4 avril 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
La publication du nouveau livre blanc sur la défense est
imminente. Dans la foulée sera adoptée une loi de programmation
militaire, dont le président de la République a promis qu'elle ne
déshériterait pas les armées.
À l'approche de la publication du nouveau livre blanc sur la
défense et la sécurité nationale, parlementaires et industriels sont
montés au créneau, appelant le chef de l'État à "limiter la casse".
Sans doute ont-ils été rassurés par son intervention télévisée du
28 mars : au profit de la Défense, « nous
dépenserons en 2014 le même montant qu'en 2013 », a-t-il
promis ce soir-là. Auparavant, le Premier ministre avait tempéré les
inquiétudes dont Jean-Pierre Raffarin s'était fait l'écho au
Sénat : « si le président de la République a pris la
décision d'engager nos forces au Mali, ce n'est pas pour, demain,
entraver les capacités de notre armée », avait-il déclaré.
Incertitudes budgétaires
Qu'en sera-t-il au juste ? Bien qu'il ait exclu les
"scénarios catastrophe" détaillés par nos confrères, François Hollande
est demeuré évasif quant à l'ampleur du budget pris en référence. Selon
que l'on considère le budget annoncé ou celui effectivement exécuté,
que l'on y inclue ou non des recettes exceptionnelles (des ventes de
fréquences ou des cessions immobilières, par exemple), les chiffres ne
sont pas les mêmes... En outre, selon la formule du général Georgelin,
ancien chef d'état-major des armées, cité par notre confrère
Jean-Dominique Merchet, animateur du blog Secret Défense,
« la Défense gagne en général les batailles stratégiques
contre Bercy, mais elle perd ensuite tous les combats
tactiques ».
Alors que l'adoption d'une loi de programmation militaire
(LPM) a été reportée à l'automne, rien ne permet d'assurer qu'elle sera
durablement respectée. C'est même le contraire qui serait étonnant. Fin
janvier, La Tribune signalait déjà une
« première encoche » au budget annuel de la Défense,
priée de contribuer au financement des surcoûts éventuels de la
politique de l'emploi. Alors qu'il était encore ministre délégué au
Budget, Jérôme Cahuzac avait toutefois promis « de piocher
dans la réserve de précaution si la facture des opérations extérieures
(Opex) était supérieure aux 630 millions d'euros déjà
budgétés », précise notre confrère Michel Cabirol.
Quelles nouveautés ?
Ces aléas budgétaires nourrissent l'indécision chronique de
l'État, contre laquelle s'élèvent les industriels, à l'image du
missilier MBDA. Paris n'en finit pas de différer ses arbitrages portant
sur deux programmes phare, « l'un très important pour toute la
filière industrielle missilier française » (le missile moyenne
portée, appelé à succéder au missile Milan), et l'autre
« crucial pour la coopération britannique »
(l'anti-navire léger), rapporte encore La Tribune.
Or, sous la pression de ses actionnaires, l'entreprise pourrait stopper
certains développements, prévient son P-DG Antoine Bouvier.
La publication d'un nouveau livre blanc confirmera
vraisemblablement la nécessaire montée en puissance de la cyberdéfense.
« Depuis 2008, la France a commencé à combler son
retard » en la matière, selon Jean-Louis Carrère, le président
de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces
armées du Sénat. « Une agence nationale de la sécurité des
systèmes d'information (l'ANSSI) a été créée en 2009 et notre pays
s'est doté en 2011 d'une stratégie dans ce domaine. Pourtant, en dépit
de ces progrès, le sentiment qui prédomine aujourd'hui est que la
menace a été largement sous-estimée et que notre dispositif connaît
encore d'importantes lacunes. » Par ailleurs, comparé au
précédent, le prochain livre blanc devrait accorder une attention
renouvelée à l'Afrique - Mali oblige -ainsi qu'aux enjeux maritimes -
« une des données majeures de l'évolution du contexte
stratégique depuis dix ans », soutient M. Carrère.
Océan Pacifique
D'ores et déjà, « 41 % du trafic maritime de
biens de consommation à destination de la métropole passe en mer de
Chine du Sud. Par conséquent, nos intérêts économiques quotidiens sont
directement tributaires de la sécurité de ces eaux », a
souligné le vice-amiral Jean-Louis Vichot, lors d'un colloque au Sénat
consacré au Pacifique. De plus, « c'est outre-mer que nous
allons trouver les ressources minérales, alimentaires, biologiques qui
vont nous permettre de développer la recherche et l'industrie en
France, outre-mer et en métropole », a-t-il plaidé.
« À Wallis et Futuna, ont été découverts des encroûtements
minéraux d'une rare qualité. En Polynésie française, on espère une
forte croissance de la pêche avec le réchauffement climatique. Celui-ci
n'apporte pas que des catastrophes puisqu'il va déplacer la ceinture du
thon vers le Sud, vers la ZEE [zone économique exclusive] de la
Polynésie française. » De quoi susciter des convoitises...
Aussi la présence française dans le Pacifique requiert-elle
des patrouilleurs - « suffisamment gros pour affronter la
houle du Pacifique » -, des frégates - « les seules à
avoir assez d'autonomie et de moyens militaires pour maintenir une
présence dans l'ensemble du Pacifique, sur les côtes d'Asie et
d'Amérique », mais aussi des avions et des satellites
d'observation. Or, comme l'a rappelé l'amiral Vichot, « les
conclusions du livre blanc de 2008 [avaient] préconisé de réduire de
moitié les capacités militaires françaises dans le Pacifique, y
laissant des forces à peine suffisantes pour exprimer la souveraineté
de notre pays sur ces territoires ». À l'époque, on avait
considéré « que les îles du Pacifique étaient suffisamment
protégées par les étendues océaniques qui les entouraient, à une nuance
près pour la Nouvelle-Calédonie ». Le tir sera-t-il
rectifié ? Réponse courant avril.
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4 avril 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
L'obstruction parlementaire offre un sursis aux embryons
humains : dans l'immédiat, ceux-ci continueront de ne pouvoir
faire l'objet de recherches qu'à titre dérogatoire – au moins en
apparence.
En février 2012, alors qu'il était en campagne, François
Hollande avait annoncé que, s'il était élu président de la République,
la loi encadrant les recherches sur l'embryon serait à nouveau révisée.
Ce faisant, avait-il déclaré, « nous rattraperons notre retard
sur d'autres pays et nous favoriserons le retour des post-doctorants
partis à l'étranger » - notamment aux États-Unis, où la loi
n'impose aucune restriction en la matière. Sa promesse semblait en
passe d'être tenue : à cet effet, une proposition de loi
devait être votée par l'Assemblée nationale mardi dernier,
2 avril. C'était compter sans la résistance de quelques
députés UMP, qui ont noyé le texte sous une pluie d'amendements,
empêchant son examen dans les délais impartis.
Ambiguïtés légales
Dans l'immédiat, la législation conservera donc ses
ambiguïtés : si elle autorise la recherche sur l'embryon,
c'est, formellement, à titre dérogatoire, quoique de façon pérenne –
comme s'il fallait maintenir un interdit symbolique tout en s'en
affranchissant dans les faits. Autant en finir avec
l'hypocrisie ! C'était l'objet de la proposition de loi en
débat, dont l'adoption aurait néanmoins constitué « un
bouleversement éthique et juridique », selon Théophane Le
Méné. De son point de vue, elle aurait entériné « la
réification de la personne humaine, la suprématie de la technique sur
l'homme et son asservissement à la logique utilitariste des
laboratoires ». En effet, a-t-il expliqué sur Causeur,
« le principe allait devenir l'exception et l'exception le
principe ».
Aujourd'hui, trente-six équipes de recherche travailleraient,
en France, sur des cellules embryonnaires. Elles y ont été autorisées
par l'Agence de la biomédecine, avec la bénédiction des ministres
chargés de la Santé et de la Recherche, mais aussi le consentement des
individus à l'origine des "embryons surnuméraires" conçus in
vitro dans le cadre d'une procréation médicalement assistées, les seuls
pouvant faire l'objet de recherches au regard du droit. Avant d'agréer
un protocole, les autorités sont censées s'assurer que soient réunies
les conditions suivantes, résumées par Mme Dominique Orliac,
député PRG du Lot, rapporteur du texte soumis à l'Assemblée :
« la pertinence scientifique du projet de recherche est
établie ; la recherche est susceptible de permettre des
progrès médicaux majeurs ; il est expressément établi qu'il est
impossible de parvenir au résultat escompté par le biais d'une
recherche ne recourant pas à des embryons humains, des cellules souches
embryonnaires ou des lignées de cellules souches ».
La hantise des recours
Autant d'éléments dont l'appréciation est sujette à
discussion. « S'il est vrai que les chiffres de l'Agence de
biomédecine révèlent un véritable dynamisme de la recherche française
en la matière, la rédaction actuelle de la loi est source de
contentieux qui retardent le lancement de certains projets
scientifiques », déplore Mme Orliac. De fait,
explique-t-elle, « la Cour administrative d'appel de Paris a
déduit de l'existence de l'interdiction de principe de la recherche
qu'il appartenait à l'Agence de la biomédecine de faire la preuve que
des recherches employant des moyens alternatifs ne pouvaient parvenir
au résultat escompté. Elle a en conséquence annulé l'autorisation
accordée trois ans auparavant à une recherche. » Apparemment,
la loi proposée répondrait surtout à la Fondation Jérôme Lejeune, dont
les recours feraient peser sur les chercheurs « une véritable
insécurité juridique ». Onze affaires seraient en cours
d'instruction, s'inquiète Dominique Orliac, au motif que l'Agence de
biomédecine « n'avait pas prouvé l'impossibilité de mener ces
recherches par d'autres méthodes ». Or, prévient-elle,
« en matière de recherche fondamentale, une telle preuve ne
peut pas être apportée ». Cependant, poursuit-elle,
« les recherches sur les cellules souches adultes et les
cellules reprogrammées n'ont pas vocation à se substituer, en l'état
des connaissances scientifiques, à la recherche sur les cellules
souches embryonnaires, mais en sont le complément
nécessaire ».
Alternative prometteuse
Voilà précisément ce que conteste, par exemple,
Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la
Conférence des évêques de France. Étant donné les perspectives offertes
par les ressources du sang placentaire ou la reprogrammation
cellulaire, l'engagement en faveur de la recherche sur l'embryon serait
« un combat d'arrière-garde » selon lui, Ce
combat n'est mené « que pour contester la valeur intrinsèque
de l'embryon », a-t-il déclaré dans un entretien à Radio
Notre-Dame retranscrit par France catholique.
Évidemment, les chercheurs s'en défendent : « il n'y
a aucune "appétence" particulière des scientifiques pour la recherche
sur les cellules souches embryonnaires et si, à l'avenir, d'autres
méthodes s'avèrent être plus efficaces, elles évinceront naturellement
cette dernière », soutient Mme Orliac.
Les projets les plus prometteurs, à brève échéance, viseraient
à traiter la maladie de Steinert, qui se traduit par des anomalies
musculaires et neuronales, ou la dégénérescence maculaire, affectant
plus particulièrement la vue des personnes âgées. Les patients
concernés peuvent-ils, dès lors, espérer une guérison prochaine ? Mgr
Vingt-Trois entend dissiper de faux espoirs : « c'est
une tromperie à l'égard des gens que de leur faire croire que grâce à
cela ils vont avoir des traitements pour Alzheimer, Parkinson,
etc. », a-t-il prévenu. « Cela n'aboutira
pas. » Un jugement sans appel.
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21 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
François Hollande sera-t-il le fossoyeur des armées
françaises ? Dans l'attente de ses arbitrages, préalables à la
publication d'un nouveau livre blanc, les inquiétudes vont croissant.
La publication d'un nouveau livre blanc sur la défense et la
sécurité nationale semble imminente. Dans la foulée, une loi de
programmation militaire devrait être adoptée d'ici l'été. Dans
l'attente des ultimes arbitrages du chef de l'État, alors qu'un bras de
fer serait engagé entre Bercy et l'Hôtel de Brienne, les spéculations
vont bon train. Jean-Louis Carrère, le président de la commission des
Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat, a
exprimé des inquiétudes largement partagées. « La patrie est
en danger », a-t-il déclaré le 13 mars 2013,
paraphrasant explicitement Danton. « Le passage d'un effort de
défense de 1,56 % en 2011 à 1,1 % en 2025, tel qu'il
est envisagé, ne permettrait plus aux autorités de notre pays de
maintenir le rôle de la France au niveau qui est le sien
aujourd'hui », a-t-il prévenu.
Quelles économies ?
Une fois n'est pas coutume, son discours pourrait bénéficier
des faveurs de l'opinion. « Deux Français sur trois pensent
que le budget de la défense doit être maintenu, voire
augmenté », signale notre confrère Jean-Dominique Merchet,
animateur du blog Secret Défense, citant les
conclusions d'un sondage Ipsos. Faut-il, dés lors, alarmer nos
compatriotes jusqu'à leur promettre l'Apocalypse ?
Gardons-nous de crier au loup : préparés au pire, les esprits
consentiront d'autant plus facilement les sacrifices imposés
prochainement à nos armées... D'aucuns s'imaginent que le porte-avions Charles-de-Gaulle
pourraient être mis sous cloche ! D'autres envisagent, sans
doute plus sérieusement, d'abandonner la composante aérienne de la
dissuasion nucléaire, dont les sous-marins deviendraient alors les
seuls vecteurs. C'est une proposition récurrente, dont les promoteurs
prétendent appliquer le principe de "stricte suffisance" cher à la
France. Le plateau d'Albion n'a-t-il pas déjà été démantelé dans les
années quatre-vingt-dix ?
Bénéfique dissuasion
Ce projet relèverait toutefois d'un mauvais calcul, selon
l'analyse de Philippe Wodka-Gallien, chercheur associé à l'Institut
français d'analyse stratégique (IFAS). Lors d'une conférence prononcée
le 14 mars à l'invitation de l'Alliance géostratégique, il a
estimé à cinquante millions d'euros le coût de la composante aérienne
de la dissuasion. Un investissement somme toute modeste de son point de
vue. D'autant qu'il permettrait de palier la perte potentielle d'un
sous-marin, contribuant à dissiper la hantise d'un « Mers
el-Kébir nucléaire ». Par ailleurs, étant donné les exigences
qu'elle requiert, la dissuasion bénéficierait continûment aux forces
conventionnelles. « Si le Rafale est le meilleur avion du
monde », c'est parce qu'il a été conçu pour délivrer le feu
nucléaire, nous a expliqué Philippe Wodka-Gallien. Quant aux équipages
formés à ces missions, ils bénéficient simplement d'une qualification
supplémentaire. En Libye, par exemple, des missiles ont été tirés par
les Forces aériennes stratégiques, dont on voit qu'elles ne sont pas
cantonnées au tir improbable d'une charge nucléaire.
L'heure des choix
Dans son ensemble, la dissuasion nucléaire française
représenterait 10 % du budget de la Défense... soit
0,15 % du budget national. Un coût équivalent aux recettes
fiscales perdues après la baisse du taux de TVA dans la restauration,
selon une comparaison proposée par Philippe Wodka-Gallien. De
quoi éclairer les arbitrages à venir... « Le spectre de la
guerre ne peut être écarté », martèle l'amiral Guillaud, chef
d'état major des armées. En dépit de l'actualité, la nation semble
réticente à l'admettre. En témoigne le scandale déclenché par un
légionnaire arborant quelque symbole guerrier tandis qu'il risquait sa
vie au Mali. Ou l'avertissement que le Conseil supérieur de
l'audiovisuel a adressé à France 2,
après que la chaîne eut diffusé, le 7 février, des images
illustrant l'horreur des exactions commises dans ce pays. « La
guerre du Mali n'a pas eu lieu », lisait-on, le mois dernier,
à la une de L'Action Française 2000.
Peut-être n'a-t-on pas voulu la voir ? Dans l'"affrontement
des volontés" que constitue chaque conflit armé, la France se trouve
confrontée à ses propres faiblesses, qui sont loin d'être seulement
matérielles, à l'image d'une certaine irrésolution propre aux
démocraties occidentales... Alors, "politique d'abord" ?
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21 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Les "études de genre" inspirent décidément moult politiques
publiques. Un exemple parmi d'autres nous en est donné en
Seine-Saint-Denis, où le Conseil général a lancé une initiative à
l'intention des collégiens.
À l'occasion de la journée de la femme, célébrée le
8 mars 2013, le gouvernement a réaffirmé sa volonté d'œuvrer
quotidiennement en faveur de l'égalité des sexes. Cela avec le soutien
des collectivités locales et du monde associatif, comme en témoigne la
présentation d'un calendrier recensant autant d'événements organisés en
ce sens qu'il y a de jours dans l'année.
Changer la langue
Parmi les initiatives mises en exergue figure celle du conseil
général de Seine-Saint-Denis, dont le président, le socialiste Stéphane
Troussel, s'inspire manifestement des "études de genre". Selon lui, en
effet, « de la crèche au monde du travail, en passant par
l'école et l'université, nombreuses sont encore les occasions
d'observer des comportements sexistes, hérités d'une
domination masculine ancestrale
qui assigne à chaque
sexe des rôles et des fonctions
dans la vie professionnelle et familiale ». Aussi son
département s'est-il attaché à mobiliser les « jeunes contre
le sexisme ». Lequel consiste, selon le conseil général de
Seine-Saint-Denis, « à inscrire la différence entre les hommes
et les femmes dans un rapport hiérarchique de domination et à
considérer, comme en grammaire, que le masculin l'emporte sur le
féminin ». D'où l'inclination de
M. Troussel à revisiter la langue
française : « nous n'entendons pas seulement
déconstruire les idées reçues à partir d'une réflexion théorique, mais
aussi et surtout travailler avec tou-te-s les professionnel-le-s
concerné-e-s pour partager les
expériences et mutualiser les bonnes
pratiques », explique-t-il dans un jargon devenu convenu.
Poupées et pistolets
Chaque année, mille cinq cents collégiens (des élèves de
troisième) sont donc conviés à des représentations théâtrales où se
jouent, avec leur participation, « des scènes sur des
situations de discriminations ou de violences sexistes ».
S'ensuivent des discussions en classe, la désignation de délégués
censés « dialoguer avec les élu-e-s et présenter des
propositions pour lutter contre les comportements sexistes »,
puis leur concrétisation sous forme d'affiches ou de DVD, par exemple.
Preuve que le message est passé, dans un collège de Montreuil, la
définition suivante a été élaborée : « Le sexisme, c'est
habituer les garçons à jouer avec des jeux plutôt violents et de
domination et habituer les filles à jouer à la dînette et aux
barbies. » Dans la plupart des établissements, cependant, il
semblerait que l'enfumage idéologique soit relégué au second plan : la
dénonciation des "mains aux fesses", la prévention des viols, la
critique des grands frères trop possessifs, voire la hantise des
mariages forcés, occupent apparemment le devant de la scène.
« En somme, ce que les adolescents de
Seine-Saint-Denis ont exprimé, par leur participation au théâtre-forum,
c'est l'idée que la différence qui les sépare en garçons et filles est,
certes, une différence incontournable, mais qui fait d'eux des être
plutôt complémentaires », analyse l'anthropologue Françoise
Douaire-Marsaudon.
L'image de la mère
En Île-de-France, où un dispositif similaire a été mis en
œuvre à l'intention des lycéens, Mme Henriette Zoughebi,
vice-présidente du conseil régional, n'en continue pas moins de
dénoncer « l'instrumentalisation des différences biologiques
entre les filles et les garçons » sur lesquelles reposeraient
des inégalités d'autant moins justifiées qu'il y aurait, selon elle,
« autant de différences entre une fille et un garçon, qu'entre
deux garçons ou deux filles ». Cela aura vraisemblablement
échappé au jeune Ahmed, qui dit respecter les femmes parce que
« c'est dans leur ventre qu'on s'est formé ». Mais
aussi à Mme Valérie Trierweiler, qui a visité une maternité –
précisément en Seine-Saint-Denis - pour fêter, à sa façon, la journée
de la femme. Une démarche éminemment "sexiste" au regard des
conceptions de Mme Zoughebi, selon laquelle « nos envies, nos
projets ne doivent pas être réduits par un facteur biologique, le
sexe ». De son point de vue, « quand nous nous
laissons enfermer dans des identités sexuées, nous renonçons à une part
de notre liberté ». En est-elle vraiment convaincue ?
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7 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Fortes d'une notoriété croissante, les activistes du mouvement
Femen prétendent incarner un féminisme d'un nouveau genre. Mais en
dépit du bruit médiatique, des constantes demeurent...
A l'approche de la journée de la femme, qui sera célébrée
vendredi prochain (le 8 mars 2013), les activistes féministes
du mouvement Femen bénéficient d'une exposition médiatique inédite. France 2
vient de diffuser un film qui leur était consacré, la veille du jour où
devait paraître le livre signé de leurs fondatrices ukrainiennes.
D'aucuns jugeront leur notoriété inespérée : dans l'Hexagone,
elles ne compteraient qu'une quinzaine de militantes, si l'on en croit Menly.
Complaisances
Civitas n'a pas manqué de dénoncer la
« collusion » que nos confrères entretiendraient avec
cette « milice antichrétienne ». Il la dénonce sans
relâche, depuis le jour où ses militants s'y sont heurtés. C'était le
18 novembre dernier, à l'occasion d'une manifestation
organisée contre le "mariage homo". Très complaisante à l'époque, la
classe politique s'est montrée plus réservée après que les
"sextrémistes" se furent données en spectacle le 12 février
dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. « Les Femen ont
probablement perdu leur aura dans cette provocation de trop »,
a commenté l'abbé Guillaume de Tanoüarn. Seuls 14 % des
Français déclareraient approuver leur initiative, « tant sur
le mode d'action choisi que sur les idées qu'elles y ont
défendues », selon une étude Harris Interactive pour VSD.
À l'inverse, 44 % s'y montreraient hostiles à tous points de
vue. Confrontées à ce relatif désaveu, les Femen pointent les réactions
schizophrènes de nos compatriotes : « Quand les Pussy
Riot font un happening dans une église moscovite ou quand Inna coupe
une croix orthodoxe à la tronçonneuse à Kiev, ça passe parce que c'est
à l'étranger », a déclaré Éloïse Bouton, l'une de leurs
militantes, citée par le quotidien Métro.
« Ça choque parce qu'on touche à quelque chose qui pose
problème », a-t-elle expliqué. Et d'affirmer que « la
France n'est pas aussi laïque qu'elle le croit ».
« Nous ne nous attaquons pas particulièrement à
l'Église », nuance Elvire Duvelle-Charles, dans un entretien
accordé à Menly. « Mais on a forcément
une réticence envers l'Église parce qu'elle est sexiste, rétrograde,
misogyne, en retard sur beaucoup de sujets comme le Pacs ou
l'avortement. » De son point de vue, c'est la survivance d'un
certain patriarcat qu'il s'agirait d'abattre.
« En enlevant nos tee-shirts, nous dénonçons le
système machiste de manière bien plus efficace que si nous prononcions
de beaux discours », soutient sa camarade Anna Hutsol, citée
par Le Journal du dimanche.
Vraiment ? Peut-être devrait-elle méditer les résultats des
enquêtes d'opinion. Toujours selon le même sondage, « les
hommes semblent porter un regard plus positif sur le choix des Femen de
manifester seins nus dans Notre-Dame de Paris : 21 %
approuvent à la fois le fond et la forme de l'intervention, contre
9 % chez les femmes ». Ces messieurs seraient-ils
émoustillés ? Cela n'est pas sans rappeler l'histoire de
Phryné, cette hétaïre grecque qui obtint la clémence de ses juges après
que son avocat l'eut dénudée devant eux... Par ailleurs, au risque de
verser dans la psychologie de comptoir, nous attribuerons à quelque
refoulement l'inclination des plus critiques à dénigrer le physique de
ces demoiselles...
Un vieux fantasme
« On veut donner une autre image de la nudité,
laquelle n'est pas destinée qu'à la séduction », poursuit
Elvire Duvelle-Charles. Ce serait « le symbole de la femme
forte, combattante, vindicative ». Mais cette force propre aux
femmes ne procède-t-elle pas précisément, dans une certaine mesure, du
désir qu'elles suscitent chez les hommes ? « La
nudité est notre armure », explique-t-elle encore. Ce faisant,
s'érigeant en guerrière, elle arbore le costume d'une amazone –
laquelle hante les fantasmes masculins depuis la nuit des temps,
jusqu'aux jeux vidéo les plus récents, où les héroïnes à forte poitrine
sont légion.
La démarche des Femen s'inscrit d'ailleurs dans une tradition
historique. On ne compte plus les causes pour lesquelles des
volontaires sont prêts à se déshabiller – de la protection des animaux
à la récolte de fonds pour Emmaüs, en passant par le financement d'une
association de parents d'élèves. Dans un registre plus militant, on se
remémorera les "journées sans soutif", ou l'initiative des Tumultueuses
s'exhibant topless dans les piscines de Paris il
y a quatre ou cinq ans. Dans les années quatre-vingt, Ilona Staller, la
"Cicciolina", avait même été élue au parlement italien après avoir fait
campagne en tenue légère.
De fait, « l'intimité féminine, dans ce qu'elle a de
plus visible, a toujours été l'enjeu de luttes politiques qui
mobilisent tout le corps social », comme l'observent Caroline
Pochon et Allan Rothschild dans leur ouvrage consacré au
« culte des seins ». Les Femen n'ont rien
inventé ! « Nous savons que nous ne pouvons changer
le monde toutes seules », confesse Elvire
Duvelle-Charles. Avec ses congénères, peut-être nous en
rappelle-t-elle, paradoxalement, la vraie nature, dont les activistes
féministes sont prisonnières comme tout un chacun.
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7 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
L'adoption d'un nouveau cadre financier pluriannuel pour
l'Union européenne pourrait affecter la Guyane française, « en
quête de singularité » vis-à-vis de Bruxelles, selon
l'intitulé d'un rapport parlementaire.
Couramment vilipendée en raison du libéralisme censé
l'inspirer, l'Union européenne n'en pratique pas moins la
redistribution à l'échelle du Vieux-Continent, voire au-delà, dans ses
régions ultrapériphériques (RUP), parmi lesquelles figure la Guyane
française. Entre 2007 et 2013, plus de 500 millions d'euros de
subventions lui auront été attribués par Bruxelles. Une somme investie,
entre autres, dans la réfection d'un aérodrome et l'extension du réseau
d'eau potable. Toutefois, « malgré les progrès réalisés durant
les dernières décennies, la Guyane manque encore de certains
équipements structurants », selon les sénateurs PS Georges
Patient et Simon Sutour, auteurs d'un rapport d'information déposé le
20 février 2013. D'autant que « la vulnérabilité des
infrastructures au climat tropical rend les projets d'investissements
particulièrement coûteux et peu rentables ».
Au regard du PIB par habitant (53 % de la "base
européenne" en 2009, selon les données d'Eurostat), la Guyane compte,
sans surprise, parmi les territoires les moins favorisés de l'Union. De
fait, soulignent les rapporteurs, « elle se retrouve en-deçà
des performances des autres départements d'outre-mer français
(67 % pour la Réunion, 66 % pour la Guadeloupe et
73 % pour la Martinique) et bien loin derrière les autres
régions ultrapériphériques que sont les Açores avec 75 % du
PIB communautaire, Madère avec 105 % et les Canaries avec
87 % ». De ce point de vue, la situation de la Guyane
est comparable à celle des régions de Roumanie, de Bulgarie et de
Pologne. Mais ses perspectives de développement sont tout autres.
Un budget en baisse
En effet, « la préfecture de Guyane fait le constat
d'un territoire triplement enclavé : une région européenne
participant au marché commun, mais handicapée par les surcoûts liés à
l'éloignement ; un territoire recouvert à plus de
90 % par la forêt, rendant l'accès aux communes de l'intérieur
difficile et les besoins en infrastructures de transport
énormes ; l'unique territoire européen sur le continent
sud-américain, mais séparé de lui par deux fleuves et sur lequel
s'applique une réglementation plus contraignante que celle de ses
voisins ». De quoi justifier, aux yeux de Cayenne, la
pérennité du soutien communautaire.
En dépit de l'élargissement de l'Union européenne à l'Est,
« un financement satisfaisant » avait été maintenu
jusqu'à présent, estiment les rapporteurs. À l'avenir, cependant, les
régions ultrapériphériques pourraient faire les frais de l'accord
survenu lors du dernier Conseil européen, où fut adopté un projet de
budget pour les six prochaines années. « Alors que le montant
de l'aide spécifique pour les RUP était de 35 euros par
habitant et par an lors de l'exercice précédent, celui-ci serait de
30 euros pour la période 2014-2020. Cela représente une
diminution de 15 % de cette aide, alors que le budget total de
l'Union ne subirait qu'une baisse limitée à 3,5 % »,
déplorent MM. Patient et Sutour. L'annonce « d'une
nouvelle initiative pour lutter contre le chômage des jeunes »
ne compenserait qu'en partie cette « déception ».
Multiples aberrations
Cependant, l'ampleur de la manne financière est loin d'être
seule en jeu. La Guyane, comme les autres régions ultrapériphériques de
l'Union, réclame l'assouplissement des critères auxquels doivent
satisfaire ses projets pour être éligibles aux fonds européens. L'un
d'entre eux, le Feder, privilégie les investissements portant sur la
recherche et l'innovation, la compétitivité des PME, les émissions de
CO2, l'accès aux technologies de l'information et de la communication.
« Or, comme le rappelle Rodolphe Alexandre, président du
Conseil régional de Guyane, comment demander à notre région de
prioriser l'utilisation des crédits Feder sur ces quatre thèmes, alors
que dans le même temps une proportion non négligeable d'habitants de
notre territoire n'a pas encore accès à l'eau et à
l'électricité ? » Au final, préviennent les
rapporteurs, « la future politique de cohésion pourrait avoir
l'effet inverse de ce pour quoi elle a été conçue. Avec un budget en
baisse et des objectifs toujours plus éloignés d'une région en
rattrapage, le risque est grand de voir diminuer la consommation des
crédits et par là-même de voir l'écart entre les régions se creuser
toujours plus ! »
Bien d'autres aberrations émanent de la technocratie
bruxelloise. « Il est des cas précis et concrets où des
aménagements des normes européennes sont nécessaires et parfois
vitaux », soulignent les rapporteurs, qui mentionnent quelques
exemples. « Comment comprendre l'application sans aménagement
d'une politique de gestion des déchets prévue pour des communes
européennes sur un territoire aussi particulier que la jungle
amazonienne ? », s'interrogent-ils. Dans la
Communauté de communes de l'ouest guyanais (CCOG), « la mise
en œuvre des directives européennes demanderait un investissement de
27 millions d'euros en infrastructures, mais entraînerait le
doublement du budget de fonctionnement. Or, il est impossible de
prévoir de nouvelles ressources à la hauteur des dépenses. [...] Certes
les investissements seraient en partie financés par l'Union européenne
et par l'État, et la CCOG pourrait bénéficier de matériels performants
et efficaces, mais elle n'aurait pas les moyens de les
gérer ! » Autrement dit, « parce qu'elle
refuse de prendre en compte la spécificité d'un territoire unique en
son sein, l'Union européenne est prête à dépenser à perte des sommes
importantes en investissement pour mette en œuvre une politique qui va
conduire une collectivité publique dans l'impasse
financière ».
La Marine démunie
Les restrictions d'usage des pesticides affectent la culture
du riz, alors que « la pression parasitaire, propre au climat
d'une région équatoriale, est beaucoup plus importante qu'en
Europe ». Par ailleurs, la Guyane « gère depuis
longtemps ses ressources halieutiques selon les normes européennes de
conservation et d'exploitation durables, contrairement à ses voisins,
le Brésil et le Suriname ». Comme le précise Georges Patient,
« alors que les pêcheurs guyanais, en application des règles
européennes, emploient des filets à grandes mailles pour préserver les
espèces, les pêcheurs brésiliens utilisent des filets avec de petites
mailles qui épuisent la ressource ».
Or, poursuivent les rapporteurs, « face à
l'épuisement de leurs stocks en raison de la surpêche qu'ils ont
pratiquée, les pêcheurs surinamais et surtout brésiliens viennent
depuis plusieurs années piller les eaux guyanaises ». À tel
point que, selon l'Ifremer (Institut français de recherche pour
l'exploitation de la mer), « la ressource serait davantage
exploitée par les navires étrangers [...] que par les embarcations
locales ». Pourtant, la Marine nationale ne disposerait que de
navires hauturiers inadaptés à la poursuite des embarcations
clandestines au faible tirant d'eau... En la matière, cela va sans
dire, il n'y a rien à attendre de Bruxelles.
Publié dans Europe, Outre-mer | 1 Commentaire
7 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale
afin d'interdire « le financement par des États étrangers des
cours d'arabe donnés en France ».
Son auteur, Damien Meslot, député UMP de Belfort, déplore que
« dans certains quartiers sensibles, des cours d'arabe,
financés par des réseaux occultes venant de l'étranger, prodiguent des
enseignements dont le contenu véhicule des messages
extrémistes ». Lesquels constitueraient, selon lui,
« des appels aux troubles de l'ordre public ».
Son argumentation nous apparaît quelque peu bancale. En effet,
si ces cours constituaient effectivement « un danger pour la
sécurité de notre territoire national », pourquoi faudrait-il
les interdire au regard de leur financement, et non de leur nature
même ? Quant à la volonté de préserver la France de
l'influence étrangère, elle n'est pas manifeste, le texte proposé
visant seulement à la protéger des États « non partie à la
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales ». Autrement dit, Washington et Ryad seraient
affectés, mais pas Berlin et Ankara, par exemple.
Aussi cette proposition de loi relève-t-elle, à nos yeux, du
pur affichage. De fait, la hantise de l'islam se prête à la démagogie
tout autant que son apologie. En outre, si ce texte devait être examiné
par l'Assemblée, celle-ci se trouverait confrontée à deux écueils.
D'une part, elle devrait s'inquiéter des réactions internationales, et
notamment des représailles susceptibles d'entraver la "diplomatie
d'influence" mise en œuvre par la France, forte d'un vaste réseau
d'enseignement à l'étranger. D'autre part, elle risquerait de museler
la liberté d'expression à nos propres dépens. En effet, tandis qu'il
fustige l'islamisme. M. Meslot pointe « des messages
contraires aux valeurs de la République ». Si bien que les
royalistes pourraient être les premiers à faire les frais de sa
politique... Prudence !
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21 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Moult commentateurs ont pointé l'inconséquence de l'Europe
dans le dossier malien. Peut-être sont-ils coupables d'avoir placé en
elle trop d'espoirs.
Dans l'affaire malienne, « l'Europe a été
nulle », selon les déclarations d'Alain Juppé au micro d'Europe 1.
Fidèle à son tropisme néo-gaullien, l'ancien Premier ministre continue
manifestement de projeter ses rêves de grandeur à l'échelle du
Vieux-Continent. Peut-être serait-il temps de l'admettre :
l'"Europe puissance" n'est rien d 'autre qu'un fantasme hexagonal. Au
moins Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense,
semble-t-il l'avoir compris : « Quand l'Europe de la
Défense aura la capacité d'intervenir immédiatement, ce sera dans cent
cinquante ans ! », a-t-il déclaré à La Voix
du Nord. « Le président du Mali nous a appelé à
l'aide le 10 », a-t-il précisé. « La décision
d'intervenir a été prise par le président le 11 à
12 h 30, j'y étais. Et nos forces ont commencé à
arriver à 17 heures. Que vouliez-vous faire ?
Consulter les Vingt-Sept ? [...] La vérité, c'est que nous
avons la réactivité militaire et le pouvoir de décision. » La
capacité "d'entrer en premier" est d'ailleurs une spécificité de
l'armée française, qui profite du primat accordé à l'exécutif, habilité
à placer le Parlement devant le fait accompli... Preuve que la nature
des institutions s'avère toujours décisive : « politique
d'abord », disait Maurras !
Heureuse solitude de la France
Apte à réagir dans l'urgence, la France doit toutefois
s'accommoder d'une relative solitude dans l'action. L'opposition n'a
pas manqué de s'en inquiéter, par la voix de Jean-François Copé, non
sans quelque légèreté. En effet, « pour la guerre, être seul
est parfois plus efficace », comme le souligne le
géopolitologue Olivier Kempf, animateur du blog Egea.
« C'est d'ailleurs ce qu'ont beaucoup ressenti les Américains
lors de la guerre d'Afghanistan, lorsqu'ils voyaient tout un tas
d'alliés européens se défiler dans des zones peu
dangereuses. » La France vient de le vérifier à ses dépens.
Les Pays-Bas ont certes mis un avion ravitailleur à sa disposition,
mais en en restreignant l'emploi, de telle sorte qu'il lui était
interdit d'atterrir à Bamako. Quant au C-17 britannique qui s'est posé
à Évreux, son équipage a d'abord refusé d'embarquer les rations des
soldats, au motif qu'elles comprenaient des allumettes : dans
la Royal Air Force, en effet, « on ne mélange pas munitions et
dispositif d'allumage dans le même appareil », explique notre
confrère Nicolas Gros-Verheyde. « Il a fallu quelques heures
de patience et un coup de fil entre les deux chefs d'état-major pour
régler la question », a-t-il rapporté sur le blog Bruxelles 2.
À ses yeux, cependant, « sans l'apport précieux et
coûteux des alliés, c'est bien simple, l'opération Serval n'aurait pas
duré plus de soixante-douze heures ». Selon ses estimations,
ce soutien aurait représenté 60 à 100 millions d'euros au
cours du premier mois d'intervention. « Soit tout autant que
l'engagement français annoncé par le ministre Jean-Yves Le Drian
(70 millions d'euros). » Cela étant, cette aide
n'émane pas de l'Union européenne en tant que telle. D'ailleurs, parmi
les alliés engagés derrière la France figurent le Royaume-Uni et le
Danemark, dont Olivier Kempf rappelle qu'ils sont « les plus
hostiles à tous nos baratins sur l'Europe de la Défense ».
Mission formation
L'opération Serval en sanctionnerait-elle alors
l'échec ? « Pour moi, l'Europe de la Défense, c'est
la mise en commun de certains moyens de défense, c'est l'industrie de
défense, un certain nombre d'actions communes », plaide
Jean-Yves Le Drian, qui cite en exemple l'opération Atalante,
luttant contre la piraterie dans l'océan Indien. « L'Europe de
la Défense, ce n'est pas l'Europe militaire », explique-t-il
encore. Le cas échéant, peut-être pourra-t-elle contribuer à la
reconstruction de l'État malien et plus particulièrement de ses forces
armées. D'autant qu'en la matière, l'Europe peut légitimement
revendiquer une certaine compétence, illustrée notamment par le
précédent somalien. Laborieusement, l'Union européenne prépare donc une
mission de formation à cet effet. D'ores et déjà connue sous le nom
EUTM Mali, elle sera placée sous le commandement d'un officier
français, le général Lecointre. « C'est, en fait, le logiciel
de l'armée malienne que nous voulons reconstruire », a-t-il
confié à Nicolas Gros-Verheyde. Par conséquent, a-t-il prévenu
« il faut [...] considérer les choses sur le temps long, au
moins le temps moyen, et non sur le court terme ».
Défi américain
Reste un autre défi qui se présente à l'Europe :
celui d'une moindre protection américaine. Comparant l'intervention au
Mali à celle survenue en Libye deux ans plus tôt, le politologue Zaki
Laïdi relève un élément nouveau, Washington ayant envisagé
« de faire littéralement payer à la France la location
d'avions de transport de troupes ». « C'est un fait
tout à fait inédit dans l'histoire des relations
transatlantiques », souligne-t-il sur Telos.
« Car même si en définitive cette option a été écartée, elle
révèle à la fois l'érosion du soutien américain et la détermination de
Washington à envoyer des signaux de non-assistance à Européens en
danger. » Ceux-ci sauront-ils en tirer les
conséquences ?
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21 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Quand les parlementaires se penchent sur l'ouverture des
universités aux étudiants étrangers ou jugent menacée la pérennité de
la langue de Molière.
Les universités françaises manqueraient-elles d'attrait aux
yeux des étudiants étrangers ? Telle est, en tout cas, la
conviction de Mme Dominique Gillot, sénateur PS du Val-d'Oise,
auteur d'une proposition de loi censée remédier à cette situation. En
dix ans, le nombre d'étudiants étrangers recensés en France aurait
pourtant bondi de 40 %, atteignant deux cent trente-mille en
2010-2011. Cependant, « notre pays reste [...] en
retard », déplore Mme Gillot. Devancée désormais par
l'Australie, la France aurait été reléguée au quatrième rang de la
compétition mondiale qui se jouerait en la matière.
Incohérences
« Notre politique [...] a été entachée
d'incohérences », martèle le sénateur, qui pointe
« une forte hésitation entre la volonté d'accueillir les
meilleurs éléments et l'obsession du "risque migratoire" ».
Tandis que ces jeunes gens seraient appelés à devenir « nos
meilleurs ambassadeurs », il ne serait « ni dans
l'intérêt des pays d'origine, ni dans le nôtre » de les
renvoyer chez eux dès la fin de leurs études. Au contraire, plaide
Mme Gillot, « c'est après au moins une première
expérience professionnelle que ces diplômés pourront, à leur retour
chez eux ou à l'international, mettre à profit les compétences acquises
en France et en faire la promotion ».
En conséquence, elle propose que leur soient attribués des
titres de séjour pluriannuels, dont la durée dépendrait de la formation
suivie. Cela afin de « limiter les démarches administratives,
souvent vexatoires, qui épuisent et précarisent les étudiants étrangers
tout en encombrant inutilement les services préfectoraux ».
Selon Mme Gillot, il conviendrait également de porter de six à
douze mois l'autorisation provisoire de séjour, période pendant
laquelle un étranger peut chercher un premier emploi après l'obtention
de son diplôme. En outre, « pour éviter le choix souvent
cornélien [...] entre le retour dans le pays d'origine ou une
installation quasi-définitive dans notre pays », un
« droit illimité au séjour en France » pourrait
bénéficier aux titulaires d'un doctorat obtenu en France. Une mesure
censée contribuer au développement d'une « coopération
économique continue, enrichissante, sans pillage des cerveaux des pays
émergents ». Reste à convaincre nos compatriotes, aux yeux
desquels il y aurait déjà « trop d'étrangers en
France »...
Anglais ou français au choix ?
Par ailleurs, Mme Gillot propose d'introduire une
dérogation au code de l'éducation, lequel oblige à dispenser des cours
en français. Déjà « contournée par de nombreux
établissements », cette disposition constituerait
« un obstacle au recrutement d'étudiants étrangers de
qualité ». Toutefois, reconnaît le sénateur, on ne saurait
s'en affranchir sans s'exposer aux foudres du Conseil constitutionnel.
C'est pourquoi, au sein d'un même établissement, les étudiants
devraient pouvoir « suivre les mêmes cursus en français et en
langue étrangère ». Au risque qu'y soit instituée une certaine
ségrégation ?
Quoi qu'il en soit, un tel projet devrait conforter dans sa
démarche Jean-Jacques Candelier, député PC du Nord, auteur d'une
proposition de résolution « tendant à la création d'une
commission d'enquête sur les dérives linguistiques ».
« Dans la publicité, les enseignes commerciales, la
communication [...] des grandes entreprises et, désormais, dans
l'enseignement secondaire et universitaire, on peut redouter que la
langue de Molière disparaisse à brève échéance », prévient
M. Candelier. Selon lui, « il y a urgence ».
D'autant que « la dilapidation de la langue française se
couple [...] avec la sape de l'héritage progressiste universel de notre
pays, le démantèlement des acquis sociaux et des services publics, la
destruction de l'indépendance nationale, avec l'adoption du traité de
Lisbonne [...] et du traité sur la stabilité, la coordination et la
gouvernance (TSCG), le sacrifice de la défense nationale dans l'Otan,
la violation de la laïcité et la substitution de l'euro-régionalisation
du territoire à la République une, laïque et indivisible issue de la
Révolution ».
Ce discours n'est pas sans rappeler celui de l'ambassadeur
Albert Salon... « L'internationalisme des travailleurs ne
s'oppose pas au patriotisme populaire », soutient Jean-Jacques
Candelier. Au contraire, « parce qu'il n'aspire qu'au droit
des peuples à disposer d'eux-mêmes » (que nous contestons
toutefois pour notre part), le « patriotisme
populaire » s'opposerait, entre autres, « au
cosmopolitisme capitaliste » ainsi qu'au
« supranationalisme impérialiste ». Pour les
pourfendeurs de la mondialisation, l'heure serait-elle à l'union
sacrée ?
Publié dans Francophonie, Mondialisation, Société | Pas de commentaires
7 février 2013
Article publié dans L'Action Française 2000
Tandis qu'il esquisse des « orientations stratégiques
pour les recherches sur le genre », le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Recherche cultive la confusion,
confondant quête du savoir et prosélytisme éhonté.
Les "études de genre" ont acquis une notoriété inédite à la
faveur de leur immixtion, sinon dans la lettre des programmes
scolaires, du moins dans les manuels de sciences de la vie et de la
terre (SVT) de première. La faute aux éditeurs trop zélés ? Peut-être
faut-il y voir, également, l'influence des milieux universitaires, où
l'intérêt pour les gender studies va
croissant : tandis que sept revues leur seraient entièrement
consacrées, elles auraient mobilisé, ces dernières années, plus ou
moins assidument, près de deux mille chercheurs. Des
« orientations stratégiques » devraient leur être
assignées, clame le ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Recherche, qui vient de publier un rapport en ce sens, coordonné par
Alban Jacquemart, Agnès Netter et Françoise Thibault.
Genre et sexe
« Le genre est d'abord un concept, initialement issu
des sciences médicales et de la grammaire française puis repris par les
sciences sociales », rappellent-ils. Un concept censé aider
« à mettre au jour, en les questionnant, les rapports sociaux
entre hommes et femmes ». Le psychiatre Robert Stoller aurait
été le premier à l'utiliser, dans les années soixante, pour
« distinguer la conformation sexuelle des individus (le sexe)
de l'identité sexuée, psychologiquement et socialement construite (le
genre) ». Outre l'anthropologie, la psychologie, la
littérature et les langues, le "genre" affecterait plus
particulièrement la sociologie et l'histoire, disciplines où il serait
majoritairement enseigné. Aux dires des rapporteurs, par exemple, la
compréhension du fait colonial s'en serait trouvée revisitée.
Une priorité du CNRS
Le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) se
serait saisi des ces recherches dans les années quatre-vingt. En son
sein, l'Institut des sciences humaines et sociales (INSHS) les a depuis
érigées au rang de priorité, permettant le recrutement de sept chargés
de recherche. Toujours sous la houlette du CNRS a été créé, l'année
dernière, l'Institut du genre, un "groupement d'intérêt scientifique"
réunissant trente-cinq universités et autres institutions.
Parallèlement, l'Institut d'études politiques de Paris, ainsi que
l'université Paris VII, ont décidé de familiariser leurs
étudiants avec les gender studies. Aux yeux des
rapporteurs, cependant, cela reste insuffisant. Ainsi conviendrait-il,
selon eux, d'« inciter les universités à construire des
licences qui comportent aux moins deux modules obligatoires sur le
genre ». Mais aussi d'y confronter tous les enseignants au
cours de leur formation. Voire un plus large public, à l'intention
duquel pourrait être créée une « université
populaire ». D'autres propositions sont formulées
« afin de lutter contre [des] inégalités
persistantes » et « de faire évoluer les
établissements supérieurs et de recherche vers la parité »,
ceux-ci devant « prendre conscience de l'existence des
stéréotypes de genre qui biaisent l'évaluation ». Si,
contrairement à d'autres, les rapporteurs ne demandent pas que soit
rebaptisée l'école maternelle, ils appellent néanmoins à
« généraliser l'usage d'une langue non sexiste » - ce
à quoi ils s'emploient en bannissant le "masculin générique" : sous
leur plume, ce sont des chercheur-e-s qui se sont exprimé-e-s !
Mouvement LGBT
Parmi eux, relèvent-ils, « plusieurs [...] sont, par
exemple, membres de l'Observatoire de la parité et permettent que les
politiques publiques se nourrissent des savoirs académiques ».
Autant dire qu'ils versent volontiers dans un certain prosélytisme. En
cela, ils s'inscrivent d'ailleurs dans un tradition historique. Les
recherches portant plus particulièrement sur « les sexualités
et les identités de sexe [...] en partie initiées par le mouvement LGBT
(qui regroupe des militant-e-s lesbiennes, gays, bisexuel-le-s et
transgenres), ont été particulièrement importantes dans l'élaboration
même du concept de genre », soulignent les rapporteurs. C'est
dire combien le militantisme interfère, depuis l'origine, dans les
études de genre. Comment s'étonner, dans ces conditions, que « la
recherche sur le genre peine à trouver, dans l'organisation
scientifique actuelle, la reconnaissance » que revendiquent ses
promoteurs ?
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