23 mars 2018
Ceux qui appellent la France à sortir de l'Union européenne semblent être les premiers à oublier qu'elle en fait elle-même partie.
La « politique de casse des services publics est dictée à la France par l'Union européenne
», avons-nous lu dernièrement sur Facebook. Le projet de loi « pour un nouveau pacte ferroviaire
», qui vient d'être présenté à l'Assemblée nationale, serait censé en témoigner. En effet, le Gouvernement ne s'en cache pas : il s'agit, entre autres, de transposer les directives organisant un « espace ferroviaire unique européen
».
Curieusement, ceux qui appellent la France à sortir de l'Union européenne semblent être les premiers à oublier qu'elle en fait elle-même partie. Et qu'à ce titre, elle a voix au chapitre. De fait, les textes incriminées ont été adoptés avec son accord, en 2012 comme en 2016 (un registre des votes publics est accessible en ligne).
Dans ces conditions, comment peut-on prétendre que Bruxelles impose sa volonté à Paris ? Tout au plus pourrait-on considérer que le Gouvernement place le Parlement devant le fait accompli. Or, au Danemark et en Finlande, il semblerait que les choses se passent différemment – preuve, encore une fois, que l'Europe n'est pas seule en cause. En France, le primat va à l'exécutif ! Cela en vertu d'une tradition monarchique entretenue par la constitution de la Ve République. Voilà, précisément, ce contre quoi se battent les souverainistes. Parmi lesquels on compte pourtant de fervents gaullistes et même des royalistes… Ironie !
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31 janvier 2018
Article publié dans L'Action Française 2000
Politique agricole commune, TVA : quand la Commission européenne veut redonner du pouvoir aux États membres, mais que ceux-ci, France en tête, hésitent à s'en saisir…
Les États membres de l'Union européenne (UE) sont-ils condamnés à lui transférer sans cesse davantage de prérogatives ? Pas au regard du droit. Leurs représentants « peuvent décider de modifier les traités sur lesquels l'Union est fondée, y compris en vue d'accroître ou de réduire les compétences attribuées à l'Union dans lesdits traités
», est-il bien stipulé dans le droit primaire européen. Quant à la Commission européenne, elle propose parfois de rétrocéder certaines responsabilités aux États membres, via la modification de quelque directive ou règlement. Depuis quatre ans, par exemple, ils jouent un rôle accru dans la gestion des fonds structurels européens. Deux autres réformes en ce sens ont été annoncées dernièrement par Bruxelles.
Pas touche à la PAC !
La première porte sur la Politique agricole commune (PAC). Il y a deux mois, le 29 novembre, la Commission a proposé de « renforcer les compétences des États membres en matière de choix et de modalités d'affectation des ressources de la PAC
». Selon Bruxelles, « le fait de passer d'une approche universelle à une approche sur mesure rapprochera la politique et ses implications réelles de ceux qui en assument la mise en œuvre sur le terrain
». Paris se réjouit-il d'une telle perspective ? Bien au contraire. Dans l'Hexagone, où l'on profite tout particulièrement de cette manne budgétaire qui transite par Bruxelles, cela suscite des inquiétudes. « Il faut arrêter de toujours augmenter la subsidiarité de la PAC ; si l'on continue comme ça, en 2026, il ne restera pas grand-chose de commun à cette politique
», dénonce un agriculteur cité par Euractiv. « La France s'oppose à toute "renationalisation" de la PAC
», résument nos confrères.
La seconde de ces réformes, présentée le 18 janvier dernier, concerne la TVA. Aujourd'hui, les États membres doivent s'accorder à l'unanimité pour définir les biens ou services susceptibles de bénéficier d'un taux réduit. Cela peut susciter d'âpres négociations. En 2016, comme l'a rappelé Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, à la Fiscalité et à l'Union douanière, « la question des taux de TVA appliqués aux tampons hygiéniques a même abouti dans les conclusions du Conseil européen lors des négociations sur le Brexit
» ; « nos chefs d'État et de gouvernement ont pourtant bien "d'autres chats à fouetter"
», a-t-il martelé. Aussi propose-t-il, au nom de la Commission, « de redonner aux États membres la liberté
[…] de fixer les taux de TVA comme ils l'entendent
», avec toutefois quelques bornes : par exemple, le taux moyen pondéré appliqué à la consommation à l'intérieur d'un État membre ne devra pas descendre en-dessous de 12 %.
Bruxelles bouc émissaire
Ce pouvoir, les États membres « le demandent
», selon Pierre Moscovici. Pourtant, « ce ne sera pas simple d'obtenir l'unanimité
» requise pour entériner cette réforme, si l'on en croit ses collègues cités par Les Échos. Il faut dire que les gouvernements s'accommodent parfois très volontiers des blocages européens. Confronté aux revendications des centres équestres, par exemple, Paris ne pourra plus arguer d'une opposition de Bruxelles pour leur refuser le privilège d'une TVA réduite, si la Commission parvient effectivement à mener son projet à bien. Il va falloir assumer ! Dans certains cas, il arrive même « que des gouvernements nous demandent de proposer telle ou telle réforme
[…] en nous avertissant qu'ils nous en feront porter la responsabilité
», selon un fonctionnaire européen cité en juin 2016 par notre confrère Jean Quatremer sur son blog Coulisses de Bruxelles.
Cela étant, il arrive aussi que Paris s'affranchisse de ses engagements européens. En 2012 et en 2014, il avait aligne le taux de TVA des livres numériques puis des journaux en ligne sur celui du papier, sans attendre le feu vert de Bruxelles. Lequel s'avère d'autant plus difficile à obtenir qu'il faut compter avec le chantage de la République tchèque. En conséquence, comme le rappelaient Les Échos en juin dernier, la France « a été condamnée en 2015 par la justice européenne mais sans être sanctionnée et elle a maintenu ces nouveaux taux réduits
». En revanche, c'est en toute légalité qu'elle a rétabli des contrôles à ses frontières en novembre 2015, après les attentats. Ils seront maintenus au moins jusqu'au 30 avril prochain. Cela en vertu d'une dérogation inhérente au fonctionnement de l'espace Schengen. Sans doute con-vient-il de le rappeler : les libertés ne s'octroient pas, elles se prennent ! Reste, le cas échéant, à en faire bon usage.
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31 janvier 2018
Article publié dans L'Action Française 2000
La subsidiarité chère à l'Église est invoquée aussi par Bruxelles.
Selon le principe de subsidiarité, tel qu'il est défini par l'Église catholique, « une société d'ordre supérieur ne doit pas intervenir dans la vie interne d'une société d'ordre inférieur en lui enlevant ses compétences, mais elle doit plutôt la soutenir en cas de nécessité et l'aider à coordonner son action avec celle des autres éléments qui composent la société, en vue du bien commun
».
Reformulation européenne
Ce principe a été explicitement introduit dans le droit européen par le traité de Maastricht, en application duquel, « dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n'intervient
[…] que si et dans la mesure où les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire
». Formulé de la sorte, il peut être invoqué pour légitimer, le cas échéant, l'intervention de l'Union européenne, plus encore que pour préserver l'autonomie des États membres…
En finir avec les chasses d'eau
Aujourd'hui, les parlements nationaux sont appelés à exercer un relatif contrôle de la subsidiarité. Par ailleurs, un commissaire européen est censé veiller au respect de ce principe. « Nous devons montrer aux citoyens que l'Union européenne peut résoudre les problèmes à grande échelle et s'abstenir d'intervenir sur les enjeux mineurs
», avait expliqué le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, en septembre 2014, tandis qu'il venait de confier cette mission au Néerlandais Frans Timmermans. Plus récemment, en février 2017, il avait dénoncé les velléités jadis manifestées par Bruxelles de réglementer les chasses d'eau : « les citoyens européens ont affirmé qu'à ce sujet, ils avaient une meilleure connaissance que les commissaires à Bruxelles
», avait-il expliqué. Ce faisant, l'Union européenne et la Commission poursuivent leur intérêt bien compris – celui d'apaiser les critiques qui les visent.
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3 juin 2017
Article publié dans L'Action Française 2000
Désormais, le « hard Brexit
» semble avoir la cote outre-Manche. Mais rien n'est encore écrit alors que s'ouvrent les négociations avec l'Union européenne.
« Brexit means Brexit
», clame Theresa May, depuis son arrivée au 10 Downing Street. Reste à savoir comment cela se traduira concrètement… Les négociations à peine ouvertes, Londres et Bruxelles s'opposent sur leurs modalités. L'Union européenne et ses États membres entendent préciser les termes du divorce avant d'envisager leur relation future. Ce qui suppose, notamment, de solder les comptes… L'UE exige notamment d'Albion qu'elle couvre les coûts liés au déménagement de l'Autorité bancaire européenne et de l'Agence européenne des médicaments, dont les bureaux sont actuellement situés à Londres. Mais aussi qu'elle honore tous les engagements financiers souscrits jusqu'à 2020. Plusieurs dizaines de milliards d'euros seraient en jeu. « Ils vont saigner ce pays à blanc avec leur facture
», a dénoncé Boris Johnson, secrétaire d'État des Affaires étrangères et du Commonwealth, cité par Euractiv, menaçant de rompre les négociations « sans rien payer du tout
».
Une facture salée
Mais selon la Fondation Robert Schuman, « même en négociant âprement et en réduisant ce montant à son minimum, Theresa May ne parviendra pas à le rendre moins symbolique et moins contradictoire avec la volonté exprimée au moment du vote le 23 juin 2016
». D'autant que « les termes de la négociation sont clairs
[…] et en défaveur du Royaume-Uni, pour deux raisons principales
» : d'une part, « 48 % des exportations britanniques de biens vont vers l'Union européenne, contre 6 % des exportations européennes qui vont vers le Royaume-Uni
» ; d'autre part, « ces négociations offrent l'opportunité à la zone euro de rectifier l'incongruité que représente la domination offshore de la place financière de Londres sur la monnaie unique
».
À court terme, donc, les économies promises à la faveur du Brexit s'annoncent compromises. Cependant, le Royaume-Uni recouvrera-t-il son indépendance juridique ? Dans un premier temps, sauf exception, l'intégralité des normes européennes seront intégrées au droit britannique. « Cette position, nécessaire à la viabilité du Brexit, en atténuera la portée symbolique
», souligne encore la Fondation Robert Schuman. Cela étant, Theresa May le revendique clairement : « nous devons avoir la liberté d'adopter nos propres lois dans tous les domaines, de la façon dont nous labellisons notre nourriture à celle dont nous contrôlons l'immigration
». C'est pourquoi, à entendre le Premier ministre britannique, à moins d'un nouveau rebondissement (tout à fait possible au demeurant…), une association étroite avec l'Union européenne, sur le modèle de la Norvège ou de la Suisse, semble finalement exclue.
Une nouvelle Europe
Alors que l'opinion britannique se montrait jadis bienveillante à l'égard des travailleurs venus d'Europe de l'Est, la libre circulation des personnes, toujours si chère à Bruxelles, suscite aujourd'hui sa défiance. Dans ce contexte émerge le projet d'une « Union continentale
», soutenu, entre autres, par l'économiste Jean Pisani-Ferry, proche d'Emmanuel Macron dont il a été un artisan de la campagne électorale. « Pour asseoir leur manifeste, Jean Pisani-Ferry et ses collègues récusent d'abord la nécessité économique de la libre circulation des personnes
», rapporte Élie Cohen sur Telos : « ce que requiert le marché unique c'est une forme d'organisation de la mobilité du travail, la libre circulation des personnes relevant, elle, d'un choix politique
» ; « ils défendent ensuite l'idée d'une participation pleine et entière du Royaume-Uni à la phase amont de la négociation des normes du marché unique, même si la décision ultime doit rester la prérogative des seuls États membres
». Un nouveau cercle se formerait ainsi au-delà de l'Union européenne, lequel serait susceptible d'accueillir, outre le Royaume-Uni, la Turquie ou l'Ukraine. L' Europe ne va-t-elle rétrécir que pour mieux s'élargir ensuite ?
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3 juin 2017
Article publié dans L'Action Française 2000
L'Union européenne précise ses prérogatives quant à la ratification des accords de libre-échange.
La machine européenne semble s'être enrayée. Dernièrement, en tout cas, la ratification des traités conclus avec l'Ukraine puis le Canada s'est heurtée à la fronde d'un parlement national (Pays-Bas) puis régional (Wallonie). Qu'en sera-t-il à l'avenir ? La Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) vient de clarifier le 16 mai 2017 les règles qui prévaudront en vertu de sa jurisprudence.
Un point pour les États
En 2013 avait été paraphé un accord avec Singapour. Comme le rappelle la CJUE, « il s'agit de l'un des premiers accords de libre-échange bilatéraux dits de "nouvelle génération", c'est-à-dire un accord de commerce qui contient, outre les dispositions traditionnelles relatives à la réduction des droits de douane et des obstacles non tarifaires dans le domaine des échanges de marchandises et de services, des dispositions dans diverses matières liées au commerce, telles que la protection de la propriété intellectuelle, les investissements, les marchés publics, la concurrence et le développement durable
». Or, selon la Cour, ce traité « ne peut pas, dans sa forme actuelle, être conclu par l'Union européenne seule
». Notamment en raison des dispositions relatives au règlement des différends entre investisseurs et États qui ne sauraient relever, selon elle, de la compétence exclusive de l'Union.
Un autre pour l'Union
Cela étant, les juges européens n'en viennent pas moins « de donner un coup de pouce particulièrement bienvenu aux négociateurs européens
», selon notre consœur Florence Autret. « Jusqu'alors
», explique-t-elle dans La Tribune, « il n'était pas certain qu'un accord comportant des règles sociales ou environnementales ou bien couvrant le secteur des transports puisse être approuvé par les seules institutions européennes
». Sur ce point, une ambiguïté vient donc d'être levée. Aux dépens des États, ou du moins de leurs parlements.
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7 avril 2017
Article publié dans L'Action Française 2000
La "surtransposition" des directives européenne élaborées à Bruxelles s'immisce dans la campagne présidentielle.
L'Europe a parfois bon dos. Il y a trois ans, par exemple, alors qu'elle convoitait un siège à l'assemblée de Strasbourg, Michèle Alliot-Marie s'était indignée de l'existence d'une directive censée « empêcher les enfants de moins de dix-huit ans de grimper sur les escabeaux
». Or, comme l'avait souligné à l'époque Jean Quatremer, animateur des Coulisses de Bruxelles, il s'agissait en fait d'une initiative nationale. Le décret établi à cet effet faisait bien allusion à une directive européenne, mais celle-ci visait simplement à protéger les jeunes gens des « risques d'effondrement
». C'est pourquoi, selon notre confrère, « dans cette affaire, c'est la folie réglementaire hexagonale qui a atteint de nouveaux sommets
».
François Fillon s'engage
Ce cas est-il isolé ? Dans son programme échafaudé pour l'élection présidentielle, Rama Yade avait proposé de « faire un audit indépendant sur l'application française des normes européennes trop souvent surinterprétées
». François Fillon n'est pas en reste. Lundi dernier, 3 avril 2017, sur RMC, il a pris un engagement à ce sujet : « j'abrogerai toutes les surtranspositions de normes européennes
», a-t-il déclaré au micro de Jean-Jacques Bourdin. Il s'agirait notamment d'épargner aux agriculteurs français des contraintes qui ne pèsent pas sur leurs homologues étrangers. Au risque de minimiser les exigences protégeant l'environnement ? « Les normes doivent être négociées pour l'ensemble du marché européen, sinon nos agriculteurs vont mourir de faim
», a répondu François Fillon.
« Je veux même qu'on introduise dans la loi française un dispositif pour qu'on s'interdise de surtransposer les lois européennes
», a-t-il poursuivi. Peut-être pourra-t-il s'inspirer des travaux du Sénat, qui vient de se livrer à une « étude de législation comparé
». En Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni et en Suède, des dispositions encadrent la transposition des directives européennes, comme l'explique le rapporteur Jean Bizet. Cela afin de parer aux excès de zèle… Un exemple à suivre ?
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16 février 2017
Petite mise au point.
« Croire que l'on peut réformer une bureaucratie de la taille de l'UE, c'est de l'ordre de la croyance religieuse
», rapportait dernièrement Le Salon beige.
Mais qu'en est-il des chiffres ?
Les institutions de l'Union européenne emploient apparemment quelque 56 000 fonctionnaires et agents assimilés. À peu près autant que la seule ville de Paris, où travaillent plus de 50 000 agents. Quant à la fonction publique d'État, elle comptait 2,4 millions de collaborateurs fin 2014, selon les sources citées par Wikipédia.
Si la taille de la bureaucratie européenne la rend irréformable, que dire alors de celle de la République française ?
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8 février 2017
La monnaie unique constitue « un élément de puissance
» selon Christian de Boissieu.
À l'origine de l'Union économique et monétaire, le traité de Maastricht a été signé il y a vingt-cinq ans, le 7 février 1992. À l'occasion de cet anniversaire, une émission des Décodeurs de l'éco vient d'être consacrée à l'euro sur BFM Business.
Un commentaire de Christian de Boissieu a plus particulièrement retenu notre attention : « dans les vingt ans qu ont précédé l'arrivée de l'euro
», a-t-il rappelé au micro de Fabrice Lundy, « nous avions le Système monétaire européen
». Or, s'est-il demandé, « que voulait dire la souveraineté monétaire nationale dans un contexte où le Deutsche Mark était de fait la monnaie principale de l'Europe
» ?
Christian de Boissieu « distingue la souveraineté réelle et l'illusion de la souveraineté
». Selon lui, « le passage à l'euro nous a redonné de la souveraineté en ce sens que la France est autour de la table à travers le gouverneur de la banque centrale
» – tandis qu'auparavant nous subissions « la politique monétaire allemande comme la principale externalité de notre politique économique
».
Autrement dit, de son point de vue, « l'euro est un élément de puissance ». À méditer !
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20 juillet 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
L'Europe communautaire et sa politique commerciale n'ont pas la cote.
Sans les remettre radicalement en cause, le Gouvernement en tient compte
et infléchit son discours.
Le référendum en faveur du Brexit annonce-t-il le détricotage de l'Union
européenne (UE) ? Dans l'immédiat, tenant compte de la défiance
qu'elle inspire, le Gouvernement français s'est manifestement décidé à
infléchir son discours, sinon sa politique. « Quand l'Europe n'est
pas le bon niveau de décision, alors elle doit s'effacer, et laisser les
États décider
», a ainsi déclaré Manuel Valls, devant quelque
deux cents militants socialistes réunis à Belleville-sur-Mer le
26 juin, comme
le rapporte Euractiv. Dans ce contexte, la politique
commerciale, censée relever de la compétence exclusive de l'UE, s'avère
particulièrement exposée aux critiques. Sans doute la hantise des poulets
américains traités au chlore n'aura-t-elle rien arrangé... Au point où en
sont les discussions, « il ne peut pas y avoir d'accord de traité
transatlantique
», a même prévenu le Premier ministre.
Accord avec le Canada
Un "Accord économique et commercial global" (AECG ou CETA) n'en a pas
moins été conclu dernièrement avec le Canada. Sa version définitive a été
validé le 13 mai par le Conseil européen des chefs d'État ou de
gouvernement, plus de neuf ans après l'ouverture des discussions. Paris
a salué « un accord ambitieux, équilibré et mutuellement
bénéfique
». D'autant que « le Gouvernement de Justin
Trudeau s'est rallié à la proposition européenne de Cour de justice des
investissements
». « Porté par la France, ce nouveau
dispositif rompt définitivement avec l'ancien système d'arbitrage privé
»,
s'est félicité le Quai d'Orsay. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du
Commerce extérieur, de la promotion du Tourisme et des Français de
l'étranger, en a fait la promotion devant ses homologues du G20 le
10 juillet ; ce dispositif aurait « vocation, à terme, à
devenir une cour multilatérale des investissements
», explique
le ministère des Affaires étrangères.
La mixité controversée
Chacun des États membres de l'Union européenne devra ratifier l'accord
conclu avec le Canada. Pourtant, « sur le plan juridique, seule
l'UE est compétente sur les domaines couverts par l'accord CETA
»,
si
l'on en croit la Suédoise Cécilia Malmström, commissaire européen au
Commerce. Bruxelles se serait résigné à le considérer comme un accord
"mixte" sous la pression de Paris et Berlin. C'est d'autant plus
remarquable que l'accord d'association avec l'UKraine s'était heurté, en
avril dernier, à l'écueil d'un référendum consultatif organisé aux
Pays-Bas... « Si nous ne sommes pas capables de ratifier l'AECG, à
l'avenir, avec qui pourrons-nous négocier ?
», s'inquiète
un fonctionnaire européen, cité
par Les Échos ; « ce serait la fin
de la politique commerciale unique
», prévient-il. « Ce
qui se joue, c'est le maintien de la compétence de la Commission en
matière de commerce
», confirme la Néerlandaise Marietje
Schaake, député au Parlement européen ; or, poursuit-elle, « si
cela lui échappait, chaque pays européen serait amené à négocier des
accords commerciaux de son côté et c'en serait alors fini du marché
commun
». Lequel constitue le principal pilier de l'Union
européenne...
De toute façon, « la France s'était engagée à ce que le Parlement
ait le dernier mot
», a
rappelé Matthias Fekl. « Les parlementaires français auront
donc à se prononcer par un vote sur la ratification ou non du CETA
»,
s'est-il félicité. De son point de vue, « c'est une question de
principe essentielle pour assurer l'adhésion des citoyens européens aux
politiques commerciales conduites en leur nom
». Le cas
échéant, pourquoi s'abrite-il encore une fois derrière Bruxelles ?
Rien n'interdirait au Gouvernement de solliciter l'avis du Parlement à
l'approche des réunions du Conseil des ministre de l'UE, où les textes
européens sont soumis à son approbation ; au Danemark et en Finlande,
par exemple, il en a même l'obligation ! Quoi qu'il en soit, force
est de le constater : sous la pression populiste, on dirait bien que
l'Europe communautaire recule à petits pas.
NB – Le Parlement français n'est pas le seul à tenter de faire entendre
sa voix au niveau européen. Dans le cadre du débat sur le travail détaché,
les Parlements de onze États (Danemark, Bulgarie, Hongrie,
Croatie, République tchèque, Pologne, Estonie, Roumanie, Lituanie,
Lettonie et Slovaquie) ont adressé un "carton jaune" à la Commission. Une
première depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Comme
le rappelle Euractiv, « cette procédure,
instaurée par le traité de Lisbonne, permet aux parlements d'un
pays de contester la compétence de l'UE sur un projet législatif
européen
». Cependant, dans le cas présent, il s'agit de
défendre une position vraisemblablement opposée à celle de Paris.
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6 juillet 2016
Article publié dans L'Action Française 2000
Coopération franco-britannique, défense européenne, Alliance
atlantique : aperçu des perspectives ouvertes par le vote du
23 juin 2016 en faveur du Brexit.
Le 24 juin 2016, alors que venait d'être annoncée l'issue du
référendum en faveur du Brexit, le
président de la République a promis que Paris serait « à
l'initiative pour que l'Europe se concentre sur l'essentiel
» –
à savoir, tout d'abord, « la sécurité et la défense de notre
continent
». Or, si le Royaume-Uni quitte effectivement l'Union
européenne (UE), « la France
[...] continuera à travailler
avec ce grand pays
», y compris en cette matière, où « nos
relations étroites
[...] seront préservées
», a assuré
François Hollande.
Gare aux punitions
« Qu'ils soient dans ou en dehors de l'UE, les Britanniques
restent à échéance visible nos partenaires les plus crédibles et les
plus sérieux en matière de défense sur le continent européen
»,
confirme Pierre Razoux, dans
une note de l'Irsem (Institut de recherche stratégique de l'École
militaire). « Nous partageons des intérêts similaires (vision
mondiale, siège permanent au Conseil de sécurité, détention de l'arme
nucléaire, nombreux territoires d'outre-mer à protéger, intérêts
géostratégiques largement convergents) que le Brexit ne modifiera pas
»,
explique-t-il. « Sur le plan industriel
», précise-t-il,
« nous sommes engagés dans des projets structurants en cours de
développement (missile antinavire léger, système de combat aérien futur)
qui restent strictement bilatéraux
». Par conséquent,
prévient-il, « il est crucial que la France continue de traiter le
Royaume-Uni avec respect, de manière sereine et dépassionnée, sans
l'esprit de "punition" que certains pourraient être tentés
d'instrumentaliser
».
Ce partenariat s'appuie sur les accords de Lancaster House signés en
2010. Lesquels sont « une façon de "faire l'Europe sans l'Union
européenne", pour reprendre les propos de l'ambassadrice de France en
Grande-Bretagne
», citée par Florent de Saint-Victor dans
un entretien au Marin. En fait, c'est une façon parmi
beaucoup d'autres... Londres participe également à l'Occar (Organisation
conjointe de coopération en matière d'armement), par exemple, sous l'égide
de laquelle a été développé l'Airbus A400M. En revanche, à la différence
de Paris, il est resté en marge du Commandement européen du transport
aérien (EATC). Force est de le constater : "l'Europe des États" chère
aux souverainistes existe d'ores et déjà. En effet, ces structures-là sont
indépendantes de l'UE et de sa Politique de sécurité et de défense commune
(PSDC), à laquelle la contribution du Royaume-Uni s'avère d'ailleurs
modeste, au regard de ses capacités.
Londres préfère l'Otan
« Durant l'opération Eunavfor Atalanta contre la piraterie,
Londres n'a mis à disposition qu'un navire depuis 2008
», souligne
ainsi Nicolas Gros-Verheyde, animateur du blog Bruxelles 2.
« Et ce pendant quelques mois à peine
»,
précise-t-il, « soit à peine plus que les... Ukrainiens
» ;
« pendant ce temps
», poursuit-il, « les
Luxembourgeois mettaient à disposition deux avions de patrouille
maritime durant plusieurs années
». De fait, observe-t-il,
« le Royaume-Uni préférait mettre ses navires à disposition de
l'Otan ou des Américains
». Étonnement, Pierre Razoux n'en estime
pas moins que la perspective d'un Brexit « laisse présager la
démonétisation
» de la PSDC. Pourtant, Londres était
régulièrement accusé d'en freiner le développement, s'opposant à la
création d'un QG militaire de l'Union, ainsi qu'à l'accroissement du
budget de l'Agence européenne de défense (AED). Selon le collaborateur de
l'Irsem, « si les Britanniques ne peuvent plus jouer au sein de
l'UE, certains d'entre eux pourraient être tentés de torpiller la PSDC
et de convaincre leurs anciens partenaires de l'inutilité de cet outil
dont ils ne font plus partie
». Cependant, souligne Nicolas
Gros-Verheyde, « un départ du Royaume-Uni n'empêcherait pas qu'il
puisse continuer à contribuer, de manière extérieure, aux opérations
militaires européennes, comme le font aujourd'hui nombre de pays tiers,
de la Géorgie à la Colombie, en passant par la Suisse, la Norvège, la
Serbie ou les États-Unis
».
Quoi qu'il en soit, « la France aurait tout à gagner à se
présenter comme l'intermédiaire naturel entre le Royaume-Uni et l'UE
»,
selon Pierre Razoux. Ce dernier entrevoit également « une
opportunité de coopération supplémentaire entre l'Allemagne et la France
»
au sein de l'Alliance atlantique. Dans quelle mesure celle-ci serait-elle
affectée par un Brexit ? Les avis sont partagés. Un analyste russe, cité
par le Courrier international, anticipe « le
renforcement du rôle de l'Otan, comme "dernière structure unifiant
l'Europe"
» ; si bien que le Brexit contribuerait « non
pas à un infléchissement du rôle des États-Unis en Europe, mais au
contraire à son renforcement
». À l'inverse, sur
Royal Artillerie, Catoneo annonce que « nous
gagnerons en autonomie par rapport aux États-Unis
».
Nouveaux équilibres
La donne serait davantage bouleversée si le Brexit s'accompagnait d'un
éclatement du Royaume-Uni. Celui-ci apparaît « menacé de
déclassement à la fois économique et stratégique avec l'indépendance
plausible de l'Écosse
», selon Pierre Razoux. Dans l'immédiat,
les spéculations vont bon train quant aux nouveaux équilibres
géopolitiques qui pourraient se dessiner à l'occasion du Brexit. Le vote
"leave" a été « accueilli très favorablement par la Russie, la
Turquie et la Chine, et de manière dubitative par les États-Unis
»,
croit savoir Pierre Razoux. « Le retrait britannique change les
termes du processus décisionnel (modifiant la minorité de blocage),
modifie les équilibres au détriment de la sensibilité libérale, et
laisse Paris et Berlin dans un inconfortable face à face
»,
analyse Frédéric Charillon dans
The Conversation. « Ceux qui se réjouissent
aujourd'hui de la sortie annoncée du Royaume-Uni pourraient être demain
les premiers à dénoncer les ambitions géopolitiques et militaires d'une
Allemagne décomplexée
», s'inquiète même Pierre Razoux. « Si
les Britanniques n'étaient pas favorables à une politique étrangère
commune digne de ce nom, la contribution du Foreign and Commonwealth
Office à la diplomatie européenne renforçait considérablement l'analyse
et la crédibilité de celle-ci
», affirme encore celui-là. À ce
propos, les chefs d'État ou de gouvernement de l'UE viennent d'adopter le
28 juin une nouvelle stratégie pour la politique extérieure et de
sécurité. Y compris David Cameron donc. Brexit ou pas, l'Europe continue.
Sous de multiples formes.
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