Mali : l'Europe au pied du mur

21 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Moult commentateurs ont pointé l'inconséquence de l'Europe dans le dossier malien. Peut-être sont-ils coupables d'avoir placé en elle trop d'espoirs.

Dans l'affaire malienne, « l'Europe a été nulle », selon les déclarations d'Alain Juppé au micro d'Europe 1. Fidèle à son tropisme néo-gaullien, l'ancien Premier ministre continue manifestement de projeter ses rêves de grandeur à l'échelle du Vieux-Continent. Peut-être serait-il temps de l'admettre : l'"Europe puissance" n'est rien d 'autre qu'un fantasme hexagonal. Au moins Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, semble-t-il l'avoir compris : « Quand l'Europe de la Défense aura la capacité d'intervenir immédiatement, ce sera dans cent cinquante ans ! », a-t-il déclaré à La Voix du Nord. « Le président du Mali nous a appelé à l'aide le 10 », a-t-il précisé. « La décision d'intervenir a été prise par le président le 11 à 12 h 30, j'y étais. Et nos forces ont commencé à arriver à 17 heures. Que vouliez-vous faire ? Consulter les Vingt-Sept ? [...] La vérité, c'est que nous avons la réactivité militaire et le pouvoir de décision. » La capacité "d'entrer en premier" est d'ailleurs une spécificité de l'armée française, qui profite du primat accordé à l'exécutif, habilité à placer le Parlement devant le fait accompli... Preuve que la nature des institutions s'avère toujours décisive : « politique d'abord », disait Maurras !

Heureuse solitude de la France

Apte à réagir dans l'urgence, la France doit toutefois s'accommoder d'une relative solitude dans l'action. L'opposition n'a pas manqué de s'en inquiéter, par la voix de Jean-François Copé, non sans quelque légèreté. En effet, « pour la guerre, être seul est parfois plus efficace », comme le souligne le géopolitologue Olivier Kempf, animateur du blog Egea. « C'est d'ailleurs ce qu'ont beaucoup ressenti les Américains lors de la guerre d'Afghanistan, lorsqu'ils voyaient tout un tas d'alliés européens se défiler dans des zones peu dangereuses. » La France vient de le vérifier à ses dépens. Les Pays-Bas ont certes mis un avion ravitailleur à sa disposition, mais en en restreignant l'emploi, de telle sorte qu'il lui était interdit d'atterrir à Bamako. Quant au C-17 britannique qui s'est posé à Évreux, son équipage a d'abord refusé d'embarquer les rations des soldats, au motif qu'elles comprenaient des allumettes : dans la Royal Air Force, en effet, « on ne mélange pas munitions et dispositif d'allumage dans le même appareil », explique notre confrère Nicolas Gros-Verheyde. « Il a fallu quelques heures de patience et un coup de fil entre les deux chefs d'état-major pour régler la question », a-t-il rapporté sur le blog Bruxelles 2.

À ses yeux, cependant, « sans l'apport précieux et coûteux des alliés, c'est bien simple, l'opération Serval n'aurait pas duré plus de soixante-douze heures ». Selon ses estimations, ce soutien aurait représenté 60 à 100 millions d'euros au cours du premier mois d'intervention. « Soit tout autant que l'engagement français annoncé par le ministre Jean-Yves Le Drian (70 millions d'euros). » Cela étant, cette aide n'émane pas de l'Union européenne en tant que telle. D'ailleurs, parmi les alliés engagés derrière la France figurent le Royaume-Uni et le Danemark, dont Olivier Kempf rappelle qu'ils sont « les plus hostiles à tous nos baratins sur l'Europe de la Défense ».

Mission formation

L'opération Serval en sanctionnerait-elle alors l'échec ? « Pour moi, l'Europe de la Défense, c'est la mise en commun de certains moyens de défense, c'est l'industrie de défense, un certain nombre d'actions communes », plaide Jean-Yves Le Drian, qui cite en exemple l'opération Atalante, luttant contre la piraterie dans l'océan Indien. « L'Europe de la Défense, ce n'est pas l'Europe militaire », explique-t-il encore. Le cas échéant, peut-être pourra-t-elle contribuer à la reconstruction de l'État malien et plus particulièrement de ses forces armées. D'autant qu'en la matière, l'Europe peut légitimement revendiquer une certaine compétence, illustrée notamment par le précédent somalien. Laborieusement, l'Union européenne prépare donc une mission de formation à cet effet. D'ores et déjà connue sous le nom EUTM Mali, elle sera placée sous le commandement d'un officier français, le général Lecointre. « C'est, en fait, le logiciel de l'armée malienne que nous voulons reconstruire », a-t-il confié à Nicolas Gros-Verheyde. Par conséquent, a-t-il prévenu « il faut [...] considérer les choses sur le temps long, au moins le temps moyen, et non sur le court terme ».

Défi américain

Reste un autre défi qui se présente à l'Europe : celui d'une moindre protection américaine. Comparant l'intervention au Mali à celle survenue en Libye deux ans plus tôt, le politologue Zaki Laïdi relève un élément nouveau, Washington ayant envisagé « de faire littéralement payer à la France la location d'avions de transport de troupes ». « C'est un fait tout à fait inédit dans l'histoire des relations transatlantiques », souligne-t-il sur Telos. « Car même si en définitive cette option a été écartée, elle révèle à la fois l'érosion du soutien américain et la détermination de Washington à envoyer des signaux de non-assistance à Européens en danger. » Ceux-ci sauront-ils en tirer les conséquences ?

Université et langue française sous le vent de la mondialisation

21 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Quand les parlementaires se penchent sur l'ouverture des universités aux étudiants étrangers ou jugent menacée la pérennité de la langue de Molière.

Les universités françaises manqueraient-elles d'attrait aux yeux des étudiants étrangers ? Telle est, en tout cas, la conviction de Mme Dominique Gillot, sénateur PS du Val-d'Oise, auteur d'une proposition de loi censée remédier à cette situation. En dix ans, le nombre d'étudiants étrangers recensés en France aurait pourtant bondi de 40 %, atteignant deux cent trente-mille en 2010-2011. Cependant, « notre pays reste [...] en retard », déplore Mme Gillot. Devancée désormais par l'Australie, la France aurait été reléguée au quatrième rang de la compétition mondiale qui se jouerait en la matière.

Incohérences

« Notre politique [...] a été entachée d'incohérences », martèle le sénateur, qui pointe « une forte hésitation entre la volonté d'accueillir les meilleurs éléments et l'obsession du "risque migratoire" ». Tandis que ces jeunes gens seraient appelés à devenir « nos meilleurs ambassadeurs », il ne serait « ni dans l'intérêt des pays d'origine, ni dans le nôtre » de les renvoyer chez eux dès la fin de leurs études. Au contraire, plaide Mme Gillot, « c'est après au moins une première expérience professionnelle que ces diplômés pourront, à leur retour chez eux ou à l'international, mettre à profit les compétences acquises en France et en faire la promotion ».

En conséquence, elle propose que leur soient attribués des titres de séjour pluriannuels, dont la durée dépendrait de la formation suivie. Cela afin de « limiter les démarches administratives, souvent vexatoires, qui épuisent et précarisent les étudiants étrangers tout en encombrant inutilement les services préfectoraux ». Selon Mme Gillot, il conviendrait également de porter de six à douze mois l'autorisation provisoire de séjour, période pendant laquelle un étranger peut chercher un premier emploi après l'obtention de son diplôme. En outre, « pour éviter le choix souvent cornélien [...] entre le retour dans le pays d'origine ou une installation quasi-définitive dans notre pays », un « droit illimité au séjour en France » pourrait bénéficier aux titulaires d'un doctorat obtenu en France. Une mesure censée contribuer au développement d'une « coopération économique continue, enrichissante, sans pillage des cerveaux des pays émergents ». Reste à convaincre nos compatriotes, aux yeux desquels il y aurait déjà « trop d'étrangers en France »...

Anglais ou français au choix ?

Par ailleurs, Mme Gillot propose d'introduire une dérogation au code de l'éducation, lequel oblige à dispenser des cours en français. Déjà « contournée par de nombreux établissements », cette disposition constituerait « un obstacle au recrutement d'étudiants étrangers de qualité ». Toutefois, reconnaît le sénateur, on ne saurait s'en affranchir sans s'exposer aux foudres du Conseil constitutionnel. C'est pourquoi, au sein d'un même établissement, les étudiants devraient pouvoir « suivre les mêmes cursus en français et en langue étrangère ». Au risque qu'y soit instituée une certaine ségrégation ?

Quoi qu'il en soit, un tel projet devrait conforter dans sa démarche Jean-Jacques Candelier, député PC du Nord, auteur d'une proposition de résolution « tendant à la création d'une commission d'enquête sur les dérives linguistiques ». « Dans la publicité, les enseignes commerciales, la communication [...] des grandes entreprises et, désormais, dans l'enseignement secondaire et universitaire, on peut redouter que la langue de Molière disparaisse à brève échéance », prévient M. Candelier. Selon lui, « il y a urgence ». D'autant que « la dilapidation de la langue française se couple [...] avec la sape de l'héritage progressiste universel de notre pays, le démantèlement des acquis sociaux et des services publics, la destruction de l'indépendance nationale, avec l'adoption du traité de Lisbonne [...] et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), le sacrifice de la défense nationale dans l'Otan, la violation de la laïcité et la substitution de l'euro-régionalisation du territoire à la République une, laïque et indivisible issue de la Révolution ».

Ce discours n'est pas sans rappeler celui de l'ambassadeur Albert Salon... « L'internationalisme des travailleurs ne s'oppose pas au patriotisme populaire », soutient Jean-Jacques Candelier. Au contraire, « parce qu'il n'aspire qu'au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes » (que nous contestons toutefois pour notre part), le « patriotisme populaire » s'opposerait, entre autres, « au cosmopolitisme capitaliste » ainsi qu'au « supranationalisme impérialiste ». Pour les pourfendeurs de la mondialisation, l'heure serait-elle à l'union sacrée ?

La confusion des genres

7 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Tandis qu'il esquisse des « orientations stratégiques pour les recherches sur le genre », le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche cultive la confusion, confondant quête du savoir et prosélytisme éhonté.

Les "études de genre" ont acquis une notoriété inédite à la faveur de leur immixtion, sinon dans la lettre des programmes scolaires, du moins dans les manuels de sciences de la vie et de la terre (SVT) de première. La faute aux éditeurs trop zélés ? Peut-être faut-il y voir, également, l'influence des milieux universitaires, où l'intérêt pour les gender studies va croissant : tandis que sept revues leur seraient entièrement consacrées, elles auraient mobilisé, ces dernières années, plus ou moins assidument, près de deux mille chercheurs. Des « orientations stratégiques » devraient leur être assignées, clame le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, qui vient de publier un rapport en ce sens, coordonné par Alban Jacquemart, Agnès Netter et Françoise Thibault.

Genre et sexe

« Le genre est d'abord un concept, initialement issu des sciences médicales et de la grammaire française puis repris par les sciences sociales », rappellent-ils. Un concept censé aider « à mettre au jour, en les questionnant, les rapports sociaux entre hommes et femmes ». Le psychiatre Robert Stoller aurait été le premier à l'utiliser, dans les années soixante, pour « distinguer la conformation sexuelle des individus (le sexe) de l'identité sexuée, psychologiquement et socialement construite (le genre) ». Outre l'anthropologie, la psychologie, la littérature et les langues, le "genre" affecterait plus particulièrement la sociologie et l'histoire, disciplines où il serait majoritairement enseigné. Aux dires des rapporteurs, par exemple, la compréhension du fait colonial s'en serait trouvée revisitée.

Une priorité du CNRS

Le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) se serait saisi des ces recherches dans les années quatre-vingt. En son sein, l'Institut des sciences humaines et sociales (INSHS) les a depuis érigées au rang de priorité, permettant le recrutement de sept chargés de recherche. Toujours sous la houlette du CNRS a été créé, l'année dernière, l'Institut du genre, un "groupement d'intérêt scientifique" réunissant trente-cinq universités et autres institutions. Parallèlement, l'Institut d'études politiques de Paris, ainsi que l'université Paris VII, ont décidé de familiariser leurs étudiants avec les gender studies. Aux yeux des rapporteurs, cependant, cela reste insuffisant. Ainsi conviendrait-il, selon eux, d'« inciter les universités à construire des licences qui comportent aux moins deux modules obligatoires sur le genre ». Mais aussi d'y confronter tous les enseignants au cours de leur formation. Voire un plus large public, à l'intention duquel pourrait être créée une « université populaire ». D'autres propositions sont formulées « afin de lutter contre [des] inégalités persistantes » et « de faire évoluer les établissements supérieurs et de recherche vers la parité », ceux-ci devant « prendre conscience de l'existence des stéréotypes de genre qui biaisent l'évaluation ». Si, contrairement à d'autres, les rapporteurs ne demandent pas que soit rebaptisée l'école maternelle, ils appellent néanmoins à « généraliser l'usage d'une langue non sexiste » - ce à quoi ils s'emploient en bannissant le "masculin générique" : sous leur plume, ce sont des chercheur-e-s qui se sont exprimé-e-s !

Mouvement LGBT

Parmi eux, relèvent-ils, « plusieurs [...] sont, par exemple, membres de l'Observatoire de la parité et permettent que les politiques publiques se nourrissent des savoirs académiques ». Autant dire qu'ils versent volontiers dans un certain prosélytisme. En cela, ils s'inscrivent d'ailleurs dans un tradition historique. Les recherches portant plus particulièrement sur « les sexualités et les identités de sexe [...] en partie initiées par le mouvement LGBT (qui regroupe des militant-e-s lesbiennes, gays, bisexuel-le-s et transgenres), ont été particulièrement importantes dans l'élaboration même du concept de genre », soulignent les rapporteurs. C'est dire combien le militantisme interfère, depuis l'origine, dans les études de genre. Comment s'étonner, dans ces conditions, que « la recherche sur le genre peine à trouver, dans l'organisation scientifique actuelle, la reconnaissance » que revendiquent ses promoteurs ? 

Arianespace : un succès à conforter

7 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Après avoir enchaîné les succès, la fusée Ariane V entrevoit désormais le lanceur qui lui succédera dans dix ans, et dont dépendra l'avenir d'une filière industrielle où la France excelle.

Ce jeudi 7 février 2013 était programmé le premier tir de l'année d'une fusée Ariane. Sans prendre trop de risques, on peut parier qu'il se sera conclu par un nouveau succès – la cinquante-quatrième réussite consécutive. Fort de la fiabilité de son lanceur vedette, secondé désormais par des fusées Soyouz et Vega, Arianespace domine largement son marché, dont il a accaparé 60 % des commandes au cours de l'année passée. Son carnet en serait rempli pour les trois ans qui viennent !

Proton & SpaceX

Parmi ses principaux concurrents figure International Launch Services (ILS), dont la fusée Proton accumule les déboires. Son dernier échec – le cinquième en six ans – remonte au mois de décembre, où un satellite de télécommunication avait été déposé sur une mauvaise orbite. À la faveur d'un petit exploit, les ingénieurs de Thales Alenia Space (TAS) ont rattrapé les dégâts. Toutefois, la durée d'exploitation du satellite livré à Gazprom Space Services devrait s'en trouver réduite à onze ou douze ans, contre une quinzaine d'années promises à l'origine. Les assureurs s'en mordent les doigts... Autre rival de poids : SpaceX, dont Jean-Yves Le Gall, le P-DG d'Arianespace, raille volontiers les promesses extravagantes. « Quelle confiance accorder à un concurrent qui annonce envoyer dans quinze ans, quatre-vingt mille personnes sur Mars ? », a-t-il demandé à La Tribune. « On rêve », a-t-il prévenu.

Fusée low cost

En coulisses, cependant, on craint que les prix soient durablement tirés à la baisse. Aussi le successeur d'Ariane V est-il d'ores et déjà présenté comme un lanceur "low cost". Selon le Quai d'Orsay, « Ariane VI aurait notamment l'avantage d'être modulable en fonction de la charge à lancer – entre deux et huit tonnes. Le lanceur serait également en mesure de transporter un seul satellite, ce qui permettrait de répondre plus rapidement à la demande d'un client, sans attendre la commande d'un second satellite. Arianespace entend aussi réduire les coûts de fabrication et rendre l'offre plus flexible. Ainsi, Ariane VI ne serait constituée que d'un seul étage qui serait réallumable. » Son lancement inaugural devrait intervenir d'ici dix ans. Ainsi en ont décidé les ministres des vingt États membres de l'Agence spatiale européenne (ESA), réunis à Naples les 20 et 21 novembre. Cela n'était pas gagné d'avance, tant était contestée l'opportunité de lancer le développement d'une nouvelle fusée. Berlin privilégiait celui d'une version modernisée d'Ariane V, dont bénéficiera tout particulièrement le site industriel de Brême. Astrium et Safran, les deux entreprises françaises les plus impliquées, étaient du même avis, au grand dam du CNES (Centre national d'études spatiales). Aussi Mme Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a-t-elle dû batailler afin que la France s'adresse d'une seule voix à ses partenaires européens. Sa tâche aurait été d'autant plus ardue que son prédécesseur, Laurent Wauquiez, aurait traité le dossier avec désinvolture.

Deux projets en un

En définitive, les États membres de l'ESA se sont accordés pour moderniser Ariane V tout en concevant une nouvelle fusée, les deux projets devant être menés en synergie. « Alors, tous gagnants ? Sûrement, mais Paris a toutefois réussi un joli tour de force en imposant dans le calendrier de l'ESA [...] le programme Ariane VI », a commenté, dans La Tribune, notre confrère Michel Cabirol. Toutefois, « si aujourd'hui tout le monde semble satisfait, dès 2014 va resurgir la question du partage de la charge de travail entre les différents pays contributeurs au programme Ariane VI, notamment entre la France et l'Allemagne. » Or, « plus rustique, Ariane VI pourrait - à nombre de lancements égal - ne faire vivre que la moitié des dix mille personnes qui travaillent dans la filière lanceur en Europe, estiment certains experts ». Une inquiétude que tempère François Auque, le président d'EADS Astrium, pariant sur le succès commercial du futur lanceur.

Le rôle stratégique de Kourou

Pour la France, martèle le gouvernement, « le programme Ariane concerne des milliers d'emplois et des compétences industrielles majeures. En effet, le groupe français Astrium est aux commandes de la réalisation de la fusée. La filiale du groupe EADS emploie dix-huit mille salariés. Elle voit dans ces projets une marque de la véritable consolidation de l'avenir du spatial européen. Pour l'actuelle Ariane V, le groupe se charge notamment d'assembler le premier étage de la fusée dans son usine des Mureaux en région parisienne. Il travaille sur la conception du réservoir en lien avec Cryospace, filiale à 55 % d'Air liquide et à 45 % d'Astrium. Plusieurs composants d'Ariane sont fabriqués par d'autres entreprises françaises comme Snecma, filiale de Safran, en charge des moteurs Vulcain. Au total, près de deux cents entreprises participent à la fabrication de cette colossale fusée de sept cent soixante-dix tonnes. Pour éviter les risques inhérents aux opérations de transport, les propulseurs à poudre de la fusée, conçus par Europropulsion (Snecma et l'italien Avio), sont assemblés directement sur le site de Kourou. C'est là qu'est établi, depuis 1973, le centre spatial guyanais, base de lancement des fusées européennes. »

La chambre haute vient d'ailleurs d'examiner un accord, en attente de ratification depuis sa signature le 18 décembre 2008, censé « fournir une base juridique unifiée et actualisée à l'utilisation par l'Agence du Centre spatial guyanais » (CSG), selon les explications du rapporteur Bertrand Auban, sénateur de la Haute-Garonne. L'engagement de l'ESA en matière de financement et d'utilisation de la base de lancement va s'en trouver pérennisé, se félicite-t-il. Tandis que la zone euro peine à s'extirper de la crise, alors que l'intervention solitaire de la France au Mali dissipe moult illusions, peut-être la politique spatiale est-elle l'exemple d'une coopération européenne réussie ?

Depardieu et le fait du prince

16 janvier 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Décidé à collectionner les nationalités, sinon à les troquer, Gérard Depardieu joue les nomades dans un monde toujours façonné par les rivalités d'États souverains.

À la faveur du différend l'opposant à Jean-Marc Ayrault, Gérard Depardieu n'a pas cessé de le marteler : « je suis un citoyen du monde », a-t-il encore déclaré début janvier (2013), alors qu'il venait de recevoir un passeport russe des mains du président Vladimiir Poutine. « Il montre effectivement que grâce à la mondialisation nous sommes, dans une certaine mesure, libres d'échapper à la main lourde d'un État », s'est félicité Emmanuel Martin, dans un billet publié par l'Institut Turgot, arguant que « la concurrence institutionnelle, et particulièrement la concurrence fiscale est une composante essentielle de notre liberté ». De fait, constate Élie Cohen, « l'accumulation de taxes nouvelles sur le capital au moment de sa formation, de sa détention, de sa transmission, et de sa distribution n'est pas soutenable à long terme dans une économie ouverte ». De ce point de vue, souligne-t-il sur Telos, « Gérard Depardieu met le doigt sur les contradictions européennes de nos gouvernants ».

Citoyen du monde ?

Mais bien qu'il se proclame « citoyen du monde », Gérard Depardieu n'en est pas moins réduit à se placer sous la juridiction d'un État, comme tout un chacun, quoique son aisance financière lui procure quelque facilité quand il s'agit de solliciter sa protection, et non d'en hériter par naissance. En cela, il ferait plutôt figure de nomade. Un nomade au déracinement somme toute relatif. « J'ai un passeport russe, mais je suis français », a-t-il également proclamé, nuançant ses propos précédents. Amateur de bonne chère, souvent aigri mais volontiers débonnaire, il « fait partie de notre patrimoine cinématographique », comme l'a observé Mme Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication. Qu'il le veuille ou non, l'interprète d'Obelix incarne la France aux yeux du monde.

Paradoxalement, c'est vraisemblablement la raison pour laquelle il a été accueilli si chaleureusement en Russie. On a beau vivre dans un village global, les États continuent de se tirer dans les pattes. « L'intelligence économique [...] de Vladimir Poutine est une démonstration concrète de la façon de saisir des opportunités pour affaiblir une nation », souligne un contributeur de l'Alliance géostratégique (AGS). « Et peu importe les déclarations diplomatiques de rose et de miel quand les faits illustrent que les nations dites "amies" sont néanmoins concurrentes avec leurs intérêts propres à promouvoir et à développer. »

Souveraineté

Dans ces conditions, « ce passeport est moins un document juridique qu'un symbole », comme le remarque Yannick Harrel, lui aussi contributeur de l'AGS. C'est pourquoi on ne s'attardera pas sur la faculté, pour Gérard Depardieu, de bénéficier effectivement d'une double nationalité franco-russe, en dépit des doutes planant à ce sujet. Par ailleurs, à supposer qu'il souhaite à nouveau se défaire de sa nationalité française - « je vous rends mon passeport et ma Sécurité sociale », avait-il déclaré à l'intention de Jean-Marc Ayrault - il lui faudrait engager des démarches sans trop tarder, et justifier d'une résidence effective à l'étranger. Autrement dit, sa nationalité dépend du bon vouloir de l'État – c'est-à-dire, selon les cas, des dispositions du droit ou des largesses du prince.

« C'est donc l'État souverain qui décide qui est un de ses nationaux. C'est sans doute l'expression la plus pure de sa souveraineté, car elle ne suppose pas l'accord d'un autre État », selon Me Eolas, l'animateur du Journal d'un avocat. Mme Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, ne s'y est pas trompée : « c'est le pouvoir discrétionnaire de Vladimir Poutine d'offrir la nationalité russe à qui il l'entend », a-t-elle observé, se refusant à tout autre commentaire sur BFM TV.

« Quand un citoyen français a une autre nationalité, deux souverainetés se heurtent, et aucune ne peut l'emporter », explique Eolas. « L'autre État a tout autant que la France le droit de décider qui sont ses ressortissants, et le législateur français n'a aucun pouvoir pour limiter la transmission de cette autre nationalité. Qui n'est tout simplement pas son affaire. » Tout au plus la France pourrait-elle « s'attaquer aux Français par acquisition », selon notre avocat. « Ceux-là devraient, pour pouvoir acquérir la nationalité française, renoncer préalablement à leur nationalité d'origine. Et on se casse à nouveau les dents sur la souveraineté des États étrangers. Quid si l'État en question ne prévoit pas la possibilité de renoncer à cette nationalité ? [...] On aura des enfants nés en France, y ayant grandi, voire y passant toute leur vie, mais qui ne seront jamais Français à cause d'une loi votée dans un autre pays. Tandis que son voisin, lui, aura la nationalité française dès l'âge de treize ans. En somme, la nationalité française dépendra de la loi d'un État étranger. » C'est dire la prudence avec lequel devra manœuvrer le législateur, si d'aventure il se décide à bannir la double nationalité.

Marine Le Pen n'est pas une girouette !

6 janvier 2013

Plaidoyer récréatif en faveur de l'égérie populiste.

Scandale dans la blogosphère néo-frontiste ! Marine Le Pen n'ira pas manifester, le 13 janvier prochain, contre l'ouverture du mariage aux couples de même sexe. L'égérie populiste serait coupable de sacrifier la famille sur l'autel de quelque calcul politicien, lit-on ici où là. C'est traiter bien injustement celle qui continue d'incarner, contre vents et marées, l'espoir du redressement national.

Aujourd'hui comme hier, en effet, la priorité demeure de renverser l'UMPS, ce syndicat d'oligarques menant le pays à sa perte. Politique d'abord ! Dans cette optique, la "manif pour tous" doit être analysée pour ce qu'elle est : à savoir, une funeste opération d'enfumage, téléguidée comme toujours depuis Bruxelles et Washington. D'ailleurs, ses organisateurs cachent mal leur jeu : les sympathies de Frigide Barjot à l'endroit des invertis donnent à réfléchir ; pour bénéficier d'une telle couverture médiatique, ne faut-il pas en être, d'une façon ou d'une autre ? Seuls des naïfs peuvent l'ignorer : le Système (avec une majuscule SVP) ne se divise que pour mieux régner. Dans le cas présent, il entretient sciemment l'illusion d'une opposition entre PS et UMP, donnant à croire qu'une alternance est possible dans notre démocratie dont les acteurs sont, en réalité, les marionnettes d'une superclasse mondiale à la solde du capitalisme apatride.

Dans l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle, Marine Le Pen avait renvoyé dos à dos chacun des deux finalistes sélectionnés par les médias aux ordres. À l'époque, il n'était pas question de préférer François Hollande à Nicolas Sarkozy au motif que celui-là brouillerait plus certainement que celui-ci les repères de la filiation. Qu'on se le dise : Marine Le Pen est d'une autre trempe que les girouettes qui nous gouvernent ! Elle n'est pas du genre à retourner sa veste au moindre mouvement de foule canalisé par des services préfectoraux pour le moins complaisants... Marine Le Pen  a l'étoffe d'une femme d'État, lucide dans son jugement, ferme dans ses convictions, déterminée dans son action. L'amour de la France, voilà son unique passion ! Hélas, jusqu'au sein de son propre parti, les suppôts du mondialisme redoublent d'efforts pour la faire trébucher. Ces traitres seront châtiés comme tel le jour la France, la vraie, retrouvera ses droits. En attendant, la nouvelle Jeanne d'Arc résiste admirablement aux terribles pressions qui s'abattent sur elle. Bravo Marine ! De ton obstination à rester en marge d'une manifestation dépend évidemment l'avenir de la France, sinon celui de la planète voire de l'univers tout entiers.

À l'école de la propagande

2 janvier 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Chantre de l'égalité, le gouvernement entend surveiller l'expression des internautes, mais aussi inculquer ses principes aux enfants, cela dès le plus jeune âge. En s'inspirant, vraisemblablement, des "études de genre".

L'"homophobie", voilà l'ennemi ! Du moins a-t-elle été désignée comme telle par Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement. « Il y a quelques jours, le réseau Twitter a été le support [...] d'un déferlement de propos d'une violence rare à l'endroit des personnes homosexuelles », a-t-elle déploré dans une tribune publiée par Le Monde vendredi dernier, 28 décembre 2012.

Suicides sur Twitter

Or, selon le ministre, « les messages ainsi maintenus en accès libre [...] ont pu présenter un danger pour des jeunes homosexuels de notre pays ». En effet, « à l'âge où les questionnements sur la sexualité apparaissent », ils seraient « très sensibles aux violences, y compris verbales, homophobes » - lesquelles seraient « la première cause de suicide chez les adolescents dans notre pays ». En conséquence, « sans préjudice d'éventuelles actions judiciaires », Mme Vallaud-Belkacem en appelle « au sens des responsabilités de l'entreprise Twitter inc., pour qu'elle contribue à prévenir et à éviter de tels débordements ». Celle-ci est invitée à entamer des discussions le 7 janvier.

Canalisant l'expression des internautes, le gouvernement entend, par ailleurs, façonner les con-sciences : de la maternelle au lycée, « l'éducation à l'égalité des sexes doit devenir une pratique quotidienne », a-t-il annoncé le 14 décembre. Dès la rentrée 2013, « les classes de grande section de maternelle et des écoles élémentaires de cinq académies expérimenteront "l'ABCD de l'égalité" » - un « outil pédagogique » censé permettre aux enseignants et à leurs élèves « de travailler sur les connaissances et les comportements de chacun envers le sexe opposé ». Dans les collèges et lycées, « des actions de sensibilisation pour lutter contre le harcèlement et les violences sexistes verront le jour ». En outre, les futurs enseignants « bénéficieront d'un module de formation spécifique au sein des écoles supérieures de professorat et de l'éducation » dédié « à la "lutte contre les stéréotypes de genre dans les pratiques professionnelles" ».

Changer les rôles

Déplorant que l'orientation des élèves soit « souvent le résultat de stéréotypes intériorisés », les pouvoirs publics vont mettre en valeur « les trajectoires de femmes ayant réussi dans des métiers "dits d'homme", et inversement ». Enfin, le gouvernement promet « un nouveau plan d'action pour l'éducation à la sexualité » censé « traiter la sexualité dans toutes ses dimensions : physiologique, psychologique, sociale, éthique et culturelle ». En s'inspirant des gender studies ? Cela n'aurait rien d'étonnant. Début décembre, Mme Virginie Duby-Muller, député UMP de Haute-Savoie, a déposé à l'Assemblée nationale une proposition de résolution « tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'introduction et la diffusion de la théorie du gender en France ». À cette occasion, elle a rappelé, entre autres, l'existence de la crèche Bourdarias en Seine-Saint-Denis : « une crèche dont, depuis avril 2009, les équipes, qui ont été formées par des spécialistes suédois, pratiquent une pédagogie "active égalitaire" et se mobilisent pour lutter contre les stéréotypes de genre qui assignent les enfants à des rôles différents en fonction de leur sexe - "on encourage les filles à manier le marteau à l'atelier bricolage et les garçons à s'exprimer à l'atelier émotions" ». Or « cette expérience pilote intéresse le gouvernement puisque Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des Femmes et Dominique Bertinotti, ministre déléguée [sic] à la Famille l'ont visitée en septembre dernier et affirmé clairement leur désir de multiplier ce type de dispositif, et de réfléchir à la formation et à la pratique des professionnels de la petite enfance ».

Cependant, rappelle encore Mme Duby-Muller, le 23 novembre 2012, le tribunal administratif de Paris a annulé l'agrément "Éducation nationale" dont bénéficiait SOS homophobie, en tant qu'association éducative complémentaire de l'enseignement public, pour atteinte au principe de neutralité qui s'impose aux associations intervenant dans l'enseignement public, ainsi que pour atteinte aux convictions religieuses et philosophiques des élèves, de leurs parents ou des enseignants. Preuve que le bourrage de crânes rencontre encore quelques obstacles.

Le mariage dans tous ses États

2 janvier 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

L'union des couples homosexuels et l'homoparentalité sont d'ores et déjà consacrées par la loi à l'étranger, où se vérifie par ailleurs la désaffection pour le mariage. Petit tour d'horizon.

A la faveur du "mariage pour tous" et de son corollaire, l'ouverture de l'adoption aux couples de même sexe, des enfants pourraient, demain, se voir réputés nés de deux pères ou deux mères. Une situation ubuesque qui ne serait pas sans précédents. Au Québec, une "présomption de parentalité" a été instituée en faveur des femmes unies devant la loi. Modifié à cet effet en 2002, le code civil appliqué dans la Belle Province envisage le recours à la procréation médicalement assistée, mais aussi les cas où « l'apport génétique se fait par relation sexuelle » - autrement dit avec la complicité d'un homme consentant généreusement à quelque ébat susceptible de palier la stérilité du ménage. Dans ces conditions, le droit québécois le stipule explicitement, « l'enfant, issu [...] d'un projet parental entre époux [...] qui est né pendant leur union ou dans les trois cents jours après sa dissolution ou son annulation est présumé avoir pour autre parent le conjoint de la femme qui lui a donné naissance ».

Accrocs en série

En novembre, Le Figaro avait signalé quelques « accrocs du mariage gay » recensés à l'étranger. Notamment au Royaume-Uni. « Ann avait tout d'abord consenti à ce que son mari Michael fasse don de son sperme », racontent nos confrères Agnès Leclair et Stéphane Kovacs. « Mais à l'annonce de la naissance d'une petite fille chez un couple de lesbiennes, elle a craqué : le sperme ne fait-il pas partie des "biens matrimoniaux" ?, s'interroge-t-elle, bouleversée "comme si [son] mari l'avait trompée". Les lesbiennes étant trop âgées, elles avaient fait appel à une mère porteuse, tout en entamant une procédure d'adoption. Laquelle échouera, justement à cause de leur âge... La mère porteuse accouchera donc sous le nom de l'une d'entre elles. Et le tribunal, devant lequel Ann et Michael tentèrent de récupérer l'enfant, donnera finalement raison au couple de lesbiennes. » Et d'évoquer, un peu plus loin, « le donneur qui voulait juste rendre service », auquel on réclame désormais le versement d'une pension alimentaire : « "Pourquoi ne poursuit-on pas la deuxième mère, qui les a élevées, et qui, elle, a les moyens ?", s'énerve-t-il. Quant aux filles de douze et quatorze ans, elles sont très perturbées psychologiquement. "Jamais je ne pourrai me marier ni avoir des enfants", assène l'aînée. » Beau travail !

Cependant, tandis que la France s'apprête à marier des couples homosexuels, « des États-Unis à l'Inde, en passant par les Pays-Bas, l'Italie et le Liban, de plus en plus de voix s'élèvent contre une norme sociale jugée dépassée ». C'est en tout cas le constat dressé par le Courrier international dans son dernier numéro de l'année 2012. « Katie Bolick a tenté de cerner ce phénomène en retraçant l'histoire du mariage et de son déclin dans un article publié dans The Atlantic. [...] Le refus de convoler en justes noces est-il représentatif d'un courant de fond ? se demande la journaliste américaine. Faut-il vraiment idéaliser le mariage d'amour ? s'interroge à son tour une humoriste à Bombay. Ne devrait-on pas autoriser les unions avec... des appareils ménagers ? propose même un écrivain à Milan. » De fait, l'ouverture du mariage aux couples de même sexe serait demeurée inenvisageable si le mariage lui-même ne s'était pas trouvé préalablement remis en cause.

Crime contre l'humanité

Cela dit, tous les habitants du village global ne sont pas logés à la même enseigne. Le 12 décembre, le Parlement d'Uruguay a certes approuvé un projet de loi légalisant le mariage homosexuel. « Le petit pays sud-américain a pris une position progressiste envers les droits des homosexuels au cours des six dernières années, approuvant les unions civiles, les adoptions par des couples gays et lesbiens, les changements de sexe dès l'âge de dix-huit ans et la présence des homosexuels au sein des forces armées », souligne l'AFP. Mais la veille de ce vote, le secrétaire général de Nations Unis, Ban Ki-moon, avait exprimé son indignation : « C'est un scandale que dans le monde d'aujourd'hui, tant de pays continuent de [poursuivre] leurs citoyens au prétexte qu'ils aiment une personne du même sexe », a-t-il déclaré. Soixante-seize pays seraient visés par ses récriminations.

C'est le cas du Cameroun, où les paroles de Mgr Bakot, l'archevêque de Yaoundé, prononcées pendant la messe de minuit, n'ont pas dû choquer grand monde : « le mariage entre personnes du même sexe est un crime sérieux contre l'humanité », a-t-il martelé, selon les propos rapportés par Pierre de Bellerive sur Nouvelles de France. « Nous devons nous lever pour le combattre, avec toute notre énergie », a-t-il poursuivi. Rendez-vous le 13 janvier !

Malthus, mauvais génie du XXIe siècle

20 décembre 2012
Article publié dans L'Action Française 2000

Des Verts au FN en passant par le PS et l'UMP, le malthusianisme nourrit la plupart des discours politiques...

La Chine « est prête à abandonner la politique de l'enfant unique », a annoncé La Tribune le 28 novembre 2012. Selon notre confrère Nabil Bourassi, dans les régions les plus développées de l'empire du Milieu, les couples devraient être autorisés prochainement à accueillir un second enfant. Le malthusianisme s'en trouvera-t-il voué aux gémonies ? Loin s'en faut.

L'or noir intarissable

Au printemps 2009, on s'en souvient, Yves Cochet, alors député Vert de Paris, avait appelé à « la grève du troisième ventre », au motif qu'un enfant européen présenterait « un coût écologique comparable à six cent vingt trajets Paris-New York ». À la hantise du réchauffement climatique s'ajoute le spectre récurrent d'une raréfaction des ressources. L'expérience donne pourtant à réfléchir : annoncé à de multiples reprises, l'épuisement des réserves pétrolières n'en finit pas d'être reporté ; depuis quarante ans, comme le rappelait Georges Kaplan en juin dernier, « les réserves prouvées mondiales [...] ont largement plus que doublé » ; « il existe même aujourd'hui quelques projets très sérieux de pétrole de synthèse ». C'est dire combien le pessimisme s'avère de mauvais aloi. Pas plus que Maurras, nous ne croyons « à la grève du génie humain » !

Bien qu'ils en soient les chantres les plus éminents, les écologistes n'ont pas l'apanage du malthusianisme. Sous ses diverses déclinaisons, celui-ci façonne l'opinion publique en profondeur, inspirant la plupart des discours politiques. À commencer par celui des socialistes. Le Premier ministre l'a confirmé le 11 décembre, tandis qu'il fustigeait l'évasion fiscale de Gérard Depardieu : « on ne fera pas reculer la pauvreté si ceux qui ont le plus [...] n'acceptent pas un peu de solidarité et un peu de générosité », a-t-il déclaré. Ainsi la nation serait-elle promise au rationnement selon Jean-Marc Ayrault... La mise en place des trente-cinq heures a procédé d'un préjugé similaire, selon lequel nous serions condamnés à partager un nombre figé d'emplois. Traditionnellement, le Front national puise à la même source : ne juge-t-il pas « l'immigration professionnelle [...] particulièrement condamnable [...] alors que le chômage explose » ?

Démondialisation

Prônée, entre autres, par Arnaud Montebourg, la « démondialisation » transpose cette conception à l'échelle du Village global, où l'on s'imagine qu'un emploi créé en Chine serait nécessairement perdu en France. Or, si l'on en croit Alexandre Gazaniol, auteur d'une note publiée par la Fabrique de l'industrie, « l'internationalisation des entreprises a un effet positif sur leur chiffre d'affaires, leur innovation et leur emploi en France, et contribue donc au développement de l'activité industrielle française ». Bien qu'elles appellent peut-être quelque nuance, ces conclusions soulignent la complexité d'un débat esquivé par le néo-malthusianisme, dont les adeptes feignant de croire que l'économie est un jeu à somme nulle. N'ont-il jamais eu vent, par exemple, des "avantages comparatifs" mis en évidence par David Ricardo en 1817 ? « Il s'agit du meilleur exemple d'un principe économique indéniable mais contraire à l'intuition de personnes intelligentes », remarquent justement les contributeurs de Wikipedia.

L'UMP n'est pas en reste : il y a un an, Alain Moyne-Bressand, député de l'Isère, avait déposé une proposition de loi « visant à interdire la généralisation des caisses automatiques aux barrières de péages sur le réseau français autoroutier » ; selon les signataires de ce texte, parmi lesquels figuraient Lionel Luca, Christian Ménard, Jacques Myard, Éric Raoult, Christian Vanneste..., « en temps de crise [...] où le chômage atteint de tristes records, aucun emploi ne doit être supprimé ou minimisé ». C'est méconnaître le caractère dynamique de l'économie, où la « destruction », quoique parfois douloureuse, s'avère néanmoins « créatrice », comme l'écrivait Joseph Schumpeter. Les réactionnaires doivent-ils s'en offusquer ? Selon Maurras, en tout cas, « la vérité politique et sociale qui nous conduit n'a pas la forme du regret. Elle est plutôt désir, curiosité, solide espérance apportant les moyens de réaliser l'avenir avec une imperturbable sécurité. » Au passage, on rappellera que, dans son rapport sur la compétitivité, Louis Gallois a précisément déploré le faible niveau de robotisation de l'industrie nationale.

Qu'on le veuille ou non, il faudra compter avec le progrès matériel. Pour le meilleur ou pour le pire. « Tous ces changements que nous opérons dans l'économie de notre planète n'ont mené à rien jusqu'ici et rien ne permet d'admettre qu'ils conduisent jamais à rien », observait Maurras. Toutefois, poursuivait-il, « nous y travaillons parce qu'il est dans notre ordre d'y travailler ». « Animal industrieux », voilà, selon lui, « la définition première de l'homme ». Aussi les incantations lancées en faveur de la décroissance nous paraissent-elles tout aussi vaines que la tentative de normaliser l'homosexualité par l'institution d'un "mariage pour tous" : ce ne sont jamais que les expressions multiples d'un volontarisme voué à échec.

Des tourments de l'adoption

20 décembre 2012
Article publié dans L'Action Française 2000

Sous quelles conditions des candidats à l'adoption parviennent-ils à accueillir un enfant ? La question mérite d'être posée, alors que l'ouverture du mariage aux couples de même sexe pourrait prochainement changer la donne.

Plus de vingt-cinq mille foyers étaient en attente d'adoption en 2006. Selon un rapport de l'Ined publié en 2007, tandis que huit mille nouveaux agréments étaient alors délivrés chaque année, seuls quatre à cinq mille enfants avaient fait l'objet d'une adoption plénière, la plupart nés à l'étranger (80 % en 2005). « Il y a effectivement beaucoup moins d'enfants légalement adoptables en France que de candidat-e-s à l'adoption », reconnaît SOS Homophobie, dans un jargon typique récusant la valeur générique du masculin. Toutefois, prévient l'association, il serait « parfaitement discriminatoire »  - et donc intolérable - de donner la priorités aux couples traditionnels si les couples homosexuels obtenaient l'autorisation d'adopter.

Discriminations

Or, les inégalités semblent d'ores et déjà flagrantes - quoiqu'elles ne procèdent pas nécessairement d'une injustice. Parmi les couples candidats à l'adoption, « on compte seulement 19 % d'ouvriers [...], alors qu'ils représentent 35 % de la population active du même âge », relève l'Ined. « À l'inverse, 25 % des candidats sont cadres alors qu'ils représentent seulement 16 % de la population active. Le revenu médian des candidats à l'adoption est d'ailleurs supérieur de 20 % à la médiane nationale. »

Quant à l'agrément requis pour adopter, il est « plus fréquemment refusé aux célibataires qu'aux couples, aux couples de plus de quarante ans qu'aux couples plus jeunes, aux parents ayant déjà des enfants biologiques qu'aux couples n'en ayant pas, et aux candidats de milieux sociaux défavorisés qu'aux autres ». Il est délivré par le président du Conseil général, à l'issue d'une procédure censée garantir, conformément aux décrets en vigueur, que « les conditions d'accueil offertes par les futurs parents correspondent aux besoins et à l'intérêt d'un enfant adopté ». Un refus sanctionne  moins de 10 % des procédures menées à leur terme. Le cas échéant, les motifs invoqués pointent, le plus souvent, « une perception insuffisante de la spécificité de l'enfant adopté », un projet « prématuré », une attente différente de l'adoption par les deux conjoints, le deuil du désir d'enfant biologique qui n'est pas fait.

Le pouvoir du psy

D'un département à l'autre, « il existe de fortes différences [...] dans les taux d'abandon avant agrément et dans la proportion de candidats qui réussissent à adopter après agrément », comme le relève, dans ses conclusions pour l'Ined, Mme Catherine Villeneuve-Gokalp. Les interventions des psychologues, « animés par des conceptions différentes de l'adoption », expliqueraient en partie ce constat, suscitant « une présélection plus ou moins forte des candidats ». De fait, lorsque les entretiens auxquels ils sont soumis « deviennent dérangeants, voire conflictuels, certains candidats refusent de les poursuivre ou anticipent un rapport défavorable suivi d'un refus d'agrément et préfèrent renoncer à leur projet ». L'Ined cite un refus d'agrément « opposé à une célibataire pour manque d'image masculine empêchant l'enfant de "faire son Œdipe" » : preuve qu'en dépit du droit, on traîne parfois les pieds au plus près du terrain... « La possibilité de demander que les investigations soient refaites par d'autres personnes existe, mais elle est peu utilisée », précise l'Institut. Peut-être les homosexuels décidés à adopter feront-ils preuve d'une opiniâtreté inédite ? En cas de recours gracieux déposé auprès du président du Conseil général, celui-ci revient sur sa décision « près d'une fois sur deux ». À ce stade, les candidats malheureux ont tout intérêt à entamer une nouvelle demande d'agrément, « plutôt que de tenter un recours contentieux qui ne leur fera guère gagner de temps, risque de leur être défavorable et leur attirera l'hostilité des services d'adoption, hypothéquant ainsi leurs chances pour une nouvelle demande ». Mais là aussi, peut-être des homosexuels s'inscrivant dans une démarche militante seraient-ils tentés, le cas échéant, d'agir différemment ?

Soutien associatif

À cet effet, ils bénéficieraient vraisemblablement d'un soutien associatif qui s'avère d'ores et déjà déterminant. Du moins pour l'adoption internationale. Celle-ci « dépend des réseaux d'information et de leur facilité d'accès », explique Mme Villeneuve-Gokalp. « En particulier, les célibataires, surtout les hommes, sont souvent mal accueillis par les associations de parents adoptifs. » Créée en 2006, l'Agence française pour l'adoption (AFA) devait contribuer à « réduire ces inégalités ». Quoi qu'il en soit, « les variations annuelles du nombre d'enfants adoptés à l'étranger rappellent, s'il en est besoin, que l'origine des différences se situe aussi dans les réglementations des pays d'origine ». Or, « seuls trois pays, les États-Unis, le Brésil et l'Afrique du Sud pourraient potentiellement répondre aux demandes des couples homosexuels », selon Arnaud Del Moral, chargé de la stratégie et des procédures d'adoption à l'AFA. Celle-ci « appréhende que les couples dont les dossiers ne seraient pas envoyés dans des pays où ils n'ont aucune chance d'aboutir se retournent contre elle devant les tribunaux administratifs », résume, dans Le Figaro, notre consœur Agnès Leclair. Qu'en pense le Défenseur des droits, ayant succédé à la Halde ?