue, précisément, peut-être l'extrême droite
n'est-elle pas aussi réactionnaire qu'elle y paraît, tant elle s'avère
encline à développer une vision constructiviste de l'histoire... À nos
yeux, soit dit en passant, du constructivisme au conspirationisme, il
n'y qu'un pas, et encore. Un exemple ? Le souverainisme.
Celui-ci procède plus ou moins de la conviction que la construction européenne serait
le fruit d'une planification patiemment mise en œuvre. Or, les calculs d'intérêts, toujours opérés dans les
capitales, en demeurent le plus puissant moteur, comme en témoignent
ses dernières avancées : comment expliquer la mutualisation
partielle des dettes souveraines et l'union bancaire, sinon par la
panique des gouvernements nationaux confrontés à la crise ?
Les souverainistes se complaisent dans des illusions volontaristes. En
vérité, personne ne tire vraiment les ficelles de "l'Europe". Tout
simplement parce qu'ici comme ailleurs, à l'échelle de l'histoire, ces
ficelles n'existent pas. C'est en cela que « tout est bricolé
ici-bas ». Chez Friedrich Hayek, on parle d'un
« ordre spontané ». Oups ! Régis Debray nous
pardonnera-t-il d'avoir associé son nom à celui d'une icône
libérale ?
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