L'école d'un nouveau genre

7 octobre 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

L'idéologie du genre pénètre peu à peu dans les établissements scolaires. Les conclusions d'une mission officielle sur les « discriminations à l'École » confirment tout l'intérêt que lui portent les élites républicaines. Aperçu.

Parmi les priorités de l'Éducation nationale figurent « la prévention et la lutte contre la violence et les discriminations ». Soucieuse, peut-être, de donner quelque gage aux ligues de vertu, la Rue de Grenelle avait sollicité la direction générale de l'Enseignement scolaire au printemps 2009 afin d'appréhender, plus particulièrement, les « discriminations à l'École ». Coordonnée par Mme Anne Rebeyrol, la mission créée à cet effet a présenté ses conclusions le 22 septembre.

De fausses accusations

Synthétisant des témoignages, ce travail « n'est pas étayé scientifiquement et ne saurait représenter une réalité [...] confirmée par la rigueur de l'enquête sociologique », préviennent les rapporteurs. Lesquels prennent le risque de froisser les chantres de l'antiracisme le plus primaire : tandis que « les enfants d'immigrés ne semblent souffrir ni de discrimination en matière d'orientation, ni en matière d'évaluation », ils soulignent que « les personnels de l'Éducation nationale [...] se trouvent parfois désarmés face à des accusations de "racisme" souvent infondées, mais qui sont utilisées pour justifier, par exemple, une mauvaise note à un devoir ».

Selon leur constat, « intervenir contre l'homophobie en milieu scolaire est le plus souvent assimilé à un acte de prosélytisme, ce qui rend l'action difficile et la communauté scolaire frileuse ». Cependant, « les associations impliquées dans la lutte contre les LGBT-phobies [sic] s'accordent à reconnaître que le ministère a porté une attention toute particulière à la question, plus précisément depuis 2008 ». Ce faisant, des réponses douteuses seraient apportées à un malaise bien réel : « Si, chez les 12-25 ans, les sujets homo, bi ou transsexuels représentent 6 % de la population générale masculine, ils constituent 50 % de l'ensemble des garçons décédés par suicide pour la même tranche d'âge. » « Le sentiment de honte et de mésestime de soi de nombreux adolescents et jeunes adultes homosexuels vient du fait, selon les témoignages, que l'institution scolaire ne leur a jamais présenté l'homosexualité comme une possible orientation sexuelle parmi d'autres. » Mais l'homosexualité n'est-elle pas condamnée, quoi qu'il arrive, à une certaine marginalité ?

Déconstruction

Condamnant le « sexisme », les rapporteurs stigmatisent « le stéréotype dominant » qui « consiste à penser que la différence des sexes induit des aptitudes et des intérêts différents, perçus comme étant l'expression de différences naturelles ». La testostérone serait donc étrangère au caractère « sexué » de la violence scolaire : « 77 % des violences envers autrui ont pour auteur un ou des garçons, contre 18 % par une ou plusieurs filles. La violence des élèves est majoritairement portée contre des personnes du même sexe. Cependant, comme les garçons sont beaucoup plus impliqués que les filles dans les phénomènes de violence, ils restent majoritaires parmi les agresseurs de filles et surtout des personnels féminins : les garçons sont ainsi à l'origine de 54 % des violences commises envers les filles et de 71 % des agressions faites aux femmes travaillant dans le secondaire public. » Serait en cause le « parcours de virilisation des petits garçons et de féminisation des petites filles qui, de manière plus ou moins consciente, innerve l'éducation, forme les représentations, construit les rapports sexistes et définit les contraintes du genre ». Sans craindre de déstabiliser les enfants, les rapporteurs assignent aux établissements scolaires une mission de « déconstruction des préjugés ». Ainsi l'École devrait-elle encourager les jeunes filles « à poursuivre leurs trajectoires et à ne pas minorer leurs ambitions » alors que « l'anticipation d'un certain fonctionnement de la famille les pousse à des choix de compromis ».

Les rapporteurs s'inquiètent, enfin, du développement d'« une culture machiste de jeunes garçons qui ont tendance à occuper l'espace public ». Tandis qu'ils dénoncent « diverses formes de replis communautaires », on devine, dans leur collimateur, des adolescents issus de l'immigration. « L'honneur des garçons de la cité leur commande de frapper leurs sœurs quand l'honneur français interdit à un homme de lever la main sur une femme », a résumé Cyril Bennasar, commentant sur Causeur, le 29 septembre, un documentaire diffusé le soir-même sur Arte. Hélas, loin de réduire « ce décalage des civilisations », l'apologie de la "diversité" contribuera vraisemblablement à l'entretenir.

Rengaine féministe

23 septembre 2010

Une communication officielle confirme la prégnance du gender sur les étires européennes. Aperçu.

La Commission européenne a présenté mardi dernier, 21 septembre 2010, sa « stratégie pour l'égalité entre les femmes et les hommes ». On y retrouve les poncifs du féminisme bruxellois, auquel des considérations économiques servent toujours d'alibi : « Pour réaliser les objectifs de la stratégie Europe 2020, à savoir une croissance intelligente, durable et inclusive, il est impératif de faire appel plus largement et plus efficacement au potentiel des femmes et à leur réservoir de talents. » Cela permettrait de « contrebalancer les effets de l'amenuisement de la population en âge de travailler », d'autant que « les mesures de conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée » auraient « des effets positifs sur la fécondité ». Mais bien qu'elle prétende stimuler l'activité, la Commission entend supprimer « les disparités encore présentes dans les droits aux congés pour raisons familiales, notamment les congés de paternité et les congés des personnes aidantes ».

« La rigidité des rôles attribués aux femmes et aux hommes » est fustigée au motif qu'elle « peut entraver leurs choix et restreindre le potentiel de chacun ». Or, il serait paraît-il « dans l'intérêt de tous d'offrir aux femmes aussi bien qu'aux hommes de véritables choix à chaque étape de leur vie ». D'où la nécessité, selon Bruxelles, de mettre les hommes aux fourneaux – avant d'offrir des poupées aux petits garçons et de couper les cheveux de leurs sœurs : « Favoriser une redéfinition des rôles non discriminatoire dans tous les domaines de la vie, comme l'éducation, les choix de carrière, l'emploi ou le sport, est essentiel pour parvenir à l'égalité entre les sexes. »

On tremble en découvrant combien l'idéologie du genre imprègne les élites européennes, qui revendiquent à demi-mot la volonté de faire le bonheur des individus : «  beaucoup de citoyens européens ont vu leur vie prendre un tour meilleur grâce aux actions en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes menées par l'Union européenne », affirme-t-on très sérieusement à Bruxelles.

Les ressortissants des États membres ne sont pas les seuls concernés : les mêmes préoccupations sont censées influencer les négociations d'adhésion et la politique de voisinage. « En outre, l'Union européenne coopérera activement avec les organisations internationales travaillant à l'égalité comme l'OIT, l'OCDE, l'ONU et l'Union africaine, pour produire des synergies et favoriser l'émancipation des femmes, ainsi qu'avec la nouvelle entité "Genre" des Nations Unies, ONU Femmes, et soutiendra la participation de la société civile, le renforcement des capacités et la promotion de l'égalité entre les sexes et de l'émancipation des femmes. » La passion égalitaire des enceintes multilatérales s'expliquerait-elle par leur manque de légitimité politique ? Quoi qu'il en soit, nous sommes prévenus : « La Commission fera de l'intégration des questions d'égalité entre les hommes et les femmes un rouage à part entière de l'élaboration de ses politiques. »

NB – Forte de sa nouvelle notoriété, Viviane Reding n'a pas exclu de promouvoir l'instauration de quotas censés « améliorer la représentation des femmes aux postes à responsabilité » : « Vu l'absence de progrès dans ce domaine, nous pourrions à l'avenir envisager de prendre des initiatives au niveau européen », a-t-elle déclaré. « J'ai l'intention de rencontrer durant le printemps 2011 les directeurs de grandes entreprises européennes cotées en bourse, pour examiner la situation et envisager les possibilités d'une autorégulation énergique. En fonction des résultats de ce dialogue avec les entreprises, j'évaluerai la nécessité de lancer d'autres initiatives en 2012. »

La presse féminine à rebours

19 avril 2010

Curieux de découvrir un nouveau titre lancé par Lagardère, nous pensions y trouver des tests et autres "conseils beauté" dont seules les illustrations nous auraient fourni un semblant d'intérêt. Or, nous y avons perçu comme un écho aux communiqués européens que nous lisons régulièrement, en dépit de leur romantisme notoire, avec autrement plus de passion...

« On a testé les cours de féminité », annonçait Be en couverture de son quatrième numéro. Tandis que Bruxelles et Madrid (entre autres) vilipendent les « stéréotypes sexistes », le magazine croit déceler à rebours « la tendance du moment » : « les femmes libérées [sic] prennent des cours pour réviser les classiques que le féminisme leur a fait oublier », apprend-on en ouverture d'un petit dossier de six pages. Au programme : cuisine, tricot et... strip-tease. Ou inscription à la Talons Academy : « 15 euros pour "apprendre à se sentir confiante et sexy chaussée en talons", c'est le concept de ce cours lancé par deux copines. Et ça marche. »

« Des années de féminisme pour en arriver là. Cette pauvre Simone de Beauvoir doit se retourner dans sa tombe », déplore, avec ironie, Françoise Marmouyet. Son enquête relève, plus ou moins, du second degré, mais cela tranche, tout de même, avec les discours officiels – émanant tout particulièrement des enceintes multilatérales, telles l'UE et l'ONU – relayés la presse politique – tel Le Figaro stigmatisant le 2 février dernier, sous la plume d'Agnès Leclair, « des adolescents fidèles aux clichés hommes-femmes ».

« À trente ans, j'ai eu envie de devenir une vraie femme », proclame un témoin interrogé par Be. À l'avenir, le magazine devra se garder de donner la parole aux tenants d'une mentalité si rétrograde. Sans quoi sa rédaction se retrouvera prochainement dans le collimateur de la Halde.

Féminisme au Conseil

8 mars 2010

Le Conseil prétend éradiquer la violence à l'égard des femmes dans l'Union européenne. Aperçu de ses conclusions.

En ce lundi 8 mars, décrété journée internationale de la femme par l'Organisation des Nations unies, le Conseil a adopté des conclusions « concernant l'éradication de la violence à l'égard des femmes dans l'Union européenne ». Ce document de sept pages s'inscrit dans la continuité de l'abondante littérature consacrée à l'égalité hommes-femmes par les institutions européennes, dont les ministres énumèrent moult références.

On relève quelques orientations concrètes : « promouvoir l'introduction d'un numéro de téléphone commun et gratuit [...] pour fournir des informations précises et actualisées et une assistance aux femmes victimes de la violence » ; « renforcer la protection des femmes victimes de la violence lorsqu'elles exercent leur droit à la libre circulation au sein de l'Union européenne » (des négociations sont en cours) ; « prendre les premières mesures en vue de la création d'un observatoire européen de la violence envers les femmes, en s'appuyant sur les structures institutionnelles existantes » (tel l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes, fraîchement installé à Vilnius, en Lituanie).

Études et statistiques insuffisantes

« On ne dispose toujours pas de données à jour, fiables, précises et comparables, tant au niveau national qu'au niveau de l'UE », déplore le Conseil, « et le phénomène de la violence à l'égard des femmes n'a toujours pas fait l'objet d'une étude approfondie au niveau de l'UE, ce qui limite la perception que l'on peut avoir de son ampleur véritable et empêche le développement de stratégies et de mesures au niveau national ainsi qu'une réaction efficace au niveau de l'UE ». En outre, il serait « essentiel d'aborder sur un plan international l'échange de connaissances, de méthodes et de meilleures pratiques au sein de l'UE et avec des pays tiers ayant une certaine expérience de la lutte contre les pratiques traditionnelles préjudiciables (telles que les mutilations génitales féminines) et contre la traite des êtres humains ».

Selon les ministres, « la lutte contre la violence à l'égard des femmes passe par une participation active des hommes, permettant de remettre en cause les idées reçues et les rôles dévolus aux hommes et aux femmes afin de promouvoir des relations basées sur le respect, l'égalité et les valeurs démocratiques ». Aussi invitent-ils la Commission et les États membres à « réaliser des campagnes de sensibilisation, d'éducation et de formation pour lutter contre des normes culturelles discriminatoires et venir à bout des stéréotypes sexistes très répandus et de la stigmatisation sociale qui légitiment et perpétuent la violence à l'égard des femmes ».

Manifestement, le Conseil exclut l'hypothèse selon laquelle la violence masculine serait le « corollaire tragique et inexcusable » de la « dévaluation de la virilité » – thèse qui serait vraisemblablement celle Mme Claude Habib. « Face à la multiplication des viols, au développement des violences conjugales, à la perte du respect dû aux femmes par des hommes déboussolés, qui semblent répondre par la brutalité ou le mépris à l'agression symbolique du féminisme, elle veut croire à un sursaut de cette générosité virile qui est au fond l'essence de la galanterie », rapporte Stéphane Blanchonnet. « Retrouver les voies de l'apaisement, de l'amour et de la confiance entre les hommes et les femmes, c'est d'abord cesser de dénier aux hommes leur rôle de protecteurs naturels, rôle qu'ils souhaitent jouer spontanément à l'égard de leur compagne mais qui est constamment moqué, tourné en dérision, ringardisé (comme tout ce qui rappelle les différences, les inégalités, les traditions) dans le discours médiatique, la fiction télévisuelle ou la publicité. » Ainsi que dans les arcanes européens.

Chronique du féminisme espagnol

4 mars 2010

Madrid continue d'agiter son étendard féministe sur la scène internationale.

« Les droits de la femme et la lutte contre la violence à caractère sexiste » sont « au centre des activités des Nations Unies cette semaine », a annoncé la présidence espagnole du Conseil de l'Union européenne.

Devant la commission de l'ONU sur la condition juridique et sociale de la femme, le ministre espagnol de l'Égalité « a réitéré ce lundi [...], au nom de l'UE, l'engagement des États membres envers la déclaration et la plateforme d'action de Pékin, à l'occasion de son quinzième anniversaire. [...] Mme Aído a de plus affirmé qu'"il est urgent d'entreprendre de nouvelles actions" afin de répondre aux besoins des jeunes filles et des femmes après des conflits armés et a jugé "essentiel" [...] d'élargir l'accès à l'information sur la santé sexuelle et reproductive. » Signalons au passage que l'ONU s'apprête à regrouper, sous la houlette d'une direction commune, ses différentes composantes censées œuvrer en faveur de l'égalité hommes-femmes.

Dès demain, Madrid réaffirmera son volontarisme féministe par la voix de Miguel Lorente, délégué du gouvernement espagnol en charge des questions liées à la violence sexiste. En marge du premier sommet UE-Maroc, celui-ci doit ouvrir un séminaire de deux jours portant sur les sujets suivants : « genre et participation politique à l’échelle locale » ; « questions liées au genre au niveau local au Maroc et en Espagne » ; « perspectives d’intégration de l’égalité des sexes dans les politiques publiques locales ».

Le progressisme vire à droite

4 mars 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Le congé maternité en débat au Parlement européen.

L'UE s'achemine vers l'allongement de la durée minimale du congé de maternité. La Commission européenne avait proposé qu'elle soit portée de quatorze à dix-huit semaines (contre seize en France). Un progrès jugé insuffisant par la commission des Droits de la femme du Parlement européen, qui s'est prononcée le mardi 23 février pour une durée minimale de vingt semaines. Par dix-neuf voix pour, treize contre et une abstention, elle a adopté le rapport sur la santé et la sécurité des travailleuses enceintes rédigé par la Portugaise Edite Estrela, membre du groupe de l'Alliance progressiste des Socialistes et Démocrates (S&D).

En vertu de la directive actuellement en vigueur, les femmes sont déjà tenues de prendre deux semaines de repos, avant ou après l'accouchement. Le projet de révision imposerait six semaines après la naissance de l'enfant, dont l'allaitement se trouverait ainsi facilité. Dans un communiqué, le Parlement européen souligne que « les États membres devraient encourager l'octroi de congé dans cette perspective ». Selon la commission parlementaire, ils devraient également « veiller à ce que les pères soient habilités à prendre un congé de paternité entièrement payé d'au moins deux semaines » (onze jours dans l'Hexagone).

Cela tranche avec le féminisme auquel nous avaient habitués les arcanes européens. Le secrétaire national de l'UMP s'en est ému : selon Philippe Juvin, ces propositions « stigmatisent les femmes dans leur rôle de mère. Ce texte n'est que l'aboutissement d'un lobbying des intégristes de tout crin et ne permettra pas de promouvoir l'émancipation des femmes dans nos sociétés ». « Avec le rapport Estrela, ajoute-t-il, la gauche réenferme la femme dans le modèle opprimant de la maternité exclusive. »

Que la "droite" se rassure : rien n'est encore joué. Le 25 mars, les députés seront appelés à s'exprimer en session plénière. Il faudra ensuite solliciter l'accord du Conseil des ministres, où la Grande-Bretagne affichera vraisemblablement ses réticences. « La directive devrait mettre en place des standards minimum au niveau européen pour la santé et la sécurité des femmes enceintes et ne pas ajouter de coûts supplémentaires sur la feuille de paye pour les entreprises déjà surtaxées et les systèmes de santé nationaux », a indiqué le directeur de la chambre de commerce britannique cité par AP (Euractiv, 26/02/2010).

L'Européenne la plus favorisée en débat à l'Assemblée (4)

24 février 2010

Conclusion de notre feuilleton parlementaire.

La résolution « visant à promouvoir l'harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes » a été adoptée par l'Assemblée nationale le mardi 23 février par 462 voix contre 7 et 2 abstentions. « La représentation nationale s'honore du combat qu'elle mène pour l'égalité entre les hommes et les femmes », a déclaré devant l'hémicycle Mme Nadine Morano, secrétaire d'État en charge de la Famille et de la Solidarité.

Selon les explications de Mme Pascale Crozon, ce texte « prévoit une étude comparative des mesures en vigueur en Europe pour éclairer le législateur. Il invite la présidence espagnole à proposer au niveau européen des directives sur la base des législations qu'elle jugerait les plus protectrices et le gouvernement français à présenter ses projets dans les domaines qui demeurent de compétence nationale. »

N'en déplaise aux démagogues dénonçant un nouvel abandon de souveraineté, ce vote ne présente aucune portée juridique contraignante. En outre, bien que nous ayons mentionné la "clause de l'Européenne la plus favorisée" dans le titre de ce billet, afin de l'inscrire dans la continuité des précédents, les députés n'ont pas appelé ouvertement à son application. Feignant de l'ignorer, la réacopshère n'est pas loin de verser dans la désinformation. D'autant que si la proposition de résolution n'avait pas été modifiée en ce sens, la chambre basse l'aurait vraisemblablement rejetée – imitant alors la commission des Affaires européennes.

Mme Colette Le Moal l'a plus ou ou moins souligné lors des explications de vote : « Nous souhaitons exprimer [...] notre satisfaction quant aux amendements qui ont été adoptés et qui nous permettront de voter cette proposition de résolution. Je retiens, entre autres, ceux de Mme Zimmermann et ses collègues : l'un invite le gouvernement français à présenter, avant le 31 décembre 2010, un rapport sur l'état du droit français en matière d'égalité [et non un projet de loi comme cela était prévu initialement] ; l'autre vise à supprimer, dans le titre de la résolution, la référence à la "clause de l'Européenne la plus favorisée". Nous partageons, en effet, le constat qu'il s'agit d'une "affirmation prématurée" et qu'il importe, avant tout, de s'engager dans un processus d'amélioration et d'harmonisation de la législation existante. »  « Engager sans débat préalable les États membres dans un processus législatif susceptible d'influer l'ensemble de leurs politiques publiques me semblait précipité », a confirmé Mme Marie-Jo Zimmermann.

Tout en récusant les velléités féministes des parlementaires, nous jugeons regrettables les approximations de leurs détracteurs, dont les négligences contribuent à saper la crédibilité d'un discours "alternatif". Ce blog continuera, modestement, de remettre quelques pendules à l'heure.

L'Européenne la plus favorisée en débat à l'Assemblée (3)

21 février 2010

Une proposition de résolution censée promouvoir, à l'origine, la "clause de l'Européenne la plus favorisée" a été débattue à l'Assemblée nationale jeudi dernier, 18 février (1).

« Le gouvernement partage et soutient l'idée [...] de promouvoir une harmonisation par le haut des droits des femmes en Europe », a déclaré Mme Nadine Morano, secrétaire d'État en charge de la Famille et de la Solidarité. « D'ailleurs », a-t-elle précisé, « le gouvernement examine actuellement la compatibilité juridique de cette démarche avec les traités en vigueur. » À ses yeux, cependant, « la démarche induite par la clause proposée soulève quelques questions, et elle ne peut être recevable en l'état ». En effet, « si le principe d'égalité entre les femmes et les hommes est indiscutable » selon elle, « l'appréciation de ce qui constitue ou non un progrès en matière de droits des femmes est susceptible de différer d'un pays à l'autre ».

Selon l'observation du député UMP Guy Geoffroy, « un certain nombre de points a posé problème, comme l'automaticité. Le texte prévoyait "l'alignement" de notre droit national. Tout le monde a considéré que ce terme était inapproprié. » Aussi les parlementaires lui ont-ils substitué la notion d'« harmonisation », et renoncé a réclamer dès maintenant l'application de la clause de l'Européenne la plus favorisée. Le texte amendé s'en trouve édulcoré, justifiant la pique lancée par le socialiste Marcel Rogemont : « À entendre la majorité, a-t-il déclaré, on pourrait finir par comprendre que même pour des causes nobles, même pour des causes qui doivent tous nous rassembler, il ne serait pas question pour les députés de l'UMP de voter avec les socialistes [...] à moins d'émasculer leur proposition, ou plutôt, devrais-je dire, de l'exciser. »

Dans un communiqué, les députés MPF Véronique Besse et Dominique Souchet ont dénoncé une résolution qui « livrerait sans conditions ce qu'il nous reste de souveraineté aux expériences européennes les plus destructrices en matière familiale ». C'est méconnaitre le contenu du texte amendé, et plus encore sa nature. Mme Pascale Crozon l'a rappelé devant l'hémicycle : « Outre le soutien affiché à l'initiative du Royaume d'Espagne, nous invitons – c'est vrai – le gouvernement français à agir, une invitation qui ne saurait en aucun cas "lier les mains" de l'exécutif. Ce serait juridiquement contraire à l'article 34-1 de la Constitution (2) si tel était le cas. Nous nous situons pleinement dans l'esprit du droit de résolution que la réforme constitutionnelle de 2008 a accordé au Parlement, et qui consiste précisément à exprimer des souhaits et à soutenir des orientations. »

Le député PS a interpellé ses collègues en ces termes : « Je vous invite à réfléchir à la dégradation de notre image auprès de nos partenaires, et singulièrement à la dégradation de la crédibilité de la France au cours de la présidence espagnole [...] si nous remettions en cause l'adoption de cette proposition de résolution par la commission des lois. »  « À l'heure où l'Union européenne a manifestement fait de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle l'un de ses chevaux de bataille, il n'est pas pensable que la France n'aille pas dans ce sens et ne participe pas à ce mouvement », a confirmé Marcel Rogemont. Son collègue Jérôme Lambert s'est enthousiasmé : « Aujourd'hui, par ce débat et surtout sa conclusion, si elle est positive, la France va prendre toute sa place, une place digne de son histoire en faveur du droit de l'homme. Avec cette défense aujourd'hui du droit des femmes, c'est la France que nous aimons qui s'exprime, celle qui nous rend fiers d'être Français. »

D'autres héritages pourraient inspirer un pareil sentiment, tel « cet équilibre subtil entre virilité dominante et féminité influente » dont Éric Zemmour fait l'apologie dans Le Premier Sexe...

(1) Les explications de vote et le vote sur l'ensemble de la proposition de résolution auront lieu le mardi 23 février, après les questions au gouvernement.

(2) « Les assemblées peuvent voter des résolutions dans les conditions fixées par la loi organique. Sont irrecevables et ne peuvent être inscrites à l'ordre du jour les propositions de résolution dont le Gouvernement estime que leur adoption ou leur rejet serait de nature à mettre en cause sa responsabilité ou qu'elles contiennent des injonctions à son égard. »

Féminisme à l'Assemblée

18 février 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Une synthèse des deux billets précédents consacrés à la "clause de l'Européenne la plus favorisée" en débat à l'Assemblée nationale.

Une proposition de résolution promouvant la "clause de l'Européenne la plus favorisée" était inscrite à l'ordre du jour de la séance publique de l'Assemblée nationale du jeudi 18 février.  Un texte présenté par des parlementaires issus du groupe SRC (socialiste, radical, citoyen et divers gauche) galvanisés par « une présidence espagnole pleine d'allant » qui multiplie les initiatives en faveur de "l'égalité hommes-femmes", comme le constatent, dans un rapport, Mme Anne Grommerch et Christophe Caresche.

Selon un mécanisme jugé « curieux » par le député UMP Étienne Blanc, le législateur national devrait s'inspirer des législations étrangères "les plus progressistes" – « notion qui, en droit, [le] laisse d'ailleurs perplexe ». Mme Grommerch (UMP) a pointé les difficultés soulevées par l'application d'une clause générale. À ses yeux, « il y a un exemple qui est très concret, c'est celui de l'interruption volontaire de grossesse. Aujourd'hui, en France, l'IVG n'est possible que dans les douze semaines. Or, passer à dix-huit semaines, délai applicable en Suède, supposerait un débat approfondi. Il faut notamment souligner qu'un tel délai [...] pourrait permettre de sélectionner le sexe de l'enfant... »

Le député a appelé ses collègues à « éviter toute prise de position prématurée ». La commission des Affaires européennes a donc rejeté la proposition le mercredi 3 février. Au préalable, son président Pierre Lequiller n'a pas manqué de souligner que ses réserves ne portaient « pas sur l'objectif ni sur l'intention, mais sur le calendrier ». Ce faisant, la droite parlementaire a démontré, une fois de plus, combien elle est soumise à la gauche dans les débats "sociétaux".

Unanimité sur le fond

Une semaine plus tard, cet avis fut contredit par la commission des Lois. « On ne peut à l'évidence pas légiférer à la hâte sur ce sujet », a reconnu le socialiste Jérôme Lambert. Selon lui, cependant, « il s'agit "simplement" [...] de voter une résolution invitant le gouvernement français dans les négociations européennes à venir à soutenir le principe de la clause de l'Européenne la plus favorisée. Qui peut refuser une telle chose ? » Cela ne se discute pas : « Sur le fond du texte lui-même, on ne peut être contre », a confirmé Mme Marie-Jo Zimmermann. « Si nous le rejetions, expliquer notre décision pourrait être délicat », a même averti l'UMP François Vannson.

La chambre basse a manifestement du temps à perdre. Elle n'est pas la seule : un groupe de travail interministériel étudierait l'hypothèse d'un traité entre la Belgique, l'Espagne, la Suède et la France afin d'appliquer la clause de "l'Européenne la plus favorisée" ; ses conclusions sont attendues pour le mois de mars.

L'Européenne la plus favorisée en débat à l'Assemblée (2)

13 février 2010

Mercredi dernier, 10 février, la commission des lois de l'Assemblée nationale a examiné une proposition de résolution rejetée une semaine auparavant par la commission des Affaires européennes.

Présenté par des députés issus du groupe SRC (socialiste, radical, citoyen et divers gauche), ce texte promeut la "clause de l'Européenne la plus favorisée". « Il s'agit d'identifier les dispositions les plus favorables aux femmes dans les États membre de l'Union européenne dans chaque domaine, et de proposer que les États membres alignent leur législation sur celle de l'État membre où elle est la plus favorable aux femmes », a résumé, dans son rapport, Mme Pascale Crozon (PS).

Selon un mécanisme jugé « curieux » par le député UMP Étienne Blanc, le législateur national devrait s'inspirer des législations étrangères "les plus progressistes" – « notion qui, en droit, [le] laisse d'ailleurs perplexe ». En conséquence, « sans porter un jugement sur le fond de la proposition », le parlementaire a exprimé son « opposition radicale » quant à la forme de la proposition.

« Il ne s'agit pas aujourd'hui de décider du contenu de la loi future », a souligné le socialiste Jérôme Lambert. « On ne peut à l'évidence pas légiférer à la hâte sur ce sujet », a-t-il reconnu. « Il s'agit "simplement" – mais la portée symbolique est forte – de voter une résolution invitant le gouvernement français dans les négociations européennes à venir à soutenir le principe de la clause de l'Européenne la plus favorisée. Qui peut refuser une telle chose ? La cause des femmes ne mérite-t-elle pas l'affirmation de la volonté d'une égalité la meilleure possible ? » Cela ne se discute pas : « Sur le fond du texte lui-même, on ne peut être contre », a déclaré Mme Marie-Jo Zimmermann. « Si nous le rejetions, expliquer notre décision pourrait être délicat. », a averti l'UMP François Vannson.

La chambre basse a manifestement du temps à perdre en échange d'inepties. La commission a adopté sans modification l'article unique de la proposition de résolution, inscrite à l'ordre du jour de la séance publique du 18 février prochain.