10 mai 2010
La France offre une promotion à Herman Van Rompuy.
Les politiques ont-ils été contaminés par les
journalistes ? Encouragés par le mimétisme ou l'idéologie, nos
confrères ont souvent promu Herman Van Rompuy « président de
l'Union européenne » – alors qu'il préside seulement le
Conseil européen des chefs d'État ou de gouvernement, dont il convoque
les réunions et anime les débats.
Or, ce glissement sémantique vient d'apparaître dans un
document officiel, vraisemblablement à la faveur d'une erreur de
traduction. En effet, la
déclaration des chefs d'État ou de gouvernement de la zone
euro du 7 mai mentionne l'intervention « du président
européen ». Du moins dans sa version française, car, dans
la langue de Shakespeare, il est bien question, au même
paragraphe, du « président du Conseil européen ».
On s'étonne que ce détail ait échappé à la sagacité des
juristes et autres diplomates francophones. Gageons que leur négligence
ne sera pas du goût de MM. Barroso et Zapatero,
candidats eux aussi à la "présidence" de l'UE.
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10 mai 2010
La mise en place du Service européen pour l'Action extérieure
(SEAE) alimente les rivalités institutionnelles. La commission des
Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées de la chambre
haute n'y est pas insensible.
En son nom, Josselin de Rohan a présenté une
proposition de résolution enregistrée à la présidence du
Sénat le 5 mai 2010.
Le texte rappelle que la Politique étrangère et de sécurité
commune (PESC) « demeure une politique de nature
intergouvernementale ». Il stipule que « le Parlement
européen ne dispose d'aucune légitimité pour exercer un contrôle
d'opportunité sur l'action du Service européen pour l'action extérieure
et pour se prononcer sur la désignation des chefs de délégation ou des
représentants spéciaux de l'Union européenne ». En
conséquence, il affirme que le SEAE « doit être un organe sui generis
de l'Union européenne, équidistant de la Commission européenne et du
Conseil, et disposant d'une complète autonomie en matière budgétaire et
en termes de gestion des ressources humaines ».
Naturellement, la proposition de résolution juge
« indispensable que les parlements nationaux puissent
entretenir des relations étroites » avec le Service. Elle
affirme, en outre, que la place du français doit y être garantie.
Reste à soumettre ce texte à l'ensemble des sénateurs. En
espérant que ceux-ci remonteront les bretelles de leurs collègues
siégeant au Parlement européen, à défaut d'appeler à sa dissolution.
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7 mai 2010
Du droit des femmes à porter un pantalon.
Dix députés (1), radicaux de gauche et apparentés,
prétendent honorer l'objectif de « délégifération »
que le le président de la République aurait assigné au Parlement. À cet
effet, ils ont déposé le 1er avril une
proposition de loi censée « mettre en évidence toute
la portée concrète de cette notion innovante ».
Ainsi ont-ils identifié deux chantiers prioritaires :
d'une part, la suppression de références obsolètes à la peine de mort
demeurant dans le Code civil ; d'autre part, l'abrogation des
dispositions de la loi du 26 brumaire an VIII
précisant que « toute femme désirant s'habiller en homme doit
se présenter à la préfecture de Police pour en obtenir
l'autorisation » – dispositions modifiées par deux circulaires
de 1892 et 1909 autorisant le port du pantalon « si la femme
tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d'un
cheval ».
(1) Gérard Charasse, Chantal Berthelot, Paul Giacobbi, Annick
Girardin, Joël Giraud, Albert Likuvalu, Jeanny Marc, Dominique Orliac,
Sylvia Pinel et Chantal Robin-Rodrigo,
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6 mai 2010
Article publié dans L'Action Française 2000
Le création du Service européen pour l'Action extérieure
suscite des tensions au cœur du triangle institutionnel européen. Après
s'être accordés entre eux, les gouvernements doivent compter avec le
Parlement et la Commission...
Réunis en Conseil des ministres le 26 avril, les
Vingt-sept ont dégagé une « orientation politique »
sur un projet de décision instituant le Service européen pour l'Action
extérieure (SEAE) – une innovation majeure du traité de Lisbonne.
La "parité" pour les ambassadeurs
« Cela n'a pas été facile », selon le
témoignage du ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Ángel
Moratinos, qui présidait la réunion. Celui-ci a confirmé la volonté des
gouvernements de prendre en compte les équilibres géographiques, mais
aussi l'égalité des sexes dans la nomination des chefs de délégation de
l'UE. Cela rendra les désignations d'autant plus complexes... Les
ministres sont également convenus d'un compromis, vraisemblablement
entre "grands" et "petits" États, « permettant aux délégations
communautaires d'offrir un service consulaire dans certaines limites et
dans la mesure où ces services ne supposent pas de frais budgétaires
supplémentaires ».
Cet accord informel ouvre la voie à la conclusion d'un
arrangement entre les principales institutions de l'UE. En effet,
l'organisation et le fonctionnement du SEAE sont fixées par le Conseil
des ministres, qui statue sur proposition du Haut Représentant après
consultation du Parlement européen et approbation de la Commission.
Confrontée aux foudres des députés, Mme Catherine Ashton avait
révisé son projet d'organigramme, en substituant au secrétaire général
trois responsables placés, sous son autorité, sur un pied d'égalité.
Cela suffira-t-il à satisfaire les parlementaires, qui partagent
désormais avec le Conseil le pouvoir budgétaire ?
Les présidents des principaux groupes politiques ont confirmé
qu'ils conditionneraient l'approbation du budget du Service et de sa
dotation en personnel à celle des projets de composition définitifs.
Parmi les instigateurs de ce chantage figure l'UMP Joseph Daul. Preuve
que, dans le cas présent, le tropisme fédéraliste inhérent au statut de
parlementaire européen éclipse les allégeances partisanes.
« Le Parlement tient particulièrement à ce que le SEAE soit un
instrument entièrement européen et non un instrument
intergouvernemental », souligne un communiqué.
Utopie fédéraliste
Le député Alain Lamassoure, président de la commission des
budgets, ne veut pas d'un vingt-huitième service diplomatique
s'ajoutant aux services des États membres. « Notre objectif
doit être de remplacer les vingt-sept autres services pour, d'ici
vingt-trente ans, n'avoir qu'un seul service extérieur »,
a-t-il proclamé au cours d'un débat parlementaire.
Dans un entretien accordé à la fondation Robert Schuman
(03/05/2010), Philippe Étienne, représentant permanent de la France
auprès de l'Union européenne, dessine aux antipodes les contours du
SEAE : « Il ne se substituera pas aux diplomaties
nationales mais prendra en charge les tâches de la présidence tournante
au titre de la Politique étrangère et de sécurité commune et permettra
de développer une culture diplomatique commune en rassemblant en son
sein des personnels venus des institutions européennes et des
administrations nationales. » Michel Foucher, directeur de la
formation à l'IHEDN, critique ouvertement l'attitude des
parlementaires : « Ceci risque de retarder l'entrée
en fonction du Service, qui ne devrait sans doute pas arriver avant
l'automne », a-t-il confié à notre confrère Marek Kubista (Euractiv,
28/04/2010) « Le Parlement commet une erreur en estimant que
des politiques communes pourraient être bâties en court-circuitant les
États. C'est l'inverse : il faut faire converger des
politiques nationales pour édifier des lignes de force d'intérêt
collectif européen. [...] Je ne crois pas du tout qu'à Pékin,
Washington ou Moscou, la vieille diplomatie soit complètement obsolète,
bien au contraire. Les positions communes européennes ne peuvent
exister que si les États, et particulièrement les grands, l'élaborent à
partir de leurs positions nationales. »
Barroso en embuscade
Dans les coulisses, les gouvernements devront compter,
également, avec la Commission. C'est avec Catherine Day, son secrétaire
général, que les discussions auraient été les plus difficiles jusqu'à
maintenant, si l'on en croit un diplomate cité par Nicolas
Gros-Verheyde (Bruxelles 2, 30/04/2010).
José Manuel Barroso entendrait se réserver certaines
prérogatives. D'ailleurs, il manifesterait peu d'égards envers le Haut
Représentant, par ailleurs vice-président de la Commission, et placé en
tant que tel sous son autorité. « Ce sentiment se reflète dans
le partage des tâches au quotidien », révèle notre
confrère : « À la Haute Représentante [sic] de
recevoir les ministres des affaires étrangères, au président de la
Commission d'entretenir des relations avec les Premiers ministres ou
présidents. Une sorte de répartition naturelle qui n'avait pas cours
avec le premier Haut Représentant, Javier Solana ayant pris l'habitude
de recevoir qui il voulait... et, surtout, de téléphoner à qui il
voulait. » Dans ce contexte, le Daily Telegraph annonce la
démission prochaine de Mme Ashton. De fait, tiraillée entre
plusieurs institutions, elles se trouve dans une position délicate,
plongée au cœur de rivalités dont les différends idéologiques ne sont
visiblement qu'un paravent.
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6 mai 2010
Article publié dans L'Action Française 2000
Par-delà la sémantique...
À l'issue d'une rencontre avec le président de la Commission
européenne, le chef de l'État a proclamé son accord avec Jose
Manuel Barroso sur « l'importance d'une stratégie économique
européenne ambitieuse basée sur un véritable gouvernement
économique ». L'expression se substitue peu à peu à celle de
« gouvernance économique » dans la bouche des élites
européennes – même en Allemagne ! Sans doute pour flatter des
opinions publiques appréciant sa connotation plus politique, tout
particulièrement en cette période de crise.
S'inspirant, plus ou moins, d'une proposition formulée par
Édouard Balladur en février dernier, le Finlandais Olli Rehn,
commissaire européen en charge des Affaires économiques et monétaires,
a envisagé de « soumettre les projets budgétaires nationaux à
un mécanisme de révision par les pairs », selon le résumé de
Madrid. Yves Daoudal, par exemple, a dénoncé « une nouvelle
trouvaille de la dictature européenne ». Après avoir présidé
les travaux menés avec ses homologues le 17 avril, le ministre
espagnol de l'Économie, Mme Elena Salgado, a assuré que Bruxelles ne se
substituerait pas aux autorités nationales : « Il est
hors de question [...] de voter (les budgets) dans des organes
différents des parlements nationaux », a-t-elle déclaré. Selon
M. Rehn, il s'agirait en fait de créer un « semestre
européen pour la conception de politiques économiques », entre
janvier et juillet. Ainsi Bruxelles serait-il informé dès le printemps,
pour l'année suivante, des grandes lignes des budgets de chaque État
membre.
Quoi qu'il en soit, en l'absence d'une convergence politique,
alors que Paris privilégie la consommation tandis que Berlin promeut
ses exportations, on voit mal comment pourrait émerger, à court terme,
un véritable "gouvernement" économique. Mais peut-être quelques
artifices européens aideront-ils les gouvernements (évidemment
nationaux, c'est presque un pléonasme...) à s'émanciper de la
pression des urnes : ainsi pourraient-ils imputer à Bruxelles la
responsabilité d'une rigueur budgétaire impopulaire qu'ils n'ont pas le
courage d'assumer.
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6 mai 2010
Article publié dans L'Action Française 2000
Les circonstances encouragent le renforcement de la
coopération franco-britannique en matière de défense. Outre-Manche, les
conservateurs y seraient même très favorables. En premier lieu dans le
domaine nucléaire.
Les Britanniques étaient appelés aux urnes le jeudi
6 mai. À quelques jours du scrutin, les conservateurs
semblaient toujours en passe de l'emporter. Une victoire de David
Cameron, eurosceptique notoire, affectera peut-être la marche de
l'UE... La défense est un autre terrain ouvert à la prospective. Le
21 avril, Malcolm Rifkind a exposé les conceptions des Tories
en la matière. Notre confrère Nicolas Gros-Verheyde a rapporté les
grandes lignes de son intervention dès le lendemain.
Avec la France
Aux yeux des conservateurs, le terrorisme serait, sans
surprise, la première menace pesant sur le Royaume-Uni. Mais garantir
la liberté du commerce serait une autre préoccupation essentielle. Sir
Rifkind exclut de réduire le budget de la défense britannique.
Toutefois, son parti entend s'attaquer « aux coûts
opérationnels du ministère », qui seraient supérieurs de
20 % environ à ceux observés dans les pays comparables, comme
la France et l'Allemagne.
Il juge les coopérations bilatérales importantes
« non seulement pour des raisons politiques mais pour résoudre
les coûts ». « Le mot coopération européenne peut
provoquer des réactions émotionnelles chez certains d'entre
nous », a-t-il reconnu. Les coopérations lui sembleraient
néanmoins utiles et nécessaires, « particulièrement avec la
France ». Outre la passation de marchés, la dissuasion
nucléaire pourrait faire l'objet d'une collaboration entre Londres et
Paris. En effet, souligne Malcolm Rifkind, « nous sommes les
seuls au niveau européen (avec la Russie) à avoir l'arme nucléaire.
Nous sommes proches. Et nous ne constituons pas une menace (envers
l'autre). »
Coopération nucléaire
En mars dernier, le Guardian avait prêté à la France la
volonté de partager les patrouilles sous-marines avec son allié.
Proposition a priori irréaliste, choquante à certains égards. Cela dit,
dès lors qu'on juge inexistantes les menaces nécessitant d'agiter à
moyen terme l'épouvantail atomique, on pourra donner la priorité au
maintien du savoir-faire, quitte à sacrifier la permanence à la mer...
Pour l'heure, en tout cas, « les marins français n'ont
toujours pas le droit de pénétrer dans la partie arrière des SNLE [sous
marins nucléaires lanceurs d'engins] de la Royal Navy, là où sont les
missiles Trident américains ». Comme le rappelait
Jean-Dominique Merchet le 26 avril, la relation "spéciale"
unissant Albion à Washington ne va pas sans une certaine exclusivité...
Néanmoins, poursuit notre confrère, « on se
parle » d'un côté et l'autre de la Manche. Cela afin de
dissiper le risque d'une nouvelle collision entre deux sous-marins. Et
sans doute, plus discrètement, pour préparer le renouvellement des SNLE
à l'horizon 2030. De façon plus confidentielle encore, une coopération
sur les têtes nucléaires ne serait pas exclue – « en
particulier grâce aux moyens français de simulation ». Sans
doute Paris a-t-il une carte à jouer.
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29 avril 2010
Tandis que les Vingt-Sept prétendent s'être accordés sur les
fondations du Service européen pour l'Action extérieure, Michel Foucher
fustige la pression exercée par le Parlement européen afin de le
soustraire à l'influence des États.
« Ceci risque de retarder l'entrée en fonction du
Service, qui ne devrait sans doute pas arriver avant
l'automne », a-t-il
confié à notre confrère Marek Kubista. « Le
Parlement commet une erreur en estimant que des politiques communes
pourraient être bâties en court-circuitant les États. C'est
l'inverse : il faut faire converger des politiques nationales
pour édifier des lignes de force d'intérêt collectif européen. [...] Je
ne crois pas du tout qu'à Pékin, Washington ou Moscou, la vieille
diplomatie soit complètement obsolète, bien au contraire. Les positions
communes européennes ne peuvent exister que si les États, et
particulièrement les grands, l'élaborent à partir de leurs positions
nationales. »
Preuve que le bon sens n'est pas étranger à nos élites, dont
les souverainistes stigmatisent trop hâtivement l'européisme. Michel
Foucher, que nous découvrons à cette occasion, dirige notamment la
formation à l'IHEDN. Entre 1998 et 2002, si l'on en croit la
biographie que lui consacre Wikipedia,
il fut conseiller en charge des affaires politico-stratégiques au
cabinet d'Hubert Védrine – un chantre du "réalisme" alors ministre des
Affaires étrangères, parfois taxé d'euroscepticisme. Mais cela
n'empêche pas M. Foucher de codiriger par ailleurs le rapport
Schuman sur l'état de l'Union !
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19 avril 2010
Curieux de découvrir un nouveau titre lancé par Lagardère,
nous pensions y trouver des tests et autres "conseils beauté" dont
seules les illustrations nous auraient fourni un semblant d'intérêt.
Or, nous y avons perçu comme un écho aux communiqués européens que nous
lisons régulièrement, en dépit de leur romantisme notoire, avec
autrement plus de passion...
« On a testé les cours de féminité »,
annonçait Be en couverture de son quatrième
numéro. Tandis que Bruxelles et Madrid (entre autres) vilipendent les
« stéréotypes sexistes », le magazine croit déceler à
rebours « la tendance du moment » :
« les femmes libérées [sic] prennent des cours pour réviser
les classiques que le féminisme leur a fait oublier »,
apprend-on en ouverture d'un petit dossier de six pages. Au
programme : cuisine, tricot et... strip-tease. Ou inscription
à la Talons Academy : « 15 euros pour "apprendre à se
sentir confiante et sexy chaussée en talons", c'est le concept de ce
cours lancé par deux copines. Et ça marche. »
« Des années de féminisme pour en arriver là. Cette
pauvre Simone de Beauvoir doit se retourner dans sa tombe »,
déplore, avec ironie, Françoise Marmouyet. Son enquête relève, plus ou
moins, du second degré, mais cela tranche, tout de même, avec les
discours officiels – émanant tout particulièrement des enceintes
multilatérales, telles l'UE et l'ONU – relayés la presse politique –
tel Le Figaro stigmatisant le
2 février dernier, sous la plume d'Agnès Leclair,
« des adolescents fidèles aux clichés hommes-femmes ».
« À trente ans, j'ai eu envie de devenir une vraie
femme », proclame un témoin interrogé par Be.
À l'avenir, le magazine devra se garder de donner la parole aux tenants
d'une mentalité si rétrograde. Sans quoi sa rédaction se retrouvera
prochainement dans le collimateur de la Halde.
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18 avril 2010
S'il était encore vivant, Charles Maurras serait-il
souverainiste ?
La géopolitique de Maurras a fait l'objet d'un ouvrage publié
en novembre dernier (1). Nous en avons lu le chapitre consacré
à la critique du fédéralisme européen, espérant y trouver moult
éléments susceptibles de nourrir notre critique du souverainisme.
Peut-être attendions-nous des auteurs qu'ils fassent parler les
morts... Or, prévient d'emblée Christophe Réveillard, « on ne
trouve chez Maurras que peu d'analyses approfondies des nouvelles
communautés européennes [...], entre autres raisons parce qu'il
disparaît en 1952 ».
Durant l'entre-deux-guerres, plus particulièrement,
« Maurras dénonce essentiellement l'irréalisme du fédéralisme
européen ». Ce faisant, aurait-il jugé négligeables les
considérations économiques et politiques à l'origine de la
CECA, attribuant sa création à la seule idéologie, bien qu'il pense
« que derrière les discours lénifiants, prévaut le réalisme
des puissances » ? À vrai dire, nous nous demandons
si la question a vraiment préoccupé Christophe Réveillard, tant il
semble enclin à réduire les politiques aux postures qui les
accompagnent. En témoigne, à nos yeux, la facilité avec laquelle il
affirme que « la période gaulliste correspond [...] au
développement d'une autre conception de l'Europe » –
« selon laquelle la Communauté doit être une confédération
d'États se donnant un pouvoir commun auquel chacun délègue (et non
abandonne) un part de souveraineté ».
Tandis que les "pères fondateurs" de l'Europe seraient aux
antipodes du Martégal, l'élaboration du plan Fouchet – demeuré sans
lendemain... – et la négociation du compromis de Luxembourg – beaucoup
de bruit pour rien ! – placeraient De Gaulle dans sa droite
filiation : « Ineluctabilité de la division de
l'Europe en entités nationales distinctes, nécessité pour la France de
refonder son organisation interne autour d'un fédérateur légitime,
critique au nom du "Politique d'abord !" de l'européisme comme
principe de dépolitisation des rapports étatiques, défense d'une
diplomatie française fondée sur la recherche de l'équilibre des
alliances et l'indépendance nationale, ce qui exclut le projet d'une
communauté permanente de nations fondée sur la contrainte, le constat
est rapidement fait : les certitudes de Charles Maurras en
matière européenne furent également celles de Charles De
Gaulle. »
Cela nous semble d'autant plus "léger" que
M. Réveillard passe sous silence les ambiguïtés d'un concept
au cœur de la réflexion sur la construction européenne. Ainsi n'est-il
pas loin d'ériger implicitement Maurras en défenseur de la
« souveraineté nationale » (2), bien que
celui-ci en ait fermement récusé le principe, lui opposant
« la souveraineté du salut public, ou du bien
public, ou du bien général ».
« Ce que Maurras reproche le plus aux différentes
tentatives d'unification européenne », c'est, paraît-il,
« l'absence de ce qui pour lui devrait relever de
l'évidence : la recherche de l'accroissement de
puissance ». Recherche dont nous doutons, pour notre part,
qu'elle soit le fait des souverainistes... Cela dit, peut-être
trouverons-nous matière à nous interroger sur les conséquences du
multilatéralisme en parcourant les autres chapitres d'une étude censée
présenter, plus généralement, les thèses de Maurras « sur les
relations internationales et les problèmes de défense », et
même exposer les débats que suscita leur réception au sein de l'Action
française.
(1) Sous la direction de Georges-Henri Soutou et Martin
Motte : Entre la vieille Europe et la seule France
- Charles Maurras, la politique extérieure et la défense nationale ;
Économica, Bibliothèque stratégique, 23 novembre 2009,
432 pages, 39 euros
(2) « Face à la critique des souverainetés
nationales, assimilées aux causes principales des guerres, Maurras
affirme que c'est au au contraire le déni de puissance nationale, par
décadence intérieure et/ou par impérialisme de puissances extérieures,
qui est facteur de déséquilibre et de guerre. »
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15 avril 2010
Article publié dans L'Action Française 2000
Loups et béliers, forte corpulence, parrainage dans
l'entreprise, affichage solennel de la Déclaration des droits de
l'homme dans les écoles... Autant de sujets sur lesquels les députés
voudraient légiférer.
À la différence des projets de loi, présentés par le
gouvernement, les propositions sont déposées par des parlementaires. La
plupart de ces textes enregistrés à la présidence de l'Assemblée
nationale le 1er avril, parfois insolites, sinon grotesques,
demeureront vraisemblablement sans lendemain.
Traditions mises à mal
Bravant certains écologistes, Mme Henriette Martinez,
soutenue par quelques collègues, demande la mise en place d'un plan de
gestion du loup : « Avec un nombre d'attaques et de
victimes en constante progression », le prédateur menace selon
elle « la pratique du pastoralisme avec de graves conséquences
pour l'élevage mais aussi pour la survie de la biodiversité de la
montagne ». Marc Le Fur et quatre autres députés
déplorent les mésaventures juridiques des organisateurs d'un tournoi de
lutte bretonne, dont le gagnant recevait traditionnellement un
bélier : « Une nouvelle fois le patrimoine local et
les traditions ancestrales sont mis à mal par une vision réductrice du
droit. » En conséquence, ils souhaitent « permettre
l'attribution en lot ou prime d'animaux vivants dans le cadre des
manifestations sportives et folkloriques régionales
traditionnelles ».
Changement de registre avec Mme Valérie Boyer.
Soulignant l'augmentation du tour de taille moyen de
4,7 centimètres entre 1997 et 2009, elle mobilise la chambre
basse pour « interdire de surtaxer une personne de forte
corpulence qui achète un billet d'avion ». Sa proposition de
loi prie le gouvernement d'établir les conditions d'application d'une
telle disposition. Faudra-t-il communiquer ses mensurations lors de
l'achat d'un billet d'avion ? Le cas échéant, comment les
compagnies pourront-elle s'assurer de la bonne foi de leurs clients,
tentés de s'approprier deux sièges pour le prix d'un quelle que soit
leur corpulence ? À travers ces questions quelque peu
triviales, on mesure l'irresponsabilité des parlementaires.
Michel Zumkeller peut se vanter, quant à lui, d'un travail
prolifique, mené de plus en solitaire – un signe du crédit que lui
accordent ses collègues ? Le député juge « très
important d'instaurer la possibilité d'un parrainage de deux ans entre
ceux qui vont quitter l'entreprise pour partir en retraite, et ceux qui
doivent entrer dans la vie active ». À cet effet, il a
présenté un texte dont la rédaction nous semble hasardeuse – En quoi
cette « possibilité » est-elle aujourd'hui
exclue ? –, et dont l'objet devrait plutôt être discuté par
les organisations professionnelles.
Le règne du bon sens
Promoteur de dispositions inutiles, M. Zumkeller
demande également que « tout produit vendu en France comporte
une étiquette précisant que la fabrication de ce produit est conforme à
notre modèle social, principalement en matière de travail des
enfants ». Encore faudrait-il s'en assurer...
Le député du Territoire-de-Belfort propose, en outre, de
« rendre obligatoire l'affichage de la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 à l'entrée de tous
les établissements publics d'enseignement scolaire de
France ». De son point de vue, « un tel affichage
solennel s'impose d'autant plus aujourd'hui qu'élèves et enseignants
sont souvent victimes d'atteintes à leurs droits ou auteurs d'atteintes
aux droits ». Autrement dit, ce serait une réponse à
« la violence entre les élèves ou contre les
professeurs ». Selon le scénario échafaudé par
M. Zumkeller, « lorsque se produira un incident dans
ou autour de l'école », « des rassemblements
pourraient alors être organisés devant ce texte fondateur ».
De quoi inculquer la discipline aux sauvageons.
Un peu de sérieux
Plus sérieusement, Bruno Le Roux et les membres du groupe
socialiste, radical, citoyen et divers gauche entendent
« renforcer l'exigence de parité des candidatures aux
élections législatives ». Thierry Mariani voudrait
« rétablir la manifestation de volonté » et instituer
un « serment républicain » préalables à l'obtention
de la nationalité après un mariage ou par des enfants nés en France de
parents étrangers. Enfin, Jacques Remiller réclame la reconnaissance
des votes blancs et l'annulation des scrutins où ceux-ci
représenteraient plus de 30 % des bulletins. Peut-être sa
proposition mérite-t-elle d'être débattue, mais sans doute son
application aurait-elle pour principale conséquence de rendre la
démocratie un peu plus coûteuse.
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