Priorité donnée à la parité

6 juillet 2012
Article publié dans L'Action Française 2000

Le gouvernement entend « mettre l'égalité entre les femmes et les hommes au cœur de l'action publique ».

À cet effet, a-t-il été annoncé le 27 juin, « les ministres s'investiront personnellement » : « Ils nommeront auprès d'eux un haut-fonctionnaire à l'égalité des droits pour proposer et suivre les mesures à mettre en œuvre dans leur ministère. La logique de la parité sera étendue à l'ensemble de la sphère publique. De nouveaux principes de nomination seront arrêtés pour une représentation équilibrée dans les grandes instances de la République, en particulier les autorités administratives indépendantes (Conseil supérieur de l'audiovisuel par exemple) et les principaux organismes consultatifs de l'État. »

Loin de tempérer cette frénésie féministe, l'UMP verse dans la surenchère, à la faveur d'une autocritique légitimée par sa déroute électorale. Faute de respecter la parité, le parti paie « cinq millions d'euros d'amende par an », a déploré Rachida Dati, au micro d'Europe 1. « Une femme à la tête de l'UMP ou même de l'Assemblée ou de la France, cela aurait de la gueule », a-t-elle poursuivi. Quant à Roselyne Bachelot, à à l'antenne de Public Sénat, elle a proposé « la division par deux des circonscriptions ainsi que l'élection d'un ticket homme-femme qui pourrait assurer la parité parfaite ». Un vrai concours Lépine !

Hollande face à Poutine

21 juin 2012
Article publié dans L'Action Française 2000

À l'issue d'un entretien avec Vladimir Poutine, le président de la République s'est présenté devant la presse aux côtés de son homologue russe, offrant aux journalistes un contraste saisissant...

Le président russe, Vladimir Poutine, a rencontré François Hollande le 1er juin 2012. Devant la presse, tandis que son homologue français nageait dans les vacuités, il s'est risqué à aborder les questions les plus épineuses.

À commencer par celle du bouclier antimissile. À ce propos, a-t-il déclaré, « la France est un des rares pays qui non seulement nous écoute [mais] nous entend aussi ». Paris semble d'autant mieux placé pour jouer les médiateurs avec Washington qu'il est peut-être le seul, en Europe, à disposer des compétences industrielles en jeu dans la défense antimissile, et donc de l'expertise requise pour une discussion "d'égal à égal". « Il nous faut [...] des garanties militaires et technologiques qui seraient consacrées par des textes juridiquement contraignants », a martelé Vladimir Poutine, qui ne se satisfera pas de quelques paroles rassurantes. « On nous a promis de ne pas élargir l'Otan, ensuite de ne pas déployer les bases militaires », a-t-il rappelé, « mais l'Otan continue à s'élargir vers l'Est, et les bases militaires poussent comme des champignons autour de nos frontières ».

Évoquant la Syrie, le président russe s'est gardé d'apparaître comme un thuriféraire insensible de la Realpolitik : « Lorsque j'entends que la Russie a des intérêts spécifiques dans ce pays, je peux vous dire que c'est une erreur totale », a-t-il déclaré. Les victimes civiles le préoccuperaient davantage. Or a-t-il laissé entendre, les perspectives d'ingérence doivent être abordées avec prudence : « Regardez ce qui se passe en Irak, en Libye, dans d'autres pays de la région. Est-ce que ces pays sont devenus plus sûrs, vers quoi évoluent-ils ? Nous proposons, s'agissant de la Syrie, d'agir de façon très correcte, de façon très pondérée. »

Enfin, alors qu'un journaliste lui demandait si Moscou accepterait d'accueillir le président syrien et sa famille, Vladimir Poutine a lancé cette pique contre la France : « S'agissant de Monsieur Assad, je peux vous dire qu'il a visité beaucoup plus souvent Paris que Moscou. » « Sur les visites du président Assad père et fils, je n'ai aucune responsabilité » a répondu François Hollande, manifestement décidé à incarner, courageusement, la continuité de l'État.

Faut-il abattre Nathalie Kosciusko-Morizet ?

15 juin 2012

Lecture un tantinet polémique d'un pamphlet signé NKM.

Parmi les personnalités figurant sur la "liste noire" du Front national, dévoilée à l'approche du second tour des élections législatives, Nathalie Kosciusko-Morizet constitue un « cas spécifique » aux yeux de Marine Le Pen. L'année dernière, en effet, à la veille des cantonales, elle avait jugé l'élection d'un socialiste préférable à celle d'un frontiste. « C'est une proposition à laquelle je tiens », a-t-elle répété quelques mois plus tard, dans un pamphlet s'attaquant ouvertement au « front antinational ».

La critique s'avère convenue. « Le Front national peut bien [...] prendre les traits avenants d'un sourire, d'une blondeur, d'un prénom », il n'en reste pas moins associé à des éléments radicaux, souligne l'auteur. « Ce n'est pas une leçon de morale », prétend NKM, qui n'en verse pas moins dans les bons sentiments. « C'est forts de nos différences que nous devons trouver un chemin ensemble », clame-t-elle tout en récusant « l'éloge des singularités ». « Qu'il y ait en chacun de nous un fond d'aigreur, [...] une petite haine de l'autre, c'est l'évidence. », affirme-t-elle. Or, « cette part obscure de nous-mêmes » formerait, selon elle, le « terreau » du FN.

Réduire le vote lepeniste à un défaut d'altruisme, voilà qui nous semble assez léger. Depuis quand la charité se mesure-t-elle à l'aune des sympathies politiques ? La moralité des individus est une chose ; les représentations façonnant l'opinion en sont une autre. Nathalie Kosciusko-Morizet s'y attaque en partie. S'agissant du "protectionnisme", par exemple, elle soutient que « le FN fait comme si de telles mesures n'existaient pas. Or elles existent. [...] L'appartenance à l'Union européenne ne les interdit nullement. Au contraire, nous disposons de normes qui sont destinées à assurer la qualité de produits. » Par ailleurs, écrit-elle, « il faut être clair là-dessus : les immigrés sont des actifs, ils contribuent de manière nécessaire et profitable à l'économie de notre pays ». Se défendant de tout angélisme, elle martèle qu'« il faut être tout aussi clair sur les difficultés. Car il y en a. Il y a des biais et des fraudes. Il existe une immigration de complaisance, qui fait un usage abusif des allocations chômage et familiales. La lutte contre ces abus est prioritaire. »

Qu'importent les faits : de toute façon, observe l'auteur, « le "programme" du FN n'a pas du tout vocation à être réalisé. [...] Il est là pour frapper, par le caractère radical de ses propositions. [...] La meilleure illustration en est donnée par le chapitre économique. » De fait, l'incriiniation grotesque de la "loi de 1973", ainsi que le fantasme d'un recours indolore à la création monétaire, en disent long sur le sérieux du FN. Celui-ci préconise, également, « la suppression de la binationalité, sans jamais rappeler que certains binationaux ne peuvent pas répudier leur nationalité d'origine, quand bien même ils le voudraient ».

Enfin, « un pays comme le nôtre a le droit souverain, aujourd'hui, de choisir qui s'installe ou non sur son territoire. Mais dès lors qu'une personne y est installée légalement, il n'est plus possible de la discriminer », estime l'ancien ministre de l'Écologie. « Ce que la France choisit de faire aujourd'hui, c'est de mener une politique ferme de lutte contre l'immigration illégale. Et cette politique rend évidement inutile toute forme de "préférence nationale". » D'autant que « parmi tant d'autres effets dévastateurs, cette préférence favoriserait l'immigration clandestine et elle rendrait impossible l'intégration des étrangers. Stigmatisés, ces derniers n'auraient d'autre choix que de se replier au sein de mouvements communautaristes ou fondamentalistes. » Un risque à méditer.

« Être français, cela se conquiert, se construit, se partage. C'est un perpétuel projet, pas une rente », proclame encore NKM. « La tentation de la rente. Voilà qui fait consensus entre le FN et la gauche », poursuit-elle. Même si « dans le cortège des désespérances, le Front national, lui, joue le rôle des pleureuses. » Enfonçons le clou : en vérité, le populisme n'est rien d'autre que la déclinaison plus ou moins "nationaliste" du néo-malthusianisme abreuvant le discours socialiste. La hantise du plombier polonais découle de la même croyance que la mise en œuvre des trente-cinq heures ; quant aux immigrés, ils sont vilipendés au même titre que ces salauds de riches. « La confusion sert toujours les mêmes », déplore Nathalie Kosciusko-Morizet. « Le FN parle d'"UMPS". Mais l'alliance électorale, objective, celle dont l'histoire politique témoigne, elle est entre le PS et le FN. Même si Lionel Jospin, en 2002, a été le dindon de la farce. » Elle ne croyait pas si bien dire... Pour la faire battre dans l'Essonne, Marine Le Pen n'a-t-elle pas appelé à voter pour son rival socialiste ? PS, FN, même combat !

Le parasite et la fourmi

7 juin 2012
Article publié dans L'Action Française 2000

Petite pique en direction de François Hollande, thuriféraire des eurobonds.

D'une pauvreté affligeante, les premières conférences de presse du président Hollande lassent davantage que celles de son prédécesseur, qui ne ménageait pas nos confrères, mais savait ponctuer ses interventions de quelques touches d'humour.

Le 23 mai, le nouvel hôte de l'Élysée s'est fendu d'une question qui se voulait rhétorique : « Est-il acceptable que certaines dettes souveraines pour être financées soient obligées de consentir des taux d'intérêts à plus de 6 % et que d'autres pays [puissent] accéder à des financements à des taux d'intérêts voisins de zéro dans la même Union monétaire, budgétaire ? » Or, si l'Union monétaire constitue une réalité, certes chaotique, l'union budgétaire demeure un fantasme. Lequel se réaliserait à la faveur d'une mutualisation des emprunts obligataires promue par François Hollande. En Europe comme en France, sans doute s'agit-il de faire payer les riches – comprenez l'Allemagne. On imagine avec quelle facilité celle-ci va se laisser convaincre : la fourmi n'est pas prêteuse... Autant parasiter ouvertement les sommets internationaux !

Dans un accès de magnanimité, Berlin semble enclin à inscrire aux calendes grecques l'introduction des "eurobonds". On attend avec impatience les conclusions du prochain Conseil européen, dont le chef de l'État se gargarisera vraisemblablement comme il fit de celles du G8, après y avoir glissé une coquille vide – en l'occurrence, le mot "croissance". « Je considère que le mandat que j'avais reçu du peuple français a été, dans un premier temps, déjà honoré », a-t-il déclaré, fort de son succès diplomatique. Rien de plus "normal" !

La France des cols bleu Marine

20 avril 2012

Chronique enregistrée pour RFR le dimanche 1er avril 2012.

Nos auditeurs savent-ils dans quelles conditions sont fabriqués les Iphone qu'ils trimballent dans leur poche ? Ils sont assemblés en Chine, dans une usine où l'on travaille souvent plus de quarante-neuf heures par semaine. C'est davantage que le plafond légal fixé dans l'empire du Milieu. Cela ressort des conclusions d'un audit réalisé par la Fair labor association, dont les conclusions ont été publiées jeudi dernier (le 29 mars 2012).

Que les fanatiques d'Apple se rassurent : ils ne sont pas coupables de contribuer à faire travailler des enfants. De toute façon, mon intention n'est pas de les accuser de quoi que ce soit. Je cherche plutôt à les mettre en garde contre l'avenir qui nous est réservé.

En effet, un candidat à l'élection présidentielle a proclamé son ambition de fabriquer des smartphones non pas en Chine, mais en France. Et je ne vous parle pas d'un candidat de seconde division. Bien au contraire : selon des analyses manifestement très sérieuses, ce candidat-là serait le mieux placé pour vaincre François Hollande au second tour. C'est un serviteur illustre de la France, l'incarnation même de la nation, la nouvelle Jeanne d'Arc ! Demain, les royalistes marcheront sur Reims aux côtés de Marine Le Pen.

En attendant, quand un Iphone est importé aux États-Unis, étant donné l'origine des différents composants, ce sont seulement 4 % de son prix qui reviennent à la Chine. 4 % : s'agit-il de la part que l'égérie populiste voudrait réserver à la France ? 4 %, contre 14 % à la Corée du Sud, 18 % à l'Allemagne, 36 % au Japon ?

Aux yeux d'un certain nombre d'économistes, tel Olivier Bouba-Olga, « on peut donc opposer deux stratégies en matière de politique industrielle » : d'une part, la stratégie popularisée par la campagne électorale, « qui vise à soutenir la production de biens "made in France" vendus en France » ; d'autre part, « la stratégie japonaise ou allemande, qui vise à être bien placé dans les processus de production de produits "made in monde" vendus... partout dans le monde ».

Prétendre que l'on serait plus ou moins patriote selon que l'on promeuve l'une ou l'autre de ces stratégies, c'est une belle ânerie, permettez-moi de le dire. Hélas, les royalistes se rendent volontiers complices d'une instrumentalisation démagogique du sentiment national. Je suis désolé de le proclamer à ce micro, mais le "patriotisme économique", à bien des égards, c'est à l'économie ce que le "bio" est à l'agriculture. C'est un gadget marketing, dont la mise en œuvre suppose une normalisation hasardeuse, pour des bénéfices vraisemblablement marginaux.

Érigé en politique, d'aucuns prétendent qu'il serait même « suicidaire ». Parce que si vous vous interdisez de délocaliser certaines activités, vous renoncez également à allouer de façon optimale les ressources dont vous disposez. Le problème se pose en termes similaires à propos des progrès techniques. Cela n'a pas échappé aux parlementaires de l'UMP, dont on connaît l'ultra-méga-super-libéralisme. J'en tiens pour preuve deux propositions de loi déposées il y a quelques mois : d'abord, celle du député Alain Moyne-Bressand, « visant à interdire la généralisation des caisses automatiques aux barrières des péages » ; ensuite, celle du sénateur Alain Houpert, visant à « assujettir aux prélèvements sociaux le chiffre d'affaires réalisé par les caisses automatiques ».  En Allemagne, on compte, paraît-il, trois fois plus de robots industriels que chez nous. Demandez-vous pourquoi l'économie d'outre-Rhin est réputée plus compétitive que la nôtre...

On prétend sauvegarder l'emploi en s'opposant à la technique ou à la mondialisation. Mais conserver, c'est dépérir ! Entasser du blé dans un grenier, stocker des aliments sous vide, cela permet de subsister quelques mois, voire quelques années. S'il convient de se préparer à affronter les disettes, cela ne saurait nous détourner du travail quotidien de la terre, ni des semis réguliers : sans cesse nous devons remettre l'ouvrage sur le métier ! C'est la vie, et nulle incantation volontariste n'y changera jamais quoi que ce soit.

Les cas de relocalisation en témoignent : ils ne concernent pas des emplois recrées à l'identique, mais ils résultent généralement d'un repositionnement de l'activité vers une offre de meilleure qualité. Par conséquent, si nos responsables politiques témoignaient d'un peu  de "patriotisme économique", ils commenceraient par sortir de la farandole courant de Florange à Petit-Couronne, où les candidats à l'élection présidentielle défilent pour visiter les usines du passé. Catoneo l'a martelé sur Royal Artillerie : « Plutôt que de lever le poing au ciel, nous devons développer de l'industrie à travers des métiers neufs et sans tarder, car les courbes ne s'inverseront pas. Innovons ! Découvrons ! Inventons ! »

Vincent Benard a lancé cet avertissement relayé par l'Institut Turgot : « Si nous ne corrigeons pas le tir, le déclin de notre système éducatif et notre fiscalité punitive de la prise de risque pourraient, dès le second tiers du présent siècle, cantonner un pays comme la France au rôle de pourvoyeur de cols bleus mal payés pour le compte de décideurs des pays émergents. » Je vous l'ai dit : on fabriquera des smartphones en France... Bien que ses concurrents ne s'en distinguent pas fondamentalement, au moins Marine Le Pen annonce-t-elle fièrement la couleur.

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Chronique parlementaire

3 novembre 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Fidèles à leurs habitudes, les parlementaire s'immiscent dans les mœurs et malmènent la mémoire.

Parmi les dernières propositions de loi déposées au Parlement, on relève celle de Jean-Marie Sermier, député UMP du Jura, qui entend lutter contre « l'outrage aux symboles de la République ». Ce faisant, il fait planer une menace sur les royalistes caricaturant Marianne...

Rebondissant sur l'affaire Baby Loup (du nom d'une crèche où travaillait une employée voilée), Françoise Laborde, sénateur PRG de Haute-Garonne, se fait le chantre de la laïcité : elle demande que « l'obligation de neutralité » soit étendue aux structures privées en charge de la petite enfance.

La parité n'est pas en reste. Tandis que Jean Louis Masson (ex-UMP) se mobilise au Sénat, Chantal Brunel (UMP) mène le bal à l'Assemblée, dans l'espoir que l'"égalité professionnelle" soit érigée en « grande cause nationale ».

Adeptes de la repentance, divers sénateurs se sont manifestement divisés quant au contenu du texte à déposer à l'approche du 17 octobre, date anniversaire de la manifestation de 1961. « Les hommes qui manifestaient à mains nues furent molestés, torturés et massacrés. Des coups de feu furent tirés. Loin de la "bavure", cette action était préméditée et coordonnée », soutient la communiste Nicole Borvo Cohen-Seat. Employant des termes plus durs encore, sa collègue écologiste Esther Benbassa pointe carrément un « un crime d'État ».

Le quinquennat part en quenouille

26 juin 2011

Chronique enregistrée pour RFR le vendredi 17 juin 2011.

À l'approche de l'élection présidentielle, c'était hélas prévisible, le quinquennat part en quenouille. Je sais que tous les royalistes ne sont pas sensibles aux nuances de la politique républicaine. Cela dit, il y encore quelques mois, avec un peu d'efforts, certes, on pouvait deviner un cap. En matière de politique extérieure et de défense, par exemple, le président de la République semblait décidé à rompre avec l'anti-américanisme de façade. Pourtant, en novembre dernier, il a nommé un néo-gaulliste à l'Hôtel de Brienne, avant de l'envoyer au Quai dOrsay.

C'est dans le domaine de la fiscalité que l'inconséquence apparaît tout particulièrement patente. Philippe Mabille l'a souligné dans La Tribune le mois dernier : « Le quinquennat a commencé sur la valeur travail, le bouclier fiscal et l'affirmation d'une fiscalité récompensant le mérite, l'effort et la réussite. » Dorénavant, la majorité envisage une taxation supplémentaire des hauts revenus, tandis que Xavier Bertrand propose d'encadrer des rémunérations jugées « extravagantes ». « Jamais la fiscalité française n'a connu, sous un même gouvernement qui plus est, une telle instabilité et un tel manque de cohérence stratégique », poursuit notre confrère.

Selon lui, « le projet de contribution sur les très hauts revenus [...] est perçu comme un très mauvais signal par tous les créateurs d'entreprise et tous les cadres supérieurs internationaux. Nous sommes là, on l'a déjà vu avec les artistes (Johnny n'est jamais revenu) et les joueurs de football, dans le cœur du réacteur de la mondialisation : que cela plaise ou non, il y a une "élite" française, très mobile, très réactive sur la question des impôts, qui est prête à préférer l'exil plutôt que d'accepter de se voir tondre par un pays que beaucoup considèrent comme foutu. Et voir même Nicolas Sarkozy, celui en qui ils avaient placé en 2007 tous leurs espoirs de rupture, céder, pour des raisons purement électoralistes, aux tentations démagogiques, pour ne pas dire "gauchistes" de l'opinion médiatique, les rend encore plus furieux... et inquiets, alors que la perspective d'un nouveau tour de vis fiscal se précise pour l'après-2012. » Fin de citation.

Le rétropédalage s'avère pire que l'immobilisme, en cela qu'il sape la crédibilité du politique et participe d'un climat d'instabilité peu propice à la croissance. La CGPME a identifié quarante priorités à présenter au gouvernement. Quelle est la première d'entre elles, aux yeux de son président Jean-François Roubaud ? « Ne pas changer en permanence les règles du jeu. » C'est la réponse qu'il a donnée aux Échos dans un entretien publié jeudi dernier. À tort ou ou à raison, la fiscalité française est jugée peu attractive par les chefs d'entreprise européens. La France arrive même en queue du classement réalisé par Ipsos pour la Chambre de commerce et d'industrie de Paris. La confusion entretenue par le gouvernement ne contribuera pas à redorer cette image.

En revanche, peut-être cela fera-t-il évoluer celle du chef de l'État, passant du président "bling-bling" à celui du pouvoir d'achat. Cela nous ramène à cette mesure aberrante censée indexer une prime salariale sur l'évolution des dividendes versés aux actionnaires. En s'attaquant aux dividendes – à ne pas confondre avec les bénéfices ! – l'exécutif prend le risque de dissuader les entreprises d'actionner un levier propice à la fidélisation des actionnaires. Le capital étant rendu plus volatil, il se trouvera d'autant plus facilement livré aux spéculateurs. Des spéculateurs tout récemment érigés par Nicolas Sarkozy en ennemis jurés ! Bonjour la cohérence.

Mardi dernier, lors d'une conférence sur les matières premières, le président de la République a tacle un José Manuel Barroso jugé trop timoré. Le président de la Commission européenne a pourtant posé de bonnes questions. « Une meilleure régulation est sans aucun doute nécessaire », a-t-il déclaré. « Mais dans quelle mesure faut-il plus ou moins de régulation ? », s'est-il demandé. « Comment s'assurer que la régulation permette effectivement le bon fonctionnement des marchés, avec suffisamment de liquidités, la transparence nécessaire pour un mécanisme de formation des prix efficace, une allocation optimale des risques et, en bon français, un "level playing field" afin que les participants ne soient pas tentés d'aller vers des zones moins régulées du marché ? »

Peut-être faudrait-il songer à tirer quelque enseignements de la crise. Le président de la République flatte l'opinion en agitant la régulation à tout va. Encore faut-il l'appliquer à bon escient. On en mesure la perversité potentielle, par exemple, avec les mécanismes pro-cycliques à l'œuvre dans la crise des dettes souveraines. En effet, l'influence excessive des agences de notation résulte directement des règles édictées par les gouvernements. Reste qu'un consensus transpartisan semble le taire. Alors que le "politique d'abord" demeure d'actualité, son ignorance s'annonce comme un biais majeur des débats de la campagne présidentielle.

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Féminisme : surenchère à l'UMP

22 juin 2011

En route pour 2012, l'UMP se penche « sur la place des femmes dans la société ». Inspirées par une idéologie grotesque, ses propositions nourrissent une inquiétude grandissante, tant la folie semble gagner les élites politiques.

À l'approche des élections de 2012, l'UMP s'est fixé « un rendez-vous avec la modernité ». « Depuis 2007 », affirme-t-elle, « le gouvernement et les parlementaires de la majorité [...] ont été très actifs pour défendre et promouvoir l'égalité entre les sexes ». Sans doute cela n'aura-t-il pas suffi aux yeux de Jean-François Copé, chantre notoire de la parité, dont le parti verse délibérément dans la surenchère féministe.

En témoignent les vingt-six propositions présentées lundi dernier (20 juin 2011) « pour arriver enfin à l"égalité ». On y relève quelque écho au récent rapport de l'IGAS sur « sur l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités familiales dans le monde du travail ». En effet, selon l'UMP, « les femmes pourront pleinement investir le marché du travail quand notre vision de la parentalité aura évolué ». Autrement dit, « l'entreprise ne doit plus voir en ses salariés simplement des femmes et des hommes mais plutôt une majorité de mères et de pères [...], tous également susceptibles [...] de prendre un congé parental ».

On nous annonce une profusion de quotas. Afin, par exemple, d'« obliger les administrations à employer 40 % de cadres supérieurs de l'un ou de l'autre sexe d'ici 2015 ». L'UMP envisage même d'ériger la parité en obligation constitutionnelle ! Affichant la volonté de « changer inexorablement les mentalités », elle appelle, sans surprise, à lutter contre les « stéréotypes », accusés de « contrarier les talents et le potentiel de chacune et chacun ». Comme si les personnalités se construisaient sans référence à aucun repère social... Et de pointer les médias, coupables de mettre en scène « un monde binaire, voire archaïque » – rien de moins ! Faudra-t-il interdire d'antenne les femmes racontant leur grossesse avec enthousiasme ? Dans un premier temps, c'est la publicité qu'il conviendrait de mettre sous surveillance, avec « un examen systématique » des campagnes d'affichage.

La proposition la plus effarante vise à « introduire, dès la maternelle, des séances consacrées à la mixité et au respect hommes-femmes ». Avec, pour objectif explicite, « d'amener les enfants à se sentir autorisés à adopter des conduites non stéréotypées ». Autrement dit, à s'émanciper de leur identité sexuelle – de leur nature même ! On nage en plein délire.

Royalisme ou populisme, il faut choisir !

26 mai 2011

Quatrième chronique pour RFR. Parmi les sujets abordés cette fois-ci : la prime sur les dividendes, le rôle de l'État et le populisme.

Selon les conclusions d'un sondage Viavoice-BPCE réalisé pour Les Échos et France info, 62 % des Français seraient favorables à la prime Sarkozy sur les dividendes. C'est désespérant, quoique très compréhensible.

On pourrait disserter des heures durant sur ce dispositif inepte, présenté hier en conseil des ministres. Selon le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2011, donc, les entreprises comptant plus de cinquante salariés seraient priées de verser une prime à leurs employés, dès lors que les dividendes attribués aux actionnaires augmenteraient par rapport à la moyenne des deux années précédentes. Vous suivez ? Dans le cas contraire, cela n'aurait rien d'étonnant : « ce qui se conçoit bien s'énonce clairement »... et inversement !

Cette prime est censée contribuer au « partage de la valeur ajoutée » cher au chef de l'État. Comme si les dividendes et leur évolution étaient toujours à l'image des bénéfices. Or, c'est loin, très loin d'être le cas. Prenez la situation de Total, vilipendé pour se profits considérables : ses dividendes étant restés stables, il ne sera pas soumis à la prime Sarkozy. En revanche, le patron d'une PME qui ne se verserait aucun salaire devra négocier avec ses employés l'augmentation de sa rémunération, c'est un comble ! Tout cela n'a aucun sens : pourquoi les salariés seraient-ils plus ou moins avantagés selon que leur entreprise se finance sur les marchés, en mobilisant des actionnaires, ou bien auprès des banques, en souscrivant des prêts rémunérés par des intérêts ?

Les partenaires sociaux ne s'y sont pas trompés. De façon quasi unanime, patrons et syndicats ont dénoncé cette immixtion de l'État dans leurs négociations. Mais l'opinion publique demeure sensible aux slogans simplistes – du genre "pas de prime pour les actionnaires sans prime pour les salariés". Pour le président de la République, il s'agit, naturellement, d'exploiter quelques clichés néo-marxistes ancrés dans les esprits. À commencer par l'opposition systématique entre capital et travail.

On stigmatise volontiers ces actionnaires cupides, accusés de s'enrichir sur le dos des salariés. Qu'en est-il dans les faits ? « Il y a un an, la Bourse française était encore déprimée », rappelle Florin Aftalion, professeur émérite à l'Essec, dans un article publié par La Tribune. « En revanche », poursuit-il, « il y a dix ans, elle était en pleine forme. [...] Un portefeuille représentant l'indice constitué à ce moment-là et conservé depuis aurait aujourd'hui perdu 28 % de sa valeur initiale ; en incorporant les dividendes reçus, son rapport sur dix [ans] aurait été inférieur à 1 % par an ! En valeur réelle, compte tenu de l'inflation, il aurait perdu de l'argent. »

À certains égards, il apparaît donc injuste de jeter l'anathème sur les détenteurs des capitaux. Mais cela s'avère surtout stérile, et même contre-productif. Hélas, les politiciens ne s'en privent pas. Tels Nicolas Sarkozy, nous l'avons vu, mais aussi Marine Le Pen, avec, dans son cas, la bénédiction de certains royalistes. Incarné par une femme, l'homme providentiel leur apparaît soudain plus fréquentable... Mes camarades me pardonneront de les caricaturer – ils savent que je le fais en toute amitié. Cela dit, on s'étonne de les voir ainsi conquis par le virage jacobin du Front national. Sans doute cela s'inscrit-il dans la logique souverainiste : en s'accommodant de la « souverainété nationale » récusée par Maurras, on assimilait déjà, plus ou moins, l'État à la nation ; dorénavant, c'est également la nation qu'on assimile à l'État.

Dans le dernier numéro de L'Action Française 2000, Paul-Marie Coûteaux pointe l'influence des syndicats d'enseignants pour illustrer la perte de souveraineté de l'État. Ce faisant, il exclut implicitement de limiter celle-ci à quelques fonctions régaliennes, et se méprend sur les causes de l'impuissance publique. De toute façon, on n'œuvrera pas au retour du roi en entretenant la conception d'un État tentaculaire dont les monarchistes dénonçaient jadis les germes totalitaires.

Selon Maurras, « un État normal laisse agir, sous son sceptre et sous son épée [certes], la multitude des petites organisations spontanées, collectivités autonomes, qui étaient avant lui et qui ont chance de lui survivre, véritable substance immortelle de la nation ». En cela, je suis désolé de le dire, le maître de l'AF ne me semble pas opposé à certains libéraux. Je pense à Alain Madelin, auteur, par exemple, d'un plaidoyer pour la subsidiarité publié sur son blog lundi dernier. « Dans la grande société ouverte qui se dessine aujourd'hui », écrit-il, « les relations verticales d'hier sont largement remplacées par des liens horizontaux dans un grand chamboule-tout de la pyramide des pouvoirs ». La suite est plus intéressante : « On a longtemps cru que plus les choses devenaient complexes, plus elles devaient être dirigées d'en-haut. On sait maintenant qu'au contraire, il faut laisser la plus large autonomie aux éléments qui composent un système complexe pour permettre leur coordination. » Cela rend d'autant plus actuelle la conception "royaliste" de l'État... et d'autant plus regrettable son abandon pas ses promoteurs traditionnels.

Participant des déboires de l'État-providence, la crise de la dette souveraine fournirait un prétexte idéal à la dénonciation de l'incurie républicaine. L'Alliance royale le martèle à chacune de ses campagnes : « Un président est un chef de parti, qui pense à la prochaine élection  ; un roi est un chef d'État, qui pense à la prochaine génération. »  Dans ce contexte, cependant, la vulgate tend à dédouaner les politiques de leurs responsabilités, puisque ceux-ci sont soumis, paraît-il, à la toute-puissance des marchés.

Tandis que monte la grogne populaire, « il appartient à l'Action française non seulement d'accompagner ce mouvement mais aussi et surtout de l'éclairer » C'est, en tout cas, ce que clamait François Marcilhac le 8 mai dernier, dans son discours prononcé à l'occasion de la fête de Jeanne d'Arc. Nous sommes d'accord ! Reste qu'à cet effet, les royalistes devraient plutôt se méfier des sirènes populistes. Appeler au primat du politique sur l'économique, c'est exprimer des valeurs, mais non donner un cap à l'action publique – sauf à revendiquer également le primat de l'État sur les entreprises en lançant un vaste programme de nationalisations.

En son temps, le maître de l'Action française pouvait établir le constat selon lequel « l'économie industrielle ne joue point dans le vaste cadre de la planète ». Manifestement, les circonstances ont changé, et cela s'avère pour le moins déstabilisant. Peut-être cette évolution explique-t-elle la tentation d'enfoncer des portes ouvertes par d'autres, ou celle de se réfugier dans un dédain romantique de l'économie... Il nous appartient pourtant d'en tirer les conséquences. Le défi qui nous est lancé s'annonce passionnant à relever ! Mais peut-être préférera-t-on rester en marge de l'histoire ?

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Laïcité : Roland Ries dément les accusations de l'Agrif

20 avril 2011
Article publié dans L'Action Française 2000

Des propos prêtés au maire de Strasbourg ont déclenché un tollé sur la frange la plus "réactionnaire" de la Toile.

L'Agrif part en croisade contre l'"allahicité" – un concept en vogue dans la blogosphère catholique, censé désigner la « synthèse dialectique de l'islam et de la laïcité ». L'association présidée par Bernard Antony vient de créer un prix qui en récompensera chaque année « un grand penseur ou poète ». Pour 2011, ses foudres se sont abattues sur Roland Ries, sénateur PS du Bas-Rhin et maire de Strasbourg.

Selon un communiqué de l'Agrif, « à des parents d'élèves qui lui demandaient pourquoi on servait à leurs enfants des menus halal dans les cantines scolaires de Strasbourg et pas de repas maigre par exemple avec du poisson le vendredi », M. Ries aurait répondu : « Nous servons de la viande halal par respect pour la diversité, mais pas de poisson par respect pour la laïcité. »

Moult blogueurs se sont emparés de cette annonce. Néanmoins, si l'on excepte un article publié par Causeur (le site d'Élisabeth Lévy), seule la frange réactionnaire de la Toile semble l'avoir diffusée. Cela pourrait expliquer le silence du maire de Strasbourg, qui se refuse, pour l'heure, à réagir par communiqué. Il n'en dément pas moins les accusations de l'Agrif : ces propos sont « totalement contraire à ses convictions », nous a confié l'un de ses collaborateurs.

Quant aux repas servis dans les cantines de Strasbourg, ils garantiraient effectivement aux élèves musulmans la possibilité de manger halal tous les jours – et cela depuis plus de dix ans. En revanche, du poisson ne figure pas toujours au menu le vendredi. Mais un repas végétarien est proposé quotidiennement. « Les catholiques y trouvent leur compte », nous a-t-on assuré. Sans doute l'Agrif ne sera-t-elle pas de cet avis !

NB - La réacosphère a beau se targuer de verser dans la "réinformation", elle a fait écho au communiqué de l'Agrif sans témoigner d'un esprit critique manifeste. Au point que nous sommes peut-être les premiers à signaler la réaction du maire de Strasbourg – qu'il a certes fallu solliciter. Si les accusateurs n'ont pas d'autre preuve à agiter que la bonne foi supposée d'une mère de famille, alors l'attribution de leur "prix" relève d'une mascarade dérisoire, dont la publicité donne à réfléchir sur l'influence de la Toile.