La laïcité, voilà l'ennemi !

15 janvier 2014
Article publié dans L'Action Française 2000

Regard critique sur la loi contre la burqa, qui aurait préparé les esprits à bannir les crèches de Noël de tous les espaces ouverts au public.

Une crèche de Noël « porte-t-elle atteinte au principe de laïcité dans les lieux publics » ? La question a été posée par l'AFP, et reprise par plusieurs de nos confrères, après qu'un usager de la SNCF se fut plaint d'une représentation de la nativité dans la gare de Villefranche-de-Rouergue (Aveyron). Or, l'envisager, c'est méconnaître la nature de la laïcité telle qu'elle est définie dans le droit français.

Jugeant cette polémique « ridicule », le socialiste Jean-Louis Bianco, président de l'Observatoire de la laïcité, a dû le rappeler : « La neutralité s'applique seulement à l'État et aux bâtiments de la fonction publique, comme les mairies ou les écoles. » En conséquence, a-t-il souligné, « il n'y a pas d'impossibilité à installer une crèche dans une gare, car si l'entreprise est privée avec une mission de service public, le lieu de la gare est un espace public, un peu comme la rue ».

De l'école à la rue

La rue où, précisément, le port du voile intégral est proscrit depuis le 11 avril 2011 et l'entrée en vigueur de la loi votée à cet effet. Cela en vertu de la laïcité, s'imagine-t-on vraisemblablement. Prétendant lutter contre une pratique  marginale, au risque d'en faire la promotion, le président Sarkozy et sa majorité auront distillé l'idée que, dorénavant, la laïcité ne devrait plus s'imposer seulement à l'école, mais dans tous les lieux ouverts au public. De là à s'indigner de croiser un curé en soutane, il n'y qu'un pas... Potentiellement blessés par des lois dirigés à leur encontre, nos compatriotes musulmans assistent, de plus, au spectacle d'une France en prise avec sa religion historique. À ce petit jeu-là, personne n'a rien à gagner, sinon quelque politiciens exploitant avec démagogie la hantise croissante de l'islam, sans craindre d'en légitimer les propagateurs les plus radicaux. Chapeau !

Cacophonie islamophobe

7 mars 2013
Article publié dans L'Action Française 2000

Une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale afin d'interdire « le financement par des États étrangers des cours d'arabe donnés en France ».

Son auteur, Damien Meslot, député UMP de Belfort, déplore que « dans certains quartiers sensibles, des cours d'arabe, financés par des réseaux occultes venant de l'étranger, prodiguent des enseignements dont le contenu véhicule des messages extrémistes ». Lesquels constitueraient, selon lui, « des appels aux troubles de l'ordre public ».

Son argumentation nous apparaît quelque peu bancale. En effet, si ces cours constituaient effectivement « un danger pour la sécurité de notre territoire national », pourquoi faudrait-il les interdire au regard de leur financement, et non de leur nature même ? Quant à la volonté de préserver la France de l'influence étrangère, elle n'est pas manifeste, le texte proposé visant seulement à la protéger des États « non partie à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ». Autrement dit, Washington et Ryad seraient affectés, mais pas Berlin et Ankara, par exemple.

Aussi cette proposition de loi relève-t-elle, à nos yeux, du pur affichage. De fait, la hantise de l'islam se prête à la démagogie tout autant que son apologie. En outre, si ce texte devait être examiné par l'Assemblée, celle-ci se trouverait confrontée à deux écueils. D'une part, elle devrait s'inquiéter des réactions internationales, et notamment des représailles susceptibles d'entraver la "diplomatie d'influence" mise en œuvre par la France, forte d'un vaste réseau d'enseignement à l'étranger. D'autre part, elle risquerait de museler la liberté d'expression à nos propres dépens. En effet, tandis qu'il fustige l'islamisme. M. Meslot pointe « des messages contraires aux valeurs de la République ». Si bien que les royalistes pourraient être les premiers à faire les frais de sa politique... Prudence !

L'islam des bureaux

6 octobre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Se démarquant des chantres de la "diversité", le Haut Conseil à l'intégration pointe les tensions suscitées dans l'entreprise par les revendications religieuses. En réponse, il invoque la sacro-sainte laïcité.

Après avoir agité l'école, les services publics et les crèches, la laïcité suscite le débat dans l'entreprise. « Le paysage a bien changé », observe Jean-Christophe Sciberras, président de l'Association nationale des directeurs des ressources humaines (DRH). Selon lui, « la revendication religieuse se fait plus forte, en raison notamment du recours à une main d'œuvre immigrée, originaire de pays non catholiques, à partir des années soixante ». Les chantiers du bâtiment constitueraient un cas emblématique : « on y observe le plus souvent des équipes constituées par communautés d'appartenance et par affinités religieuses », rapporte le Haut Conseil à l'intégration (HCI). Dans un avis publié le mois dernier, celui-ci ne craint pas d'aborder un sujet « tabou et politiquement incorrect ». D'autant qu'il aurait « toujours considéré la question de la laïcité comme intrinsèquement liée à celle de l'intégration des personnes d'origine étrangère ».

Problèmes concrets

Le service de repas halal, l'aménagement des horaires en vue des prières et l'octroi de congés pour les fêtes religieuses seraient gérés « avec assez de souplesse » dans les grandes entreprises. En revanche, le port de signes religieux, l'ouverture de salles de prière et les relations hommes-femmes seraient plus délicats à traiter. La légalité s'en trouverait bafouée : « Ainsi, tel restaurant ne possède pas de vestiaire pour femmes parce que son patron n'envisage pas d'en embaucher. [Dans] un salon de coiffure strictement réservé aux femmes, l'inspecteur du travail ne peut entrer pour effectuer un contrôle parce que son intervention troublerait leur intimité. »

Deux types de restrictions de l'expression religieuse peuvent être inscrites dans le règlement intérieur des entreprises : elles portent, d'une part, sur les impératifs de sécurité, d'hygiène et de santé et, d'autre part, sur la tâche du salarié définie dans son contrat de travail. « La jurisprudence du "boucher de Mayotte" (arrêt de la Cour de cassation, mars 1998) est claire sur ce point : un salarié boucher de confession islamique demandait, après deux ans de travail, de ne plus avoir à traiter de viande de porc ; l'employeur refuse ; le salarié cesse son travail et invoque un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais le juge estime que "l'employeur ne commet aucune faute en demandant au salarié d'exécuter la tâche pour laquelle il a été embauché". » Par ailleurs, « le juge français a évoqué au cours de plusieurs affaires la relation avec la clientèle pour justifier la restriction du port du foulard par des femmes musulmanes. Ainsi, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (1997) a admis le licenciement pour cause réelle et sérieuse d'une salariée de confession islamique qui refusait d'adopter la tenue conforme à l'image de marque de l'entreprise. »

Tandis que la loi leur interdit de répertorier la religion de leurs employés, patrons et DRH risquent des poursuites judiciaires quand ils refusent de céder à certaines revendications. En effet, « certains seront tentés de lire toute limitation de l'expression religieuse [...] comme une discrimination religieuse, quand bien même cette restriction serait proportionnée et justifiée ». À ce titre, déplore le HCI, « la Halde a participé de cette évolution qui par certains aspects ne favorise guère l'apaisement entre salariés et entre employeur et salariés ».

Sentiment d'injustice

En outre, des accommodements peuvent être perçus comme des privilèges accordés à une minorité : « Si certains sont exemptés de travail le vendredi ou le samedi, serait-ce à dire que d'autres doivent impérativement les remplacer ces jours-là ? Si certains ont des horaires aménagés, pourquoi alors le refuser à d'autres dont les raisons ne seraient pas religieuses mais familiales par exemple ? » Souhaitant palier l'absence de réponses claires et homogènes, le HCI soutient « la mise en œuvre d'un dispositif à la fois législatif et règlementaire ». Aujourd'hui, ces questions seraient traitées au plus près du terrain. Selon le HCI, il conviendrait de promouvoir explicitement « la neutralité religieuse », de façon à « favoriser la qualité du lien social dans l'entreprise ». Concrètement, cela supposerait la révision des règlement intérieurs, et l'organisation de séminaires où serait diffusée la bonne parole républicaine.

« La laïcité est le moyen de faire coexister pacifiquement dans un espace commun une pluralité de convictions », martèle le HCI. C'est ignorer la violence des inventaires, et négliger les instrumentalisations auxquelles se prête un principe ambigu. C'est en son nom qu'on tente, parfois, d'étouffer des traditions façonnées par le christianisme – en allant jusqu'à réclamer que les sapins soient retirés des écoles à l'approche de de Noël ! Mais n'est-ce pas en son nom, également, que le Front national dénonce désormais l'immigration ? « En dehors de Marine Le Pen, plus personne ne défend la laïcité », assure Élisabeth Badinter, dans un entretien accordé au Monde des religions. Le 22 septembre, deux condamnations ont été prononcées par le tribunal de Police de Meaux en application de la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Or, si l'on en croit l'enquête du Guardian, cela ne devrait rien changer au comportement des femmes incriminées. À moins qu'elles renoncent définitivement à sortir de chez elles, confrontées à des injures dont la violence irait croissant. Curieuse façon d'œuvrer à la concorde sociale.

Laïcité : Roland Ries dément les accusations de l'Agrif

20 avril 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Des propos prêtés au maire de Strasbourg ont déclenché un tollé sur la frange la plus "réactionnaire" de la Toile.

L'Agrif part en croisade contre l'"allahicité" – un concept en vogue dans la blogosphère catholique, censé désigner la « synthèse dialectique de l'islam et de la laïcité ». L'association présidée par Bernard Antony vient de créer un prix qui en récompensera chaque année « un grand penseur ou poète ». Pour 2011, ses foudres se sont abattues sur Roland Ries, sénateur PS du Bas-Rhin et maire de Strasbourg.

Selon un communiqué de l'Agrif, « à des parents d'élèves qui lui demandaient pourquoi on servait à leurs enfants des menus halal dans les cantines scolaires de Strasbourg et pas de repas maigre par exemple avec du poisson le vendredi », M. Ries aurait répondu : « Nous servons de la viande halal par respect pour la diversité, mais pas de poisson par respect pour la laïcité. »

Moult blogueurs se sont emparés de cette annonce. Néanmoins, si l'on excepte un article publié par Causeur (le site d'Élisabeth Lévy), seule la frange réactionnaire de la Toile semble l'avoir diffusée. Cela pourrait expliquer le silence du maire de Strasbourg, qui se refuse, pour l'heure, à réagir par communiqué. Il n'en dément pas moins les accusations de l'Agrif : ces propos sont « totalement contraire à ses convictions », nous a confié l'un de ses collaborateurs.

Quant aux repas servis dans les cantines de Strasbourg, ils garantiraient effectivement aux élèves musulmans la possibilité de manger halal tous les jours – et cela depuis plus de dix ans. En revanche, du poisson ne figure pas toujours au menu le vendredi. Mais un repas végétarien est proposé quotidiennement. « Les catholiques y trouvent leur compte », nous a-t-on assuré. Sans doute l'Agrif ne sera-t-elle pas de cet avis !

NB - La réacosphère a beau se targuer de verser dans la "réinformation", elle a fait écho au communiqué de l'Agrif sans témoigner d'un esprit critique manifeste. Au point que nous sommes peut-être les premiers à signaler la réaction du maire de Strasbourg – qu'il a certes fallu solliciter. Si les accusateurs n'ont pas d'autre preuve à agiter que la bonne foi supposée d'une mère de famille, alors l'attribution de leur "prix" relève d'une mascarade dérisoire, dont la publicité donne à réfléchir sur l'influence de la Toile.

Sarkozy joue avec le feu

20 mai 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Le vote d'une loi contre le port du voile intégral rassurerait peut-être l'électorat courtisé par l'UMP, mais il pourrait fournir à cette pratique une publicité inespérée, faute de s'appuyer sur des bases juridiques suffisamment solides.

Un projet de loi prohibant le port de voile intégral ou, plus vraisemblablement, la dissimulation du visage dans l'espace public, devait être présenté en Conseil des ministres mercredi dernier, 19 mai. Dans l'attente d'en découvrir la teneur, on se demandait par quelle prouesse juridique le garde ses Sceaux prétendrait dissiper les menaces de censure soulignées le 25 mars par le Conseil d 'État.

Une conception élargie de l'ordre public

Inutile d'invoquer la laïcité : « Elle ne peut s'imposer directement à la société ou aux individus qu'en raison des exigences propres à certains services publics (comme c'est le cas des établissements scolaires). » La sauvegarde de la dignité humaine ne serait pas une base beaucoup plus solide. En effet, la Cour européenne des droits de l'homme l'a jugée indissociable de la protection du "libre arbitre", tandis qu'elle se penchait sur les évanouissements d'une femme soumise aux sévices de deux complices : les salafistes peuvent compter sur le soutien des sadomasochistes ! Quant à la sécurité publique, elle constituerait « un fondement très solide pour une interdiction de la dissimulation du visage, mais seulement dans des circonstances particulières » ; en l'absence de troubles avérés, une interdiction générale reposerait « sur une logique artificiellement préventive » – laquelle n'a jamais été admise par la jurisprudence.

En définitive, seule une acception élargie de "l'ordre public" pourrait s'accommoder de la lubie présidentielle. Il faudrait y voir, selon les termes du Conseil d'État, « le socle d'exigences réciproques et de garanties fondamentales de la vie en société ». « Mais une telle conception, juridiquement sans précédent, serait exposée à un sérieux risque de censure constitutionnelle ou conventionnelle, ce qui interdit de la recommander », ont conclu les magistrats.

1 900 cas en France

Or, une censure de loi « sonnerait comme une défaite de la République. Il est donc essentiel de bien peser les enjeux et les risques d'une telle interdiction », avait prévenu la mission d'information parlementaire sur le voile intégral, dans son rapport publié en janvier dernier. Les élections régionales et la déroute de l'UMP auront ouvert la voie aux plus téméraires.... Au risque de faire la publicité d'une pratique certes en progression, mais qui demeure marginale.

1 900 femmes porteraient le voile intégral sur le territoire national, selon les estimations du ministère de l'Intérieur (dont 270 établies dans les collectivités d'outre-mer). La moitié seraient âgées de moins de trente ans, et l'immense majorité (90 %) auraient moins de quarante ans. Les deux tiers seraient des Françaises, parmi lesquelles la moitié appartiendraient aux deuxième et troisième générations issues de l'immigration.  Fait remarquable, un quart des femmes intégralement voilées seraient des converties.

En quête d'identité

« Il s'agit d'une pratique anté-islamique importée ne présentant pas le caractère d'une prescription religieuse », a rapporté Éric Raoult au nom de la mission parlementaire. « Elle participe de l'affirmation radicale de personnalités en quête d'identité dans l'espace social mais aussi de l'action de mouvements intégristes extrémistes ; elle représente un défi pour de nombreux pays. »  Et de citer Mme Nilüfer Göle, directrice d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, faisant le constat que « les filles portant le foulard en France sont plutôt en rupture avec la manière traditionnelle dont le portait leur mère ou leur grand-mère ». La même analyse serait valable au sujet des femmes portant volontairement le niqab, auxquelles la mission a attribué deux motivations : « en premier lieu, la recherche de pureté dans la pratique d'un culte plus austère ; en second lieu, la volonté de prendre ses distances avec une société jugée pervertie ».

De grands principes

Prenant acte de la situation, les parlementaires ont proposé, entre autres, de « renforcer la formation civique délivrée dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration ». Si la l'interdiction devait être votée – puis appliquée... –, des stages de "citoyenneté" seraient peut-être imposés aux contrevenants. Sans doute y inculquerait-on le principe de laïcité, censé permettre, selon nos députés schizophrènes, « l'intégration à la communauté nationale de ceux qui rejoignent la France pour y travailler et y vivre », mais « n'interférant pas dans leur culture et leur religion ». « Lutter contre le port du voile intégral c'est [...] faire œuvre de libération », a encore proclamé le rapport parlementaire. « C'est notre vivre ensemble fondé sur l'esprit des Lumières qui est bafoué », a confirmé André Gérin.

Les pouvoirs publics se fourvoient dans l'idéologie contractualiste. Laquelle exclut fort logiquement la perspective d'assimilation – un processus dont l'aboutissement tient moins aux volontés individuelles qu'à l'enracinement progressif des générations. Renouant avec ses grands principes, la République se remémorera-t-elle également ses velléités totalitaires ? Selon les révélations du Figaro (04/05/2010), le ministre Éric Besson serait « disposé » à exposer à la déchéance de leur nationalité des Français coupables d'« atteintes caractérisées aux valeurs fondamentales de notre République ». Les royalistes sont prévenus.

Journée nationale de la laïcité

25 février 2010

C'est toujours avec plaisir que nous l'écoutons parler... Mais Jacques Myard se fourvoie dans un mauvais combat en faisant l'apologie de la laïcité.

Le député souverainiste Jacques Myard voudrait faire du 9 décembre la « journée nationale de la laïcité ». À cet effet, il vient de présenter une proposition de loi, enregistrée à la présidence de l'Assemblée le mercredi 24 février. « Il s'agirait non seulement de célébrer publiquement l'un des piliers de la République », explique-t-il dans l'exposé des motifs, « mais aussi d'y consacrer quelques heures des programmes scolaires et médiatiques ».

Dans son collimateur, on entrevoit l'islam, qu'il se garde pourtant de nommer, évoquant « certains groupes religieux » qui « tentent d'imposer des comportements clairement contraires au principe de laïcité, et en particulier à la neutralité du service public qui en découle ». De son point de vue, un « hommage à la loi sur la séparation des Églises et de l'État de 1905 » serait une réponse à l'islamisation rampante. « Cette loi a permis de mettre fin à toutes les tensions politico-religieuses caractérisant la vie politique française depuis la Révolution », affirme-t-il un peu hâtivement, passant sous silence les brimades infligées au pays réel qui n'avait pas encore déserté les paroisses.

Le laïcisme hérité de la IIIe République continue d'empoisonner nos mentalités, en dépit du tournant entamé par le président Sarkozy en faveur d'une laïcité plus saine, qui « n'est pas la négation ou le rejet du fait religieux » mais « un principe d'apaisement dont dépendent la concorde et la paix civiles ». Dans ces conditions, les velléités du député des Yvelines ne froisseront pas seulement des officines islamiques. Bien au contraire, elles galvaniseront les plus sectaires, enclins à couvrir d'une pudeur déplacée l'héritage chrétien qui imprègne en profondeur le pays. Autrement dit, la France foulera au pied son propre passé, au lieu d'encourager tous ses citoyens à se l'approprier.

Nos parlementaires devraient plutôt célébrer Marie avec une ferveur renouvelée. D'autant que nos compatriotes musulmans pourraient tout à fait se joindre à la fête du 15 août !

Restauration communautaire

7 janvier 2010
Article publié dans L'Action Française 2000

Depuis la fin novembre, Quick s'essaie à la vente de hamburgers certifiés halal. Le groupe de restauration rapide se lance ainsi sur un marché porteur, qui affiche régulièrement une croissance à deux chiffres.

Le concurrent européen de McDonald's, contrôlé à 95 % par un fonds public français, s'est immiscé malgré lui dans le débat sur l'identité nationale : depuis le 30 novembre, des repas certifiés halal sont servis dans huit restaurants Quick de l'hexagone. Les hamburgers y sont garnis d'une viande issue d'un abattage rituel, opéré par égorgement  « au nom de Dieu », face à La Mecque, par un sacrificateur habilité par un organisme religieux avec l'agrément de l'État. Le porc étant réputé haram (illicite), des allumettes de dinde ont remplacé les lardons.

30 % de hausse

La démarche, expérimentale, permettra d'évaluer l'ampleur des difficultés logistiques : les prescriptions islamiques pourraient s'avérer délicates à respecter dans des cuisines où des aliments "licites" risquent de cohabiter avec quelques autres proscrits par la loi coranique. L'enseigne veillera sans doute à dissiper la méfiance des clients, alors que son concurrent KFC, ayant investi un créneau similaire, est justement accusé d'avoir trahi leur confiance. À Villeurbanne, ils sont invités à vérifier l'origine des commandes dans un cahier mis à leur disposition en français et en arabe. Avec ce changement de carte, rapporte notre consœur Carole Bianchi, « "le fast-food a vu son chiffre d'affaires progresser de 30 % et a dû embaucher deux fois plus de personnel en moins de quinze jours, selon le gérant Karim Bouzeenaba » (20 Minutes, 15/12/2009).

Nouveau marché

L'alimentation halal constitue un marché en plein essor, enregistrant régulièrement une croissance supérieure à 10 %. Spécialisé « dans les études marketing ethniques », le cabinet Solis lui attribue un chiffre d'affaires de 4 milliards d'euros en 2009 (dépenses des ménages, sans compter la consommation en restauration hors domicile de type sandwicheries, restaurants, collectivités...). Par comparaison, le "bio" drainerait seulement 2,6 milliards d'euros, selon l'estimation citée par Anne-Hélène Pommier (Le Figaro, 16/12/2009).

« Longtemps limité à des commerces traditionnels », le circuit de distribution de ces produits s'étend aujourd'hui aux grandes et moyennes surfaces, observe Solis, « notamment aux grandes enseignes d'hypermarchés qui présentent des offres de produits halal élaborés pour partie par les plus grands groupes agroalimentaires français ».

Industriels et distributeurs cibleraient les "baby-boomers de la diversité", nés en France et forts d'un pouvoir d'achat supérieur à celui de leurs aînés. Mais ils communiquent encore avec pudeur, préférant généralement promouvoir les "saveurs d'Orient". Si Maggi fait figure d'exception, la plupart commercialisent leurs produits halal sous une marque spécifique. Tel Casino, en pointe avec Wassila, ou Panzani, qui fut le premier à lancer une campagne publicitaire sur les chaines "hertziennes". C'était l'été dernier, à l'occasion du ramadan : « Certains de nos clients se retrouvent dans les personnages de la pub, ça leur fait plaisir, c'est pour eux une preuve d'intégration » se félicitait alors Sébastien Beyhourst, directeur marketing de Zakia Halal (Libération, 26/08/2009).

Entre intégration et assimilation

Preuve que l'intégration n'est en aucun cas synonyme d'assimilation ? L'"islamisation" du pays, volontiers dénoncée, suscite un malaise compréhensible. Observons toutefois qu'elle ne va pas sans paradoxes : s'ils se distinguent de leurs compatriotes par certaines habitudes de consommation, imposées par leur foi, les musulmans peuvent désormais se fournir dans les mêmes boutiques, s'asseoir à la même table... Voire se joindre aux mêmes fêtes : à la veille de Noël, Caroline Taix signalait que « chapons, foie gras et dinde farcie halal [avaient] fait leur apparition dans les rayons des épiceries spécialisées » (Les Échos, 24/12/2009).

Une finance halal à Paris

3 décembre 2009
Article publié dans L'Action Française 2000

Le gouvernement et les parlementaires de la majorité promeuvent le développement de la finance islamique sur la place de Paris. Aperçu des enjeux économiques et sociaux.

Le mois dernier, Bercy accueillit un colloque présentant les « opportunités pour les entreprises françaises » offertes par la finance islamique. Christine Lagarde a confirmé qu'elle menait un « combat » en faveur de son développement sur le territoire national. Par ce biais, le ministre de l'Économie entend renforcer l'attractivité de la place de Paris et capter des liquidités au volume croissant, issues de rentes pétrolières et gazières.

Cinq principes

La finance islamique recouvre les activités censées respecter les prescriptions du Coran. Elle repose sur cinq principes : interdiction de l'intérêt versé selon le seul écoulement du temps ; prohibition de la spéculation et de l'incertitude ; exclusion des secteurs haram (vente d'armes, d'alcool ou de porc, pornographie) ; partage des profits et des pertes ; adossement à des actifs tangibles. Des exigences mises en valeur par la Crise... Évalué à 700 milliards de dollars, ce marché devrait représenter 1 000 milliards d'euros à l'horizon 2020, selon Elyès Jouini et Olivier Pastré, auteurs d'un rapport pour Paris Europlace. « Soit [...] l'équivalent du tiers des fonds propres de l'ensemble des banques mondiales en 2007 ou l'équivalent de la moitié de la capitalisation boursière de la place financière de Paris aujourd'hui. »

Les banques françaises n'ont pas manqué d'investir ce marché. BNP-Paribas s'y emploie depuis les années quatre-vingt, principalement dans le Golfe persique et en Asie du Sud-Est. Depuis 2003, le groupe s'appuie sur une filiale basée à Bahrein. « Cette entité est soumise aux mêmes contraintes et dispositions légales que BNP-Paribas, notamment en matière de connaissance des clients, de lutte contre le blanchiment d'argent, etc. Néanmoins, [...] elle dispose d'un comité de charia composé de docteurs en théologie [...] chargés d'approuver toutes les opérations mises en place », expliqua Maya Boureghda lors d'une table ronde organisée au Sénat au printemps 2008.

Immigrations

Sur le territoire européen, le Royaume-Uni fait figure de pionnier. Par rapport à lui, « la France a pris beaucoup de retard dans le développement de son industrie financière islamique », observe Zoubeir Ben Terdeyet, directeur d'Isla-Invest. Peut-être parce que « en Grande-Bretagne, les populations musulmanes sont constituées surtout de personnes originaires du Pakistan, de l'Inde et du Golfe persique, soit des régions où les banques islamiques sont très présentes. En France, en revanche, la communauté musulmane est composée, en majorité, de gens issus d'Afrique du Nord où la finance islamique est assez inexistante. » Jean Arthuis, qui préside la commission des Finances de la chambre haute, déplore l'« inertie nationale », tout en martelant que peu d'aménagements légaux seraient nécessaires pour y remédier. D'ailleurs, l'Autorité des marchés financiers a déjà approuvé des OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières) compatibles avec la charia. Outre-Rhin, le land de Saxe a émis une obligation islamique – ou sukuk – qui lui a rapporté 100 millions d'euros.

Un exemple à suivre ? Probablement aux yeux du sénateur UMP Philippe Marini, auteur d'un amendement à la proposition de loi « tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et moyennes entreprises ». Adopté définitivement par le Parlement, après avis favorable du gouvernement, son texte prévoyait la modification du Code civil sur la fiducie (transfert temporaire de propriété), afin que le détenteur de sukuk puisse se prévaloir d'un droit de propriété des actifs supports. Saisi par l'opposition, le Conseil constitutionnel a censuré cet amendement le 14 octobre dernier, pour un motif de forme. Scandalisé, le député PS Henri Emmanuelli avait dénoncé une atteinte à la laïcité par « l'introduction de la charia dans le droit français ». Une accusation récusée par sa collègue UMP Chantal Brunéi : « Nous n'ajoutons ici qu'un instrument d'investissement supplémentaire dans la boîte à outils – un parmi beaucoup d'autres, et que personne n'est obligé d'utiliser ! »

Communautarisme

Sans doute eût-il été plus opportun d'agiter l'épouvantail du communautarisme. L'année dernière, Jean Arthuis avait regretté que « la réflexion présentement engagée soit essentiellement tournée vers la banque d'investissement et de financement au détriment de la banque de détail ». La demande des particuliers n'apparaît pas manifeste, mais Zoubeir Ben Terdeyet veut croire en son émergence : « Lorsque la viande halal est apparue en France, presque personne n'en achetait. [...] Beaucoup de musulmans qui ne consommaient pas de viande halal, par effet de mimétisme, font maintenant comme leurs voisins en s'en procurant. Le même phénomène pourrait avoir lieu concernant les produits de finance islamique. » Leur développement s'accompagnerait d'un  « effet intégrateur potentiel » selon Jean Arthuis ; ce serait un signal positif envoyé à la communauté musulmane nationale, une sorte de reconnaissance.... Dans le débat qui anime la rédaction de L'Action Française 2000 et qui oppose, plus ou moins, les partisans de l'assimilation à ceux de l'intégration communautaire, l'ancien ministre de l'Économie soutiendrait vraisemblablement les seconds.

L'islam n'a plus la cote

17 juillet 2008
Article publié dans L'Action Française 2000

Le Conseil d'État confirme le refus d'accorder la nationalité française à une Marocaine adepte d'un islam trop radical.

Mme Fazia M. a trente-deux ans. Elle est mariée à un Français et mère de trois enfants. En dépit de sa maîtrise de la langue, le 16 mai 2005, le gouvernement s'est opposé par décret à sa naturalisation, arguant, conformément au Code civil, d'un « défaut d'assimilation ». À juste titre selon le Conseil d'État, dont la décision du 27 juin a été révélée par Le Monde vendredi dernier.

La presse a monté en épingle le port de la burqa, dont le juge administratif aurait proclamé l'incompatibilité avec l'obtention de la nationalité française. Mais le verdict n'y fait aucune mention. Il stipule que la requérante a « adopté une pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française, et notamment avec le principe d'égalité des sexes ; qu'ainsi, elle ne remplit pas la condition d'assimilation ». Effectivement, Fazia M. ne cache pas les attaches salafistes de son foyer, où elle vivrait « presque recluse » selon le commissaire du gouvernement cité par Le Monde. On s'interroge sur l'objectivité des motifs invoqués. Sans doute est-il impossible d'échapper tout à fait à l'arbitraire en la matière... D'autant qu'une législation tatillonne instaurerait une véritable "idéologie d'État". Il appartient à l'exécutif de faire bon usage de son pouvoir discrétionnaire.

Laïcisme, islamisme, même combat !

Après l'annulation du mariage d'un couple musulman dont l'épouse avait menti sur sa virginité, cette affaire confirme l'évolution des "bonnes consciences médiatiques", enfin débarrassées de leur angélisme islamophile. Faut-il s'en réjouir ? En partie seulement, car les ressorts de cette réaction sont douteux. « La France se doit de rester l'avant-garde du combat laïque, seul rempart contre les dérives fanatiques dont les femmes sont les premières victimes », affirme l'association Ni Putes ni Soumises. Méfions-nous du laïcisme, dont les adeptes sont des alliés objectifs des islamistes, tant ils sont prompts à fouler aux pieds notre identité nationale – influencée certes par deux siècles de république, mais façonnée surtout par plus d'un millénaire de christianisme ! Quant aux slogans égalitaires inspirés par une idéologie féministe, ils mènent à une  impasse. C'est dans la valorisation des différences qu'on enseignera à nos petits sauvageons le respect dû aux femmes : en effet, qui voudra leur faire croire qu'elles sont des hommes comme les autres ?

Les féministes contre la « charia »

5 juin 2008
Article publié dans L'Action Française 2000

Une véritable fatwa contre la liberté des femmes, selon Sihem Habchi.

Révélée par les médias le 29 mai, la décision du tribunal de grande instance de Lille  rendue le 1er avril, annulant un mariage alors que l'épouse avait menti sur sa virginité, a provoqué un véritable tollé. Sihem Habchi, au nom de l'association Ni putes ni soumises, s'est insurgée contre l'instauration d'« une véritable fatwa contre la liberté des femmes ». Le PS, quant à lui, s'est offusqué d'un jugement « atterrant » qui « bafoue le droit des femmes à disposer de leur corps ». Ils ont beau jeu de dénoncer la soumission de la Justice aux préceptes islamistes, ceux-la même qui sont si prompts à accueillir sur notre sol des immigrés porteurs de valeurs qui nous sont étrangères... À la lecture de l'énoncé du verdict, en tout cas, on nuance leurs réactions.

Héritage manifeste du mariage religieux, la reconnaissance de nullité est une procédure quasiment tombée en désuétude : « elle n'est plus enseignée à la faculté que comme une curiosité », précise Eolas dans son Journal d'un avocat (1). Elle s'appuie sur l'article 180 du Code civil : « Le mariage qui a été contracté sans le consentement libre des deux époux, ou de l'un d'eux, ne peut être attaqué que par les époux, ou par celui des deux dont le consentement n'a pas été libre, ou par le ministère public. L'exercice d'une contrainte sur les époux ou l'un d'eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage. S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage. »

« Qualité essentielle »

« Mais la loi se garde de définir ces qualités essentielles, remarque Eolas, et la jurisprudence de la cour de cassation laisse le juge décider si, selon lui, les qualités invoquées sont ou non essentielles. [...] Seules exigences de la jurisprudence : l'erreur doit être objective et déterminante, c'est-à-dire reposer sur un fait et être telle que, sans cette erreur, l'époux ne se serait pas marié. »

De fait, la Justice admet que la virginité d'une femme puisse constituer une « qualité essentielle » aux yeux de son futur mari. Aussi Sihem Habchi s'inquiète-elle d'« un glissement vers l'institutionnalisation du relativisme culturel ». Le jugement n'en reste pas moins « conforme à la jurisprudence classique » selon Philippe Lemaire,  procureur de la République de Lille : « c'est le mensonge qui motive la décision du juge » (Le Monde, 29/05/2008).

Ni pute ni soumise réclame que « les législateurs rétablissent cette faille de la loi ». En admettant que ses valeurs soient effectivement partagées par la République, celle-ci se retrouvera confrontée à un dilemme insoluble : comment pourrait-elle garantir le libre consentement des époux tout en en restreignant les motifs légaux ? Pour l'heure, c'est la femme dont on déplore la "répudiation" qui fait les frais de ces polémiques. Selon son avocat, Me Charles-Édouard Mauger, cité par l'AFP, elle aurait été « traumatisée » par la médiatisation de l'affaire, et depuis  l'appel du procureur de la République de Lille, « elle va très, très, très mal ». En définitive, le sort de la malheureuse, ainsi que la crainte – à bien des égards légitime – d'une "islamisation" de la France sont en partie instrumentalisés au service d'un certain féminisme. C'est une réponse bien insuffisante aux outrances inspirées par l'islam : on n'imposera pas le respect dû aux femmes par de vulgaires revendications libertaires.

(1) http://www.maitre-eolas.fr/