21 juin 2012
Article publié dans L'Action Française 2000
La réforme de la Politique commune de la pêche (PCP) proposée
par la Commission européenne est mal accueillie au Sénat.
Que va-t-il advenir de la pêche française ? Cinq
sénateurs rattachés à divers groupes politiques s'en
inquiètent : Joël Guerriau (Union centriste), Odette Herviaux
(groupe socialiste), Gérard Le Cam (groupe communiste, républicain,
citoyen), Bruno Retailleau (UMP) et Charles Revet (UMP). Dans une
proposition de résolution enregistrée le 6 juin, ils rappellent
l'objectif de la Commission européenne : « lutter
plus efficacement contre la surpêche qu'elle considère comme
généralisée dans les eaux européennes et réduire la surcapacité des
flottes ». Or, le diagnostic de Bruxelles leur apparaît
d'autant plus « discutable » qu'il s'appuie sur des
données scientifiques jugées
« insuffisantes » : « à peine la
moitié des stocks sont aujourd'hui connus, avec des marges d'erreur
importantes », soutiennent les parlementaires. En tout cas,
préviennent-ils, si le "rendement maximal durable" était atteint dès
2015 pour toutes les espèces, conformément aux recommandations de la
Commission, la France devrait « fermer 50 % de ses
pêcheries, ce qui aurait des conséquences économiques et sociales
désastreuses pour le littoral français ». Le projet de
régulation de la flotte de pêche par l'attribution de quotas
revendables inspire la plus grande méfiance : les expériences
menées en ce sens par l'Islande, les pays baltes, ou encore le Danemark
et les Pays-Bas, l'auraient été au détriment de la pêche artisanale.
Vers l'interdiction des rejets
Quant à l'interdiction des rejets, ce serait « une
fausse bonne idée », coûteuse à mettre en œuvre en raison des
moyens de surveillance qu'elle nécessite. « Il est préférable
d'adopter une démarche d'amélioration de la sélectivité des engins de
pêche, pour prévenir les prises indésirables », clament les
auteurs de la résolution : "trier sur le fond plutôt que sur
le pont". D'autant que l'interdiction des rejets poserait
« des problèmes techniques immenses à la pêche française au
chalut qui est multi-spécifique ». Les navires, alors
surchargés, ne seraient pas adaptés pour ramener à terre l'ensemble des
prises.
Dans la nuit du 12 au 13 juin, les gouvernements
européens sont pourtant convenus d'interdire progressivement les
rejets. En revanche, ils excluent d'imposer l'instauration de quotas
transférables. De fait, comme le relèvent les sénateurs, « les
textes de la Commission [...] ont été accueillis de manière extrêmement
critique par la plupart des États membres de l'Union européenne
intéressés ainsi que par le Parlement européen ». Une
assemblée avec laquelle il faudra compter : en application du
traité de Lisbonne, celle-ci est désormais appelée à jouer un rôle
actif dans la définition de la Politique commune de la pêche (PCP).
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17 septembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
Entamée jeudi dernier, la "grève du lait" suscite des
controverses parmi les producteurs. Sans ébranler la technocratie
européenne, au moins aura-t-elle révélé à l'opinion publique la
situation dramatique des éleveurs.
Une "grève du lait" a été lancée par l'Organisation des
producteurs de lait (OPL) et l'Association des producteurs de lait
indépendants (APLI), qui revendiquent le maintien des quotas européens
– dont l'augmentation progressive doit aboutir à leur surpression en
2015 –, ainsi qu'un lait à 400 euros la tonne ; depuis le 10 septembre,
mus par la colère ou le désespoir, certains éleveurs ont cessé les
livraisons. Une initiative récusée par la Fédération nationale des
producteurs de lait (FNPL, émanation de la FNSEA) : « Qui peut croire à
la chimère des 400 euros pour les 1 000 litres ? Cette action qui consiste à jeter le fruit de son travail peut diviser et choquer, y
compris nos concitoyens qui sont eux-mêmes éprouvés durement par la
crise. »
Des prix instables
« Quand le lait est tiré, il faut le vendre », observe
Nicolas-Jean Brehon. « Alors qu'un fabricant peut toujours être incité
à se fournir ailleurs. Certains n'attendent même que cela. » (Questions
d'Europe, Fondation Robert Schuman, 27/07/2009) D'autant
qu'en France, la moitié des achats sont réalisés par des industriels. «
Jusqu'au début des années 2000 », poursuit-il, « le secteur laitier fut
le secteur agricole le plus régulé ». Mais « les producteurs ayant une
quasi-garantie d'écouler les productions à des prix rémunérateurs et
les États n'ayant jamais eu le courage politique de fixer les quotas à
des niveaux suffisamment rigoureux, le système s'est emballé ». Cela
justifia une évolution radicale, entraînant une dépendance vis-à-vis
des prix pratiqués en dehors de l'UE, ainsi que des variations de
grande ampleur : à la hausse moyenne de 43 % en 2007-2008 succéda une
chute de 32 % l'année suivante. « Il est certain qu'aux niveaux
actuels, les prix payés aux producteurs ne permettent pas d'assurer
l'équilibre des exploitations laitières. »
Quotas en débat
En juillet dernier, la France avait réclamé le gel des quotas
laitiers en 2010. Malgré le soutien de l'Allemagne, elle s'était
heurtée à l'intransigeance de la Commission européenne – paravent d'une
majorité d'États membres : « Quelques pays sont hostiles
aux régulations par principe (Royaume-Uni, Suède). D'autres
pays sont partisans d'une levée des quotas ou d'une augmentation
sensible, afin de faire jouer les avantages comparatifs dont ils
estiment pouvoir bénéficier (Pays-Bas, Danemark Pologne). Enfin,
certains pays ont été pénalisés par des quotas trop faibles, inférieurs
aux consommations nationales (Italie, Espagne). Chaque année, plusieurs
pays payent des pénalités pour dépassement de quotas (912 millions
d'euros en trois ans). Il n'est pas raisonnable de penser que ces pays
accepteront de payer encore... »
En 2007-2008, cependant, seuls huit États avaient dépassé
leurs quotas ; les autres se trouvaient en "sous-réalisation", parfois
importante. Le danger représenté par une augmentation des quotas s'en
trouve contesté. Quoi qu'il en soit, une réponse à la crise apparaît
indispensable, pour des motifs sociaux mais aussi politiques : la
sécurité alimentaire ne sera pas garantie sans que soit assuré aux
agriculteurs un revenu décent.
Entre autres mesures, la Commission a soutenu le stockage
privé, pratiqué des "achats d'intervention", réactivé les restitutions
(subventions) à l'exportation, promu la consommation des produits
laitiers... « Nous sommes au fond de la piscine » reconnaît le
commissaire en charge de l'Agriculture, Mme Mariann Fischer Boel. Son
action n'en est pas moins jugée bien trop timide. Le 7 septembre, seize
États membres, dont la France et l'Allemagne, ont formulé ces
propositions résumées par Euractiv : « Le texte
suggère d'augmenter temporairement les prix d'intervention européens,
que l'UE définit pour acheter aux agriculteurs leurs surplus. Il
propose aussi que les gouvernements nationaux puissent aider davantage
les producteurs sans demander à Bruxelles son feu vert. Allant plus
loin, les seize États suggèrent de mettre sur pied un prix minimum du
lait, défini dans chaque pays entre les producteurs et les
industriels. »
Contractualisation
La "contractualisation" serait ainsi la « voie à
suivre » selon le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire. «
Cette solution [...] doit être analysée avec lucidité », avertit
Nicolas-Jean Brehon, qui souligne « les différences de poids entre les
parties – 100 000 éleveurs et quelques dizaines de
fabricants ». Pour l'OPL, « cette solution risque surtout de
rendre les producteurs de lait encore plus vulnérables face aux marchés ». Et de stigmatiser un projet « d'inspiration "nationaliste" », la
contractualisation étant « du ressort de notre droit national et [non]
commune aux vingt-six autres pays ».
Cette posture "européiste" s'expliquerait-elle par la crainte
du dumping ? À bien des égards, celui-ci est déjà à l'œuvre... Ne
négligeons pas, en outre, la variété des contextes nationaux : par
exemple, en quoi nos partenaires sont-ils concernés par l'usage de nos
quotas laitiers à des fins d'aménagement du territoire ? Cela dit, le
cadre européen, voire international, ne saurait nous indifférer. La
France compte des transformateurs industriels de taille mondiale, comme
Danone et Lactalis ; le lait représente 16 % des exportations agricoles
nationales, à l'origine d'un solde commercial positif de 3,5 milliards
euros.
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3 septembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
L'annonce de Bruno Le Maire a provoqué un tollé : 500 millions
d'euros versés entre 1992 et 2002 devraient être remboursés par les
producteurs qui en furent les bénéficiaires indirects. Décryptage d'un
nouveau scandale.
Le calme plat règne à Bruxelles pendant l'été, où seules
quelques permanences sont assurées. L'Union européenne n'en a pas moins
défrayé la chronique des jours ensoleillés, par la faute du ministre de
l'Agriculture Bruno Le Maire. Le 3 août, celui-ci annonça dans les
colonnes du Parisien son intention de répondre à l'injonction de la
Commission européenne, exigeant le remboursement par des producteurs de
fruits et légumes de subventions versées entre 1992 et 2002.
Indignation
Alimentés par l'Office national interprofessionnel des fruits,
des légumes et de l'horticulture (Oniflhor), les "plans de campagne"
avaient pour but, selon Bruxelles, « de faciliter l'écoulement des
produits français en manipulant le prix de vente ou les quantités
offertes sur les marchés ». Or, « de telles interventions sont
fermement interdites par la réglementation communautaire en matière
d'aides d'État ». Les sommes litigieuses s'élèveraient à un
demi-milliard d'euros, intérêts compris. Un chiffre que Paris espère minimiser.
C'est un mauvais coup pour les producteurs de fruits et
légumes, dont les syndicats dénoncent l'effondrement des revenus (- 37
% entre 2007 et 2008 selon la Fédération nationale des producteurs de
fruits). Dans un torrent d'indignations, on releva, comme toujours,
moult approximations. "L'Europe" a-t-elle « besoin d'oseille » ? Ses
ressources budgétaires ne seront pas affectées par un remboursement
dont l'État français sera, en définitive, le bénéficiaire. A-t-elle
patienté sournoisement jusqu'aux vacances pour prononcer sa sanction ?
Nullement : sa décision concluant à l'illégalité des aides remonte au
28 janvier dernier.
Découvrant l'affaire à la faveur du "buzz" médiatique,
l'opinion, galvanisée par le chauvinisme, fut d'autant plus choquée que
l'exigence formulée par Bruxelles porte sur des subventions indirectes,
dont certaines furent versées il y a dix-sept ans. Quid de la
prescription ? Fixée par un règlement, elle intervient après dix ans,
mais ce délai est interrompu dès lors que la Commission entame des
investigations.
Sept ans de procédure
Or, à la suite d'une plainte anonyme, elle avait interpelé la
France dès le 31 juillet 2002. La procédure s'est donc étalée sur sept
années. Un délai qui n'aurait rien d'exceptionnel selon les indications
que nous a fournies la représentation de la Commission européenne en
France, étant donné la complexité du traitement d'un tel dossier.
D'autant que Paris multiplia les demandes de reports.
D'autres griefs écorchent nos responsables politiques : «
Certains documents en possession de la Commission indiquent que les
autorités françaises étaient informées de la nature douteuse de ces
actions au regard du droit communautaire. Elles-mêmes qualifiaient ces
actions de "largement anticommunautaires" et signalaient la "menace
d'une obligation de faire rembourser par les producteurs les sommes
indûment versées". Un compte rendu du BRM [Comité économique fruits et
légumes du bassin Rhône-Méditerranée] rappelle aussi "le caractère
confidentiel des plans stratégiques et le besoin de discrétion
nécessaire compte tenu du principe anticommunautaire de ceux-ci". »
C'est dire l'inconséquence des gouvernements successifs,
feignant d'ignorer à Paris les engagements souscrits à Bruxelles.
D'ailleurs, la France n'aurait « pas contesté [...] l'analyse
préliminaire de la Commission concernant l'incompatibilité de ces aides
avec le marché commun ». Vilipendé pour sa servilité à l'égard de
Bruxelles, Bruno Le Maire s'inscrit en partie dans la continuité de ses
prédécesseurs ; il assume surtout les responsabilités que ceux-ci
avaient fuies jusqu'alors.
Humiliation
Cette affaire n'est pas la première du genre : la récupération
des aides au vignoble charentais et celle du plan Rivesaltes furent
exigées en 1999 et 2003. Humiliation formelle, ces rappels à l'ordre de
la Commission participent d'un mécanisme temporisateur : dans la partie
qu'ils jouent en commun, les Vingt-Sept s'accommodent par ce biais des
petits accrocs au respect réciproque de leurs engagements. Minimisant
la tentation de retirer ses cartes au premier faux pas d'un partenaire,
ce sont les "coups francs" sifflés sur un terrain de football : « Nous
sommes les arbitres des règles que les Européens se sont données »,
explique le porte-parole de la Commission, Altafaj Tardio (Le Monde,
04/08/2009). Des règles évidemment discutables : le moindre coût de la
main d'œuvre étrangère n'est-il pas, lui aussi, à l'origine d'une
distorsion de concurrence ? Qu'importe : « La question [...] n'est pas
couverte par la Politique agricole commune. Il n'existe pas de règles
européennes sur le sujet. » Imparable logique de la
technocratie !
Signalons toutefois que si un État membre en fait la demande
avant sa "condamnation" par la Commission, le Conseil des ministres,
statuant à l'unanimité, demeure libre de décréter une aide compatible
avec le marché commun ; dans le carcan institutionnel européen, des
portes restent ouvertes au politique.
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21 mai 2009
Article publié dans L'Action Française 2000
L'Union européenne doit produire du vin rosé par mélange de blanc et de rouge ; tel est le vœu de la Commission de Bruxelles. Un rapport parlementaire lève une partie du voile sur un "scandale" se révélant beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Explications.
Nouveau symbole des méfaits de la technocratie bruxelloise, le
projet de règlement européen levant l'interdiction de produire le rosé
de table par coupage de blanc et de rouge est une bénédiction pour les
souverainistes en campagne : 87 % des Français y seraient hostiles (1).
Poursuivant le décryptage de cette affaire, nous nous appuyons cette
fois-ci sur le rapport (2) de Gérard César, sénateur UMP de la Gironde.
Pour lui, il est essentiel « de soutenir le ministre de l'Agriculture
et de la Pêche, qui négocie ce dossier à Bruxelles [...] afin de faire
entendre la voix particulière de notre pays et de tenter d'y rallier
certains de nos partenaires européens lors du vote du texte le 19 juin
prochain ».
OCM vin
En avril 2008, un règlement avait lancé la réforme de
l'Organisation commune du marché vitivinicole (OCM vin). En
conséquence, à l'automne dernier, la Commission européenne a proposé
deux textes d'application, sur les règles d'étiquetage et les pratiques
œnologiques, discutés, respectivement, au sein d'un comité de gestion
et d'un comité de réglementation. Dans ce cadre, le 27 janvier, lors
d'un vote indicatif autorisant la consultation de l'OMC, « compte tenu
des réponses positives apportées à ses autres demandes » selon Gérard
César, la France s'est prononcée en faveur d'un "paquet" incluant la
mesure controversée.
Introduite en 1999, l'interdiction de produire du rosé par
coupage s'appliquait seulement aux vins de table. Cela « se justifiait
par l'existence de régimes d'aides distincts pour la distillation de
crise des vins de table rouges et des vins de table blancs. Le silence
des textes communautaires sur les vins autres que ceux de table
signifiait qu'il était licite d'utiliser la technique du coupage pour
les vins d'appellation, afin notamment de prendre en compte les
spécificités d'élaboration du champagne rosé et de certains vins
rouges. »
Un train de retard
La Commission avait-elle caché son jeu ? « Dès les premières
discussions préparatoires », elle avait « fait part de ses doutes sur
la justification du maintien de l'interdiction du coupage ». Celui-ci
devenait à ses yeux « une "discrimination négative" à l'encontre des
producteurs communautaires [...] alors que la pratique du mélange
rouge-blanc est utilisée aux États-Unis ou en Australie et que ces
produits sont déjà sur le marché européen, sans indication sur les
étiquettes ». Autrement dit, ce n'est pas la commercialisation – déjà
autorisée ! - du rosé coupé qui est en cause, mais sa fabrication sur
le territoire des vingt-sept États membres de l'Union européenne.
Ces restrictions étaient-elles préjudiciables aux viticulteurs français ? La faiblesse
des échanges internationaux sur le marché des vins rosés relativise
cette crainte : « Environ 10 % seulement de la production est
commercialisée entre pays. L'absence de normalisation internationale du
produit pourrait l'expliquer. Contrairement aux vins rouge ou blanc, le
rosé est largement consommé dans son pays ou sa région de production.
La concurrence se fait donc, pour l'instant du moins, davantage au sein
des pays producteurs qu'entre ceux-ci. » Dès lors, faut-il s'attendre à
ce que la demande en rosé coupé soit stimulée par l'émergence d'une
offre française ?
Quoi qu'il en soit, le recours au coupage présenterait trois
inconvénients selon le sénateur de la Gironde : un risque de
standardisation, les producteurs étant susceptibles de recourir aux
cépages blancs les plus répandus ; un risque d'édulcoration, avec la
tentation de corriger des excès de dureté par l'ajout de sucre ; un
risque de confusion dans l'esprit des consommateurs, confrontés à des
produits impossibles à différencier à l'œil nu. Gérard César imagine la
réaction d'un acheteur déçu par un rosé coupé : la crainte d'un déficit
d'image se dessine, affectant les producteurs de rosé traditionnel,
voire l'ensemble de la filière vitivinicole.
L'impasse multilatérale
Dans son ultime numéro, La Lettre de l'indépendance annonce
carrément « l'agonie des AOC ». Le rapport se veut plus nuancé : « Nul
ne peut anticiper aujourd'hui les conséquences économiques de
l'autorisation du vin rosé coupé sur la filière vitivinicole française,
mais ce sont peut-être les producteurs de vin rosé de table qui ont le
plus à craindre. [...] Les producteurs de vins rosés d'appellation
avaient la faculté [...] de recourir à la technique du coupage, mais
ils l'ont refusée dans leur cahier des charges. Compte tenu de la forte
fragmentation du marché du vin, certains observateurs optimistes
estiment que les vins rosés haut de gamme seront très faiblement
concurrencés par les vins rosés coupés à faible prix. »
Pressé par le temps, Bruxelles ne semble pas disposé à retirer
son texte. Or, « l'opposition au règlement sur les pratiques
œnologiques repose sur une alliance hétéroclite d'États membres que la
Commission européenne pourrait aisément briser en donnant satisfaction
aux revendications de certains pays pour isoler la France » (3). Et « si
d'aventure une minorité de blocage était réunie [...], il faudrait être
vigilant pour que les avancées qu'a obtenues le gouvernement lors des
négociations sur le nouveau règlement ne soient pas remises en cause ».
« Quant à une réglementation nouvelle au sein de l'OIV (4) (qui autorise
le coupage pour les vins) ou de l'OMC (qui interdit d'obliger les pays
tiers à indiquer sur leurs étiquettes si le vin rosé est issu de
coupage), elle est pour l'heure hors de portée. D'une part, la
modification des règles au sein de l'OIV nécessite le consensus des
États. D'autre part, les accords relatifs à la politique commerciale
communautaire doivent être conclus à la majorité qualifiée par le
Conseil "Affaires générales et Relations extérieures" (CAGRE). »
On le voit, « les marges de manœuvre du gouvernement sont très
faibles, tant au niveau communautaire qu'au niveau international ».
D'où l'intérêt des subtilités exposées ci-dessus : elles illustrent la
complexité des pratiques multilatérales, par ailleurs inintelligibles
pour le grand public. Voilà une affaire typiquement européenne.
(1) Selon un sondage Ifop pour Sud-Ouest Dimanche
et Midi Libre.
(2) N° 392, "annexe au procès-verbal de la séance du
6 mai 2009". Rapport de 32 pages disponible sur le site Internet du
Sénat.
(3) Avis aux connaisseurs : l'Allemagne et la Hongrie
n'apprécient pas la baisse du plafond autorisé de sulfites ; l'Italie
et la Grèce sont hostiles aux mesures relatives à la désalcoolisation.
(4) Organisation internationale de la vigne et du vin.
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