24 mai 2013
Le ministère de l'Intérieur envisagerait, parait-il, une
interdiction du Printemps français. À l'origine de cette
annonce : des supputations médiatiques nullement vérifiées.
Ce matin, vendredi 24 mai 2013, Manuel Valls était l'invité
de Raphaëlle Duchemin sur France Info.
À cette occasion, notre consœur l'a interrogé sur les menaces qui
pèseraient sur Frigide Barjot, à l'approche d'une nouvelle
manifestation contre le "mariage homo", sollicitant, par ailleurs, sa
réaction à la lecture d'un
communiqué du Printemps français – un appel à la
« résistance » rédigé selon des termes pour le moins
virulents.
En réponse, le ministre de l'Intérieur s'est insurgé contre
« toute menace de mort, toute menace de haine »,
stigmatisant « des groupes radicaux, d'extrême
droite », sans jamais en citer aucun. Il n'en aurait pas moins
« évoqué une possible interdiction du "Printemps
français" », selon le site Internet de France Info.
Un "chapeau" étant par nature racoleur, il n'y a rien de choquant à ce
que les propos de Manuel Valls y soient quelque peu extrapolés.
On se désole, en revanche, de la passivité moutonnière de nos
confrères : qu'il s'agisse de
L'Express, du
Figaro, du
Huffington Post, de
Libération ou du
Monde, entre autres exemples, tous ont
repris l'accroche de France Info. Naturellement,
le Centre royaliste d'Action française n'a
pas manqué de s'engouffrer dans la brèche, dénonçant
« un nouveau pas dans l'instauration d'un État
policier » - c'est de bonne guerre !
En tout cas, cela donne à réfléchir sur notre propre métier :
que pèsent la rigueur et l'esprit critique des journalistes face à
l'effet boule de neige ?
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15 septembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000
À la faveur de la crise, une formule chère à l'AF se trouve
remise à l'honneur. À tort ou a raison ? Le débat est ouvert.
Commentant sur son blog un éditorial de Libération,
où Nicolas Demorand appelait à « réarmer le pouvoir
politique » contre l'influence des marchés financiers,
Jean-Philippe Chauvin l'a jugé « maurrassien ».
Lecteur d'une presse moins consensuelle, Aristide Leucate n'en retient
pas moins des considérations du même ordre. Dans L'Action
Française 2000 du 1er septembre, il a
relevé cette citation d'un confrère vaudois : « C'est
à l'État [...] qu'il appartient de cadrer (et non de régenter dans le
détail) l'activité économique, pour s'assurer qu'elle reste au service
du bien commun. » Suivait la reprise d'une formule chère à
l'AF : « Politique d'abord ! »
Monétiser la dette
Ces propos feraient l'unanimité s'ils n'étaient éclairés par
ceux de Marine Le Pen, pointant « notre dépendance de
plus en plus forte vis-à-vis des marchés ». « Parce
que c'est à eux exclusivement qu'on peut emprunter, parce qu'ils ont un
monopole et qu'ils peuvent nous imposer leurs conditions, nous imposer
des taux d'intérêt élevés », l'État devrait
« reprendre le contrôle de la politique monétaire, de la
politique budgétaire et de son financement », soutient
l'égérie populiste. Celle-ci vise une réforme remontant à 1973,
dénoncée sous le nom de « loi Rotschild » :
allusion à la banque éponyme, employeur éphémère de Georges Pompidou,
dont celui-ci est accusé d'avoir servi les intérêts devenu président de
la République. Par cette loi, l'État avait renoncé à se financer
directement auprès de la Banque de France ; depuis lors, il
doit compter avec les taux du marché. Ce faisant, il entendait se
prémunir des dérives inflationnistes.
Tandis que l'Occident peine à s'extraire de la spirale des
déficits, peut-être la perspective de monétiser la dette mérite-t-elle
d'être débattue. Mais en gardant à l'esprit qu'« il n'y a pas
de repas gratuit », selon l'expression popularisée par Milton
Friedman. Autrement dit, tout se paie d'une façon ou d'une autre. Or,
le coût s'avère d'autant plus élevé que l'on s'entête à faire
abstraction des forces à l'œuvre dans le système économique.
« Ce qui ne peut pas être refuse d'être », martelait
Charles Maurras dans La Politique naturelle. « Ce qui doit
être, ce que produit l'antécédent qu'on a posé, suit le cours de sa
conséquence », poursuivait-il, déplorant les méfaits des
« volontés mirifiques » : « On
annonçait l'abondance : il faut rogner la monnaie. Les
salaires ont monté, mais les prix aussi ; il faut que les
salaires montent encore : comment monteront-ils si l'on n'a
plus d'argent pour les payer ? » Les proclamations
selon lesquelles « la politique de la France ne se fait pas à
la corbeille », l'affirmation désinvolte que
« l'intendance suivra », les gargarismes en faveur
d'un « parti des politiques » sont autant
d'incantations procédant d'une conviction morale : la
politique apparaît plus noble que les activités économiques et
financières, puisqu'on lui prête, à tort ou à raison, la seule ambition
de servir le bien commun. De cela devrait découler une organisation
sociale retranscrivant formellement cette hiérarchie :
« politique d'abord », nous dit-on. Or, si l'on s'en
tient à Maurras, « quand nous disons "politique d'abord", nous
disons la politique la première, la première dans l'ordre du temps,
nullement dans l'ordre de la dignité ». Ni dans celui du droit.
Volontarisme
Aussi la formule nous paraît-elle galvaudée. Et même dévoyée,
étant donné qu'elle participe d'un volontarisme aux antipodes de
l'empirisme cher à l'AF : on nous promet de reconstruire la
société sur la base d'une abstraction, à la façon des révolutionnaires
envisageant le découpage administratif de la France suivant des formes
géométriques tracées au sommet de l'État. Dans ces conditions, comment
s'étonner que soit survenue la crise des subprimes ?
« La lune ! On n'a qu'à demander la lune »,
clamait Maurras. « Des mains dociles iront la cueillir dans le
ciel », comme d'autres, responsables politiques en tête, ont
annoncé aux ménages américains qu'ils pourraient se porter acquéreurs
de leur logement quel que soit leur niveau de revenus. « Mais,
peu à peu, les évidences se font jour. »
Justifiant la baisse d'un cran de la note souveraine des
États-Unis, Standard & Poor's a invoqué « la profonde
division politique » observée outre-Atlantique. Cela
« mène à une impasse et a empêché un règlement réel du
problème de la dérive budgétaire fédérale », selon Jean-Michel
Six, le chef économiste Europe de l'agence de notation, interrogé par Les Échos.
Sur le Vieux-Continent, les calculs politiciens nourrissent la
cacophonie diplomatique, rendant d'autant plus hasardeux le
rétablissement de la confiance. Preuve que, dans son acception
maurrassienne, le "politique d'abord" demeure d'actualité. Ne nous y
trompons pas : fustiger les agences de rating,
les traders et autres spéculateurs, c'est
témoigner d'une sollicitude déplacée à l'égard du personnel politique,
que l'on dédouane de ses responsabilités par la désignation d'un bouc
émissaire.
La France compte suffisamment de démagogues s'attaquant aux
magnats du capitalisme, ennemis à bien des égards imaginaires, tant
doit être relativisé le poids des individus et de leur cupidité dans le
système financier. Derrière les fonds de pension, n'y a-t-il pas de
modestes retraités ? Les royalistes ont mieux à faire que de
noyer leurs voix parmi celles des néo-marxistes au discours convenu.
Dans ce contexte, il leur appartient plutôt de dénoncer l'accumulation
des déficits aux dépens des générations futures, une fiscalité rendue
illisible par les atermoiements politiciens, l'interférence des
calendriers électoraux dans les négociations internationales...
Autrement dit, l'incurie républicaine – celle des institutions.
Politique d'abord !
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1 septembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000
Mis à l'honneur dans la presse, Bainville se trouve par
ailleurs invoqué dans le débat économique.
Jacques Bainville a fait l'objet d'un éloge dans les colonnes
de L'Express. « L'historien et
journaliste monarchiste avait tout pour lui : lucidité, brio,
maîtrise de tous les genres », lit-on en introduction d'un
article publié le 12 août sur le site Internet de
l'hebdomadaire. Outre « l'aptitude de Bainville à la
prophétie », qu'il juge « époustouflante »,
Emmanuel Hecht souligne la distance qui le séparait de Charles Maurras
et Léon Daudet. Une concession au "politiquement correct" au demeurant
nuancée, d'autant que notre confrère invoque une « question de
tempérament ». De fait, « les coups de poing [...],
la crudité et la violence du langage [...], l'antisémitisme,
répugnaient au distingué Jacques Bainville ».
Rigueur budgétaire
Par ailleurs, on relèvera quelque écho à l'actualité en
relisant les articles économiques de l'illustre journaliste.
« Rien de plus terrible que la liberté donnée à l'État
d'imprimer du papier-monnaie », écrivait-il dans L'Action Française
du 2 novembre 1925. À ses yeux, l'indépendance de la Banque de
France constituait un « garde-fou » grâce auquel
avait été contenu « le gaspillage financier, inhérent aux
démocraties ». Cela nourrira la discussion, au moment où l'on
envisage de monétiser la dette publique en autorisant de nouveau l'État
à se financer directement auprès de la banque centrale, en marge de la
pression des marchés. « Quand on n'a pas assez de bonne
monnaie, et qu'on est bien résolu à ne pas recourir à la fausse, quand
on veut se contenter de ce peu de bonne monnaie plutôt que d'aller à la
ruine par une richesse fictive, que faut-il faire ? »
se demandait Jacques Bainville, quelques mois plus tard, toujours dans
les colonnes du quotidien royaliste. « Se
restreindre », répondait-il. Selon lui, « il n'y a
pas d'autre système que les économies ».
Peut-être les circonstances ont-elles changé – l'heure n'est
plus à l'inflation galopante. Et peut-être nos lecteurs partageront-ils
l'aversion de Maurras pour certaines théorisations... « Il n'y
a pas de protectionnisme, il n'y a pas de libre échange qui
tienne », affirmait-il. « Il y a la vigilance et
l'incurie, il y a l'organisation intelligente des tarifs ou la
résignation à leur jeu automatique et mécanique, lequel ne peut être
que désastreux comme toute résignation humaine aux caprices de la
nature. »
Quoi qu'il en soit, ce constat établi en 1926 par Jacques
Bainville nous semble toujours d'actualité : « Les
neuf dixièmes de la France ne comprennent rien à ce qui se passe. D'où
la difficulté de demander à la masse, représentée par ses élus, des
sacrifices dont la portée et la destination lui échappent. »
Or, selon l'historien d'AF, « dans toute la mesure où elle
était indépendante de l'élection, la Restauration a été économe. Dans
toute la mesure où elle dépendait de l'opinion publique, elle a suscité
un mécontentement et des rancunes que ne désarmait pas le retour de la
prospérité. "Grande et importante leçon", eussent dit nos pères. Elle
explique la lâche paresse avec laquelle nos gouvernements démocratiques
se sont laissé aller, comme la Révolution elle-même, sur la pente
facile des assignats et de l'inflation. » Ainsi que sur celle
des déficits...
Les citations de Jacques Bainville sont tirées de La Fortune
de la France, un recueil d'articles paru en 1937 et
disponible gratuitement dans la bibliothèque numérique des "Classiques
des sciences sociales" : http://classiques.uqac.ca/
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15 décembre 2010
Article publié dans L'Action Française 2000
Quand Charles Maurras se trouve convoqué pour appuyer un libre
commentaire de la crise des dettes souveraines...
La soumission du politique aux "lois du marché" relève d'un
lieu commun largement dénoncé. De fait, la réforme des retraites fut
vraisemblablement décidée sous la pression des investisseurs, afin de
prévenir un renchérissement des emprunts d'État.
Politique d'abord
Y a-t-il matière à scandale ? Sans aucun doute aux
yeux des gaullistes, pour qui « la politique de la France ne
se fait pas à la corbeille » – autrement dit, à la bourse. En
pratique, alors que la charge de la dette constitue le deuxième
poste budgétaire de l'État, les fluctuations des marchés obligataires
ne sauraient indifférer les responsables politiques. La tentation est
grande, pour les royalistes, de s'inscrire dans le sillage du général
De Gaulle – quitte à s'abriter derrière le "politique d'abord"
cher à Maurras.
Mais « quand nous disons "politique
d'abord" », expliquait-il dans Mes Idées politiques,
« nous disons la politique la première, la première dans
l'ordre du temps, nullement dans l'ordre de la
dignité » : « Autant dire que la route doit
être prise avant que d'arriver à son point terminus ; la
flèche et l'arc seront saisis avant de toucher la cible ; le
moyen d'action précédera le centre de destination. » Des
considérations à l'opposé de la maxime gaullienne selon laquelle
« l'intendance suivra » !
À la quête d'une grandeur virant à l'esbroufe, nous préférons
celle, patiente et discrète – somme toute capétienne ? – de la
puissance et de la prospérité. Dans cette perspective, l'économie peut
apparaître « plus importante que la politique ».
Maurras lui-même le proclamait. En conséquence, écrivait-il,
« elle doit [...] venir après la politique, comme la fin vient
après le moyen, comme le terme est placé au bout du chemin, car, encore
une fois, c'est le chemin que l'on prend si l'on veut atteindre le
terme ».
Travers volontariste
La mondialisation a-t-elle changé les règles du jeu ?
Beaucoup le prétendent, poussés par le romantisme ou la démagogie. Tel
Arnaud Montebourg évoquant, au micro d'Hedwige Chevrillon,
« les dettes incommensurables » que les marchés
financiers auraient « imposées » aux peuple européens
(BFM Business, 01/12/2010). Mise au
pilori, la spéculation vient rappeler les politiques à leurs
responsabilités. D'ailleurs, elle n'est pas seule en cause :
« Il faut bien voir qu'une partie [des banques] n'a pas
d'autre choix que de vendre les obligations de certains
pays », souligne Jean Quatremer (Coulisses de
Bruxelles, 29/11/2010). « En effet, les règles
prudentielles les obligent à avoir en portefeuille, en fonds propres,
des emprunts d'État très bien notés afin qu'elles disposent d'un
matelas solide. [...] Donc ce qui peut apparaître comme de la
spéculation contre la dette souveraine de la part des établissements
financiers européens n'est que la résultante d'une réglementation
inadaptée. » En Grèce, ce ne sont pas des traders,
mais bien les politiques, qui ont maquillé les comptes publics,
précipitant leur pays dans l'abime. Quant à l'État américain, il a joué
un rôle déterminant dans le déclenchement de la crise des subprimes.
Washington était-il soumis aux lois du marché, alors qu'il
encourageait les banques à prêter à des ménages insolvables afin
d'élargir l'accès à la propriété ? Sans doute s'est-il
davantage montré coupable de les négliger ! En dépit du
scepticisme que lui inspiraient les économistes libéraux, Maurras
n'excluait pas l'existence de lois économiques. Il appelait même à leur
obéir. C'est à cette condition, disait-il, « que nous
commanderons aux choses ». Aussi leur stigmatisation est-elle
une ânerie – la conséquence d'un fourvoiement volontariste.
« En matière économique, plus encore qu'en politique,
la première des forces est le crédit qui naît de la
confiance », observait encore Maurras. Or, la parole d'un
Trichet vaut davantage que celle d'un Sarkozy : tandis que la
Banque centrale européenne maintient son cap, l'Élysée navigue à vue...
« En fait, les gouvernements européens perçoivent mal ce
besoin d'avoir un instrument capable d'interagir en temps réel avec les
marchés pour enrayer le plus vite possible les menaces »,
analyse Anton Brender, directeur des études économiques chez Dexia AM (Les Échos,
03/12/2010). « Ils ont aussi du mal à comprendre que les
marchés soient si sensibles aux messages qu'ils envoient et qu'ils
puissent si vite paniquer. Les marchés ont besoin de messages clairs et
d'interventions décidées. » Ce dont les gouvernements
démocratiques se montrent peu capables.
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