1 octobre 2015
Passage en mode "Gorafi".
Marine Le Pen participera au prochain "happening" des
Femen. « L'important n'est pas d'où nous venons, l'important
est où nous voulons aller ensemble », s'est-elle justifiée,
reprenant la formule de Max Gallo soufflée par Florian Philippot.
« Les militantes du mouvement Femen ont fait la
preuve de leur courage et de leur lucidité en dénonçant la tenue d'un meeting
islamiste à Pontoise, organisé avec la complicité de l'oligarchie
politico-médiatique », a expliqué la présidente du Front
national. « Elles auraient même toute leur place au sein du
Rassemblement Bleu Marine », a-t-elle poursuivi.
Céline Pina sera-t-elle de la partie, elle aussi ?
« Elle hésite à se dépoitrailler », regrette Marine
Le Pen. « Mais en politique », a-t-elle
martelé, « il faut savoir donner de sa personne ».
« C'est cela, être une femme d'État », confirme un
jeune militant frontiste. « Angela Merkel s'est laissé
photographier les seins à l'air. Voyez jusqu'où cela l'a menée... Pour
le plus grand bénéfice de l'Allemagne, et le malheur de la France...
Marine, c'est un peu la Jeanne d'Arc des temps modernes, elle est de la
même trempe que la chancelière ! » Dont acte.
En dépit du différend l'opposant à sa fille, Jean-Marie Le Pen
lui-même aurait joué les entremetteurs. « Les Femen vont balader leurs gros nichons dans les églises, mais elles ne vont jamais dans les
mosquées ni dans les synagogues », avait-il regretté à l'hiver
dernier. En effet, pourquoi les chrétiens seraient-ils les seuls en
profiter ? Approchées par le vieux Menhir libidineux – et
jalouses, peut-être, de l'intérêt qu'il porte à la sculpturale
Nabilla –, les "sextrémistes" lui auront donc prêté une oreille
attentive. On
comprend mieux, désormais, pourquoi Marine parlait de son père comme de
la « petite Femen » du FN : c'était en fait
leur ambassadeur !
Les modalités de cette prochaine manifestation "topless"
restent tenues secrètes. Au préalable, cependant, Marine
Le Pen devrait apparaître à la "une" de Playboy.
« Il
faut préparer la France à cette vision d'horreur », reconnaît
Louis Aliot. Cette précaution suffira-t-elle à tempérer les
inquiétudes qui s'expriment au sein du parti ? « On
va rendre la France frigide », s'alarme un transfuge des
Identitaires, pourfendeur du « grand remplacement ».
« C'est encore un coup du funeste Philippot »,
dénonce un cadre issu de la "veille garde" du FN ; « avec ses
potes homos », nous dit-il, « il espère rafler les
voix des lesbiennes qui mouillent à la vue des camionneuses ».
« Pas du tout ! », s'insurge
Gilbert Collard. « Bien au contraire », précise-t-il,
« il s'agit d'un signal envoyé à La Manif pour
tous » : « Marine respecte les traditions
initiées par sa mère », explique l'avocat ;
« c'est l'expression de notre attachement aux valeurs
familiales ».
Affaire à suivre.
NB – Les citations de Max Gallo
et de Jean-Marie Le Pen sont
authentiques, ainsi que celle de Marine Le Pen parlant de la « petite Femen » du FN (ce sont les seules).
Mise à jour – Le
Monde dit à peu près la même chose que nous :
« En s'attaquant frontalement à la religion musulmane, les
Femen n'attisent-elles pas la flamme xénophobe du Front
national ? », se demande notre consœur Catherine Vincent.
L'accès à son article est payant, mais on devine que son propos à elle
est à prendre au sérieux – du moins est-il censé l'être !
Publié dans Féminisme & Genre, Insolite, Politique | Pas de commentaires
30 septembre 2015
A priori, les Blancs sont d'une
intelligence supérieure. La preuve avec Nadine Morano ?
Dans le numéro de L'AF2K bouclé la nuit
dernière, à paraître demain (1er octobre 2015), la page
centrale est consacrée aux parodies et autres détournements faisant le
bonheur des réseaux sociaux... Cela donne des idées !
Au passage, rendons à César... Si Nadine Morano prétend
s'inspirer du général De Gaulle, à la faveur d'une citation
rapportée par Alain Peyrefitte (et seulement par lui...), peut-être
Henry de Lesquen a-t-il contribué à jouer les entremetteurs.
« C'est très bien qu'il y ait des Français jaunes,
des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est
ouverte à toutes les races et qu'elle a une vocation universelle. Mais
à condition qu'ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne
serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple
européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion
chrétienne. »
Le président de Radio Courtoisie le
répète à longueur d'antenne, prenant un malin plaisir à imiter la
diction du général De Gaulle !
Mais pourquoi s'obstiner à manier un terme nourrissant tant
d'ambiguïtés, sinon dans le but délibéré de les entretenir ?
Sans doute les mots ont-il changé de sens. Mais n'en déplaise aux
réactionnaires, tout n'était pas mieux avant.
Publié dans Humeur, Insolite, Politique | Pas de commentaires
26 septembre 2015
Des citoyens de gauche comme de droite, issus de toute la
France, désireux non pas de battre un parti au profit d'un autre, mais
de servir leur pays, s'engagent pour le redressement national.
Pour le redressement national, Macron
président !
Trop, c'est trop : ras-le-bol de l'immobilisme et du
sectarisme !
De déclarations en déclarations, Emmanuel Macron est devenu le
héraut inespéré d'une politique de redressement national.
Il s'en est pris au carcan des trente-cinq heures, et le voilà
qui propose d'assouplir les rigidités du marché du travail.
Il ouvre, en fait, la voie vers une société de
libertés : accroissement des responsabilités offertes à
chacun, réhabilitation de la négociation au sein des entreprisses,
nouvelles perspectives d'emploi...
Faut-il énumérer, outre les trois cent huit articles de sa loi
pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques,
les plus notables de ses déclarations rompant avec l'immobilisme et le
sectarisme ?
En octobre 2013, dans un entretien à Mediapart,
il invite à « revisiter un des réflexes de la gauche, selon
lequel l'entreprise est le lieu de la lutte des classes et d'un
désalignement profond d'intérêts » ; constant que
« la société statutaire où tout sera prévu va inexorablement
disparaître », il appelle à réagir en conséquence, afin de
donner « la possibilité aux individus de faire face, même aux
coups durs ».
En janvier 2015, dans un entretien aux Échos,
tandis que les professionnels de la politique se satisfont
manifestement du chômage de masse, incitant la population à la
résignation, il déclare qu'« il faut des jeunes Français qui
aient envie de devenir milliardaires ».
En juillet 2015, dans un entretien à l'hebdomadaire Le 1,
il observe qu'« il y a dans le processus démocratique et dans
son fonctionnement un absent » ; « dans la
politique française », explique-t-il, « cet absent
est la figure du roi » dont il « pense
fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la
mort ».
Sans parler de sa dernière sortie, aussi courageuse
qu'inattendue, sur le statut de la fonction publique...
Bravo, mille fois bravo ! Des ministres ont été
écartés pour bien moins que cela.
La démagogie passéiste n'est plus supportable.
Si l'on veut sauver la France du désastre, il faut s'appuyer
sur Macron. Si l'on veut dépasser les clivages partisans, cela peut se
faire avec l'aide de Macron.
Nous appelons à ce qu'il reste au gouvernement, qu'il en
prenne même la direction, puis qu'il succède au président de la
République à la tête de l'État. Ce serait "le" signal positif,
indispensable, pour enfin changer durablement de cap, revenir à des
positions saines pour toute la France.
Pour la France, Macron président !
Source : www.macron-president.fr (il s'agit d'une réponse au manifeste appelant à la
démission d'Emmanuel Macron apparu quelques heures plus tôt).
Publié dans Humeur, Insolite, Polémique, Politique | Pas de commentaires
17 septembre 2015
A priori, Schengen, c'est
fini... Vraiment ?
« A priori, Schengen,
c'est fini. » Cette annonce circule sur la Toile, avec la
photo d'Angela Merkel, s'inscrivant dans une série d'images plus ou
moins parodiques. Sur les réseaux sociaux apparaît également ce
commentaire : « À bas l'Union européenne. Vive
l'Europe des nations libres et indépendantes ! »
Voilà qui participe d'un double malentendu.
En effet, le rétablissement de contrôles aux frontières des
États membres de l'Union européenne participe du fonctionnement normal
de l'espace Schengen. Si Paris y trouve son compte d'une façon ou
d'une autre, il ne fait aucun doute qu'il emboîtera le pas à Berlin. Le
Premier ministre, Manuel Valls, vient de le rappeler devant les députés :
« Nous avons déjà rétabli ce printemps des contrôles
temporaires à cette frontière (franco-italienne). Et nous n'hésiterons
pas à le faire de nouveau comme les règles de Schengen le permettent à
chaque fois que les circonstances l'imposent, si c'est nécessaire dans
les prochains jours ou prochaines semaines. » Il y a d'autres
précédents... Comme l'expliquait Serge Weber, dans une contribution au Dictionnaire
critique de l'Union européenne (Armand Colin, 2008),
« la liberté de circulation est en réalité toute
relative ».
D'aucuns s'imaginent qu'elle résulterait de décisions
inspirées par la seule idéologie : des élites apatrides
œuvreraient sincèrement (quoique sournoisement) à la constitution d'un
État européen puis mondial, convaincues que celui-ci serait le gage
d'une paix perpétuelle... Du conspirationnisme soft,
en quelque sorte ! La réalité s'avère plus prosaïque, comme
l'illustre l'article de Wikipédia consacré à
l'accord de Schengen : « Souvent présenté
comme un "laboratoire de l'Europe", cet accord fait suite, notamment, à
une grève du zèle des douaniers italiens, puis des douaniers français,
en janvier 1984, confrontés à l'intensification de leur travail à la
suite de l'augmentation des passages de frontières, à laquelle fait
réponse une grève des camionneurs qui paralyse le territoire français
en février 1984. »
Autrement dit, des considérations économiques et sociales ont
vraisemblablement présidé aux négociations de cet accord, signé le
14 juin 1985 par la France, l'Allemagne, la Belgique, les
Pays-Bas et le Luxembourg. Cinq États, donc, alors enclins à souscrire
un engagement multilatéral en marge des institutions communautaires.
L'espace Schengen n'a été intégré à l'Union européenne qu'une
dizaine d'années plus tard, avec le traité d'Amsterdam. Aujourd'hui,
cependant, tous les États membres de l'UE n'en font pas
partie : l'Irlande et le Royaume-Uni se maintiennent à
distance ; la Bulgarie, la Croatie et la Roumanie frappent à
la porte (le cas de Chypre est un peu spécial). À l'inverse, l'Islande,
le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse y participent... sans être
membres de l'UE.
Bref, l'espace Schengen, c'est l'Europe à la carte.
Son histoire comme sa réalité présente en
témoignent : "l'Europe des États libres et indépendants"
existe ; elle est là, sous nos yeux, dans nos vies... Pour le
meilleur ou pour le pire.
Publié dans Europe, Souverainisme | Pas de commentaires
16 septembre 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Le développement international et la santé mondiale sont loin
d'être régis par les seuls principes de la philanthropie. Force est de
constater que les États et leurs intérêts continuent d'en déterminer
les orientations.
Vendredi 25 septembre 2015 s'ouvrira à New York, pour
trois jours, le sommet des Nations unies au cours duquel sera adopté le
« programme de développement pour l'après-2015 »,
censé succéder aux « objectifs du millénaire pour le
développement ». Définis il y a quinze ans, ceux-ci visaient à
« réduire l'extrême pauvreté et la faim, assurer à tous
l'éducation primaire, promouvoir l'égalité des sexes et
l'autonomisation des femmes, réduire la mortalité infantile, améliorer
la santé maternelle, combattre le VIH-Sida, le paludisme et les autres
maladies, assurer un environnement humain durable, construire un
partenariat mondial pour le développement ».
Le commerce dicte sa loi
Les ambitions réaffirmées de la "communauté internationale" se
traduiront-elles dans les faits ? Entres autres écueils, les
politiques de développement s'avèrent biaisées par les préoccupations
propres aux États donateurs. Un exemple ? « La
disproportion et la précipitation de financements alloués au contrôle
de maladies infectieuses » – lesquelles « trouvent
des éléments d'explication dans la peur qui habite
l'Amérique », comme l'explique Mme Dominique
Kerouedan, dans
un leçon inaugurale du Collège de France prononcée en février 2013,
consacrée à la "géopolitique de la santé mondiale". « Dans le
même hôpital », regrette-t-elle, « le patient atteint
de Sida est parfois traité alors que les patients souffrant de
méningite, d'hépatite ou de fièvre typhoïde, ou de toute autre maladie,
meurent dans l'indifférence ». Peut-être la promotion des
« droits sexuels et reproductifs » participe-t-elle
d'un phénomène similaire ? Au printemps dernier, comme
le rapporte Euractiv, les Vingt-Huit se
sont accordés pour infléchir en ce sens la politique de développement
de l'Union européenne. Cela, semble-t-il, à l'invitation de
Paris : « nous sommes extrêmement satisfaits, car
nous avons réussi à négocier des conclusions ambitieuses, qui
comprennent notamment la mention de l'éducation sexuelle des femmes et
des droits reproductifs », s'est ainsi félicitée une « source
française » citée par nos confrères.
Quoi qu'il en soit, si l'idéologie exerce vraisemblablement
son influence, celle-ci ne saurait éclipser les considérations
économiques, comme en témoignent les origines historiques de
l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Tandis que se tient à Paris,
en 1851, la première Conférence sanitaire internationale, « il
s'agit moins pour les États de maîtriser les épidémies de choléra, de
peste ou de fièvre jaune, que de s'entendre pour réduire au minimum les
mesures de quarantaine qui s'avèrent coûteuses pour le
commerce », souligne encore Dominique Kerouedan. Autrement
dit, selon l'analyse de David Mitrany, « les progrès laborieux
de la coopération internationale sont moins dus à la sagesse politique
des États qu'au rapprochement de leurs intérêts matériels ».
Comment gagner la guerre
« Le vocabulaire de la géopolitique – puissance,
pouvoir, souveraineté, sécurité, territoires, velléités et rivalités,
cartes et positionnement – caractérise avec plus de justesse les
relations internationales contemporaines dans le champ de la santé que
celui de la seule gouvernance de l'architecture de l'aide au
développement », poursuit Mme Kerouedan. En pleine
Guerre froide, rappelle-t-elle, « le président John Fitzgerald
Kennedy [...] brandissait devant le Congrès, traditionnellement
isolationniste, la coopération au développement comme une stratégie
puissante pour contrer la progression du communisme ». À
l'aube du XXIe siècle, si le Conseil de sécurité des Nations
unies s'est inquiété de la propagation du Sida, c'était en raison de
son « impact [...] sur la paix et la sécurité en
Afrique », selon l'intitulé d'une thématique inscrite à
l'ordre du jour de ses réunions. Il semble même que l'expression de
"santé mondiale" soit apparue, pour la première fois, dans un rapport
américain soulignant « l'intérêt, pour la sécurité des
États-Unis, des questions de santé telles qu'elles se manifestent même
à l'autre bout de la planète ».
Outre-Atlantique, peut-être se souvient-on que « les
désastres sanitaires conduisant à des échecs militaires ne sont pas
exceptionnels ». Notre histoire nationale en donne quelques
exemples : « La variole avait tué plus de vingt-deux
mille soldats de l'armée française pendant la guerre de 1870. Les
troupes sont décimées lors de l'expédition du général Leclerc à
Saint-Domingue en 1802, ou de la conquête de Madagascar en
1895. » La guerre n'est plus la même aujourd'hui. Confrontées
à la menace islamiste, les armées devraient-elles se désintéresser des
questions sanitaires ? Coiffant les agences de renseignement
américaines, le National Intelligence Council (NIC) est convaincu du
contraire. En 2008, dans un rapport traitant, précisément, des
implications stratégiques de la santé mondiale, il prévenait
« que les acteurs non étatiques, comme les terroristes ou les
seigneurs de guerre, gagnent en légitimité, en pouvoir et en envergure,
locale et internationale, en fournissant des services que des
gouvernements ne proposent pas ». De fait,
« l'incapacité du gouvernement à fournir à la population des
services de base, de santé ou autres, a nui à la crédibilité du
gouvernement en Afghanistan, tout en alimentant le soutien aux
Talibans ».
Un appel à la France
Malheureusement, remarque Dominique Kerouedan, « la
notion de sécurité en politique va de pair avec l'urgence et le
contrôle de maladies transmissibles, plutôt qu'avec une approche
holistique de long terme, qu'exige le renforcement d'institutions
techniques ou managériales ». Par ailleurs, semble-t-elle
regretter, « à leur aide sanitaire bilatérale, la France et la
Commission européenne privilégient le financement d'initiatives
mondiales pilotées à distance ». Or, déplore-t-elle,
« le retrait du terrain de l'expertise bilatérale à long terme
signe, de fait, la fin de ce qui fut le plus satisfaisant – et
l'exception française, belge, allemande, européenne – dans l'exercice
de la coopération : réfléchir et travailler ensemble, in situ, à des
réponses renouvelées ». Tandis que dominent les intérêts
américains, clame-t-elle en conclusion de sa leçon inaugurale,
« il ne tient qu'à la France de se réconcilier avec son
histoire, européenne et africaine, et à l'Union européenne de prendre
la place qui est la sienne dans le monde, en faveur de la paix et du
développement ». Toujours actif en Afrique, Paris
relèvera-t-il le défi ? Sur
Diploweb, Dominique Kerouedan s'inquiète
« d'une politique de développement durable de la France
écartelée entre, d'un côté, la diplomatie économique avec les pays les
plus riches du continent, et de l'autre, l'organisation de la
conférence de Paris sur le climat en 2015 ». Affaire à suivre.
Publié dans International, Monde | Pas de commentaires
27 août 2015
Lecture critique d'un article contribuant à propager des
légendes urbaines.
Poursuivant notre petite enquête sur l'obsolescence
programmée, nous venons de prendre connaissance d'un
article publié il y a deux ans par Paris Tech Review.
Quelle déception à sa lecture ! « Les exemples
foisonnent d'appareils tombant en panne juste après la fin de période
de garantie. », écrivent les auteurs. Pourquoi n'en
donnent-ils aucun, s'ils sont effectivement si nombreux ? Il
est vrai que nous avons tous vécu des expériences malheureuses.
Gardons-nous toutefois d'en tirer des conclusions hâtives :
seules les statistiques feront foi ! Or, il semblerait
vraisemblable que celles-ci réfutent pareille croyance
populaire : « le produit HS "juste après la fin de la
garantie" est un phénomène rare et non contrôlé par le
fabricant », comme
l'explique Anton Suwalki sur Contrepoints.
« Les entreprises investissent des sommes et une
énergie considérables pour fabriquer des produits délibérément
défectueux », prétendent encore les collaborateurs de Paris
Tech Review, sans proposer aucune illustration précise de
leur propos. Tout au plus évoquent-ils vaguement des cartouches d'encre
dont le recyclage serait bloqué par une puce électronique. Un exemple
d'autant moins convaincant qu'il ne s'agit pas vraiment de produits
« sciemment conçus pour ne pas durer », mais plutôt
d'une volonté de rendre les consommateurs captifs – tout comme le fait
Amazon avec son Kindle, par exemple. Pas grand chose à voir avec l'obsolescence
programmée stricto sensu donc.
De fait, les auteurs entretiennent la confusion entre les
différentes acceptions du concept. « On a pu la rapprocher de
la mode, qui dévalue année après année des vêtements ou accessoires
achetés fort cher », soulignent-ils notamment. La mode, pour
faire simple, constituerait en fait une « version primitive de
l'obsolescence programmée », à laquelle les constructeurs
automobiles auraient été contraints de revenir sans qu'on sache trop
pourquoi : « quand la fiabilité technique des
produits augmente" – c'est le cas pour les voitures – et prolonge leur
durée de vie, les constructeurs cherchent à créer, par le truchement du
design, une obsolescence visuelle des modèles
antérieurs », affirment ainsi les auteurs. C'est
méconnaître la stratégie mise en œuvre par certains groupes, à
commencer par Volkswagen, qui procède précisément à
l'inverse !
Publié dans Conspirationnisme, Économie et Industrie | Pas de commentaires
27 juillet 2015
Vincent Lambert doit mourir, tout comme le capitaine Dreyfus
devait être jugé coupable : tel est, en substance, le message
délivré par notre confrère Bruno Roger-Petit.
La situation de Vincent Lambert relève-t-elle de
la fin de vie ou bien du grand handicap ? Tandis que
sa famille se déchire sous le regard obscène des médias (dont nous
sommes), son destin n'en finit pas d'être balloté au gré des procédures
judiciaires. « Face à cette tragédie, l'humilité est de
rigueur », soutient Bruno Roger-Petit. Sur ce point, au moins,
nous sommes d'accord !
Mais alors, que faire ? Faut-il mettre un terme à ses
souffrances, comme le demande sa femme ? Ou bien le placer
durablement dans un établissement plus adapté, comme le réclament ses
parents ? Certainement pas ! « La première
des urgences », martèle notre confrère, « c'est [...]
de faire en sorte que le destin de Vincent Lambert ne soit plus pris en
otage par des militants intégristes ».
Car « à la fin », explique-t-il
dans Challenges, « il y a le
droit ». Or, poursuit-il, « le droit s'est prononcé
de telle façon qu'il a reconnu que, dans le cadre de la loi française,
il était possible, si besoin était, de prendre la décision d'arrêter ce
qui est médicalement vain » ; « et le droit
qui a été dit doit être respecté par tous et partout, y compris quand
il peut déplaire à une conscience subjective » – « y
compris celle de croyants intégristes qui placent leur foi au-dessus du
droit, donc de la République. » Nous y voilà !
« De ce point de vue », souligne-t-il,
« c'est devenu une affaire de principe ».
Dans ces conditions, peu importe le destin d'un malheureux
individu. De toute façon, « personne ne peut dire quelle est
la juste solution à l'écrasant problème que pose la situation de
Vincent Lambert », remarque Bruno Roger-Petit. Autrement dit,
puisqu'il est impossible de résoudre l'affaire Lambert d'un point de
vue moral, autant l'exploiter dans une perspective partisane. Pour un
certain nombre de « militants intégristes », déplore
notre confrère, Vincent Lambert serait devenu « un objet de
communication destiné à populariser leur combat "pour la
vie" ». Certes. Mais loin de soustraire Vincent Lambert à ceux
qui se le seraient approprié, Bruno Roger-Petit le réduit à la querelle
dont il est précisément l'otage. Quel est, en substance, le message
délivré par notre confrère ? Selon lui, Vincent Lambert doit
mourir, non parce qu'il serait juste d'interrompre les soins dont il bénéficie, mais
parce que c'est légal, et surtout parce que sa disparition
indisposerait « des militants intégristes » exécrés.
À certains égards, on se croirait en pleine affaire
Dreyfus ! À l'époque, déjà, c'était une « affaire de
principe », comme dirait Bruno Roger Petit. Maurras l'avait
lui-même revendiqué,
comme en témoignent ses propos rapportés par François Huguenin :
« Mon premier avis là-dessus avait été que, si Dreyfus était
innocent, il fallait le nommer maréchal de France, mais fusiller une
douzaine de ses principaux défenseurs pour le triple tort qu'ils
faisaient à la France, à la paix et à la raison. » Autrement
dit, ce n'était pas la responsabilité du pauvre capitaine qui
importait, mais l'identité de ses défenseurs – et l'honneur de
l'Armée à laquelle ceux-ci se seraient attaqué en prenant son parti.
Aujourd'hui, ce ne sont plus l'Armée et la sécurité nationale
qui sont menacés, mais la République et l'État de droit, nous dit Bruno
Roger-Petit. Ils le sont par « des militants
intégristes » que l'on sait aux protes du pouvoir. Des gens
dont la foi n'est souvent que le paravent d'une orgueil détestable, à
l'image des pharisiens vilipendés dans l'Évangile, mais qui ne
dérangent vraiment que ceux qui en font une obsession... À l'image de
Bruno Roger-Petit, donc, qui semble virer anti-dreyfusard par hantise
de l'extrême droite – un comble !
Publié dans Polémique, Société | Pas de commentaires
24 juillet 2015
Marine Le Pen laisse entendre que l'Europe imposerait
à la France d'interrompre les soins dispensés à Vincent Lambert – un
mensonge flagrant.
Marine Le Pen vole « au secours de Vincent
Lambert », annonce
Nouvelles de France. « Le débat
consistant à s'interroger sur le droit de tuer quelqu'un, de tribunaux
en tribunaux et de journaux télévisés en journaux télévisés, est
épouvantable », aurait déclaré, jeudi dernier,
23 juillet 2015, la présidente du Front national, comme
le rapportent nos confères du Figaro.
Et d'ajouter : « Un pays doit pouvoir
conserver sa liberté totale, notamment dans ce domaine, et n'a pas à se
soumettre aux exigences, y compris de la Cour européenne des droits de
l'homme (CEDH). Surtout quand cette cour ne semble pas avoir le souci
véritable de défendre Vincent Lambert. »
Or, en l'espèce, que dit la CEDH ? Sa décision,
rendue le 5 juin dernier, stipule « qu'il n'y aurait pas
violation » de la Convention européenne des droits de l'homme
« en cas de mise en œuvre de la décision du Conseil d'État
autorisant l'arrêt des soins» (voir
le résumé de l'affaire proposé par Wikipédia). Autrement dit,
il s'agit plus ou moins d'un blanc-seing donné à la justice
française !
Bref, contrairement à ce qu'insinue
Mme Le Pen, en dépit de ses engagements
internationaux, la France est libre d'instruire cette affaire comme
elle l'entend.
L'Europe a bon dos !
Publié dans Désinformation, Justice, Politique, Société | Pas de commentaires
16 juillet 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Observateur attentif des droites radicales, Jean-Yves Camus
est politologue, chercheur associé à l'IRIS (Institut de relations
internationales et stratégiques).
« Protéger les jeunes du risque
d'endoctrinement anti-républicain » : tel était
l'objet du séminaire organisé par France Stratégie (le "laboratoire
d'idées" du gouvernement, héritier du Commissariat général au Plan),
auquel vous avez participé le jeudi 2 juillet 2015. Les royalistes
étaient-ils visés ?
Cette formulation émane d'une administration. Or, mon regard
est celui d'un universitaire. Sur la forme républicaine du
gouvernement, chacun a son opinion, mais je crois, honnêtement, que le
coup de force n'est pas pour demain. Que l'on s'en réjouisse ou qu'on
le déplore, le sujet, aujourd'hui, ce n'est pas le mouvement
royaliste ! Ce qui importe, c'est de regarder les mouvements
qui posent un danger pour la sécurité intérieure et extérieure de la
France. Au cours de cette réunion, 80 % des discussions ont
donc porté sur l'islamisme. L'interdiction des mouvements comme le
vôtre serait absurde. De toute façon, l'objet des discussions n'était
en aucun cas d'évoquer des mesures de répression : seul le
gouvernement peut décider de mesures de dissolution, qui ne pourraient
en aucun cas supprimer une école de pensée.
Intervenant en tant que « spécialiste
des nationalismes et extrémismes en Europe », vous avez pris
la parole aux cotés de la directrice générale du Centre de prévention
contre les dérives sectaires liées à l'islam. L'extrême droite et
l'islamisme représenteraient-ils un danger commun pour les institutions
ou la société, comme le suggère la dénonciation de
« l'islamo-fascisme » ? Y aurait-il des
points communs, voire des passerelles, entre l'islamisme et les droites
radicales ?
L'islamo-fascisme est un concept parfaitement creux, dont
l'emploi peut, à la rigueur, permettre à des publicistes de "clasher"
dans les débats télévisés, mais scientifiquement, il ne tient pas. Cela
étant, il y a effectivement des points de convergence entre tel ou tel
groupuscule – je dis bien groupuscule – d'ultra-droite et les discours
délirants qu'on peut trouver chez les salafistes radicaux :
sur le complot international, le rôle caché de tel ou tel groupe de
pression qui dirigerait le monde en tenant les ficelles... Il y a
également quelques cas rarissimes – on doit les compter sur les doigts
de la main – de gens qui, tout en ayant eu un engagement à
l'ultra-droite, sont passés ensuite à un engagement islamiste. Mais
aujourd'hui, le problème qui se pose, ce sont les conversions, pas les
passages de l'ultra-droite au salafisme !
La République est sur toutes les lèvres, comme
en témoignent l'organisation de ce séminaire ou le changement de nom de
l'UMP. Son invocation ne serait-elle pas le paravent "politiquement
correct" d'une certaine "islamophobie" ?
Je fais partie des gens qui utilisent le terme d'islamophobie.
Je n'en ai jamais nié la pertinence lorsqu'il s'agissait de parler
d'une forme de détestation de l'islam qui constitue, au sens clinique,
une phobie. Quand on a une phobie de l'islam et des musulmans, sans se
demander si les gens se définissent eux-mêmes comme musulmans, ni s'ils
sont totalement intégrés à la Nation française, quand on part du
principe que tous les musulmans forment une cinquième colonne dans la
République, alors on est un islamophobe. Cela étant, le terme est
parfois aussi utilisé pour entraver la liberté que l'on doit avoir de
questionner l'islam, de critiquer l'islam, comme on peut également
questionner et critiquer le catholicisme, le judaïsme, tout type de
croyance philosophique et religieuse. Je ne dirai pas que l'invocation
de la République sert de paravent à l'islamophobie. Cependant, il est
d'autant plus question de République, d'une façon parfois un peu
totémique, depuis que se pose la question de la radicalité islamiste en
France, et qu'une interrogation réelle se fait jour sur la place qu'on
doit donner à l'islam dans notre pays.
« En Europe occidentale »,
expliquiez-vous à L'Humanité en 2012, « les
populismes d'extrême droite ont réussi à détourner le logiciel
idéologique de la gauche sur les questions sociétales ». Qu'en
est-il du Front national ? Sa critique relativement mesurée du
"mariage pour tous" participe-t-elle de ce phénomène ? Par
ailleurs, Marine Le Pen aurait-elle rompu avec son père parce que
l'antisémitisme ne lui semblerait plus rentable ?
Tout ce mouvement-là est lié à la question de
l'islam : défense des homosexuels dans leurs droits en tant
que minorité, parce qu'on explique que, dans les pays d'islam, ils
n'ont aucun droit, et qu'ils sont menacés ici même par la montée du
fondamentalisme musulman ; défense des femmes, parce que l'islam les
opprime et les force à porter le voile ; défense de la laïcité, parce
que l'islamisme cherche à la détruire ; réappropriation de
toutes les valeurs sociétales qui étaient portées auparavant par la
gauche, parce que certains milieux laïcs considèrent qu'aujourd'hui, il
y a, dans les pays européens un nouveau totalitarisme qui s'exprime, le
totalitarisme islamiste. On vient défendre les libertés individuelles,
les libertés des minorités, contre ce totalitarisme-là. C'est vrai à ce
point que Pim Fortuyn et Geert Wilders ont pris aussi la défense des
Juifs des Pays-Bas, dont ils expliquent qu'ils sont menacés par le
totalitarisme islamiste, ce qui n'était quand même pas l'optique
dominante à l'ultra-droite il y a encore quelque temps... Que
l'évolution du Front national s'inscrive dans la même logique, cela ne
fait aucun doute. Mais il faut être très clair : l'antisémitisme,
électoralement, cela n'est pas rentable du tout ! D'ailleurs, cela
n'est pas davantage rentable que le supposé vote juif. Une étude de
Jérôme Fourquet (Ifop) sur « les votes juifs » montre
combien il est statistiquement insignifiant et divers.
« La France n'est pas que la
République », a déclaré Marion Maréchal-Le Pen, dans un
entretien à la revue Charles. Pensez-vous, comme
l'annonce Bruno Roger-Petit dans Challenges,
qu'il s'agisse d'« un cri de ralliement lancé à ce que
l'extrême droite française a toujours produit de pire depuis deux
siècles » ?
Ce qu'il y a de pire dans l'histoire des extrêmes droites,
c'est le national-socialisme... La république est la forme de
gouvernement qui, je crois, rassemble la majorité des Français.
Regardons toutefois la carte de l'Europe, ou, plus précisément, celle
de l'Union européenne : la Belgique est une monarchie, le
Danemark aussi, tout comme l'Espagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, le
Royaume-Uni ou la Suède... Tous ces pays n'en sont pas moins des
démocraties. Autrement dit, la royauté et la démocratie peuvent aller
de pair, même si, évidemment, dans le cas du journal que vous
représentez, la critique de la démocratie est principielle...
D'ailleurs, je crois que c'est aussi la force de la République de
tolérer que soient critiqués les fondements même de nos institutions.
Quel regard portez-vous sur l'Action
française ?
Par rapport à son histoire, évidemment, j'ai des divergences
énormes, qui portent en premier lieu sur l'antisémitisme d'État. En
effet, si jamais cela ne laissait pas entendre qu'il existerait des
Juifs anti-nationaux (ou non nationaux), le terme de juif national
m'irait assez bien : je suis français, je suis patriote, je
suis attaché à mon pays, au modèle civilisationnel qu'il y représente,
y compris dans la période antérieure à 1789 ! Je suis par
ailleurs clairement de cette gauche qui n'oublie pas la Nation.
L'histoire de France est indivisible à mes yeux, et ses racines sont
bien plus lointaines que la Révolution française. Cela dit, j'ai
toujours expliqué que l'Action française ne se résumait pas aux gens
tombés dans la collaboration pro-nazie, que Maurras avait condamnés, et
qui avaient condamné Maurras. D'ailleurs, on redécouvre le rôle des
militants d'Action française dans la Résistance. Toute l'AF ne tient
pas dans la dérive idéologique de Brasillach, Rebatet et quelques
autres. Maurras fait partie du patrimoine intellectuel français. Mais
comme toujours, comme dans la pensée de tous les auteurs – y compris
Voltaire –, on est amené naturellement à retrancher. Sur
l'antisémitisme d'État, les choses ont été faites assez clairement,
notamment par Boutang, assez tôt après la guerre. Incontestablement, on
peut tout dire de Maurras, sauf que c'est un écrivain ou un philosophe
insignifiant.
Publié dans Action française, Islam, Politique | Pas de commentaires
16 juillet 2015
Article publié dans L'Action Française 2000
Rappel de quelques consultations populaires ayant ponctué la
construction européenne.
La démocratie directe s'immisça dans la "construction
européenne" dans les années soixante-dix, à l'heure du premier
élargissement des Communautés, auquel Paris ne donna lui-même son feu
vert qu'à l'issue d'un référendum (68,3 % des suffrages
exprimés en faveur du "oui"). L'adhésion du Danemark et celle de
l'Irlande furent ratifiées dans la foulée d'une consultation populaire
(respectivement 81,3 % et 63,3 % de "oui"), tandis
que celle de la Norvège fut rejetée selon les mêmes modalités
(53,5 % de "non"). L'adhésion du Royaume-Uni était déjà
effective quand un référendum y fut organisé (67,2 % de
"oui"). « There is no alternative », clamaient déjà
les partisans du maintien dans "l'Europe"... Dans les années
quatre-vingt, les traités d'adhésion de la Grèce, de l'Espagne et du
Portugal furent ratifiés par voie parlementaire. Dans les années
quatre-vingt-dix, en revanche, l'élargissement suivant donna lieu à des
consultations populaires. « Il avait été convenu de commencer
par le pays où l'opinion semblait la mieux disposée, l'Autriche, et
l'effet d'entraînement fut d'autant plus réel que les résultats furent
meilleurs qu'espérés » (66,6 % de "oui"), comme le
rapportent Anne Dulphy, Lukas Macek et Christine Manigand, dans une
contribution au Dictionnaire critique de l'Union européenne
(Armand Colin, 2008). La Finlande et la Suède lui emboîtèrent le pas.
« En revanche, à nouveau, la population norvégienne –
notamment celle du Nord, ainsi que les petits paysans, les artisans
pêcheurs... – opposa un "non" à 52,2 %, en dépit d'une
participation inégalée de 89 %. »
Un état d'esprit fataliste
Nouvelle vague d'élargissement dans les années 2000. Chypre
entérina son adhésion à la faveur d'un vote parlementaire, tout comme
la Bulgarie et la Roumanie un peu plus tard. Partout ailleurs (Estonie,
Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque,
Slovénie, Slovaquie), un référendum fut convoqué. Dans la plupart des
cas, le "oui" l'emporta largement, mais la participation fut assez
faible. Dans le décennie suivante, cela se vérifia en Croatie, où
l'adhésion fut également approuvée par référendum (66,27 % de
"oui", mais seulement 43,51 % de participation). L'Europe se
serait-elle imposée comme une fatalité ? « Cette
vision du processus d'intégration comme une nécessité historique est
très caractéristique de la trajectoire des pays
post-communistes », commentent Anne Dulphy, Lukas Macek et
Christine Manigand. « Il en a découlé assez logiquement un
sentiment [...] que "tout est joué", le vote des citoyens n'étant
qu'une simple formalité. » En cela, « les référendums
d'adhésion dans les Peco [pays d'Europe centrale et orientale] sont à
mettre en parallèle avec les consultation en France, aux Pays-Bas et en
Irlande en 2005 et 2008 : derrière un postulat pro-européen de
principe, il y a désormais une réelle difficulté à faire émerger une
majorité populaire dès lors qu'il s'agit de préciser les modalités
concrètes du projet européen ».
Plusieurs autres référendums ont ponctué la
construction européenne. Quelques États méritent une attention
particulière : la Norvège, qui semble durablement associée à l'UE sans
y adhérer formellement ; l'Irlande, où les citoyens ont été convoqués
aux urnes à deux reprises afin que soit ratifié le traité de Lisbonne –
tout comme ils l'avaient déjà été deux fois afin que soit adopté celui
de Nice ! – ; le Danemark, où l'échec d'un premier référendum
sur le traité de Maastricht avait suscité la négociation de plusieurs
dérogations – sur lesquelles il est d'ailleurs question de revenir, au
moins en partie, à l'occasion d'une prochaine consultation populaire.
L'exemple de la Suède
« La Suède, de son côté, n'a jamais demandé
d'exception formelle », rappellent les contributeurs du Dictionnaire
critique de l'Union européenne. « Lors des
négociations d'adhésion, elle avait spécifié qu'elle se réservait le
droit de soumettre à une décision séparée sa participation à la
troisième phase de l'Union économique et monétaire. Cette décision ne
figure pas dans le traité de juin 1994, mais les autorités suédoises
ont revendiqué ce droit à un libre choix » – preuve que
l'Europe peut se construire plus ou moins "à la carte" indépendamment
des traités. S'il était pressé d'adopter la monnaie unique contre
l'avis du "pays légal", Stockholm pourrait donc s'abriter derrière la
"volonté populaire". Ce faisant, peut-être se heurterait-il aux
velléités intégrationnistes des institutions communautaires, mais pas
directement aux intérêts des États membres de l'UE... Or, nulle
consultation populaire ne saurait bouleverser les rapports de force qui
gouvernent l'équilibre européen. Maurras raillait jadis « ces
divagations de démocratie libérale qui supposent que nous pouvons tout
ce qu'il nous vient à la fantaisie de vouloir ». Autrement dit
: la souveraineté est une chose, mais la puissance en est une autre...
Les Grecs ne viennent-ils pas d'en faire l'amère expérience ?
Publié dans Europe | Pas de commentaires